Résiliation de bail par le métayer, qui ne supporte plus les dégâts causés par les guerre de religion, 1593

Jean Gallichon et Louise Moynard possédaient une métairie à Miré, située entre Saint-Laurent-des-Mortiers et Morannes. Hélas, durant les troubles des guerres de religion, le métayer a été littéralement racketé, et demande la fin immédiate de son bail. Il se rend donc à Angers résilier son bail auprès de Jean Gallichon. Celui-ci ne prend alors aucune décision, car son épouse, Louise Moynard, est partie sur les lieux.

Miré, collection particulière, reproduction interdite
Miré, collection particulière, reproduction interdite
    Voir la carte du Haut-Anjou

L’acte qui suit est extrait des Archives Départementales du Maine-et-Loire, série 5E1 – Voici la retranscription de l’acte : Le 16 juin 1593 après midy par davant nous François Revers notaire royal Angers Besnard Goddin mestaier demeurant au lieu et métairie de la Taillette paroisse de Myré
s’est transporté à la personne de honorable homme Jehan Gallichon marchand demeurant à Angers sieur dudit lieu et métairie,

    j’ai déjà trouvé plusieurs actes notariés concernant Jean Gallichon dans le fonds de François Revers notaire. Or, ce notaire, particulièrement actif, dénomme toujours avec précision les métiers et autres qualiticatif.
    Jean Gallichon n’y porte jamais de titre de sieur de …, mais ceci s’explique sans doute par modestie.
    Jean Gallichon est toujours qualifié par Revers de marchand alors qu’il précise toujours pour bien d’autres marchand de draps de laine, etc…
    J’émets donc la plus grande réserve sur le métier de Jean Gallichon, car François Revers son notaire, avait l’habitude de préciser le métier des marchands

auquel il a déclaré qu’il ne peut et luy est impossible à cause des troubles ravages qui ont esté fait sur ledit lieu et des tailles extraordinaires qu’il est contraint payer tant pour le roy que du party contraire, de tenir et demeurer audit lieu et mestairie soyt en qualité de mestaier ne autrement et qu’il n’a moral de soustenir telles afflictions
et qu’il s’est départy et se départ dudit lieu et mestairie comme métaier d’icelle et dès à présent affin que ledit Gallichon ayt à se prémunir d’un autre mestayer ainsy que bon luy semblera saut

et o reservation par ledit Goddin faicte de prendre et recueillir la moictié des grains qui sont à présent ensepmancez audit lieu pour l(année présente seulement, et la moitié des bestiaux qui restent et sont encores à présent sur ledit lieu et sauf à compter entre les parties tant pour les charges dudit lieu que autres et de demander par ledit Goddin restitution audit Gallichon de 3 escuz et demy faisant moitié de 7 escuz sol par ledit Goddin desboursé pour retirer et rescousser les bestiaux dudit lieu d’entre les mains des ennemis et rebelles à sa majesté qu’ils auroient menés à Château-Gontier et afin que du tout ledit Gallichon n’en prétende cause d’ignorance,

    ainsi, les bestiaux avaient fait l’objet d’une rançon, ce qui est déjà considérable comme dégats ! J’avais imaginé que pendant les troubles les bestiaux étaient pris et qu’on ne les revoyait plus.

lequel Gallichon dict que honorable femme Loyse Moynard sa femme est dans ledit lieu et mestairie et qu’il ne fera aucun changement pour ceste occasion jusques à son retour

    ces jours-ci, j’avais soupçonné Louise Moynard d’avoir été une maîtresse femme. Cet acte confirme mes soupçons, puisque c’est elle qui est partie sur place constater les dégâts et que son mari ne prend pas de décision en son absence.
    Au passage, on peut s’étonner que ce soit l’épouse qui voyage durant les troubles et par l’époux !
    Par ailleurs, il semble que le métayer ait vu Louise Moynard à sa métairie, et que celle-si ait été si exigente qu’il vient tenter sa chance à Angers auprès de Jean Gallichon.
    Peine perdue, celui-ci ne prend aucune décision sans sa femme !

outre jusques à ce qu’il se soit conseillé et à ceste fin nous a demander coppie des présentes que luy avons délivrées dont et de tout ce que dessus nous avons audit Goddin décerné le présent acte pour luy servir et valoir ce que de raison, fait Angers maison dudit Gallichon présent René Allain demeurant Angers et Mathurin Drouart marchand demeurant à Contigné tesmoings lesdits Goddin et Drouart ont dict ne savoir signer

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Une réponse sur “Résiliation de bail par le métayer, qui ne supporte plus les dégâts causés par les guerre de religion, 1593

  1. En effet quel homme modeste que ce Jean Gallichon, d’après d’anciennes généalogies il serait issu d’une famille de juristes (ascendance non prouvée à ce jour), et n’est que marchand et encore sans précision comme s’il n’avait pu intégrer une corporation. Pourtant sa signature prouve qu’il a fait des études. Quand il se marie, mariage entre égaux, il accorde par contrat à ses épouses des avantages que ne prévoit pas la coutume d’Anjou. Deux fois veuf, père avec au mois un fils, alors qu’il devrait hésiter à donner une marâtre à ses enfants, il choisit Louise Moynard, une maîtresse femme, aussi un épouse capable de le seconder dans son commerce comme dans ses affaire privée. Jean Gallichon ne souffrirait-il pas d’infirmités ? Dans le présent acte, il reste à Angers quand c’est Louise Moynard qui se déplace en Haut Anjou.
    L’auteur de la généalogie Cevillé donne l’exemple d’un de ses cousins aveugle, boulanger et marié : « Jean Mondière ; est aveugle de naissance, de son mouvement et contre le gré de ses frères, il s’est fait boulanger (ils sont fils de notaires et les boulangers sont gens modeste – en général – car certains font de belles fortunes). Il est fort industrieux, même à couper et polir le bois. Il cueille les fruits des arbres tout aveugle qu’il est et ce qui est de plus étonnant la nuit il veut de la chandelle allumée à tout ce qu’il fait encore, que certainement il ne voit pas son travail, non plus durant le jour. Il s’est marié et vend du pain à Laval. »
    Note d’Odile : Vous avez pleinement raison. Jean Gallichon avait manifestement un handicap qui l’empêchait de marcher, et probablement est-ce la raison pour laquelle il n’a pu exercer un métier dans la judicature, qui l’aurait obligé à aller au Présidial.
    Tout à fait d’accord avec vous : il est cultivé, car sa signature est parfaite, et je dirais même du rang des officiers de la judicature. Il a aussi une solide fortune personnelle, qui lui a permis la jolie donation qu’il fait à sa 3e épouse lors de leur mariage.
    Puisque cette année je fais le notaire François Revers, qui est manifestment son proche voisin à Sainte Croix, je pense trouver encore quelques actes le concernant. En tout cas, ce que j’ai trouvé de lui à ce jour est parlant, et je suis très touchée de pouvoir ainsi percer la vie de Jean Gallichon.
    Au reste, autrefois on pouvait aussi avoir un accident de cheval ! De nos jours, on est abreuvé d’accidents de voiture, et on oublierait presque facilement qu’autrefois, le cheval, certes plus écologique, était tout de même cause d’accidents, ne serait-ce que parce que les chemins étaient redoutables…

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