Jean Germain a emmené sa jeune épouse Jacquine Dieuleveult en Bretagne : Couterne 1593

Contrats de mariage retranscrits et analysés sur ce blog.

Chaque province avait son type de contrat de mariage, et même il existait des variantes à l’intérieur d’une province. J’aime bien mes ancêtres Normands, pour leur jolis contrats de mariage.

  • Ils ont une très grande particularité : la dot n’est pas payée comptant, et il est prévu un étalement généralement sur 6 ans ou environ. Mais cette promesse était le plus souvent mal tenue. Le gendre devait relancer souvent, y compris devant le notaire, parfois le beau-père était décédé entre-temps, donc il devait faire passer les frères et soeurs de son épouse devant le notaire pour les obliger à payer la dette.
  • Ce qui signifie que le contrat de mariage figure le plus souvent classé avec cet acte devant notaire, à l’instance du gendre impayé, donc des années plus tard. Ici il n’y a que 8 ans, mais tout de même tout n’est pas encore payé !
  • Il existe même des records de longévité, si l’on peut dire ainsi, car il y avait belle lurette que tout le mondé était décédé, à commencer par le gendre et la fille, sans voir leur argent. Mon record constaté est traité dans mon ascendance LEPELTIER à La Coulonche. Ce sont les petits enfants qui sont poursuivis pour impayé, 46 ans après le contrat de mariage de leur grand-mère ! Remarquez bien qu’avec cet acte d’impayé, j’avais fait mon beurre, c’est à dire moisson de filiations ! Mais avouez que cela pourrait figurer dans un livre de records !

Mais ces contrats normands ont une autre particularité. La dot n’est pas qu’en argent et trousseau, elle est aussi en meubles morts ou vifs.

  • La première fois que j’ai rencontré le terme meubles morts ou vifs, mes neurones n’avaient pas fait tilt immédiatement ! Je veux bien avouer quelques minutes, le temps de comprendre que les mères vaches étaient des meubles vifs etc…

L’acte qui suit n’est pas à proprement parlé un contrat de mariage, mais il parle et même il parle beaucoup. Il s’agit d’une procuration car le jeune époux a émigré (eh oui ! autrefois les Normands émigraient !) certes pas au bout du monde, mais tout de même à plusieurs journées de cheval (40 km/jour) pour s’installer en Bretagne, mais il n’a manifestement pas touché la dot de son épouse, et il charge donc son frère de ses intérêts, et vous allez voir que même le trousseau promis n’a pas encore été touché, c’est totalement fou !!! Je dis « totalement fou » car en Anjou, autre province que j’aime et j’étudie depuis longtemps, la dot était touchée le jour des épousailles. Donc l’habitude de traîner, et même traîner longtemps, avant de paier me surprendra toujours.
L’acte parle car vous avez des liens filiatifs, que ne donnaient aucun autre acte.

  • L’acte notarié qui suit est extrait des Archives Départementales de l’Orne, série 4E172

Le 16 avril 1593 au bourg de la Ferté Macé en l’estude, fut présent Jehan Germain fils de Jacques de la paroisse de Couterne lequel a constitué et ordonné ses procureurs généraulx et certains messagers especiaux … Me Robert Germain prêtre son frère présent et acceptant auquel ledit constituant a donné et donne plain pouvoyr puissance et aucthorité de recepvoir pour luy … le payement de 40 escuz sol que ledit constituant dit luy estre deubz par Jacques Dieuleveult pour terme escheu du nombre de la promesse depiecza par luy faite audit Jehan Germain faisant le mariage dudit Germain d’une part et de Jacquille (sic) Dieuleveult sa femme soeur dudit Dieuleveult, ensemble faire sortir à payement pour ledit constituant tout le meuble et trousseau … 16 escuz deux tiers pour les bestes le tout promis faisant ledit mariage selon l’obligation qui en est portée et pour ce requérir … exécutions … et assignations que appréciations qu’il appardiendra aussy du receu en bailler bons et vallables acquits … et généralement etc promectant l’avoir agréable … présents Mathurin Hubert (s) et Macé Palluel (s)

 

Comme quoi même les actes mineurs peuvent beaucoup parler !