Construction d’une chapelle en l’église sainte-Croix, Angers 1622

L’église Sainte-Croix d’Angers est située face à la maison d’Adam, ou plutôt c’est la maison d’Adam qui est sur la place sainte-Croix.
Pour une raison non explicitée ici, les héritiers ont un peu traîné avant de respecter les volontés du testament, et la chapelle est construite 50 ans après le testament ! Comme la vie a entre-temps augmenté, elle sera moins luxueuse.
L’époux d’une des héritières, donc non considéré comme héritier, réussit à glisser ses armes dans la chapelle, alors qu’il n’y est pour rien, c’est à dire pas un denier venant de lui. C’est surprenant car peu respectueux des volontés du défunt !

L’acte qui suit est extrait des Archives Départementales du Maine-et-Loire, série 5E36 – Voici la retranscription de l’acte : Le 24 octobre 1622 comme ainsy soit que défunt noble homme Jacques Richard vivant sieur de Bois Travers eschevin d’Angers ait par son testament et ordonnance de dernière volonté entre autres choses voulu et ordonné estre fait et édifié en l’église parrochiale de Sainte Croix d’Angers joignant la chapelle sainte Barbe et tirant vers le coing de ladite église une autre chapelle de grandeur compétente et comme les paroissiens de ladite église et les héritiers dudit défunt verront bon estre laquelle chapelle seroit voultée tant par bas pour sépultures que par hault et en laquelle y auroit ung aultel fait de maczonnerie de pierre de rajace

    je ne sais pas ce que signifie cette pierre, mais c’est ce que je lis.
    Dernière minute, Marie a trouvé l’explication ci-dessous, merci à elle !

ou contretablier duquel ou au dessus seroient les images de notre dame de saint Michel et de saint Pierre et de Saint Jacques le majeur et pour bastir ladicte chapelle auroit voulu et ordonné estre employé la somme de 1 000 livres tournois si tant y en falloit et ou ladite somme n’y seroit entièrement employée il auroit donné et légué le surplus à la fabrice de ladite église et lequel bastiment il auroit voulu et ordonné estre faict faire par sesdits héritiers comme plus à plein appert par ledit testament receu et passé par défunt maistre Estienne Quetin vivant notaire royal à Angers le 11 février 1571 ce qui n’auroit encores esté faict et exécuté
et auroient lesdits héritiers offert auxdits paroissiens leur bailler et mettre entre mains ladite somme de 1 000 livres tournois pour employer en la construction et bastiment de ladicte chapelle ainsy qu’ils verront estre à faire,
lesquels paroissiens disoient qu’il seroit difficile faire à présent édifier et construire ladite chapelle en la forme qu’elle est désignée par ledit testament depuis lequel les matières des batiments et les salaires des ouvriers auroient enchery de moictié ou environ

    le testament a été fait 50 ans plus tôt ! donc en 50 ans, entre 1581 et 1622 les matériaux et salaires ont aumenté de 50 %

et néanlmoings offroient se charger de la construction et bastiment de ladite chapelle pour la somme de 1 000 livres en la forme portée par ledit testament fors qu’elle ne soit voultée que par bas et seulement lambrissée de bois par le hault comme celle que lesdits paroissiens ont naguères fait construire au coing de l’accroissement qu’ils ont fait faire de leur église et qu’à l’autel de ladite chapelle soit mis en ung cadre ung tableau de plate peinture auquel seront les images de saint Michel saint Pierre et saint Jacques le majeur au dessus duquel cadre en sera faict ung aultre plus petit auquel sera mis ung tableua avec l’image nostre Dame aussy en plate peinture ou au lieu dudit tableau une image en bossée et en laquelle chapelle ès endroits plus commodes seront peintes les armes dudit défunt sieur du Bois Travers et y sera faite une cloison de bois tourné pareille de celle qui est à ladite chapelle naguères construite, ce que lesdits héritiers auroient accepté,
pour ce est il que en le court du roy notre sire à Angers par davant nous Jullien Deille notaire d’icelle personnellement establys messire François Bitault sieur de Chize conseiller du roy en ses conseils d’estat et privé maistre des requestes ordinaires de son hostel cy davant mary de défunte dame Renée de Charnières qui estoit unique fille et héritière de défunte damoiselle Jehanne Richard comme elle vivoit dame de la Fessardière estant de présent en ceste ville, et damoiselle Sébastienne Richard fille majeure et usante de ses droits demeurant audit Angers dite paroisse de sainte Croix en son nom et faisant pour nobles hommes Charles Davoust sieur de la Maigrinière conseiller du roy président en l’élection de La Flèche, damoiselle Françoise Richard sa femme et noble homme Joseph Lecoq conseiller notaire et secrétaire du roy maison et couronne de France tuteur naturel de Lucresse Lecoq sa fille et de défunte damoiselle Lucresse Richard lesdites Sébastienne Françoise et Lucresse filles et héritiers de feu noble homme Jehan Richard sieur de Bois Travers et tous esdites qualités héritiers dudit défunt sieur de Bois Travers d’une part,
et vénérable et discret maistre Mathurin Jousselin prêtre curé de ladite cure et église parochiale de Ste Croix et honorables hommes René Aveline sieur de la Garanne et Pierre Maumussard procureurs de la fabrice de ladite paroisse au nom et comme commis et députés desdits paroissiens par conclusion du conseil écripte et insérée sur le livre des conclusions de ladite paroisse de sainte Croix d’autre part,
soubzmetant respectivement scavoir lesdits héritiers eulx leurs hoirs et lesdits commis et députés eulx et tous et chacuns les biens de ladite cure et fabrice respectivement etc confessent avoir fait et convenu entre eulx ce que s’ensuit c’est à scavoir que lesdits députés du consentement dudit sieur curé ont promis et demeurent tenus faire construire et édifier dedans ung an prochainement venant en la forme contenue par ledit offre cy dessus oultre que à costé des armes dudit feu sieur de Boistravers celles dudit sieur de Chize my parties avec celles de ladite déffunte dame son épouse y seront apposées,

    monsieur de Chize ne manque pas d’orgueil, car il n’y met aucun denier et met pourtant ses armes !

pour et moyennant ladite somme de 1 000 livres tournois sur laquelle lesdits députés ont confessé avoir esté cy davant payés par ledit sieur de Chizé ou autre pour luy auxdits paroissiens ou leurs députés une tierce partie montant la somme de 333 livres 6 sols 8 deniers de laquelle a esté baillé quittance, et le surplus montant la somme de 666 livres 13 sols 4 deniers ledit sieur de Chizé et damoiselle Sébastienne Richard esdits noms ont promis et demeurent tenuz la bailler et payer auxdits paroissiens ou leursdits députés savoir ledit sieur de Chizé esdits noms 83 livres 6 sols 8 deniers en quoi il est seulement contribuable comme héritier en partie soubz bénéfice d’inventaire de défunte damoiselle Charlotte Richard dame du Breil et par ladite Sébastienne Richard esdits noms le surplus et ce dedans Pasques prochainement venant
et ladite chapelle construite s’il reste quelque partie de ladite somme de 1 000 livres lesdits paroissiens sont et demeurent tenuz convertir et employer ce qui en restera en achapt d’ornements pour l’usaige de ladite église et premièrement de ceulx qui sont requis pour la célébration des grandes messes en vigiles fondées chacuns jours en ladite église par ledit défunt par sondit testament
lesquelles choses ont esté stipulées et acceptées par lesdites parties esdits noms respectivement et dont elles sont demeurées d’accord et à ce tenir etc dommaiges etc obligent etc renonczant etc
fait audit Angers maison dudit sieur de Chize en présence de Me Jacques Baudin François Guitton clercs audit Angers

Odile Halbert – Reproduction interdite sur autre endroit d’Internet Merci d’en discuter sur ce blog. Tout commentaire ou copie partielle de cet article sur autre blog ou forum ou site va à l’encontre du droit d’auteur.

3 réponses sur “Construction d’une chapelle en l’église sainte-Croix, Angers 1622

  1. Pierre de taille de Rajace. Les sculpteurs,appellent pierre rajace ou rapaije,une pierre dure et de beau grain,dont on ignore aujourd’hui les carrières,on en faisait autrefois de fort belles figures.
    (Dictionnaire portatif de peinture ,sculpture et gravure,par Antoine- Joseph Pernety)

      Note d’Odile : Merci de votre aide. J’ai mis le renvoi dans le texte.
  2. Léglise de Sainte- Croix.
    Les historiens varient sur le nom de son fondateur; quelques-uns prétendent que ce fut Saint Lézin,évêque d’Angers,qui la fit construire à ce même lieu où il guérit une foule d’aveugles et de boiteux,en faisant le signe de la croix,lorsqu’ils lui demandoient l’aumône(1); d’autres disent que ce fut S Mainboeuf,en mémoire de ce miracle opéré par S. Lézin.
    Cette église, qui n’étoit originairement qu’une chapelle,fut, du temps de Charlemagne,un petit monastère sous l’invocation de Saint Etienne; c’est aujourd’hui une des plus anciennes paroisses de la ville, à la nomination du chapitre de la cathédrale(2)Péan confond la chapelle Ste Croix,élevée vers le VIIe siècle,avec le petit monastère de Saint- Etienne,que Charlemagne donna à Saint Maurice. Les deux fondations furent seulement réunies lors de leur reconstruction commune vers le Xe ou le XIe siècle.La principale fête de la paroisse resta consacrée à Saint- Etienne. Le clocher fut refait en 1615,l’église aussi agrandie et en dernier lieu en 1619. Elle formait le coin de la rue Saint- Gilles,faisant face à la rue Saint- Aubin.L’espace entre Sainte- Croix et la cathédrale fut donné en 1274 par le comte au chapitre de Saint- Maurice et converti en cimetière. Il resta commun aux deux paroisses jusqu’en 1619,qu’on le divisa par de simples bornes de pierres bientôt enfouies et qui n’existaient plus quand le cimetière fut supprimé.- On appelait à Angers « marchand de Sainte- Croix »,marchand qui ne perd ni ne gagne et vend à tout prix.
    (Péan de La Tuillerie- Description de la ville d’Angers)

  3. Sous la place Sainte-Croix,une église disparue.
    -Révélées par les travaux de voirie au pied de la maison d’Adam,ce sont bien les fondations de l’église Sainte-Croix,qui ressurgissent.Deux siècles,après son triste démantèlement (les matériaux:bois de charpente,grilles,vitraux,jusqu’aux plombs qui les composent seront en 1791 mis aux enchères et vendus au plus offrant),ce petit édifice,situé au chevet de la cathédrale a pourtant connu ses heures de gloire.
    On attribue au grand saint Lezin,patron des ardoisiers,la fondation première au VI e siècle,sur le lieu même où il guérit 12 aveugles et boiteux par le signe de la croix.Un vitrail,malheureusement détruit par des garnements en 1572 en rappelait l’évènement.
    Son trésor s’enrichit rapidement de pieuses reliques dont un fragment de la vraie croix rapporté en 1470,par le roi René et enchâssé dans une croix de vermeil doré pesant 14 marcs.Jusque-là indifféremment appelée Sainte-Croix ou Saint-Etienne,du nom du petit monastère qui lui était accolé,sa vocation est désormais acquise:aussi trouve t’on « une tante de tappisserie qui comprand le tour de l’églize en neuf pièzes »,représentant la découverte de la Croix du Christ par sainte Hélène,la Cène avec les douze apôtres et le baptême de Constantin par saint Sylvestre(il s’agit en fait d’une légende,saint Sylvestre meurt avant) La chaire à prêcher n’est pas oubliée dans cet impressionnant décorum,puiqu’une tenture en faisait également le tour.
    Dame Claudine.
    Parmi les tombes anciennes, mises au jour lors des travaux,sans doute serait-il émouvant de retrouver celle de cette dame dont la jolie épitaphe mortuaire nous fut transmise par Bruneau de Tartifume au XVIe siècle:
    Au monde fu(t) Claudine Villebreme(…)Espouse fu(t)de Joachim Coral,qui de La Flèche,fut juge et seneschal.Se(i)ze enfans eu de luy en mariage,tous baptisés ,je lo(ue) Dieu du lignage.Neuf avant moy sont morts en innocence,qui face à face voyent la divine essence.Quant aux aultres soient trespassés ou vifs.Ou ciel empir en gloire soient ravis.Le doux Jésus me face tel pardon.Que Paradis j’aye par grâce et par don.En septembre,vingt et deuxièsme jour,je trespasse,et sans plus long séjour.L’an mil cinq cens et cinq,point ne mesconte.Au jugement à tous fault rendre compte.
    Saint-Sacrement
    Petite et pauvre de revenus,cette église connaît cependant une certaine renommée sous le patronage du curé Mathurin Jousselin,qui y fait exposer,de façon permanente,le Saint-Sacrement.Et il obtient,en 1659,l’accord du pape Alexandre VII,pour des indulgences plénières et la fondation d’une confrérie.Lui succédera quelques années plus tard,Joseph Grandet,directeur du Séminaire d’Angers et brillant historien de la région.
    En mauvais état à la veille de la Révolution,et dominée de plusieurs mètres par le cimetière qui l’entoure(provoquant une forte humidité),l’église Sainte-Croix est finalement rasée.En 1840,on détruit les dernières maisons(encore visibles sur les dessins de Berthe ou de Hawke),pour donner naissance à la petite place que l’on connaît si bien.
    (Vincent Caillaud.C O du 13 6 1996. )

    e

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