Vente de vigne à Feneu par la dame de Montriou, 1661

Mathurin Rouger est ici dit fermier de Montriou, et c’est assez étonnant car il ne sait signer. Mais le terme Montriou peut aussi bien valoir pour la seigneurie et son château, que pour une métairie du même nom, comme nous allons le découvrir ci-dessous, extrait du Dict. du Maine-et-Loire, de C. Port, 1876 :

Montriou : château, commune de Feneu. Mons Riol 1052-1082 (2e cartulaire St Serge, p.124) – Mons Riulfi 1082-1094 (Ibid., p.115) – Mons Rionis 1082-1094 (Ib., p.132) – Morioux (Etat-Civil) – Ancien fief et seigneurie, relevant de la Roche-Joulain, dont est sieur Jamet de Beauvau 1405, – Jean Rabault, chevalier, mari de Charlotte de Beauvau, 1484, qui le 21 septembre y fondent au manoir la chapelle, alors récemment construite, « en l’honneur de Dieu, de la benoiste Vierge Marie et des Saints et Saintes du Paradis, en espécial des sainctes amyes de Dieu, les troys Maries » (G442) – Mathurin de Pincé, 1540, Jean de Brie, mari d’Etiennette de Pincé, 1552 ; – Emmanuel Brahier 1595, qui vend le 27 février à Robert Constantin, – Gabriel Constantin de Varennes en 1663, qui vend à Hercules de Launay, mari de Suzanne Leroux. Acquise peu après par demoisselle Renée Thyreau, la terre passe, par accord concly le 15 juillet 1692 entre ses nombreux héritiers, ) demoiselle Jeanne Levenier, qui fut interdite le 20 mars 1693, puis à Pierre-Gabriel Guérin, mari de Françoise Levenier. Pierre Guérin, bourgeois d’Angers, et son fils Charles la revendirent le 14 mars 1749, sous réserve d’usufruit, à leur héritier présomptif, Michel Mauvif de la Plante, mari de Renée Maugars. En dépendaient à cette date, outre l’enclos du domaine,les métairies de Montriou, Beauvais, Salvert, la closerie du Grand-Monterbault, de la Censie, du Grand-Badouelle, des vignes, des taillie. – Le tout appartient en 1770 à Pierre René Hilaire Toublanc, écuyer, conseiller en la Chambre des Comptes de Nantes, mari de Claude Renée Mauvif, dont la fille Renée épousé à Angers le 24 septembre 1781, René Pierre Cassin écuyer, trésorier des finances à Tours ; et leur héritier y réside encore.
Le manoir du XVIe siècle s’élève tout fraîchement restauré, sur le bord de la Suine, au milieu des ombrages, précédé autrefois d’un haut portail avec douves et double tourelle, qui a été abattu il y a une trentaine d’années – La place était assez forte pour qu’en 1589 les ligueurs y vinssent prendre demeure et y installer des défenses que les habitants se hâtèrent de détruite à leur sortie. Une garnison y revint pourtant en 1592. – Aujourd’hui le logis aperdu ses douves, son portail, sa cour d’enceinte et, sen se dégageant, s’est transformé par des additions nouvelles, dans le style de la construction primitive (architecte Heulin), sauf les baies qui ont gardé l’aspect moderne, l’intérieur est peuplé de curieuses toiles, pastels, paysages, portraits de famille.
La chapelle, longtemps délaissée en grange, attenait à l’habitation, reliée en équerre par un petit corps de logis, qui est supprimé. Au dessus de la petite porte domine une belle croix de pierre découpée en feuillage frisé. L’autel a été déplacé et le fond de l’oeuvre découpé en une large fenêtre flamboyante à triple meneaux trilobés, avec vitraux où ont été réunis les débris de la verrière antique, aux armoiries notamment de Meaulne et de Maillé. Mais les fresques où figuraient un remarquable portement de croix avec de longues légendres en vers, ont disparu. – Un des trois jours des Rogations, le prêtre devait y conduire la procession de Feneu, faire avec elle trois fois le tour du puits et dire la messe dans une chapelle. Le seigneur à son tour, après la messe, était tenu de faire servir à boire, en même temps que l’assistance s’écriait par trois fois Beauvau, Beauvau, Beauvau, en souvenir de la dame fondatrice du repas qui se prenait sur l’herbe « et tant comme ils seront, trois pucelles de la compaignie danceront et diront trois chansons ». – « Le 2 juillet 1781, écrit dans son registre le curé Peton, … il y a eu plus de pain et de vin qu’on en a pu manger et boire ; mais il faut se souvenir, qu’il est dû 7 boisseaux de blé, réduits en pain, et 40 pintes de vin pour les paroissiens et 3 pour le clergé. »
Berthe a conservé un dessin du château et de la chapelle avant leur restauration. Mss. 896, tII, f°55. Une lithographie en a aussi été donnée (Angers, 1864, in-8°, Barassé)

Feneu, château de Montriou, collection personelle, reproduction interdite
Feneu, château de Montriou, collection personelle, reproduction interdite

Revenons sur le fermier de Montriou, qui ne sait pas signer.

    Sait-il signer, oui ou non . En effet, parfois, surtout dans les registres paroissiaux, la plume courait un peu vite pour écrire la phrase qui ne sait signer. Et une première réponse serait qu’il sait bel et bien signer mais que le notaire a été trop vite à écrire. Enfin ceci reste une hypothèse.

    S’il ne sait pas signer, je le vois mal gérant la seigneurie de Montriou, et je dirais dans le même sens, que normalement le notaire aurait écrit fermier de la terre et seigneurie de Montriou, et j’en conclue, pour le moment, faute de mieux, qu’il est fermier de la métairie de Montriou. Ceci reste bien entendu à recouper avec d’éventuelles trouvailles sur ce personnage.

    Voir ma page sur le métier de fermier, car le terme est un faux ami.

Mais, s’il est fermier de la métairie de Montriou, ceci signifie qu’en Anjou, on pratiquait les 2 formes de bail pour l’exploitant direct :

    le bail à moitié, c’est à dire partage des fruits
    le bail à ferme, c’est à dire à prix ferme, c’est à dire à loyer

Et s’il sagissait d’un fermier de la terre et seigneurie de Montriou, il s’agirait d’un intendant, que je vois bien mal ne sachant pas écrire. Certes, il lui fallait surtout compter, mais comment tenir ses comptes avec une telle terre si on ne sait pas les noter ? C’est la raison pour laquelle j’ai exclu l’hypothèse du fermier de la terre de Montriou. Ce serait en tous cas la première fois que je vois un tel cas, peu probable…

L’acte qui suit est extrait des Archives Départementales du Maine-et-Loire, série 5E97 – Voici la retranscription intégrale : Le mardy 4 octobre 1661 après midy, par devant nous Jacques Goujon notaire de la chastelenie du Plessis Bouré a esté présente personnellement establie et deument soubzmise damoiselle Françoise Lecommandeur dame de Monriou demeurante en ce bourg d’Escuillé laquelle a vendu quitté ceddé et transporté et par ces présentes vend quitte cedde délaisse et transporte et promet garantir de tous troubles hypothèques et empeschements quelconques et en faire cesser les causes à honneste homme Mathurin Rouger fermier de Monriou et y demeurant paroisse de Feneu qui a acquis pour luy ses hoirs et ayant cause scavoir est un morceau de vigne situé au clos de vigne de Fassé contenant 3 quartiers et demy de vigne ou environ joignant d’un costé la vigne dépendant de Vinieu d’autre costé la vigne de Jullien Barré et la vigne dudit acquéreur voisin par son endroit abuté d’un bout la vigne de (blanc) Boureau demeurant à Chanteussé un fossé entre deux, et la vigne de Jacques Marchais, d’autre bout la vigne de Renée Corbin veufve de deffunt André Collas et tout ainsi que lesdites choses se poursuivent et comportent et qu’elles apartenoient à ladite venderesse à tiltre successif de ses déffuntz père et mère sans d’icelles choses faire aucune réserve, à tenir par ledit acquéreur lesdites choses du fief et seigneurie du Plessis Bourré pour l’aplacement dudit Escuillé soubz les cens rentes et debvoirs anciens et accoustumés que les parties par nous enquis suivant l’ordonnaice royal n’ont peu déclarer
lesquels cens rentes et debvoirs l’acquéreur payera à l’advenir quitte du passé jusques à ce jour

transportant et est faite la présente vendition cession délais et transport faite pour et moyennant la somme de unze vingt dix livres y compris la vendange provenue esdite icelle présente année que ledit acquéreur a prinse et eue,

    soit 230 livres vendange comprise, pour une superficie de 3,5 quartiers, faisant en Anjou 3,5 x 24,31 ares, soit 85 ares. Cette somme est élevée, et effectivement, c’est donc la vendange elle-même qui la compose, faisant sans doute 50 à 75 % des 230 livres !

laquelle somme d’unze vingtz dix livres ledit acquéreur pour ce deuement estably et soubzmis a promis et s’est obligé payer et bailler à ladite acqueresse (erreur, elle est venderesse) dans le premier jour de janvier prochainement venant sans aucun intérests jusqu’audit temps, passé lequel temps en payera intérêts à raison du dernier vingt, sans que la stipulation d’interest empesche l’action du sort principal ledit terme escheu, au payement d’icelle somme ci-dessus demeurent lesdits choses spécialement affectées et hypothéquées par privilège spécial ensemble les autres biens dudit acquéreur auquel contrat promesse obligation et ce que dessus est dit tenir sans pouvoir contrevenir obligent lesdites parties eux leurs hoirs et leurs biens mesmes ledit Rouger comme dit est a peine renonçant etc dommage etc
fait au bourg dudit Escuillé maison de ladite venderesse en présence de Me Sébastien Leroyer prêtre vicaire de ceste paroisse et Louis Poulain escuier esr de la Volterie demeurant en ceste paroisse tesmoings
ledit Rouger a dit ne scavoir signer
en vin de marché la somme de 100 sols y comprins 60 sols donnés par ledit acquéreur à ladite venderesse

Le château de Montriou reçoit de nos jours, voyez son site. La chambre d’hôte est nettement plus abordable qu’à Brissac, et en outre il a des jardins magnifiques, avec des animations tout au long de l’année !

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4 réponses sur “Vente de vigne à Feneu par la dame de Montriou, 1661

  1. Merci beaucoup;sur les registres paroissiaux aucune mention de son métier exact et il ne signe pas ,ses fils sauront signer et seront métayers,vous avez raison en précisant que tout doit étre vérifié et recoupé,le terme fermier m’avait surpris , le notaire devait avoir un vocabulaire différent …Quoiqu’il fut,un week end au Chateau pour sa descendante me parait sympathique…J’adore les jardins.
    Réponse d’Odile : donc il est exploitant agricole avec un bail à prix ferme, d’où le qualificatif de fermier de Montriou, et j’ajoute que si ses fils sont métayers, il était métayer lui même. Mais un métayer qui faisait un tout petit commerce car s’il achète la vendange, elle dépasse manifestement sa consommation personnelle, et nut doute qu’il ajoute un petit revenu avec ce petit commerce. Au fait je ne sais pas combien d’ares de vigne suffisaient autrefois à la consommation d’un foyer.
    Ceci dit, un bail à prix ferme d’une métairie était autrefois risqué pour l’exploitant, car il devait tenir compte des bonnes années mais aussi des mauvaises, alors que son loyer était fixe. Je ne suis pas agricultrice, mais à lire les journaux, on sait bien que même de nos jours, avec tous les progrès techniques, la nature n’est pas égale d’une année sur l’autre… Il avait dû avoir une bonne année 1661 et faisait un placement en prévoyance des mauvaises années éventuelles… C’était une bonne solution pour les économies car en l’abscence de banque, impossible de garder l’argent chez soi.

  2. Bonjour,

    Le conseil municipal de Chazé sur Argos élabore un site sur sa commune, qui, normalement, devrait être mis en ligne courant avril 2009.
    A ce titre, nous souhaiterions faire un lien vers votre site qui est remarquable !
    Nous tenions à vous le faire savoir et à vous en demander l’autorisation.
    Nous vous remercions par avance de l’attention que vous accorderez à notre demande.
    Dans l’attente de vous lire,
    Bonne journée
    Reponse d’Odile : Bonjour et merci de votre intérêt pour mon site. Bien sûr qu’un lien est permis et en voici la syntaxe http://www.odile-halbert.com/Paroisse/Chaze-Argos.htm
    Lorsque vous aurez mis votre site en ligne, merci de me faire signe, et de m’autoriser à votre tour à mettre sur ma page un lien vers votre site.
    Entre-temps, je vais voir si j’ai des trouvailles d’actes notariés anciens concernant votre commune, et je mettrai volontiers la retranscription et l’analyse, comme je le fais quotidiennement sur mon blog, afin que vos administrés puissent venir en discuter librement.

  3. D’aprés « le Bas Maine » René Musset,le métayage(à moitié fruit) est vraiment une association entre le propriétaire et l’exploitant,le propriétaire participe aux cultures et industries nouvelles,réussite si le propriétaire s’interesse à son bien,ce qui implique une certaine proximité;le fermage est plus répandu quand le propriètaire est à distance de son bien et s’en désintèresse ou considère sa terre comme un placement le nombre des fermages augmentera au cours du XIX e,même si c’est aléatoire au niveau des récoltes ,le paysan y gagnait en indépendance.
    Réponse d’Odile : merci. Dans les baux à moitié fruits, j’ai souvent rencontré la précision relative à la participation du propriétaire aux récoltes, et je m’étais laissé dire il y a quelques années par un professionnel de l’agriculture, que ces liens entre propriétaire et exploitant agricole dans le bail à moitié fruits tenaient aussi du fait que le propriétaire venait se rendre compte par lui même des récoltes pour surveiller sa part. Ce qui effectivement n’était possible que lorqu’il demeurait à proximité.
    Par contre, pour les aléas du bail à ferme, je reste persuadée que les exploitants apprenaient à gérer le risque en prévoyant durant les années fastes, une années moins favorable, par des petits placements comme ci-dessus, et que lors des mauvaises récoltes, les anciens propriétaires, ou autres marchands, venaient racheter ces biens fonciers. Je ne pense pas que les crises de mévente, comme celle que nous subissons, aient existé autrefois. Même le prix était plus stable.

  4. MON PERE S APELLE FRANCE RABAULT NEE A SAINT VALERY EN CAUX 76 ET J AIMERAIS SAVOIR SI NOUS SOMMES DE LA FAMILLE DE JEAN RABAULT DANS QU ELLE VILLE JE POURRAIS EFFECTUER MES RECHERCHE C EST EN VENANT A SANCERE QUE J AI DECOUVERT CE NOM SUR UNE BOUTEILLE DE VIN EN VOUS REMERCIANT C EST TRES IMPORTANT POUR NOUS RECEVEZ MES SALUTATION

      Note d’Odile : Mes recherches ne concernent pas la région dont vous parlez. Vous devez faire votre généalogie vous-même.
      Voir comment débuter en généalogie

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