Inventaire des meubles de la succession de Jeanne Cantarini veuve Haton, La Mazure Le Bourg d’iré 1709

Jeanne Cantarini, belle-fille de Selvage Forsini vue ces jours-ci sur ce blog, a laissé 2 filles, l’une mariée et décédée laissant une fille unique au couvent, l’autre célibataire vivant avec sa défunte mère à la Mazure.
Les meubles attestent de la fortune passée, du temps de Marie de Médicis. Mais les armoires sont vides, cependant des meubles sculptés dont plusieurs en bois d’ébenne d’autres en noyer, un cabinet d’Allemagne, des miroirs rarissimes à cette époque, une infinité de boîtes de cuir etc… Le tout semble bien venir du temps où Pierre Haton faisait partie des gardes de Marie de Médicis.
et vous allez même découvrir en bas de cette page une affaire peu banale, et pourtant, il est probable que souvent les choses se passaient plus ou moins comme cela. Je vous laisse donc découvrir ce qui se passe lors de cet inventaire en fin de cette page, puis à demain pour la suite.
Je vous demande donc seulement quand vous lirez ces lignes peu banales de vous souvenir que Elisabeth Haton est célibataire âgée sans doute de 40 à 45 ans, et manifestement cadette et ayant vécu près de sa mère pour la soigner au lieu de rentrer au couvent qui était le sort des cadettes.

Pour le vocabulaire, reportez vous à mon lexique des inventaires après décès

Je vous mettrai la suite demain, car l’acte est fort long, et surtout l’écriture patte de mouche difficile.

Cet acte aux Archives Départementales du Maine-et-Loire, série 5E32 – Voici ma retranscription (voir ci-contre propriété intellectuelle) :

Le jeudi 18 avril 1709 sur les 8 heures du matin, nous Claude Bouvet notaire royal résidant à Segré sommes avex nos tesmoings cy après nommés transportés en la maison seigneuriale de la Mazure sise paroisse du Bourg d’Iré, et ce à la requeste de messire Simon Alexandre de Cumont (écrit « d’Escumont ») chevalier seigneur du Puy Froidefond demeurant ordinairement en son château du Puy paroisse de Froidefond évesché du Main, ou estant a comparu ledit seigneur du Puy Froidefond lequel nous a dit qu’étant père et tuteur naturel de damoiselle Jeanne Henriette de Cumond novice en l’abbaye royale du Ronceray de la ville d’Angers sa fille et de deffunte dame Jeanne Honorée Haton vivant sa première épouse, il est en cette qualité habile à succéder en la succession de feue dame Jeanne de Cantarini vivant veuve de messire Pierre Haton vivant chevalier seigneur de la Mazure sa mère, créancier de ladite succession tant audit nom de père et tuteur qu’en son propre et privé nom, il nous a requis de procéder à l’inventaire des meubles meublants effets titres papiers et autres choses dépendant d’icelle succession, et ce en conséquence de l’ordonnance de monsieur le lieutenant général d’Anjou à Angers, en date du 16 de ce mois signée Livillée et Jallu estant ensuite de la requeste présentée à cette fin par ledit seigneur du Puy, laquelle il nous a relaissée pour estre attachée à ces présentes, à ce faire ce jour après que intimation a esté duement faite à damoiselle Elisabeth Haton fille majeure aussi habile à succéder à ladite dame de Cantarini suivant le raport de Herbin sergent royal en date de ce jour qui nous a aussy esté représenté par ledit seigneur du Puy et relaissée cy attachée, dans laquelle dite maison ont aussi comparu ladite damoiselle de la Mazure Haton demeurante en ladite maison seigneuriale de la Mazure à laquelle ledit seigneur du Puy par lant a demandé les clefs des portes et vaisseaux estant en icelle pour estre fait inventaire de ce qui s’y trouvera en ayant eu l’administration depuis le décès de ladite dame de Cantarini, et faire les déclarations en tel cas requises, à tout quoi ladite damoiselle repliquant a dit qu’elle n’empeschoit qu’inventaire se fusse ainsi qu’il est requis, qu’elle n’a point de clefs et que ledit seigneur du Puy les a cherchées aussi bien

Et premier dans une salle basse de ladite maison s’est trouvé deux petits chenests de fer et une pelle de feu un garde casse et deux broches et une petit pinse le tout prisé 40 sols
7 chères de bois foncées joinc prisée avec un fauteuil couvert de toile, une petite table en forme de guéridon 45 sols
Un petit cabinet dans lequel il y a 14 petites liettes façon de bois d’ebenne lequel est porté su 4 piliers au dessous de laquelle est une liette prisée aec une petite tablette 6 livres – à ouverture faite d’iceluy cabinet s’est trouvé que des fuseaux et autres choses qui nécéssitent de tout inventorier
Un petit cabinet de bois, paire de presses [de la Bretagne à la Normandie, espèce d’armoire basse à 2 vantaux, généralement dépourvue de tablettes, mais qui comprend 2 tiroirs à la partie supérieure. On y met des vêtements] fermante à deux fenêtres et de clef prisé 8 livres – à ouverture faite d’iceluy s’est trouve une petite boiste fermante de clef couverte de cuir noir et garnie de cuivre dans lequel il ne s’est rien trouvé, quatre autres petites boistes deux desquelles sont couvertes de cuir noir à l’entour de cuir rouge dans lesquelles il ne s’est pareillement rien trouvé, deux petites fiolles de verre l’un noir et l’autre ouvré, une paire de soulliers à usage d’homme, le tout prisé avec une corbeille d’osier blanc carré 3 livres
Une paire de presses fermante à 4 fenêtres et de clef, garnie de 2 liettes prisée 16 livres – laquelle esetant ouverte ne s’y est trouvé que 5 petites corbeilles que petits paniers d’osier, 2 petits pots de faïence, 6 autres pots de terre noire, un bouvard clissé ?, 2 viels morceaux d’estoffe, un saladier, une bouteille de faïence, et un autre de grès noir, 2 buis de terre, 6 bouteilles de terre, le tout prisé ensemble 40 sols – après que lesdites fenestre ont esté refermées de clef
Un petit basset fermant à deux fenestrse prisé 30 sols – à ouverture faire d’iceluy ne s’est trouvé que 5 pots de etrre prisés 10 sols
Un autre petit basser aussi fermant à 2 fenestres avec une petite liette, prisé 10 sols – dans lequel s’est trouvé quelques petites pourcelaines et pots de faïence prisés ensemble 20 sols
Un cabinet de cuisine fermant à une fenestre et de clef, plus que mi usé prisé 40 sols – dans lequel s’est trouve 2 lampes et 2 chandeliers d’estain prisés ensemble 60 sols
Un petit pommier de fer blanc [petit ustensile de ménage, de terre ou de métal, en forme de demi-cylindre, qui servait à faire cuire des pommes, des poires, ou autres fruits, devant le feu (Lachiver M. Dictionnaire du Monde rural, 1997)], 2 beurriers de terre, un beurrier de faïence prisés ensemble 20 sols, qui est tout ce qu’il s’est trouvé dans ledit garde manger sur une late de bois en laquelle estoit autrefois une montre à pendule prisé 15 sols
Un rouet à filer prisé 30 sols
Une rotissoir de bois prisé 60 sols
Un petit travaoil prisé 6 sols
20 livres de vesselle tant creuse que platte prisée à raison de 10 sols la livre la somme de 10 livres
qui est tout ce qui s’est trouvé dans ladite salle

ensuite de quoi nous aurions entré dans une petite chambre à costé de celle cy dessus estant sous le degré de ladite maison ou seroit trouvé
Une vieil lit et couchette garni de sa foncaille une couette, un traverslit ensouillé de toile garni de plume, 2 (illisible) d’estoupe en réparon avec une couverte de beslinge blanc, le tout prisé 10 livres
Un bahut couvert de cuir noir fermant de clef prisé 20 sols – à l’ouverture faite d’iceluy ne s’est trouvé que quelques guenilles
Une petite boiste de sapin fermant de clef prisée avec un boisseau de noix 60 sols
Dans ladite salle cy-dessus auroit esté obmis à inventorier un grand miroir à cadre de bois de noyer prisé 10 livres

Ensuite de quoi nous nous serions transporté dans une boulangerie à costé d’icelle salle où se seroit trouvé une vielle poisle chaudière rapiècée contenant environ 4 seillées d’eau, prisée 7 livres
Une platine de cuivre rompue, 3 petits chaudrons l’un desquels est rompu, le tout pesant 12 livres prisé avec 2 poislons une passette 7 livres
Une paire de grande balance, une autre petite, avec de pilles de poix le tout d’airain prisé avec 2 poix (pour « poids ») de fer d’une livre et l’autre demie, prisé le tout 40 sols
Un flasque [en Aunis et en Poitou, fer à repasser d’une forme particulière, qui reçoit des charbons allumés (idem)] de fer prisé avec 2 autre platines de fer le tout pour dresser le linge 30 sols
Une panne de terre prisée avec un tripier de fer 60 sols
Un grand vieil cabinet, un haiteau et une vieille mue prisé le tout ensemble 30 sols
Une vieille huge prisée 10 sols
qui est tout ce qui s’est trouvé dans ladite boulangerie

et dans un grenier estant au dessus d’icelle boulangerie s’est trouvé le nombre de 24 nombres de lin prisé à raison de 6 sols soit 7 livres 4 sols

ensuite somme entées dans le cellier de la maison où s’est trouvé une huge fermante de clef prisée 4 livres
Une selle de cheval garnie de ses équipages prisé 6 livres
3 vieils boisseaux l’un mesure d’Angers l’autre de Candé le troisième de Château-Gontier prisés ensemble 20 sols
Une bassinoire de cuivre, des petits landiers de fer blanc, 2 grands plats couverts de rouille de fer blanc prisé le tout ensemble 40 sols
17 tonneaux de peu de valeur tant de pipe que de busse prisés ensemble 6 livres
2 hastiers [ hâtier : grand chenêt de cuisine à plusieurs crochets de fer sur lesquels on appuie les broche (idem) ] de fer prisés 20 sols
22 vis de bois de noyer desquelles il y en a usés de 5 pieds de long et les autres de 10 pieds prisées ensemble 8 livres
Un vieil charlit et quelques vieux meubles presque de nulle valleur prisés avec une chaire de bois 60 sols
2 petites pannes de terre desquelles il y en une fendue prisées avec une vieille petite table cassée 15 sols
3 vergettes de fer pour tenir les rideaux de lit prisées 20 sols
3 vieilles poisles à cuire et gresler chastaignes prisées ensemble avec 2 petits vieils chaudrons de peu de valeur 30 sols
qui est tout ce qui s’est trouvé en ledit cellier

et ensuite sommes entrés dans une chambre haute estant au dessus de la salle basse ou estant se seroit trouvé 4 fauteuils de bois ouvré couverts de tapisseries prisés ensemble 4 livres
3 autres chères de bois de noyer couvertes de futaine prisées avec 2 chères de bois foncées de jonc 60 sols
Un petit cabinet d’ébenne fermant de clef avec un soubassement garni de 2 liettes, les fenestres dudit cabinet peintes et représentant plusieurs personnages dans lesquelles sont renfermés plusieurs petites liettes et tiroirs aussy d’ebenne faites à façon de chapelain dont le devant est aussi peint et rempli de figures prisé 25 livres – et ouverture faite d’icelles liettes il ne s’ests rien trouvé que ledit seigneur du Puy jugeat inutile de faire inventorier
Une petite boiste de bois de noyer fermant de clef garnie de plaques de cuivre, prisée avec une autre boiste dont le dessus de la fermeture aussi de cuivre doré et avec un cabinet sur lequel lesdites boistes sont portées le somme de 100 sols – et ouverture faite d’icelles boistes où se sont trouvé que du linge appartenant à ladite damoiselle Haton
Une petite table carrée sans liettes prisée avec son tapis de serge garnie de frange de soie avec une petite boiste couverte de cuir brun dans laquelle il ne s’est trouvé que des coiffes de ladite damoiselle Haton la somme de 50 sols
Un grand miroir dont le cadre est doré prisé avec un autre petit miroir à cadre de bois peint noir la somme de 35 livres
Une table carrée de bois de noyer garnie de sa liette sur laquelle est posé un cabinet d’Allemagne garni de son comond ? couleur de bois, sur la fermeture duquel sont dépeints en bosse plusieurs personnages la somme de 15 livres – et ouverture faite d’iceluy cabinet ne s’est rien trouvé que de petites tablettes à colonnes torses dorées que ledit seigneur n’a jugées d’estre inventoriées sur ce que ladite damoiselle Haton a déclaré le tout luy appartenir
Un buffet de bois de noyer presque neuf fermant à 2 fenestres et de clef garni de 2 liettes prisé 15 livres – lequel estant ouvert et ses 2 liettres il ne s’est rien trouvé que lesdites parties n’eussent inventorié
Un charlit de bois de noyer garni de sa foncaille à fond de bois, une paillasse, une couette ensouillée de couetty, un traverslit aussi ensouillée de couetty garni de plume, un matelas de laine dont la couverture est de toile de brin, une mante de laine blanche, un tour de lit de serge couleur feuille morte contenant 11 pieds, le tout garni de franges et froncettes de soie jaulne prisé 80 livres – dans la paillasse duquel ayant esté aparu par lesdites appréciatrices et par ledit sieur du Puy du linge, cela l’auroit obligé de faire fouiller en ladite paillasse où se seroit trouvé caché le nombre de 39 serviettes scavoir 21 serviettes de toile de gros lin presque neufves prisées à raison de 9 livers la douzaine à la somme de 15 livres, les autres de toile blanchie et ouvrées au nombre de 18 aussi prisées à la susdite raison de 9 livres la douzaine à la somme de 13 livres 10 sols – 7 nappes de toile ouvrées l’une desquelles contenant 5 aulnes et demie prisées ensemble 16 livres – une autre contenant 2 aulnes laquelle n’a esté apprétiée mais relaissée à ladite damoiselle Haton – 6 pièces de toile ouvrée par carreaux façon de centelle qui ont aparu estre du tout de lit prisées ensemble 6 livres
Et à l’instant ledit seigneur du Puy a protesté contre ladite damoiselle Haton de recel et divertissement des meubles et effets d’icelle succession, laquelle dite damoiselle auroit caché le linge cy dessus inventorié dans ladite paillasse dudit lit où elle couche ordinairement, ce que ladite damoiselle n’auroit pas contesté mais au contraire reconnu en présence de Me Laurent Guyon procureur fiscal demeurant à La Chapelle sur Oudon, Nicolas Gebu sergent royal demeurant à Segré nos tesmoings soussignés, ce qui fait connaistre la manière et foy d’icelle damoiselle Haton et personnes qu’elle et ses complices ont depuis le décès de ladite de Cantarini ont diverti plusieurs d’iceux meubles

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