Difficile d’être au service d’un protestant sans passer pour un protestant : le cas Lailler 1585

ce qui suit est un témoignage, et en l’occurence, René Pellault vient témoigner, non sans un certain courage, en cette époque où les protestants étaient pourchassés et/ou massacrés.
En effet, son proche parent, Robert Lailler dépend féodalement de la baronnie de Château-Gontier, propriété du roi de Navarre, protestant à cette date.
Difficile pour les officiers et serviteurs du roi de Navarre dans la baronnie de Château-Gontier de ne pas passer pour un protestant ! Et encore plus difficile de désobéir aux ordres de son suzerain !
Je suis donc très perplexe, par exemple lorsque le Journal de Louvet, dans ses listes de protestants massacrés à Angers, nomme soudain « le serviteur de … », lequel maître, protestant, avait été massacré quelques jours plus tôt. Un peu comme si toute la maisonnée ne faisait qu’un dans la religion et qu’un dans la persécution.
Comme vous les savez si vous suivez quelque peu ce blog, je descends de René Pelault, et il était côté catholique dans la Ligue. On ne m’otera pas de l’idée que son proche parent se trouvait dans une situations plus qu’embarassante du fait qu’il relevait du roi de Navarre.
Donc, René Pelault a ici fait le déplacement de Noëllet à Angers pour venir témoigner courageusement, à travers toutes ces persécutions, de son parent !

    Voir mon étude PELAULT
    Voir les Lailler

J’ai trouvé cet acte aux Archives Départementales du Maine-et-Loire, cote E4260 – Voici sa retranscription (voir ci-contre propriété intellectuelle) :

Le 27 novembre 1585 après midy, en la cour du roy notre sire Angers endroit par davant nous Mathurin Grudé notaire royal Angers et des tesmoings cy après nommés noble homme Robert

    le notaire a écrit « René », mais ne l’a pas barré avant d’écrire en interligne au dessus « Robert », mais je trouve dans le Dictionnaire de la Mayenne de l’Abbé Angot le nom de Robert Lailler en 1585 à Vièves en Quelaines

Lailler sieur de Lespinay demeurant en sa maison de Viefves paroisse de Quelaynes estably et soubzmis soubz ladite cour luy ses hoirs etc a dit et déclaré à monseigneur le comte du Bouthage gouverneur et lieutenant pour le roy en ce pays d’Anjou que pour avoir esté nourry au service du roy de Navarre duquel il est serviteur domesticque il auroyt eu volonté de l’aller trouver au moys d’octobre dernier et pour y aller en plus grande assurance se porta mis en la suytte des trouppes du sieur de Clermont qu’il pensayt debvoir passer la rivière de Loyre sans qu’il ayt de volonté de faire la guerre en ce pays d’Anjou ny faire chose qui feust contre le service du Roy et que aussitôst qu’il a entendu et
de sa majesté par sa déclaration faite sur l’édit de réunion de ses subjets à l’église catholicque apostolique et romaine du moys de juillet dernier il se seroyt et est retyré en sa maison pour obeyr audit edit et déclaration comme il veult et entend à l’advenir faire et se
soubz l’obéissance des commandements de sa majesté et luy demeurer bien humblement fidelle
sans y contrevenir ne porter les armes contre son armée ne
à ceulx qui les porteront comme il a promis et juré et qu’il gardera et entretiendra ladite promesse sur sa vie et son
n’ayant jamays fait confession d’aultre religion que de la cattolicque apostolicque et romaine en laquelle il veult continuer et y vivre et mourir et au service du roy
dont et de tout ce que dessus ledit Lailler a esté pleny et cautionné par noble homme René Pellault seur du Boys Bernier et y demeurant paroisse de Noueslet aussi pour cest effet estably et soubzmis soubz ladite cour luy ses hoirs etc et lesquels Lailler et Pellault ont attesté et asseuré à mondit seigneur gouverneur que ledit Lailler n’a en sa maison armes ne chevaulx dont il se puysse ayder à la guerre
dont et de tout ce que dessus
lesdits Lailler et Pellault et déclaré ce présent acte pour leur servir et valloyr ce que de raison et a ce que dessus est dit tenir sans y contrevenir se sont lesdits Lailler et Pellault obligés eulx et chacun d’eulx seul et pour le tout sans division de personne ne de biens eulx leurs hoirs etc renonczant etc et par especial aux bénéfice de division et discussion d’ordre de priorité et postériorité foy jugement et condemnation etc
fait et passé au pallays episcopal d’Angers
Maurille Deslandes sieur de la ? demeurant à Angers et Judic ? Garsenlan marchand demeurant au lieu du

    je vous mets les noms des témoins, que j’ai eu du mal à déchiffrer. Cliquez pour agrandir.

Odile Halbert – Reproduction interdite sur autre endroit d’Internet Merci d’en discuter sur ce blog.

5 réponses sur “Difficile d’être au service d’un protestant sans passer pour un protestant : le cas Lailler 1585

  1. Bonjour Odile et merci pour cet acte ,dans lequel nous pouvons lire :
    ‘par sa déclaration faite sur l’édit de réunion de ses subjets à l’église catholicque apostolique et romaine du moys de juillet dernier ‘
    Ne pensez vous pas qu ‘il s’agirait là d’une conséquence de L’Édit de Nemours promulgué par Henri III le 18 Juillet 1585?
    ‘l’exercice du culte protestant est interdit. Les protestants doivent abjurer ou s’exiler. Les ministres protestants doivent sans délais quitter le royaume sous peine de mort. Henri de Navarre et Condé sont déclarés inaptes à la succession au trône’
    Source Wikipedia

      Note d’Odile

    je vuos réponds cet APM car j’ai du monde chez moi
    Odile

  2. Voici l’extrait du jeudi 10 août 1585 du journal de Louvet :

    Le jeudy dixième jour dudict mois audict an, l’édict d’unyon, faict par le roy de ses subjects avec luy et l’église catholique, apostolique et rommayne pour l’extirpation des hérézies, a esté leu et publié au siège présidial d’Angers, et auparavant laditte publication, a esté dict dans ledict pallais, à l’autel de la chapelle, une grande messe répondue et chantée en musique par les psalteurs et musiciens de l’église d’Angers, qui a esté cellébrée par M. Jacquelot, doyen de Sainct-Martin et conseiller audict siège, où ont assisté MM. Lechat, président, Pierre Ayrault, lieutenant-général-criminel, René Louet, lieutenant-particulier, et Baultru, assesseur, qui estoient tous revestuz de leurs grandes robes rouges, avec tous lesquelz estoient MM. les conseillers dudict siège et MM. les gens du roy et aultres, MM. de la justice, tant de la prévosté, esleuz, avocatz, greffiers et grand nombre de peuple ; après la publication duquel édict et lecture faicte d’icelluy à haulte voix, M. Lefebvre, avocat du roy, a faict ung beau plaide, la conclusion duquel estoit qu’il requéroit que ledict édict fust exécuté de poinct en poinct, que MM. qui estoient au siège eussent à prester le serment tous en particulier, suivant ledict édict, ensemble tous aultres, après lequel on a leu audict siège les articles extraicts dudict édict, après laquelle lecture, ledict sieur président s’est mis à genoux davant ledict sieur lieutenant-particulier dans ledict siège, lequel tenoit le livre des Saints Evangiles tout ouvert, lequel a juré sur icelles de garder et faire garder le contenu audict édict de poinct en poinct, sur les peines portées par icelluy. Ce faict, ledict sieur lieutenant-particulier s’est mis à genoux davant ledict sieur président, qui a faict pareil serment sur lesdittes Evangiles, après lequel ledict sieur lieutenant criminel assesseur se sont pareillement et les conseillers dudict siège, tous les ungs après les autres, suivant leur rang et ordre, pareillement mis à genoux et tous juré sur lesdittes Evangiles, comme les précédents, comme aussy ont MM. les avocatz du roy faict et juré davant ledict sieur président en la forme que dessus ; et aïant lous lesdicts sieurs dudict siège faict ledict serment, M. le prévost des mareschaulx et MM. les officiers de la prévosté, sçavoir : MM. Guillaume Bonvoisin, juge, Lefebvre, lieutenant, et Goureau, procureur du roy, et les greffiers et clercs qui auraient aussy comparu à prester et jurer le serment comme les dessus dictz et au regard des officiers de l’élection, ils n’auraient voullu comparoir davant lesdictz présidiaulx pour prester ledict serment, lesquelz alléguoient pour deffenses qu’ilz n’estoient leurs juges et qu’ilz offraient exécutter ledict édict en leur chambre du conseil, nonobstant lesquelles, MM. dudict siège présidial ont ordonné que lesdictz esleuz presteroieut ledict serment, le tout nonobstant oppositions ou appellations quelconques faictes ou à faire, et ce, par davant ledict sieur président Lechat, davant lequel ilz comparaistraient, et l’un desquelz esleuz, pour les propos scandaleux qu’il aurait dict audict sieur avocat du roy Lefebvre, aurait esté condampné en cinquante livres d’amende, applicables aulx paouvres, lesquelz esleuz, après laditte prononciation, ont, sans préjudice à leurs droicts, comparu davant ledict sieur président, et juré et faict ledict serment. Ce faict, ont aussy comparu MM. les juges et consulz des marchands, juges des traites et officiers desdittes traites, officiers des greniers à sel, les gardes, officiers, ouvriers et monnoyeurs de la monnoye, notaires, avocatz et sergents ont aussy comparu et juré comme les dessus dictz davant ledict sieur président, et pour le regard des officiers absents, fust ordonné qu’ilz comparoistroient davant ledict sieur lieutenant-particulier pour prester le serment comme tous les dessus dictz, et qu’ilz signeraient tous dans ung registre dans lequel estoit inscripte la forme et article dudict serment, lequel registre estoit et fust mis entre les mains de Me Jehan Ballain, clerc-juré au greffe civil. Ce faict, se sont tous retirez, et les tapisseries qui avoient esté tendues dans ledict pallais ont esté ostées.

  3. Bonjour

    si il était dur de servir un protestant, il devait être dur également d’être protestant, brimade, destruction des biens, voir meurtre.
    Etre au service d’un protestant laissait planer un doute, donc on pouvait faire intervenir une personne pour prouver son catholicisme, mais un protestant « auto déclaré » , on devait avoir nettement moins d’égard envers celui ci . Il n’y a pas de mystère, si Louis d’Andigné époux de Renée de la Faucille et Antoinette de la Faucille épouse de Rosiers font leurs testaments en Angleterre vers 1587, ils ne sont pas en voyage touristique, ils craignent pour leurs vies en France. Les de Portebize, également Protestant, ont dut se faire passer pour des catholiques à la même période, mais si on s’appuie sur les registres de la commune de soulaire, il ne trompait pas leur monde. Une des seules familles nobles de soulaire, on devrait les retrouver souvent comme parrain et marraine des enfants des alentours, et biens non, il ne sont quasiment jamais P et M , seule exception qui confirme la règle, Marie de Portebize qui sera marraine pas loin d’une 10aine de fois

    Stéphane

  4. Bonjour Madame,

    1. Je vous remercie chaleureusement pour votre travail complet et passionnant pour un ancien étudiant en histoire. J’avais de mauvais souvenir de la paléographie, mais vous me réconciliez un peu avec.

    2. Selon vous, valait-il mieux être proche d’une famille juive qu’une famille huguenote pendant cette guerre civile ?

    3. Autre sujet, autre lieu. Auriez-vous par hasard, d’anciennes cartes postales du cimetière La Bouteillerie ou alors Miséricorde à Nantes ?

    4. Je suis photographe et j’aimerai commencer un projet sur la ville de Nantes, des portraits urbains comparés entre le début du siècle et aujourd’hui. Est ce que ce projet vous paraît intéressant et réalisable ?

    Bonne continuation,
    Au plaisir de vous lire de nouveau
    H.Men

      Note d’Odile :

    A l’époque que j’étudie ci-dessus, les protestants étaient poursuivis, et je ne comprends pas votre allusion aux Juifs.

    S’il existe des cartes postales de cimetières, elles pourraient être dans la collection en ligne sur le site des Archives Départementales de Loire Atlantique.

    La comparaison entre cartes anciennes et vues actuelles existe déjà.
    Odile

  5. Je ne pense pas qu’il existait à cette période des Israélites dans nos régions ,je l’avais lu dans un livre sur la déportation des Juifs du Mans lors de l’Occupation ,ceux ci étaient tous d’origine immigrés de l’Est et réfugiés en France.

    « …Ces diverses mesures aboutissent en 1394 à l’expulsion des juifs du Royaume de France. Ne subsistent dès lors que les communautés d’Avignon et du Comtat Venaissin, sous la dépendance directe du Pape depuis 12.. ainsi que celles d’Alsace et de Lorraine, qui appartiennent à l’Empire romain germanique »
    http://tjacob.chez.com/histoire.htm

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