de la graine au fil
Le lin et le chanvre sont cultivés en Haut Anjou au 17e et 18e siècles. Le lin occupe alors 1 500 ha en Craonnais (1) puis disparaît début 19e face au coton.
Ils procurent à tous des compléments de revenus, ce qui expliquerait un émigration moins élevée qu'ailleurs (2). Jocelyne Dloussky explique qui a étudié les mécanismes commerciaux à Laval, ajoute que la filière artisanale et commerciale de l'arrière pays et du Haut-Anjou reste à étudier (2). Le fil est vendu aux tisserands sur les foires de Craon, Château-Gontier (Haut-Anjou), Laval et Mayenne (Maine). La filière fait parfois l'objet de règlements de police (3), car la qualité souffre de tentatives de mal-façon.
Les métiers et occupations derivés du lin et du chanvre se retrouvent dans les rôles de taille et les inventaires après décès. Mais, j'y observe cusieusement que la quasi totalité de la population touche au fil, même lorsque le métier est fort différent, et même à l'abri du besoin.
Le lin est roui dans l'eau par macération plusieurs semaines, non sans certaines odeurs nauséabondes. Puis il est sécher et brayer (broyer). Ces travaux sont effectués par les closiers et métayers. Les fibres brayées sont mises en paquets (poupées) par les poupeliers, puis filées par les fileuses. Selon les inventaires après décès de ce site, il semble que beaucoup plus de femmes que celles dites fileuses aient participé au filage, car braye et rouet sont quasiement dans toutes les maisons.
Le fil est ensuite traité par le filassier, qui lave, blanchit, normalement à la lessive, c'est à dire à l'eau avec des cendres.  Haut de page
 
marchand de fil   
Le marchands de fil possèdent de véritables entrepots chez eux, selon les inventaires après décès. Il ne se contente pas du commerce du fils, mais possède des biens fonciers ou prend à ferme des biens fonciers, qu'il baille à moitié. Or, dans ce bail, la moitié de la récolte va au bailleur. Le closier ou métayer n'est pas un marchand, c'est à dire quelqu'un qui se déplace à cheval avec des marchandises pour aller les vendre sur les foires, et il confit la vente de la moitié qui lui est propre au bailleur.
Ce qui explique que les maisons de notables regorgent de fil à tous les stades de sa préparation... ainsi, le curé Moride à Laval, le notaire, l'avocat, ou le tanneur. Mais vont-ils eux même directement vendre à Craon ou Château-Gontier, ou bien vendent-ils au marchand de fil, qui se charge de l'écoulement sur le marché. Il est que le marchand de fil soit le seul vendeur sur les foires, aussi voyez les Jallot de Combré, les Lemesle de Montreuil sur Maine... etc... Viendront ensuite les tissiers ou tisserands, puis le grand négoce international de Laval.
 
familles de marchands de fil : Buffebran Cossé le Vivien | Jallot Combrée | Lemonnier Saint Erblon | Lemesle Montreuil sur Maine | Menard Montreuil sur Maine
 
Planche extraite de l'Encyplopédie de Diderot, qui montre 3 fileuses dans un décor très bourgeois qui n'a rien à voir avec les intérieurs réels de la campagne du Haut-Anjou (larges fenêtres à vitres et rideaux, tableaux, sièges bourgeois)
 
On vient de Saint-Brieuc acheter à Angers ! Haut de page
Le 24.12.1636 Germain Bouglier Sr de la Morandaye dt à Saint-Brieuc en Bretagne, étant de présent à Angers, confesse devoir à Jacques Tocqué marchand de draps à Angers 145 L pour vente et livraison des marchandises suivantes : 4 aulnes de draps pour faire habit et manteau 80 L \ 6 aulnes de taffetas pour doubler et manteau 30 L \ 4 aulnes de gallon 12 s \ 50 boutons 12 s \ 1 peau à faire pochette 8 s \ 24 aiguillettes pour le bas des chausses 2 L 8 s \ 22 aulnes de dentelle pour habit et manteau 17 L 12 s \ 2 aulnes de serge pour doubler les chausses 2 L 16 s \ 1,5 once de soie 29 s \ une paire de neux de 10 rubans 2 L 10 s \ 0,5 aulne de bougran 7 s \ 1 aulne de canevas 16 s \ un chapeau de laine feutrée 8 L (AD49-5E8/270 Serezin Nre Angers)
 

Contrat d'apprentissage de filassier, 1738, Armaillé

Voir l'analyse sur ce billet de mon blog.
Le 20 décembre 1738, devant Toussaint Péju notaire royal résidant à Armaillé, furent présents Louis Dupont fillassier demeurant au bourg d'Armaillé, et, Gilles Maunoir, laboureur, et François Maunoir son fils, âgé de 20 ans, demeurant ensemble à la Camossaye à Armaillé, lesquels ont fait entre eux le marché d'apprentisage conventions et obligations qui suivent, c'est à savoir que ledit Dupont promet et s'oblige de montrer et enseigner à sa possibilité pendant le temps et espace de 17 mois entiers et consécutifs qui ont commencé de ce jour, audit François Maunoir fils acceptant le métier de fillassier avec tout ce qui le régule et dépend sans lui en rien cacher ni receller à quoi ledit apprenty promet obéir comme en toutes choses licites et honnêtes qui lui seront commandées que ledit Dupont et sa femme sans que pendant ledit temps ledit apprentis puisse s'absenter de la maison dudit Dupont sans cause légitime ; en laquelle maison ledit Dupont logera, couchera ledit apprenty et le nourrira et sera nourri comme luy, dans les maisons où il le mènera travailler dudit métier, de la probité et fidélité duquel apprenty ledit Gilles Maunoir son père demeure tenu en non propre et privé nom, lequel dit apprenty pourra être employé à d'autre travail que celuy de fillassier et même être envoyé par ledit Dupont à ses journées à bêcher fanner et faire autres choses semblables, tout dans le temps et séjour seulement que ledit Dupont manquera de travail de sondit métier de fillassier, le prix desquelles journées sera tout à l'entier par ledit Dupont sans que ledit François Maunoir puisse rien en prétendre fors de 4 journées qu'il pourra faire pour son compte dans le temps de la récolte prochaine ... passé à Armaillé en notre étude en présente de Guillaume Belot Me chirurgien juré et Jullien Morillon meunier demeurant au bourg d'Armaillé témoins requis.

   

Contrat d'apprentissage de tissier, 1718, Candé

 
Le 25 avril 1718 après midy, par devant nous Pierre Popin notaire royal en Anjou résidant à Candé, furent présents establis et duement soumis, François Morissault tissier demeurant en cete ville paroisse St Denis d'une part, Marie Mercier veuve de defunt Daniel Bondu, demeurant à Beaulieu paroisse de Freigné, d'autre part, entre lesquels a esté convenu de ce qui suit, qui est que ledit Morissault s'oblige de montrer et enseigner en son honneur et conscience et autant qu'il lui sera possible sondit métier de tissier à Noël Bondu fils de ladite veuve Bondu, et ce pendant le temps et espace de trois années entières et consécutives à commencer de ce jour, pendant lequel temps ledit Bondu sera nourry, couché et reblanchy par ledit Morissault, qui s'oblige de lui fournir de tous outils propres audit métier sans que ladite veuve Bondu soit tenue d'en fournir aucuns ; convenu que lorsque ledit Morissault fera la lessive la fille de ladite Mercier aidera à la laver pendant qu'elle sera demeurante chez sadite mère seulement, sans espérance d'aucun salaire fors sa nourriture, sans espérance d'aucun salaire fors sa nourriture ; et en considération de la longueur des trois années pour ledit apprentissage, ladite veuve Bondu ne paiera aucune chose soit en argent ou autrement audit Morissault, qui s'oblige de donner audit Bondu fils à la fin desdites trois années un habit de meslinge seulement ce qui a été ainsy vouly consenty stipullé et accepté par les parties qui à ce tenir obligent etc dont etc fait et passé audit Candé en nostre étude en présence de Me René Thomas Guichard sergent royal et Etienne Joseph Lebarbier scellier y demeurant témoins à ce requis et appelés et ont les parties dit ne scavoir signer de ce enquis. Signé Lebarbier, Guichard, Popin  (AD49)
 

  Contrat d'apprentissage de tissier en toile, 1629, Candé

Le 28 may 1629 avant midy, devant nous Pierre Hatté notaire de la baronnie de Candé fut présent et personnellement establi et dument soumis et obligés sous ladite cour Pierre Morissault tissier en toile, demaurant à l'aumonerie St Jehan de Candé d'une part, et Claude Dumesnil demeurant à présent avecq ledit Morissault d'autre part, c'est à scavoir que ledit Morissault demeure tenu et obligé de monstrer l'art et mestier de tissier en toile audit Dumesnil le mieux qu'il sera à la possibilité dudit Morissault et ledit Dumesnil apprendra ledit mestier qu'il sera possible, pendant le temps et espace de 2 ans, et le présent marché commençant à la Pentecoste prochaine et lesdits ans finiront à pareil jour sans que ledit Dumesnil n'en paye aucune chose audit Morissault à apprendre ledit mestier tissier, et ledit Morissault demeure tenu et obligé d'établir un pourpoint de toile, haut de chausse de meslin, bas de chausse de toile et une paire de choulier que ledit Morissault baillera dans la Toussaint prochaine venant, outre aussy ledit Morissault baillera audit Dumesnil une chemise de réparon en réparon, et ledit Dumesnil ne pourra s'en aller hors ledit Morissault qu'il n'ai achevé ledit temps, ni ledit Morissault le pourra (effacé) d'avoir achever son temps et sera contraint par emprisonnement de corps et auquel marché ... fait et passé audit Candé maison d'honnête Estienne Cheuslin en présence d'honneste homme Jehan Gilberge marchand et Claude Cathelinais témoins, lesdits Morissault et Dumesnil ont dit ne scavoir signer. Signé Gilberge, Catherlinais, P. Hatté

Bibliographie   Haut de page

  1. Encyclopédie Bonneton, Mayenne, 2000, Bonneton éditeurs,
  2. DLOUSSKY Jocelyne, Vive la toile, économie et société à Laval au XVIIIe siècle, 232 pages, 1990, Mayenne, Yves Floch éditeur
  3. PITOU Frédérique, La police de la manufacture textile de Laval au XVIIIe siècle, Annales de bretagne et des pays del'Ouest, tome 107, n°2, 2000  

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