Contrat d’apprentissage de boulanger, Angers

Je poursuis les contrats d’apprentissage divers, ici la papa est « homme de labeur » ce qui signifie qu’il n’est même pas closier à moitié d’une closerie, mais tout simplement journalier, ce qui est plus pauvre que le closier. Il n’empêche qu’il a sans doute réussi à économiser pour tenter d’offrir à son fils une autre vie. D’ailleurs, il paie même aussi en nature, en l’occurence avec du chanvre !

J’ai trouvé l’acte qui suit aux Archives du Maine-et-Loire, série 5E2 – Voici ma retranscription : Le mardi avant midy 10 janvier 1599 en la cour royal d’Angers endroit par devant nous Guillaume Aubry notaire d’icelle ont esté présents et presonnellement establis honorables René Langlois Me boulanger demeurant en la paroisse Saint Maurille de ceste ville d’Angers d’une part
et Mathurin Durand homme de labeur et Phillipes Durand son fils demeurant au lieu de la Roche Thibault paroisse de Jarzé d’autre part
soubzmettant respectivement eux leurs hoirs et mesme lesdits les Durands père et fils chacun d’eux seul et pour le tout sans division de personnes ne de biens confessent avoir ce jourd’huy fait et font le marché et convention qui s’ensuit
c’est à savoir que ledit Durand père a baillé et baille sondit fils en apprentissage audit Langloys et pour demeurer par ledit Durand fils en la maison dudit Langloys pour le temps de deux ans entiers à commencer dans d’huy en quinze jours prochainement venant, et à continuer et finir à pareil jour ledit temps fini et révolu
pendant lequel y apprendre ledit estat de boulanger
et à ceste fin est ledit Langloys tenu monstrer et faire apprendre ledit estat audit Durand son fils à sa possibilité et fournir de nourriture et coucher audit Durand fils selon sa qualité
et quant audit Durand fils il sera et demeure tenu travailler servir et obéir à tout ce qui dépend dudit estat de boulanger et toute autre chose honneste qu’apprentif doit et est tenu fair sans que pendant ledit temps ledit Durand fils puisse sortir ne extravaguer

    eh oui ! le verbe « EXTRAVAGUER » existe bel et bien ! seulement les dictionnaires anciens le donnent comme « penser des choses déraisonnables » alors qu’ici il est manifeste qu’il signifie « faire des choses déraisonnables »

sans le consentement dudit Langlois et où il en sortiroit sans consentement sera tenu et contraint retourner et ledit Durand père promet le ramener et obéir au présent marché à la première sommation qui luy en sera faite par ledit Langlois à peine de tous despens dommages et intérests
et est ce fait pour et moyennant la somme de 12 escuz sol vallant 36 livres tz et 8 poids de chanvre, payable par ledit Durant père audit Langlois savoir le chanvre dans la Toussaint et 6 escuz dans d’huy en ung an prochainement venant et pareillement de 6 escuz à la fin dudit marché

    le mot « poids » est orthographié « poix » le plus souvent dans les actes, mais je corrige le plus souvent l’orthographe afin de ne pas plus dérouter mes lecteurs, déjà gatés par ailleurs avec l’orthographe et les mots d’antan.
    Le Dictionnaire du Monde rural de M. Lachivier, précise qu’en Anjou, le poids de 13,25 livres (soit 6,5 kf) servait d’unité de mesure dans le commerce du chanvre. Il cite même « la disme de Béhuard était posséeée autrefois par mes précédesseurs à raison de 60 livres (monnaie) et douze poids de chanvre » (selon AD49-EII, f°315)

le tout stipulé et accepté par lesdites parties à quoy tenir etc accomplir etc dommaiges intérests etc obligent lesdites parties respectivement et mesmes lesdits Durand père et fils chacun d’eux seul et pour le tout sans division etc biens à prendre vendre etc et mesmes leurs corps à tenir prison comme pour les propres deniers et affaires du roy notre sire renonçant etc et spécialement lesdits Durands père et fils au bénéfice de division d’ordre et discusion priorité et postériorité foy jugement condemnation
fait et passé audit Angers à notre tablier en présence de Me Pierre Renou escollier étudiant en l’université d’Angers et Thierry Martin marchand tesmoins lesquelles parties ont déclaré ne savoir signer

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Embrasement d’une barge de fagots pour boulangers, Pouancé, 1543

Marc Toublanc n’est pas un notaire facile à faire. J’y relève, au mieux, les actes qui traitent du Haut-Anjou et des communes qui m’intéressent. J’ai pris l’acte qui suit car je voyais apparaître Pouancé. Or, en le retranscrivant je découvre plusieurs points intéressants.

  • André Delanoë, de Pouancé, devenu apothicaire à Angers, avant 1543
  • J’avais par le passé rencontré certains Delanoë de Pouancé montés à Angers, entre autres
    Ici, je découvre qu’André était apothicaire en 1543 à Angers, date à laquelle les apothicaires sont rares mais ce sont déjà différenciés des épiciers en 1484, par l’Ordonnance de Charles VIII « doresnavant nul espicier de nostre ville de Paris ne s’en puisse mesler du fait et vacation d’apothicaire si ledit espicier n’est lui-même apothicaire »
    Cet André Delanoë, apothicaire à Angers, sait signer, mais curieusement les 2 Delanoë de Pouancé ne signent pas, preuve que dans certaines familles tout le monde n’était sans doute pas traité sur le même plan ?

  • la barge de fagots pour boulangers
  • Je découvre le terme de barge de fagots, qui est un terme donné par M. Lachiver, qui s’applique aux fagots utiilsés par les boulangers.
    J’ignore plus cette pratique, et si les fagots étaient gratuits ou payants, mais en tout cas le fait de les avoir perdu par le feu, pose manifestement un problème tel qu’il est traité à Angers et non à Pouancé, et que 2 boulangers d’Angers ont servi à la fois de témoins et d’arbitres. Vous allez les voir à la fin de l’acte.

      Voir les noms de lieux de Pouancé, selon les aveux de 1513 et 1606
      Voir ma page sur Pouancé
      Voir ma page de cartes postales de Pouancé
    Pouancé, collection particulière, reproduction interdite
    Pouancé, collection particulière, reproduction interdite

    L’acte qui suit est extrait des Archives Départementales du Maine-et-Loire, série 5E2 – Voici la retranscription de l’acte : En la court du roy notre sire à Angers (Marc Toublanc notaire royal Angers) endroit personnellement estably sire André Delanoe marchant appoticaire demeurant en ceste ville d’Angers,
    soubzmetant etc confesse etc avoir aujourd’huy quicté et encores quicte à Jacques Delanoe paroissien de St Aulbin de Pouancé à ce présent et acceptant tous et chacuns les droictz que ledit André a et peult avoir à l’encontre dudit Jacques Delanoe pour raison de certain prétendu embrasement d’une loge et barge de fagots le tout sis et situé au lieu de la Noë paroisse dudit St Aulbin de Pouancé,

    barge : tas de fagots, de petit bois, que l’on constituait près des villes pour l’approvisionnement des boulangers – en Anjou, gros paquet de plusieurs douzaines de poignées de chanvre liées ensemble pour le rouissage – etc… (M. Lachiver, Dict. du monde rural, 1997)

    que Me Aurmel Delanoë prétend avoir esté faict par ledit Jacques Delanoë et autres
    par le moyen du transcport et cession que ledit Me Aurmel Delanoe demeurant en ladite paroisse dudit Saint Aulbin fist le jour d’hier 13 de ce mois de juin audit André Delanoe ledit transport et cession par moy Marc Toublanc notaire soubz signé ainsi que plus amplement appert et peult apparoir et ppour les causes contenues en icelle
    et est ce fait moyennant la somme de 2 escuz d’or sol sur laquelle somme ledit Jacques Delanoe a payé et baillé audit André Delanoe la somme de 45 sols tournois par devant noue et en a quicté et quicte ledit Jacques Delanoe ses hoirs et le reste, montant pareille somme de 45 sols tournois, ledit Jacques Delanoe a promis doibt est et demeure tenu payer audit André Delanoe ses hoirs dedans le jour et feste de notre Dame Angevine prochainement venant à peine de tous intérestz ces présentes néanlmoins etc
    auxquelles choses dessusdites et tout ce que dessus est dit tenir s’obligent lesdites parties chacun d’eulx seul et pour le tout et mesmes ledit Jacques Delanoe ses biens à prendre vendre etc renonczant lesdites parties etc foy jugement condemnation etc
    fait et passé en ceste ville d’Angers ès présence de René Noury et Marin Aubert boulangers tous demeurant en ceste ville
    Signé : André Delanoé, Noury, Toublanc

    Seul André Delanoë sait signer, et les 2 autres ne signent pas ! Serait-il d’une branche plus aisée que les deux autres ?

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