Dispense de consanguinité, Méral, 1769 : Pierre Brielle et Jeanne Guinoiseau

Archives du Maine-et-Loire, série G

La 4 janvier 1769, en vertu de la commission à nous adressée par monsieur le vicaire général de monseigneur l’évêque d’Angers, en datte du 23 décembre dernier, signée Houdbinne vicaire général, et plus bas Ch. Seuret, pour informer de l’empeschement qui se trouve au mariage qu’ont dessein de contracter Pierre Brielle et Jeanne Guinoiseau tous deux de la paroisse de Méral, des raisons qu’ils ont de demander dispense dudit empeschement, de l’âge desdites parties et du bien qu’elles peuvent avoir, ont comparu devant nous commissaire soussigné lesdites parties, scavoir ledit Pierre Brielle, âgé de 35 ans, et ladite Jeanne Guinoiseau, âgée de 31 ans, accompagnés de Pierre Brielle père dudit Pierre Brielle, père dudit Pierre Brielle, de Michel Boisramé son beau-frère, de Jacques Guinoiseau père de ladite Jeanne Guinoiseau, de Louis Chartier son oncle par alliance, tous demeurans dans la paroisse dudit Méral, qui ont dit bien connaître lesdites parties, et serment pris séparément des uns et des autres de nous déclarer la vérité sur les faits dont ils seront enquis, sur le rapport qu’ils nous ont fait et les éclaircissements qu’ils nous ont donné nous avons dressé l’arbre généalogique qui suit :

de René Guinoiseau sont issus :

  • Jacques Guinoiseau – 1er degré – Anne Guinoiseau femme de René Brielle
  • Jacques Guinoiseau – 2e degré – Pierre Brielle
  • Jacques Guinoiseau – 3e degré – Pierre Brielle qui veut épouse Jeanne Guinoiseau
  • Jeanne Guinoiseau du mariage de laquelle il s’agit – 4e degré

    Nous avons trouvé qu’il y a un empeschement de consanguinité du quatrième au troisième degré entre ladite Jeanne Guinoiseau et ledit Pierre Brielle, ou ce qui revient au mesme du troisiesme au quatrième degré entre ledit Pierre Brielle et ladite Jeanne Guinoiseau. (on n’est jamais trop précis !!!)
    A l’égard des causes ou raisons qu’ils ont de demander la dispense dudit empeschement, ils nous ont déclaré que ladite Jeanne Guinoiseau est fille et âgée de 31 ans, sans avoir trouvé d’autre parti qui luy convient, ayant été seulement demandée il y a environ deux ans par un parent proche et qui ne luy convenait point, et que ledit Pierre Brielle, quoique son parent, luy convient à tous égards, que quoique ladite paroisse de Méral soit étendue, cependant les habitans sont presque tous parents ou alliés par les mariages qui de tous temps se sont contractés entre parents, nos seigneurs évêques ayant octroyé bien souvent de pareilles dispenses que les habitants de cette paroisse sont bien unis ensemble, qu’ils ont peine à parer à des mariages étrangers, que ce peuple naturellement timide, éloigné de ville, et habitans les bords de la Bretagne, et n’aime pas le caractère Breton, ne peut se résoudre à contracter mariage avec les Bretons, ce fait est constant, qu’il est rare de voir les habitans de cette paroisse contracter mariage avec leurs voisins, que si ladite Guinoiseau ne se marie avec ledit Brielle il y a lieu de craindre qu’elle ne trouvera point un party qui luy convienne si bien que celui qui se présente et ladite Guinoiseau demeurant avec une belle-mère depuis des années, elle désire recevoir un établissement qu’enfin ledit Brielle ayant demandé en mariage une fille qu’il n’a pu avoir et était âgé de 35 ans il désire épouse celle qui se présente.
    Et comme leur bien ne monte qu’à la somme de 700 livres en fond meubles marchandise et inventaire, ledit Brielle n’ayant aucun bien de fond, mais seulement 500 livres en meubles, bestiaux et marchandises, demeurant chez son père métayer et ayant 4 enfants et qui a déclaré appartenir du côté de leur mère déffunte en meubles, bestiaux et marchandises, 2 000 livres, en conséquence 500 L chacun, mais n’ayant point fait d’inventaire cette portion pourrait bien dans peu diminuer eu égard au malheur des temps, et ladite Guinoiseau n’ayant que 90 livres d’inventaire, comme il parait par l’acte qui en a été fait par devant notaire et qu’on nous a communiqué, et en bien de fond 14 livres sur lesquelles sont à diminuer les deniers royaux et les réparations ordinaires, lequelles parties n’ont point d’autre recours pour se soutenir dans un temps où les taux et autres impositions sont si onéreux, que la force de leur bras, et en conséquence ils se trouvent hors d’état d’envoyer en cour de Romme pour obtenir la dispense dudit empeschement ce qui nous a été certifié par lesdits témoins cy-dessus dénommés et qui ont déclaré ne scavoir signer fors ledit Jacques Guinoiseau père de ladite Jeanne Guinoiseau, fait dans la salle du presbitaire dudit Méral Signé : Guinoiseau

    Merveilleux n’est-ce pas ! Il semblerait que Mr le curé de Méral en rajoute un peu sur les Bretons…
    Car, je connais bien Méral pour l’avoir dépouillé autrefois. Tous les Mératais (il paraît qu’ils ne sont pas Méralais) n’ont pas eu une telle horreur des Bretons, la preuve, je descends des Goussé, des Marchandye, des Maugars, des Hunault, qui ont bougé, contrairement à ce raconte le curé de Méral en 1769. Il est vrai que c’était 150 ans avant !

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    Dispense d’affinité, Méral (Mayenne) 1757 : Thomas Leconte et Jeanne Marcillé

    Archives Départementales du Maine-et-Loire, série G

    Il y a affinité, lorqu’un veuf (ou une veuve) avait son conjoint décédé apparenté à cellle (celui) qu’il recherche en mariage. On a toujours des détails intéressants, même s’il faut tempérer :

  • ils disent toujours qu’ils ne savaient pas, en effet, difficile d’imaginer de se fréquenter en commençant par établir un arbre généalogique !!! Par la suite, il y avait toujours une langue assez bien pendue pour dénicher la chose et en parler au curé, si ce n’est lui qui vérifiait pour que le mariage ne soit pas annulé par la suite pour non conformité.
  • leur généalogie est orale, et peut être erronée, car de vous à moi, quand on n’a pas connu ses grands parents, ce qui est le cas le plus fréquent, difficile de s’en souvenir…
  • pour ne pas payer, ils peuvent en dissimuler un peu, même sous serment… enfin cela donne un ordre de grandeur. Dans le cas ci-dessous, pauvres (enfin très peu aisés). S’ils sont aisés, ils ont de quoi payer les frais en Cour de Rome, et ils ont droit (façon de parler) à la procédure lourde. Pour les pauvres, on règle généralement le problème au niveau de l’évêché, enfin, surtout dans un cas aussi léger que celui qui suit.
  • le cas ci-dessous évoque un enfant difficile, qui nous laisse sur notre faim… Serait-ce un enfant handicapé ?
  • enfin, ils disent toujours qu’on ne peut plus faire marche arrière car l’honneur de la fille est perdu. C’est un argument qui marche bien… donc on l’avance toujours, qu’on ait ou non couché ensemble. Ce qui signifie qu’on ne peut en tirer aucune conclusion hâtive.
  • Le 25 juillet 1757, en vertu de la commission à nous adressée par Monsieur le vicaire général de Monseigneur l’évêque d’Angers an date du 8 du présent mois de juillet 1757, signé Lepresle, vicaire général, et plus bas, par Monseigneur Jubeau secrétaire, pour informer de l’empêchement qui se trouve au mariage qu’on dessein de contracter Thomas Leconte maçon de la paroisse de Méral, veuf de Renée Fournier, et Jeanne Marcillé, fille de la même paroisse, des raisons qu’ils ont de demander dispense dudit empêchement, de l’âge desdites parties, et du bien précisément qu’elles peuvent avoir, ont comparu devant nous commissaire soussigné, lesdites parties, scavoir ledit Thomas Leconte âgé de 35 ans et ladite Jeanne Marcillé âgée de 31 ans, accompagnés de Renée Theard veufve de René Marcillé, mère de ladite Jeanne Marcillé, demeurante à Chantepie paroisse de Méral, de François Sommier son cousin demeurant paroisse de Saint Poix, de Jacquine Fournier veufve René Buhigné demeurante aux Planches à Méral, de Jeanne Fournier femme de Jean Monternau, closier à la Touche des Landes aussi en Méral. Lesdites deux Fournier sœurs de deffunte Renée Fournier, première femme dudit Thomas Leconte, tous lesquels thémoins ont dit bien connoître lesdites parties, et serment pris séparément des uns et des autres, de nous déclarer la vérité sur les faits dont ils seront enquis, sur le raport qu’ils nous ont fait, et les éclaircissements qu’ils nous ont donné, nous avons dressé l’arbre généalogique qui suit :

    de Jean Pierre et Renée Gaudin, souche commune, sont issus : (dur dur de faire un tableau au forma WIKI dans un blog, aussi visualisez bien gauche-droite les deux lignées)

  • Jean Pierre | 1er degré | Renée Pierre mariée à René Theard
  • Jean Pierre | 2e degré | René Theard
  • Renée Pierre mariée à Jean Fournier | 3e degré | Renée Theard mariée à René Marcillé
  • Renée Fournier première femme de Thomas Leconte | 4e degré | Jeanne Marcillé qui veut épouser Thomas Leconte
  • Ainsi, nous avons trouvé qu’il y a un empêchement d’affinité du 1 au 4e degré entre ledit Thomas Leconte et ladite Jeanne Marcillé ;
    à l’égard des causes ou raisons qu’ils ont pour demander la dispense dudit empêchement, ils nous ont déclaré que ladite Jeanne Marcillé est fille et âgée de 31 ans, sans avoir trouvé d’autre parti qui luy convient,
    que ledit Thomas Leconte est veuf et chargé d’un enfant difficile à élever et qu’étant tous les jours absent de sa maison à cause de son métier, il a besoin d’épouser ladite Jeanne Marcillé pour l’éducation et la garde de son enfant et pour le bien de ses affaires, que depuis environ 5 mois ils se sont recherchés de bonne foy pour le mariage sans qu’ils seussent (attention, participe du verbe savoir) qu’il y eut affinité entre eux,
    et que depuis quelques mois ils se sont vus avec tant de familiarité que le public en a été scandalisé au point même que s’ils ne se marient ensemble, il y a lieu de craindre et grande apparence que ladite Jeanne Marcillé ne trouvera point à qui se marier.
    Et comme leur bien ne monte qu’à la somme d’environ 200 livres en meubles, hardes ou marchandises, sans aucun bien de fond, ledit Leconte n’ayant qu’environ 50 écus (soit 150 livres) en meubles et hardes et ladite Marcillé n’ayant guère qu’environ 50 livres, ils se trouvent hors d’état d’envoyer en Cour de Rome, pour obtenir la dispense dudit empêchement,
    ce qui nous a été certifié véritable par lesdits thémoins dénommés de l’autre part qui nous ont déclaré ne scavoir signer fors ledit Leconte et ledit Sommier de ce ensuis,
    fait et dressé ledit procès verbal lesdits jour et an 25 juillet 1757 en notre maison presbitérale de Saint Poix. Signé F. Sommier, Thomas Leconte, Jarry curé de St Poix

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    Les sommations respectueuses : pour avoir de ses parents l’autorisation de se marier, même après la majorité (25 ans)

    Pour se marier, il faut l’accord parental, même après la majorité, laquelle est pourtant à 25 ans, ce qui est beaucoup, d’autant que la vie est courte jusqu’en 1880. Pour mémoire, en 1880, l’’espérance de vie à la naissance, autrement dit l’âge moyen au décès, était de 40,8 ans pour les hommes, 46,4 pour les femmes.
    S’il faut leur accord, c’est que leur présence et don en avancement d’hoir est obligatoire au contrat de mariage.
    On essuie parfois un refus. Eh oui, cela arrivait ! Vous avez l’un de ces refus dans la famille des Lemanceau de Champteussé sur Baconne. La mère (Françoise Loyseau veuve de Pierre Manceau) ne fit donc aucun contrat de mariage et aucun avancement d’hoir à sa fille, Catherine Lemanceau, 27 ans, qui veut épouser Jacques Lemesle ! Mais, après les 3 sommations respectueuses obligatoires et ses 3 refus devant notaire, elle fait un autre acte devant notaire, autorisant le curé à marier sa fille, mais précisant bien qu’elle n’entend faire aucun avancement de droit successif.

    En cas de refus (3 fois, ce nombre est obligatoire, c’est pour cela qu’on a toujours le pluriel à Sommations respectueuses) cela n’est pas rien, même majeur. Il faut aller voir tous les proches, pour tenter de les mettre de son côté, et de faire pression si possible sur le parent peu coopératif. Si le refus est toujours là, il faut demander au notaire d’assister physiquement à la demande d’autorisation, en la demeure du parent refusant, en compagnie de tous les parents favorables qui tentent encore de convaincre le refusant. Puis le notaire devait enregistrer le refus dans un acte, signé de deux témoins.

    Voici le mécanisme, expliqué par l’Encyclopédie de Diderot :

    SOMMATION RESPECTUEUSE : acte fait par deux notaires, ou par un notaire en présence de deux témoins, par lequel, au nom d’un enfant, ils requierent ses père & mère, ou l’un d’eux, de consentir au mariage de cet enfant. On appelle ces sortes de sommations, respectueuses, parce qu’elles doivent être faites avec décence, & sans appareil de justice ; c’est pourquoi l’on y emploie le ministere des notaires, & non celui des huissiers.
    Ces sommations ne peuvent être faites qu’en vertu d’une permission du juge, laquelle s’accorde sur requête, l’objet de ces sommations de la part de l’enfant, est de se mettre à couvert de l’exhérédation que ses pere & mere pourroient prononcer contre lui, s’il se marioit sans leur consentement.
    Mais pour que ces sommations produisent cet effet, il faut que l’enfant soit en âge de les faire, & qu’il ait trente ans, si c’est un garçon, ou vingt-cinq ans, si c’est une fille.
    L’enfant qui consent de courir les risques de l’exhérédation, peut se marier à 25 ans, sans requérir le consentement de ses pere & mere. Voyez l’arrêt de réglement, du 27 Juillet 1692, au journal des audiences.

    Ce dernier paragraphe, conjugué à tout ce que j’ai mis sur l’exhérédation sur mon site, explique tout. En effet, autrefois la dot, ou avancement de droit successif, était obligatoirement versée par les parents (lorsque l’un ou les deux vivent) lors du contrat de mariage. Dès lors, on comprend mieux que certains parents aient hésité à donner leur bien à quelqu’un qui ne leur revenait pas ! enfin, c’est ainsi que je vois les choses… Pas vous ?

    Et soyons réaliste jusqu’au bout. Si on trouve si peu de sommations respectueuses, c’est que la plupart du temps les jeunes gens en âge de se marier avaient déjà perdu leurs parents et hérité, et étaient libérés de curatelle après 25 ans, donc libres de se marier sans toutes ces formalités.

    Voici le dernier refus que j’ai relevé, qui ne me concerne en rien, mais illustre le mode de vie d’antant. Elle a 27 ans, et mis un oncle dans sa poche, mais rien n’y fait :

    Le 20 juin 1654 après midy, en présence de nous Jean Chedran, notaire royal à Angers et des témoins cy-après nommez honorable fille Agathe Boivin demeurant en cette ville paroisse St Pierre s’est transportée vers la personne d’honnorable homme René Boivin Me orphèvre en cette ville, son père, trouvé en sa maison située rue St Laud de cette ville dite paroisse St Pierre, auquel parlant ladite Agathe Boivin sa fille a dit estre âgée de 27 ans ou plus, avoir tousjours témoigné le respect et honneur qu’elle doibt à sondit père, lequel a eu agréable la recherche que Me Arnault marchand faict de sa personne et tous ses parents, a humblement supplié et requis ledit Sr Boivin son père de consentir au mariage dudit Marchand avecq elle et en passer contract, déclarant que son refus sans en rien le départir du respect et honneur qu’elle luy doibt, elle jouit des droits et privilèges de l’ordonnance au sujet dudit mariage, et à ce que dessus a aussy esté à ce présent honnorable homme François Cochon marchand demeurant en cette ville oncle de ladite Agathe Boivin, qui a prié et supplié ledit sieur Boivin son beau-frère de consentir audit mariage et que tous les autres proches parans de ladite Agathe Boivin en sont d’advis, ledit Boivin a dit ne vouloir… (AD49)

    Vous avez noté le terme respect à plusieurs reprises. Par contre, dans ce refus, je n’ai pas compris pourquoi le père refusant est dit avoir toujours eu pour agréable la recherche … ce qui signifierait (si j’ai bien compris) que le père n’est pas défavorable au mariage de sa fille, mais bien qu’il n’a pas envie de payer de dot.

    Et demain, je vous donne des dispenses de consanguinité en Haut-Anjou. Mais rassurez-vous, il y a des provinces où tout était plus rapide, car dans ma branche Bretonne (Merdrignac et Ménéac) j’ai une quantité très impressionnante de filles mariées à 15 voire 13 ans, et tout le monde était d’accord.
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    Compte de tutelle d’Etienne et Pierre Gardais, 1651, Brain-sur-Longuenée

    Article 469 du Code Civil Napoléon, 1807, qui reprenait en cela la plupart des droits coutumiers de l’ancien régime.

    « Tout tuteur est comptable de sa gestion lorqu’elle finit.»

    Les conseils de famille pour nommer un curateur sont rares dans les actes notariés en Maine-et-Loire, et difficiles à trouver en allant à la pêche à la ligne (seule méthode que je connaisse). On trouve presque plus souvent le compte de tutelle, véritable tranche de vie. Comme la majorité n’était qu’à 25 ans (nous y reviendrons longuement), il arrive même que le mariage du mineur ait eu lieu avant, ce qui ne terminait aucunement la tutelle.

    C’est le cas qui suit :
    Le 7 février 1651, devant Garnier notaire royal à Angers (AD49), compte que Constantin Levoyer curateur es causes de Estienne et Pierre les Gardays, rend audit Estienne Gardaye.

    Et premier à charge de la somme de 300 L par ledit Levoyer reçue de Me Françoys Poifelon prêtre de Brain-sur-Longuenée pour la vendition à luy faite d’un logis et jardin situé au Bourg de Brain-sur-Longuenée, que ledit Levoyer luy auroit vendu en conséquence du jugement donné au siège présidial d’Angers par contrat passé par devant Me Louis Seard Nre de la Roche-d’Iré, en déduction de laquelle somme iceluy Levoyer aurait payé savoir (eh oui ! le tuteur a eu besoin d’argent pour payer les frais et il a vendu la maison. On apprend aussi qu’elle était à Brain. C’est important car Estienne Gardais est marié et vit maintenant à Bescon)

    à la veuve Guymier veuve de †Jacque Valuche 30 L de principal et 8 L 17 s 6 d qui lui étaient due par le défunt Pierre Gardays et Renée Lejendre leur père et mère comme appert par acquit étant au pied de la minute dudit contrat. (et voici le nom du père et celui de la mère)

    plus payé à Marie Lepage veuve de Pierre Joncheray 15 L qui lui était deuz par ledit deffunt

    à Mr de la Fosse curé de Brain pour des services qu’il aurait fait et fait faire pour lesdits deffunts la somme de 15 L (les frais d’enterrement sont toujours dus par les héritiers, cela n’a pas changé)

    à Jehanne Segretain de Brain 15 s

    à Guillaume Segretain couvreur d’ardoise 15 L 10 s que lesdits deffunts lui devaient par obligation passée par devant Garnier Nre royal Angers le 8 août 1642

    à monsieur Seard demeurant à Brain la somme de 49 L 10 s 6 d de principal et 58 s d’intérêts que ledit Gardaye deffunct lui debvoit comme apert par obligation passée devant Jean Godivier le 17 février 1642
    audit Seard pour un quart de sel que lesdits deffunctz luy debvaient comme collecteur du sel de l’année 1641 la somme de 23 s 2 d (on hérite des dettes, même les impôts impayés)

    à moy Levoyer la somme de 19 L que j’ai retenu par mes mains que ladite deffuncte Gardaye me debvait comme apert par obligation passé par Godivier le 18 mars 1644

    plus, m’était deub 23 s 7 d par ladite deffuncte Gardaye comme collecteur du sel de l’année 1646 pour un quart de sel en quoy elle estait taxée (en tout cas les parents vivaient encore en 1646, c’est toujours une donnée importante en généalogie)

    plus, payé audit Godivier pour dépens qui fut faite lors que lesdits deffuncts furent enterrés la somme de 50 s (encore les frais d’enterrement !)

    plus payé audit Godivier sergent royal 40 s pour avoir donné les exploits aux parents desdits Gardaye pour la provision de curatelle
    plus payé 10 s au fossoyeur de Brain qui avait fait la fosse pour ensépulturer ladite deffunte Gardaye (toujours les frais d’enterrement)

    plus payé à Mr le lieutenant général et au greffe 100 s pour la provision de curatelle

    plus payé à un métayer de monsieur de Molière 8 L que lesdits deffunctz luy debvoient par obligation

    plus m’a coûté 75 s pour défendre à un procès contre le curé de Cantenay

    plus payé 26 s à monsieur Seard pour dépense que fit ledit Estienne Gardaye avec le nommé Brillet lorsqu’ils allèrent consulter chez Me Valtère à Feudonnet, lesdits Gardaye et Brillet seroist héritiers de la deffuncte Jardin (alors là, on rêve. En effet autrefois cela n’était pas une synécure de trouver les héritiers, encore plus de savoir si un parent dont on pouvait hériter était décédé. Je reviendrai longuement là-dessus, mais notez bien déjà la difficulté pour tout un chacun de s’informer valablement)

    plus payé à Me Valtère 20 s pour faire consulter lesdits héritiers de ladite Jardin

    plus payé à Mr le lieutenant de la Provosté 20 s pour nous donner son advis pour le mesme subject (bigre, jusqu’où va la difficulté à se prétendre héritier. Néanmoins, on reste sur notre faim.)

    Somme toute de debvoirs pour lesdits Gardais 203 L 14 s 2 d compris les 19 L qui m’estoient deubz au moyen de quoy reste à payer par ledit Levoyer la somme de 96 L 5 s 10 d

    Le 10 février 1651 avant midy devant nous notaire royal Angers soubsigné fut présent ledit Estienne Gardais demeurant au bourg de Bescon, lequel a confessé avoir eu et receu avant ce jour d’huy dudit Levoyer à ce présent la somme de 48 L 2 s 11 d tournois qui luy estoient deubz pour sa part du reste de la vendition de ladite maison et jardin mentionné au contrat passé par ledit Seard daté au compte de l’autre part, par le moyen du poyement de ladite somme dont il se contente il a déclaré l’avoir agréable dabondant ledit contrat et le ratiffie en temps que beoin est et tous les poyements faictz par ledict Levoyer pour ce qu’il na le tout faict que à sa prière et requeste par son advis et de son consentement et a ledict Levoyer aussi déclaré qu’il ne demande rien auxdits les Gardais de ses voyages et vacations par luy faictz à ladite curatelle (rassurez-vous, il n’en a pas besoin pour vivre), et a l’entendement des présentes obligent les partyes leurs hoirs et leurs biens …. promet ledit Gardais faire ratifier ledit contrat et ces présentes à Perrine Galichet sa femme … fait et passé à Angers en nostre trabler présent Estienne Yvard et Jean Bourgeois clercs demeurant Angers tesmoings, et ledit Gardais a dit ne savoir signer.

    Quand je vous parle de pêche à la ligne dans les notaires, vous avez bien remarqué que le notaire est à Angers, alors que tous ces braves vivent à Brain et Bescon, et qu’il y a des notaires plus proches d’eux. Donc ce document est le fruit de mes longues patientes recherches.
    Enfin, je précise que je ne descends pas de ces Gardais, enfin, je l’ignore, car je suis bloquée à Vern sur un Pierre Gardais. Aussi je note toujours tous les Gardais, dans l’espoir qu’un jour le puzzle parlera.

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    Droit de bâtardise, avant et après la Révolution

    En droit féodal, la succession des enfants naturels, décédés sans héritiers, est recueillie

    par le seigneur haut justicier, qui est souvent le roi. C’est le droit de « bâtardise ». (Diderot, Encyclopédie – Lucien Bély, Dictionnaire de l’Ancien Régime, PUF, 1996)
    Après la révolution « à défaut de conjoint survivant, la succession est acquise à la république » (Article 768, Code civil des français (en ligne en mode texte marqué T sur Gallica).

    Donc, rien de changé : on a supprimé les seigneurs hauts justiciers, et remplacé le roi par la république.

    En 1878, « si l’enfant naturel n’a rien reçu de son père et qu’il ne laisse ni descendants ni frères ni sœurs naturels, le conjoint survivant, à son défaut l’Etat, sont préférés aux frères et sœurs légitimes » (Allard, J.-L. Des enfants naturels : reconnaissances, adoptions, successions…, 1878, sur Gallica)

    Depuis, il n’existe que des enfants reconnus, ou pas. Un enfant reconnu, n’est pas toujours alimenté par le père, qui réapparaît parfois en fin de vie, se souvenant brusquement de l’existence d’un enfant pour réclamer un droit alimentaire, quand ce n’est pas tout bonnement l’administration qui exerce ce droit. J’ai eu connaissance de tels faits au 20e siècle… Je ne suis pas certaine qu’ils aient disparu.

    Ce soir sur la 3 à 20h50 l’émission télévisée « Jeunes, seules, sans travail et déjà mères. » Il n’est pas certain que nous soyons allé vers un progrès dans tous les cas.

    Revenons aux bâtards d’autrefois.
    Il était BCBG (bon chic bon genre) dans la noblesse d’avoir une maîtresse et des bâtards, et ceci fut parfois imité dans la haute bourgeoisie. En 1598, Henri IV est reçu en grande pompe par la ville de Nantes, lors du fameux Edit. Or, il est accompagné de la belle Gabrielle qui vient de mettre au monde à Angers leur fils immédiatement marié par Ct Dvt Guillot Nre à Angers par son père, et largement doté. Le corps de ville de Nantes accueille sans sourciller le couple et offre même à Gabrielle des présents dignent de son rang. La reine est à l’ombre, ailleurs…et surtout pas de la partie.

    Enfin, autrefois y avait 3 types de bâtards :

  • ceux qui furent dotés (correctement) par leur père naturel, le plus souvent issu d’un milieu aisé. Les dotations (quand elles existent) sont dans les actes notariés, aussi en série 1B
  • ceux qui ne le furent pas, et connurent une vie dure. Souvent c’était le maître qui avait engrossé une servante. Et par maître, comprenez aussi bien le métayer ou le closier, car ils avaient eux aussi servante, surtout les métayers plus aisés. Cela n’est pas réservé aux notables.
  • et enfin, ne les oublions pas, ceux issus d’une mère d’un milieu aisé, mais ce qui était toléré chez les hommes ne l’était pas chez les femmes…
  • On ne peut donc faire aucune généralisation sur le terme bâtard, mais je veux ici rendre hommage à tous ceux qui furent en catégories 2 et 3, et connurent souvent le pire. Je souhaite cantonner ce blog aux petits, pas aux grands que l’Histoire a beaucoup gratifiés de mémoire.

    Mais au fait, avez-vous trouvé quel acte notarié était le premier dans la vie ? Pour le savoir demain, voici un indice. Ce contrat existe toujours, mais n’est plus chez le notaire. Il est fréquent en Allemagne (entre autres) beaucoup moins en France.

    Enfin, j’ai étudié toute l’histoire d’un bâtard de la catégorie 1, décédé sans héritiers (voir le début de ce billet) et la suite est piquante… Voulez-vous un jour cette histoire vraie… ?

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    Mariage illégitime et enfants illégitimes

    , suite du billet d’hier.
    Avec exercice de paléographie.

    Parfois, le père, reconnaissait l’enfant dans son testament, mettant sans doute sa conscience en paix avant de paraître devant Dieu. Parfois, l’enfant est reconnu lors du mariage, même, s’il avait été déposé à sa naissance sans mention du nom de la mère. Nous possédons un acte notarié de cette nature, dont le nom restera du domaine de la vie privée…

    Le mariage aussi pouvait être décrété illégitime en cas de consanguinité découverte après coup, probablement par dénonciation…, entraînant les enfants issus de ce mariage dans l’illégitimité. Cette règle fut organisée au 4e siècle.
    Elle a été étudiée par Jack Goody dans son ouvrage l’évolution de la famille et du mariage en Europe, Armand Colin, 1985, préface de Georges Duby. Voici le résumé :

    Stimulés par les ethnologues et les démographes, les historiens depuis vingt ans se sont mis à scruter l’histoire des réalités familiales en Europe. Jack Goody refuse les idées reçues. Guidé par son expérience d’anthropologue acquise en Afrique, il entreprend d’interroger sur la longue durée les modèles de parenté, soucieux notamment d’expliquer les différences qui ont clivé le bassin méditerranéen au IV » » siècle. Il souligne ainsi le rôle déterminant joué par l’Église dans l’Occident médiéval.
    Secte minoritaire, elle devient alors une organisation dont les intérêts exigent qu’elle constitue et défende un patrimoine elle va ainsi construire un système de règles où sont proscrites des pratiques telles que l’adoption, le divorce, le concubinage, les unions entre proches. Prenant en main les institutions du mariage, des donations et de l’héritage, elle favorise la mobilité de la terre, son aliénation, donc sa dévolution éventuelle à l’Église, et l’accumulation du capital entre ses mains. Le mariage sur consentement mutuel, la liberté de tester, les préceptes de la morale conjugale qu’elle impose assurent son pouvoir spirituel mais aussi temporel, celui du plus grand seigneur foncier.
    Traduit d’un ouvrage tout récent, cet essai « remarquable et dérangeant « , selon Georges Duby, fournira aux historiens et aux anthropologues un cadre rigoureux de réflexion et il séduira par l’originalité de ses perspectives le public des non spécialistes désireux de mieux connaître l’évolution de nos structures familiales.
    Jack Goody, ancien directeur du département d’anthropologie de l’université de Cambridge et récemment chargé d’enseignement à l’École des hautes études en sciences sociales, est mondialement connu pour ses recherches africanistes et son effort pour concevoir les modèles familiaux dans leur complexité et leur universalité.


    Cet arbre de consanguinité, dressé au 11e siècle, est l’une des multiples représentations de la consanguinité à l’époque.
    L’actualité veut qu’un Colloque international ait lieu les 24-26 janvier 2008 à l’ENSSIB École nationale supérieure des sciences de l’information et des bibliothèques Écritures : sur les traces de Jack Goody autre aspect de son œuvre.

    Ainsi, la préservation du patrimoine a fixé des règles. C’est ce que je viens de redécouvrir en préparant ce billet et surtout à la lumière d’un acte notarié que j’ai récemment lu et qui m’a refait voir les dispenses de consanguinité aussi sous cet angle, ce qui m’avait jusqu’à présent totalement échappé. Le voici :

    Pour progresser en paléographie, retranscrivez vous-même ce passage. Vous avez un zoom de cette vue pour mieux la retranscrire.

    Le 6 mai 1573, Julienne Bonvoisin, veuve de †Jean Colin juge magistrat à Angers, fille de Jehan Bonvoisin Sr de la Riveraye et de Jacquette Leconte, fait une demande à monsieur l’official, expéditeur des demandes de consanguinité, afin d’obtenir une dipsense de consanguinité du 3° au 4°degré avec Jehan Bonneau, en vue de mariage.

      « desdites parties tel ne se pourra condamner le
      mariage qu’il y a entre ledit Bonneau et
      Julienne Bonvoisin et quant auxdits constituants
      ils ont voulu et consenty, veulent et consentent
      ledit mariage et que les enfants qui
      proviendront du mariage soyent déclarés
      légitimes et habiles à succéder et desrogeant
      comme dès lors et dès lors comme dès à présent tiennent
      lesdits enfants qui proviendront dudit mariage légitimes
      et habiles à succéder tout ainsi que si lesdits
      Bonneau et Julienne Bonvoisin ne se touschayent
      d’aucune consanguinité et à l’entrement de tout »

    Cet acte qui vient de me faire prendre conscience de l’importance autrefois de la transmission du patrimoine. Je n’avais pas vu la consanguinité sous cet angle jusqu’à présent. Demain nous voyons la succession des bâtards, puis nous verrons le premier acte notarié rencontré au cours d’une vie. A votre avis, quel acte rencontrait-on d’abord au cours de sa vie ? Et avez-vous le temps ce WE de répondre à mon jeu paléographie d’hier.

    Odile Halbert – Reproduction interdite sur autre endroit d’Internet Merci d’en discuter sur ce blog et non aller en discuter dans mon dos sur un forum ou autre blog.