Contrat d’apprentissage de tonnelier à Saint Lambert du Lattay (49), 1723

pour Jean Vaillant chez Pierre Gaultier

Nous poursuivons les contrats d’apprentissage.

L’acte qui suit est extrait des Archives Départementales du Maine-et-Loire. Voici la retranscription intégrale. Ce contrat est fort mal écrit, et pour le comprendre il faut faire de la phonétique mentalement. Pour vous aider, j’ai parfois mis en italique l’orthographe exacte. : Le 29 may 1723, par devant nous Charles Billault notaire royal Angers résidant à Rablay, furent présents établis et soubmis Pierre Gaultier thonelier (tonnelier) demeurant à la Mulonnière paroisse de Saint Lambert du Lattay,
Renée Chevallier veufve René Vaillant et Jean Vaillant son fils, demeurant au bourg de Rablay,
entre lesquelles parties a esté fait le marché d’aprentisage qui suit pour le temps et espasse (espace) de 18 mois qui commanseront (commenceront) le 18 juillet prochain et qui finiront le 10 janvier de l’année 1725,
c’est à scavoir que ledit Gaultier a promis et par ces présentes promet et s’oblige montrer et enseigner sondit métier de thonelier audit Jean Vaillant sans rien luy en celer scavoir doller à faire les tonneaux de toutes fasons façons le norir (nourrir) coucher et reblanchir et luy donner bon trestement traitement ainsy que les mestres (maîtres) sont tenu de faire à leurs aprantifs à la charge par ledit Jean Vaillent d’obéir audit Gaultier et de faire ce qui luy commandera touchant sondit métier de thonnelier d’aller et venir où il voudra l’envoyer

et est fait le présent marché d’aprantisage (apprentissage) pour la somme de 50 livres que ladite veufve Vaillent promet et s’oblige payer et bailler audit Gaultier scavoir 25 livres dans le jour et feste de Magdelaine prochaine et les 25 livres restent de la Saint Jean Baptiste prochaine en un an à paine (peine) etc
ce qui a esté ainsy voulu consenty stipulé et accepté, s’obligeant lesdites parties leurs hoirs etc biens etc renonçant etc dont etc s’oblige ladite veufve Vaillant fournir coppie des présentes audit Gaultier dans un mois prochain, aussy à paine (peine),
fait et passé audit Rablay en notre étude présents Pierre Chosteau couvreur d’ardoise Louis Beugnon sergent et René Vaillant Vigneron, demeurants audit Rablay, ladite veufve Vaillant et dedit René Vaillant ont déclaré ne scavoir signer

Planche extraite de l’Encyclopédie de Diderot, article Tonnelier, Outils.

DOLER, v. act. DOLOIRE, s. f. Doler apartient à tous les Arts, qui travaillent sur le bois. Égaler, aplanir; blanchir et unir le bois. — Doloire est un instrument de tonnelier, qui sert à doler le bois. (Jean-François Féraud, Dictionnaire critique de la langue française, Marseille, Mossy 1787-1788). Le doloire de tonnelier était une sorte de hache dont le manche, très gros, est déporté pour faciliter le travail de l’ouvrier.

La durée d’apprentissage est de 18 mois, et ce tonnelier travaille au coeur du vignoble Angevin, des côteaux du Layon, donc on peut le considérer comme représentatif de son métier.
Or, une fois encore (voir Commentaire de la durée d’apprentissage du vinaigrier), j’observe une durée d’apprentissage totalement différente de ce que dit l’Encyclopédie de Diderot : L’apprentissage est de six ans, après lequel l’aspirant doit faire chef-d’oeuvre, pour être admis à la maîtrise. Cette phrase de Diderot semble extraite de Statuts exclusivement Parisiens et le moins qu’on puisse dire c’est qu’une fois encore ils ne représentent pas la France entière… Sans doute à Paris ne travaillait-on que des objets de luxe, pour la Cour ou autre, mais dans tous les cas qui n’avaient strictement rien à voir avec les objets du Français moyen…

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Contrat d’apprentissage de tonnelier vinaigrier à Soulaines (49), 1662

pour Jean Talluau chez Jean Boutton. Archives Départementales du Maine et Loire, serie 5E

Nous partons dans le vinaigre pour plusieurs jours, tant il était important autrefois : antiseptique, médicament, etc…
Le contrat d’apprentissage qui suit est assez original, en ce sens que l’apprenti est adulte, désirant sans doute s’offrir une autre situation et investissant dans une formation à un métier plus valorisant. Nous verrons le niveau de vie du vinaigrier dans les jours qui suivent.
L’acte qui suit atteste qu’un vinaigrier est un métier charnière dans la filière du vin, et qu’on peut être à la fois vinaigrier et autre chose dans la filière. Ici tonnelier vinaigrier :

Voici la retranscription de l’acte : Le sabmedy 20 janvier 1662 après midy, devant nous André Choisnet notaire royal à Angers résidant aux Ponts de Cé, furent présents en personne establis et duement soubmis honorable homme Jean Boutton sieur de la Roche marchand tonnelier et vinaigrier demeurant en ce lieu paroisse de saint Maurille des Ponts-de-Cé d’une part,
et Jean Talluau natif de la paroisse du Touré (sans doute le Toureil, canton de Gennes, arrondissement de Saumur), de présent en ce lieu d’autre part,
lesquels ont fait et font entre eux le marché d’apprentissage qui ensuit, qui est que ledit Talluau s’est mis avec et en la maison dudit sieur Boutton pour le temps et espace de deux années entières et parfaites et consécutives qui commencent ce jourd’huy et finiront à pareil jour pour par ledit Boutton luy montrer et enseigner ledit mestier de tonnelier et vinaigrier à sa possibilité sans rien luy en celler et par ledit Talluau servir et obéir audit sieur Boutton audit mestier de tonnelier et vinaigrier en toutes choses licites et honnestes qui luy seront par luy commandées, son bien procurer, …, à sa possibilité, et par le sieur Boutton le nourrir, coucher, laver et reblanchir pendant iceluy temps sans que ledit Talluau puisse s’absenter de la maison dudit sieur Boutton sans son express congé et consentement ;
ce marché fait pour et moyennant le prix et somme de 140 L tournois sur laquelle susdite somme ledit sieur Talluau en a présentement payé et baillé contant audit sieur Boutton la somme de 77 L en louis d’argent ayant cours suivant l’édit, ton et de laquelle susdite somme de 77 L ledit Boutton s’en contente et en a quitté et quitté ledit Talluau, et le surplus montant la somme de 63 L ledit Talluau pour ce duement estably et soumis par devant nous comme dit est promet et s’oblige icelle payer et bailler dans d’huy en un an prochain venant à peine etc ce qui ainsy voulu stipullé consenty et accepté par lesdites parties, auquel marché d’apprentissage quittance obligation et à tout ce que dit est tenir etc dommage etc obligent lesdites parties respectivement etc et à défaut etc biens et choses à prendre vendre et même le corps dudit Talluau à tenir prison comme pour deniers royaux s’absentant de la maison dudit sieur Boutton sans son exprès congé et consentement renonçant etc,
fait et passé aux Ponts de Cé maison dudit sieur Boutton, présent Pierre Garnier marchand ciergier demeurant en ce lieu, et Nicolas Leduc compaignon vinaigrier, demeurant à Angers paroisse de la Trinité. Signé : J. Talluau, J. Boutton, P. Garnier, N. Leduc, Choisnet

A demain, toujours sur le vinaigre. Les vinaigriers étaient une corporation règlementée, et ce contrat m’interpelle car la durée de l’apprentissage est fixée à 2 ans, et je vous expliquerai demain des durées plus longues et pourquoi.
La somme de 140 L est par contre coquette, assez pour que je conclue à un métier socialement valorisant. En effet, lorsque la somme est élevée, il faut soupçonner un métier qui va rapporter… cela paraît logique… Donc, ce Talluau est en train de tenter une ascencion sociale, à moins qu’il n’ait tenté d’épouser la fille du maître, car cela arrivait aussi souvent que le maître n’ait pas de fils et que la place fut libre après lui…. mais comme ces actes ne sont pas miens, vous êtes seuls à pouvoir poursuivre cette histoire… auquel cas, merci de faire signe sur ce billet dans les commentaires, ce serait bougrement intéressant.
Autrefois les dettes n’étaient pas prises à la légère, et je constate au fil de ces contrats d’apprentissage que la clause de saisie de corps en prison est souvent incluse dans le contrat. Si on veut bien s’imaginer l’état des prisons d’antan, plus mortelles qu’autre chose, on comprend vite l’efficacité dissuasive de la clause.
Voir la page HTML qui dresse un tableau des contrats d’apprentissage qui sont sur ce site, vous pouvez aussi utiliser la fenêtre de recherche de ce blog.

Mais au fait, vous souvenez vous de deux, ou au moins une, des utilisations antiseptiques les plus importantes du vinaigre ? Cogitez bien, avant de trouver ici la réponse.

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