Codicile au testament de Jean Hardouin, prêtre, pour donner 3 mois de nourriture à ses serviteurs sans travail après son décès : Montreuil sur Maine 1555

C’est la première fois que je trouve une telle clause : ses serviteurs seront nourris jusqu’à 3 mois après son décès s’ils n’ont pas trouvé de maître plus tôt.
Et, à la lecture de cette clause, j’en conclue que les serviteurs qui perdaient leur maître ne trouvaient pas toujours un maître aussitôt, et qu’il fallait souvent 3 mois.
Ainsi, le chômage existait déjà, non indemnisé avant de retrouver un travail !!! et Jean Hardouin prévoît cette indemnité de chômage à ses serviteurs.

Outre cette clause fort sympathique, Jean Hardouin révoque le don fait à ses héritiers pour le donner à une orpheline qu’il a chez lui nommée Tiennette Leblanc.

Enfin, plus étonnant, il craint que ses 2 exécuteurs testamentaires soient débodés de travail !!!! alors il en nomme 3 autres. Je ne pense pourtant pas que la fortune de ce prêtre ait été considérable !

Et 2 des nouveaux exécuteurs testamentaires sont « marchand et notaire », ce qui signifie qu’un notaire seigneurial, ici notaire du Lion d’Angers, ne traitait pas suffisamment de baux et autres actes par an pour gagner sa vie correctement aussi il exerçait aussi le métier de marchand fermier c’est à dire de gestionnaire de biens intermédiaire entre le propriétaire avec un bail à ferme, et l’exploitant agricole, avec un bail à moitié. Ce travail était très rémunérateur à en juger par le nombre de familles aisées grâce à cette actitivé.


Voir ma page sur Montreuil-sur-Maine

Acte des Archives du Maine-et-Loire 5E121 Ma retranscription (voir ci-contre propriété intellectuelle) :
Le 19 août 1555 (devant Huot notaire Angers) en la cour du roy notre sire à Angers etc personnellement estably vénérable et discret maistre Jehan Hardouyn prêtre demourant en la paroisse de Montreuil sur Maine au diocèse d’Angers, estant en sa pleine saine et bonne disposition de sa personne, soubzmectant confesse avoir aujourd’huy oultre son testament et ordonnance de sa dernière volonté par cy davant fait et ordonné et passé par deffunt Me Mathurin Degré en son vivant notaire des contrats du roy d’Angers le 15 juin 1551, par codicile et ordonnance de sa dernière volonté fait et ordonné et par ces présentes fait et ordonne les choses cy après contenues et telles que cy après s’ensuit : c’est à savoir que ledit estably a du jourd’huy ratiffié confirmé et approuvé et par ces présentes loue ratiffie confirme et approuve sondit testament dessus mentionné fait et passé par ledit Degré ledit jour audit an 1551 et iceluy a pour agréable, (f°2) veult et ordonne qu’il soit exécuté et qu’il sorte son plein et entier effet selon sa forme, fors et réservé l’article pénultième dudit testament et estant escript en iceluy auparavant le dernier article, portant élection de ses exécuteurs il est escript et contenu que ledit establi a voulu et ordonné que si il reste aucune chose de ses biens meubles après le don porté par ledit testament, ledit article accompli, le reste de sesdits meubles soit baillé à ses héritiers en tant qu’il luy en pourra appartenir, lequel article dessus mentionné et tout le contenu en iceluy ledit estably a révocqué et révocque par cesdites présentes et ne veult qu’il sorte effect et a voulu et ordonné, veult et ordonné par cesdites présentes que après que sur sesdits meubles ait esté prise la somme de 300 livres tz pour bailler à ses héritiers ainsi que contenu est audit testament, que si le reste de sesdits meubles au service des (f°3) donations portées et contenues par ledit testament auront esté payées faits et parfaits et acomptés selon le contenu audit testament, tout le reste de sesdits meubles si aucun reste y a soit baillé donné et décerné à Thiennette Leblanc pauvre fille orpheline, laquelle à présent il nourrist en sa maison, à laquelle il a par ces présentes donné et donne le surplus de sesdits meubles, les charges ordonnées sur iceulx et autres cy après contenues sur iceulx provisionnées et levées ; à la charge de ladite Leblanc de prier Dieu pour l’âme dudit estably, laquelle donation nous notaire soubzsigné avons stipulée et acceptée pour ladite Leblanc absente ; et davantage craignant ledit estably donner trop grande peine à noble et discret Me Pierre de Biences ? baron dudit Montreuil et à Jehan Bellanger, exécuteurs esleuz et dénommés par ledit testament, a iceluy estably révocqué et révoque de ladite exécution lesdits de Biences et Bellanger pour et en leur lieu pour iceluy testament exécuter (f°4) ensemble ce présent codicile, a iceluy estably esleu et nommé et ordonné et eslit et ordonne avecques les autres exécuteurs nommés par ledit testament Jehan Souvete marchand et notaire et Olivier Fournier aussi marchand et notaire et Jehan Brillays tous demourant au Lyon d’Angers et chacun d’eulx seul et pour le tout ; davantage le contenu audit testament a ledit estably voulu et ordonné veult et ordonne qu’au jour de son enterrement au service d’iceluy les petits enfants de l’école dudit Montreuil assistent à son enterrement et qu’ils disent chacun leurs 7 psaulmes avecques le pater noster et ave maria à basse voix pour le salut de son âme, à chacun desquels veult estre baillé et payé 12 deniers tz ; Item à sondit testament qu’assistent 30 pauvres tenant chacun en l’église dudit Montreuil durant le service qui ledit jour sera pour luy dit en ladite église une chandelle (f°5) de cyre ardente priant Dieu pour luy et que à chacun desdits pauvres il soit donné le reffection 6 deniers tz ; Item a voulu et ordonné, veult et ordonne que ses serviteurs qui seront à son service lors de son décès soyent nourris à ses despens jusques à 3 mois après son décès si plus tost ils ne sont pourveuz de maistres ; auxquelles choses dessus dites et tout le contenu audit testament fors en ce qu’il est par ces présentes révoqué tenir et accomplir oblige ledit estably renonçant etc foy jutement condemnation etc présents à ce vénérable et discret maistre Jehan Bouvet prêtre chapelain en l’église st Pierre d’Angers, Jehan Henis et Thomas Daubourd clercs demeurant à Angers tesmoings, fait et passé audit Angers en la maison de nous notaire soubzsigné

5 réponses sur “Codicile au testament de Jean Hardouin, prêtre, pour donner 3 mois de nourriture à ses serviteurs sans travail après son décès : Montreuil sur Maine 1555

  1. Bonjour à tous et d’abord à Odile,
    Annie Antoine dans sa thèse  » Fiefs et villages du Bas Maine au XVIIIe siècle » explique les profits générés par le système des sur-fermes : les professions qui prenant un bail à ferme rétrocèdent des métairies à des véritables agriculteurs en bail à moitié.
    Ce système, écrit-elle, a, dans d’autres régions été largement critiqué et dénoncé comme une des causes de la pauvreté rurale, puisque deux personnages au lieu d’un seul, le propriétaire et le sur-fermier, s’acharnent ainsi à retirer la rente foncière du profit du cultivateur.
    Cette thèse est-elle en ligne pour ceux qui souhaitent approfondir le sujet ? Je l’ai trouvée à Emmaüs en 2 tomes.

    1. Bonjour Françoise
      J’ai l’ouvrage, que j’avais acheté à sa parution en 1994
      hélas je viens de rechercher sur le site de l’éditeur
      http://www.editionsregionalesdelouest.com/
      et manifestement l’ouvrage est épuisé.
      c’était ISBN 2-85554-073-9

      Les 532 pages de cet ouvrage universitaire mériteraient d’être soit républiées soit mises en ebook universitaire.

      Je l’ai souvent consulté, car j’ai beaucoup de marchands fermiers dans mes ascendants, et c’était toujours dans ces familles un enrichissement, donc la terre faisait vivre 3 classes sociales et au détriment de celle de l’exploitant agricole. Ceci dit c’était surtout des gens qui savaient mettre de côté les produits de la récolte et attendre le moment opportun pour les vendre à prix élevé, et leur métier était en fait une spéculation permanente, quitte à bloquer les marchandises pour faire monter les cours.
      Je vais relire Annie Antoine pour voir si elle démontre ce point.
      Odile

      1. Bonjour à tous et réponse à Odile :
        Annie Antoine précise aussi : » Le système des sur-fermes multiplie le nombre de ceux qui peuvent profiter des satisfactions du propriétaire foncier. Ce système fonctionne en symbiose étroite avec celui du bail à moitié : d’une part parce qu’il n’est pas possible pour un propriétaire de gérer rationnellement plus de six à dix exploitations en colonie partiaire, d’autre part, parce que le partage en deux de la récolte contribue à atténuer les conséquences sur l’exploitant de la multiplication des intermédiaires. En effet, dans le cadre d’un bail à colonie partiaire, l’exploitant, quelque soit le nombre des intermédiaires qui le séparent du propriétaire de sa terre, ne donnera finalement jamais plus de la moitié de sa récolte, de telle sorte que le système n’est pas l’objet de critiques violentes… Il en résulte, ce qui pourrait apparaître paradoxal dans une région où comme ailleurs, les grands propriétaires sont absents, une proximité de l’exploitant et du personnage auquel il doit rendre des comptes dans plus de la moitié des cas. »
        Précédemment, je lis aussi : » … le bail à moitié, s’il limite l’enrichissement des agriculteurs, leur assure une sécurité qui se traduit dans les inventaires après décès par l’importance de leur outillage et la valeur de leur mobilier ainsi que par un faible endettement. »

Laisser un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *