En 1901, la plupart des maisons de Guérande n’ont pas de fosse d’aisance

Le siècle qui vient de s’écouler a vu tant de changements que beaucoup ignorent même l’existence de fosses d’aisance, croyant que l’égout a toujours existé. Il n’en est rien, et même en 2022, une ville comme Nantes n’a pas encore mis tous les Nantais à l’égout.
Je vous mets, pour mémoire, comment on a fait pendant des siècles dans toutes les villes, et d’ailleurs à Nantes comme à Guérande : tout à la rue.

Ce qui suit est en ligne sur le site des Archives Départementales de Loire-Atlantique, série des Délibérations municipales. Voici donc Guérande en 1901 :

Session d’août 1901
Maisons particulières, établissement de fosses d’aisances.
Mr le Maire expose au conseil que maintes fois, son attention a été appelée sur la malpropreté des rues de la ville occasionnée en grande partie par le défaut de fosses d’aisances dans la plupart des maisons de la ville, ce qui obligeles les habitants à jeter le soir, sur la voie publique, les matières fécales. Pour obvier à cet état insablubre, il conviendrait d’obliger les propriétaires de maisons, situées dans la ville, à construire des lieux d’aisance.
Le Conseil, reconnaissant ces plaintes fondées, invite Mr le maire à prendre des mesures pour les faire cesser.
A cette occasion, un membre demande que l’agent voyer fasse faire des fouilles dans la rue de Saillé pour y constater l’état du caniveau souterrain qui, dit-on, part de la rue de Pellan suit la rue de Saillé pour aboutir en dehors de la ville.
Après s’être rendu compte de ce caniveau, on pourrait peut-être s’en servir comme égout.
Le conseil, approuvant cette demande, autorise Mr le Maire à mettre à la disposition de Mr l’agent voyer une somme de 200 francs pour faire les frais auxquels les fouilles en question pourront donner lieu.

Voir mes cartes postales de Guérande sur mon site

 

En 1926 l’eau n’était pas encore au robinet route de Clisson à Nantes ; un siècle plus tard la France manque d’eau tant nous en consommons !

Il y a 2 ans je vous parlais des porteurs d’eau rue Saint Jacques à Nantes et personne n’y avait encore l’eau courante au début du 20ème siècle.
En 1926, après l’arrivée de l’eau rue Saint-Jacques, ceux de la route de Clisson demandent à la ville de Nantes de prolonger l’arrivée de l’eau potable au robinet jusques chez eux, et pour mémoire la route de Clisson suivait la rue Saint Jacques après le carrefour de Bonne Garde.
Donc mes grands parents paternels qui demeuraient route de Clisson n’avaient pas encore l’eau courante, et elle n’est pas encore votée raconte l’article ci-joint. Ma cousine Anne, qui a le même âge que moi, se souvient très bien de l’installation de salle de bains dans la maison de nos grands parents communs, et ce juste avant la seconde guerre mondiale. Marly, marchand de salles de bains à Bordeaux, venait d’y installer une succursale, qui installa donc beaucoup route de Clisson.
Et nous voici en août 2020 devant un pénurie d’eau en France, et de probables coupures de robinet, mais il faut dire qu’en un siècle nous avons pris des habitudes du surconsommation incroyables, et nous avons bien oublié comment vivaient nos grands parents. J’ai donc hier tenté de comprendre ma consommation par rapport à la moyenne en France, car je consomme 22 m3/an et je ne peux vraiement plus rien réduire. La moyenne en France est au dessus de 150 m3/an à cause des jardins, piscines, baignoires et de l’agriculture. Je fais partie des Français qui vivent en copropriété et ne reçoivent donc pas une facture d’eau chaque année, car c’est une ligne au milieu de tant de lignes des charges qu’il faut beaucoup d’attention pour découvrir le relevé de mon compteur individuel chaque année. Je suppose que tous ceux qui vivent en appartement sont comme moi.

Avant l’eau courante, il y avait à Nantes le métier de porteur d’eau : Nantes Sud Loire 1846

Voir tous les articles sur Nantes Sud Loire Saint Jacques

En 1846, l’eau courante n’est pas encore arrivée dans Nantes Sud Loire, et pour vous faire une idée de l’arrivée de l’eau au robinet, à Nantes voyez le catalogue de l’exposition réalisée en septembre 2002 par les Archives Municipales de la ville de Nantes.

Donc, en 1846, l’eau est prise soit au puits, quand on en a un, et j’y reviendrai, ou aux rivières proches, la Sèvre et la Loire. Mais tout le monde ne peut pas aller chercher son eau, donc il existe encore en 1846 un porteur d’eau.

Il s’appelle Joseph Chevrier, 35 ans, marié, père d’un garçon, et il demeure au n°52 de la rue Dos d’Âne, soit à peu près au niveau actuel du rond point entre le parking et la station de tramway Pirmil.

Avec toutes les personnes âgées, incapables de porter l’eau aux étages, mais dépourvues de retraite, je ne sais s’il pouvait leur monter l’eau. Je pense donc que ces personnes âgées se contentaient d’eau à boire, et rien pour l’hygiène.  Et le porteur d’eau livrait surtout les nombreuses maisons sans puits, mais qui pouvaient payer le service du porteur. Je sais, c’est terrible ce que je suis en train d’écrire, pourtant, après mure réflexion, c’est ma seule certitude. Et inutile de vous dire combien je pense à l’immense, immense progrès dont nous bénéficions, nous les personnes âgées à domicile, car nous avons retraite et eau au robinet.

 

BALAYER DEVANT SA PORTE

Nous en avons oublié le sens. Aussi bien tous les parleurs d’Internet, que nos maires. Et chaque année à l’automne, lorsque les couches épaisses de feuilles trempées, transformées en bouillie, recouvrent les trottoirs, je peste car j’ai peur de tomber.

Autrefois, BALAYER DEVANT SA PORTE était une obligation, et même une obligation devant les assurances, car si quelqu’un tombait devant chez vous faute d’entretien, vous étiez responsable. Je me souviens ici de ma tante Monique, qui demeurait boulevard Dalby, aux trottoirs généreusement larges mais comme beaucoup de boulevards, jonchés de platanes géants. Chaque matin, comme tout le monde depuis le moyen-âge, et même probablement avant le moyen-âge, elle balayait devant sa porte, et laissait un trottoir propre pour la journée.

Il faut dire qu’il y des siècles nos villes, lorqu’elles étaient pavées, comme c’était le cas de Nantes, avaient des rues très encombrées de toutes sortes d’immondices, dont je vous épargne l’énumération car répugnante à nos nez et yeux de 2020.

Donc, on sortait chaque matin avec son balais de coco ou de millet, et on nettoyait. Même les auteurs anciens citent cette activité matinale :

BALAYER (Dictionnaire de l’ancien français, en ligne) :

A. –

Au propre

1.

« Nettoyer (un endroit) avec un balai Ainsi comme elle nestoioit et balyoit la maison d’icellui, trouva un escu d’or de XVIIJ s. par. soubz une table (Reg. crim. Chât., I, 1389-1392, 309). Et premierement qu’elle commande aux chamberieres que bien matin les entrees de vostre hostel (c’estassavoir la salle et les autres lieux par ou les gens entrent et se arrestent en l’ostel pour parler) soient au bien matin balleyez et tenues nectement (Ménagier Paris B.F., c.1392-1394, 130). Je m’en voiz faire vostre lit Et baloier nostre maison Affin que nettement soyon (Gris., 1395, 28). …et quinze jours après ce qu’elle fu entrée oudit service, en baliant leur chambre trouva es netoieures une verge d’or (Paris domin. angl. L., 1428, 282).

Vous avez bien lu, ces auteurs sont au 14ème et au 15ème siècle. Et si ils sitent le travail de la domestique chez les gens aisés, j’ajoute que chez les moins aisés, c’était la maîtresse de maison elle-même qui balayait.

Et nous n’avons manifestement conservé que le sens au figuré, oublieux de nos ancêtres !!!

Avec tous nos engins modernes nous sommes oublieux des moindres détails de la vie autrefois, plus respectueuses de l’entretien des villes que de nos jours !!! Au lieu de faire du jogging, on balayait.

Le balais de millet et le balais de coco n’ont pas disparu

Dans ce monde où tout change et disparaît si vite, il est parfois surprenant de retrouver sur le moteur de recherche que certains objets d’antan tiennent bon et sont encore en vente, donc utilisés. Ainsi en va-t-il du balais de coco et son compère le balais de millet.

Je me souviens qu’il y en avait chez mes parents dans les années 1950 pour balayer les marches extérieures. Je n’en ai jamais revu depuis puisque cela fait maintenant plus de 60 ans que je vis en appartement.

Or, Joséphine Bonnissant et Marie Judith Lebraire, demies soeurs, tenaient une épicerie place Saint Pierre, et font venir des balais de millet venant par Bordeaux et par mer au port de Nantes. Elles n’étaient pas les seules et vous allez voir que la ville de Nantes avait besoin de beaucoup de balais de millet.

Cliquez sur l’image pour la zoomer

Je pensais bien que Bonnissant et Lebraire avaient travaillé dans l’épicerie, mais j’ignorais  qu’un balais de millet ait sa place dans les rayons d’une épicerie. Selon moi, cela relevait plus du commerce que j’ai connu dans les années 1950 et qu’on appelait DROGUERIE. Qu’en pensez-vous ? Avez-vous connu ces balais ? Et quelle différence entre le millet et le coco ?

Cette publication, que j’ai trouvé sur le site des Archives Départementales de Loire-Atlantique, rubrique PRESSE.

 

 

 

Les décès autrefois à l’accouchement sans mains lavées !

Je viens de vivre plusieurs heures sans eau, mais tout s’est bien passé. J’avais prévu des bassines d’eau et un flacon de produit pour les mains.
Mais, tappant le registre de baptêmes de Loiré, années 1576 et suivantes, je constate encore une fois, les surprenantes suites de décès à la naissance, donc manifestement des enfants nés sans de réelles conditions d’hygiène.

J’ai donc aussitôt relu attentivement l’ouvrage de François Lebrun : les hommes et la mort en Anjou aux XVII et XVIIIe siècles, Flammarion, 1975

Puis j’ai lu sur Internet Jacqueline Vons, « La parole d’une sage-femme : Louise Bourgeois (1563-1636) », dans V. Boudon-Millot, V. Dasen et B. Maire (éd.), Femmes en médecine, Actes de la journée internationale d’études organisée à l’université René-Descartes-Paris V, le 17 mars 2006, en l’honneur de Danielle Gourevitch, Paris, BIUM-De Boccard, Collection Medic@, 2008, p. 223-238. Article réédité sur Cour de France.fr le 1er mai 2013 dans le cadre du projet « La médecine à la cour de France » (http://cour-de-france.fr/article2762.html).

C’est édifiant, lu avec nos yeux, mais j’avoue que vivre seulement quelques heures sans eau me déroutait tellement que je ne pouvais que tenter d’imaginer la vie de nos ayeules !

Rue Maufumier (Craon), Rue des Fumiers (Nantes), Rue du Fumier (Paris)

Autrefois les rues étaient encombrées d’animaux. Outre les chevaux, les porcs vagabondaient et je pense aussi aux poules. Les villes avaient donc un Parc à fumier.

a Nantes, ce Parc à fumier, était du côté de l’actuelle rue des Olivettes et on y accédait par la rue des Fumiers, qui fut débaptisée le 27 octobre 1837 pour devenir la rue Marmontel, qui donne chaussée de la Madeleine. Je vous signale au passage qu’autrefois cette rue était donc extra muros et non intra muros, ce qui était déjà tout de même un soupçon d’hygiène. On devait donc transporter par les portes de la ville le fumier jusqu’au parc des fumiers, soit environ 1 km plus loin.

à Paris, on trouve la rue du Fumier sur les plans de 1760 et 1771, 1760 uniquement, en 1771 c’est la rue des Terres Fortes. Elle est devenue la rue Lacuée, dans le 12e

à Craon, je la trouve dans les partages Cohon, car après le décès de Guillaume Cohon sieur de Pinceloup, sans hoirs, suivi de partages collatéraux à ses frères et soeurs, c’est sa soeur Françoise Cohon, épouse d’Yves Hunault qui hérite de la maison sise à Craon rue Maufumier, où elle habitait à son décès, et demain je vous mets les partages de la succession de cette Françoise Cohon, elle aussi décédée sans hoirs.

J’ignore si la rue existe encore et sous ce nom, mais je suis persuadée que le fumier faisait l’objet de rues dans beaucoup de villes autrefois.

Je vous écris ce billet, car autrefois, on donnait des noms de rue très souvent basés sur l’activité dans la rue :
rue de la Poissonnerie
rue de la Tannerie
rue des chapeliers etc…

Mais aujourd’hui, beaucoup de petites communes se trouvent avec des rues non encore nommées et j’ai vu hier à la télé qu’on se remuait beaucoup pour leur trouver des noms, et qu’on s’orientait vers les noms de fleurs, moins sujets à discussion que les noms de célébrités.

Ah, les fleurs ! c’est un parfum, mais tout de même mieux que le fumier.

Odile

PS attention, je vous prévois bientôt un billet sur les vidanges des immondices humains, qui eux étaient intra muros jusqu’à Mellier notre maire qui fit mettre extra muros ces immondices. Enfin, il les fit juste jetter par dessus les murailles, ce qui était déjà extra muros !!!