Introduction
Née en 1938 j’ai beaucoup de souvenirs de la guerre. Souvent ce sont des images gravées dans ma mémoire, et je viens vous livrer une image qui me hante toujours quand j’entends les nouvelles, de Gaza et autres lieux de guerre affamante…
rue Saint Michel à Guérande en 1944
Au premier étage de la maison Fagault à l’angle de la Saint-Michel et la rue de la Juiverie, c’était les Allemands, et nous vivions tous au second. Pour mémoire, la poche était une zone où les Allemands s’étaient retirés, et les alliés tentaient de les affamer tandis que les civils Français de cette zone subissaient le manque de nourriture, d’où ensuite l’extraction de civils et les trains de libération dont je vous ai parlé.
La maison Fagault était une épicerie quincaillerie en gros et disposait d’entrepôts derrière la maison, de personnel, environ une vingtaine. Ma maman avait alors 5 enfants dont j’étais l’aînée, et face au manque de nourriture, elle fut généreusement assistée du personnel, trouvant ça et là du lait, des biscuits, et même cette viande dont je viens vous parler…
l’immense boîte de biscuits
Couleur métal brut, sans décors, elle mesurait au moins 30 x 30 cm cubique, et contenait certainement 4 à 5 kg de biscuits. Je viens ce jour de demander à l’IA cette boîte, mais malheureusement l’IA a oublié et ne connaît plus que les petites boîtes métaliques fantaisies joliement décorées qui n’ont strictement rien à voir avec la tine de guerre. Donc, je me souviens avoir mangé des biscuits. C’étaient des biscuits secs sans chocolat ou autre douceur et ma mémoire ne peut dire s’ils étaient LU ou BN. Certes la Biscuiterie Nantaise était autorisée pour livrer en particulier les écoles … , mais il est probable que c’étaient LU, car je me souviens fort bien avoir pris le temps de compter les dents de chaque côté donc c’étaient des Petit Beurre LU. C’était merveilleux de manger ces biscuits ! D’ailleurs les adultes ne manquaient pas de nous signaler que c’était exceptionnel !!! et que nous devions nous réjouir de les manger !
madame de la viande !
J’étais sur le pallier du second quand cela s’est passé, et j’ai bien vu cette femme monter tenant à la main droite une immense queue et au bout un animal pendait.
Arrivée sur le pallier, elle se mit à hurler, sur le mode « cris de joie » :
Madame de la viande !
L’image de ce rat est restée gravée en moi ! C’était aussi gros pour moi qu’un lapin et pas du tout la taille d’une souris ! Bref, un animal impressionnant !
A la mémoire de ce rat de mon enfance, et surtout de ma maman qui fit face cette année là à si peu de nourriture pour élever 5 enfants si petits !