Transaction entre François Simon sieur de la Bernardaie, et Pierre Delhommeau, Angers, 1596

Depuis 3 jours, je suis sous le choc, j’ai un SIMON qui est aussi SIMONIN, et impossible de comprendre cette altération du patronyme.
Il existe bien une vraie famille noble Simon de la Saulaye (Freigné), de la Bernardais (Vern-d’Anjou), qui a été traitée dans l’ouvrage ci-après :

    Voir l’ouvrage de M. de l’Epronnière sur Freigné

En voici un représentant en 1596 :

    François Simon Sr de la Bernardais est fils de Julien Simon Sr du Haut-Bois et du Mortier 1480 † après 1539 et de sa seconde épouse Louise Du Teilleul dame du Pont et de la Bernardaye, et frère de Jacques Simon Sr de la Saulaye fils de la première épouse Jeanne Du Pré

Malgré la fréquence du prénom Claude chez ces Simon, je vois mal le mien se rattacher à une quelconque branche cadette, ou alors lointaine cadette en remontant encore plus haut ?

L’acte qui suit est extrait des Archives Départementales du Maine-et-Loire, série 5E7 – Voici la retranscription de l’acte : Le 31 décembre 1596 avant midy en la court du roy nostre sire à Angers endroit par davant nous (Jean Chuppé) personnellement establiz noble homme François Symon Sr de la Bernardaye et y demeurant paroisse de Vern d’une part
et Pierre Delhommeau Sr de la Bretaudaye demeurant en ceste ville d’Angers paroisse de la Trinité d’autre part, soubzmetant eulx etc confessent etc avoir fait et font entre eulx l’accord transaction et convention qui s’ensuyt
c’est à savoir que ledit Delhommeau pour demeurer quite vers ledit Symon du reste du prix de la cession passée par Lecourt notaire royal en ceste ville le 19 septembre 1592 montant 700 escuz sol, et du contenu en une cédulle montant 13 escuz du 20 février 1592 et autre cédule montant 22 escuz que ledit Delhommeau auroit receu de Me Maurille Drouet Sr de Ranlou advocat Angers pour paier la dépense de Loys Joret Sr de St Jacques et pour demeurer quites des intérestz de ce qui restait de ladite cession ledit Delhommeau a promis et demeure tenu paier audit Simon la somme de 40 escuz sol payable 18 escuz dedans ce jour et le reste montant 22 escuz dedans caresme prochain venant sauf le recours dudit Delhommeau contre ledit Joret pour la somme de 22 escuz portée par ladite cédulle, de laquelle ledit Maurille Drouet à ce présent a confessé estre des deniers dudit Symon et au moyen de ladite somme de 40 escuz ledit Symon a quité et quite ledit Delhommeau de tout le reste de ladite cession et contenu ès dites cédules, tant en principal que intérestz et demeurent respectivement quites l’un vers l’autre de tout ce qu’ils pourraoient debvoir de tout le passé jusques à huy …
la présente quittance stipulé et accepté par lesdites parties à laquelle transaction obligation et tout ce que dessus tenir etc obligent etc mesmes ledit Delhommeau au payement de ladite somme de 40 escuz etc et par deffault etc foy jugement condemnation etc
fait et passé Angers en la maison de honorable homme Pierre Lemaryé Sr de la Moynaie advocat Angers ès présence dudit Lemarié

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Contrat de mariage Quetier Bourdais, Grez-Neuville, 1619

Voici un contrat de mariage de tanneurs entre Vern-d’Anjou et Grez-Neuville, avec jouissance d’une maison au bourg de Grez-Neuville.

    Voir ma page sur Grez-Neuville

Les tanneurs sont gens qui savent généralement signer, ce qui est le cas ici du futur et de son beau-père, mais qui n’apprenent pas encore à écrire à leurs filles.
Les revenus sont ceux de métayers aisés, sans plus, et dans tous les cas, bien inférieurs au seuil mondain de notre ami Toisonnier, seuil que vous voyez sur ma page regroupant tous les contrats de mariage :

    Contrats de mariage retranscrits et analysés sur ce blog.
Grez-Neuville, collection personnelle, reproduction interdite
Grez-Neuville, collection personnelle, reproduction interdite

L’acte qui suit est extrait des Archives Départementales du Maine-et-Loire, série 5E36 – Voici la retranscription de l’acte : Le 27 juillet 1619 avant midy (Baudriller notaire royal Angers), comme en traitant et accordant le mariage ja encommencé par fiances faites entre honneste homme Jullien Quettier marchand tanneur fils de deffuncts honneste homme Louis Quetier et Perrine Grantien d’une part
et honneste fille Ancelme Bourdais fille de honneste homme Pierre Bourdais marchand tanneur et de deffunte Nicolle Hamon
et auparavant que de parachever d’accomplir ledit futur mariage sont demeurés d’accord des clauses conventions et pactions matrimonales telles que s’ensuivent
pour ce est-il qu’en la court du roy notre sire Angers par devant nous Jehan Baudriller notaire d’icelle ont esté présents en leur personne ledit Quetier demeurant au bourg de Vern et ladite Bourdais demeurant au bourg de Neufville, lesquels duement soubzmis et establiz confessent avoir fait et accorder entre eux les pactions et conventions matrimonialles telles que s’ensuit, c’est à scavoir que ledit Quetier o l’autorité et consentement d’honneste homme Pierre Quetier marchand demeurant à Vern et honneste homme Me Pierre Toublanc demeurant au lieu de saint Serge et ladite Brundeau o l’autorité et consentement dudit Brundeau son père aussy à ce présent, demeurant audit Neuville, ont promis respectivement de parachever et d’accomplir le mariage ja encommencé et dont fiances sont ja faictes, et iceluy solemniser en face de notre mère sainte église catholique apostolique et romaine aussi tost que l’un en sera par l’autre requis tout légitime empeschement cessant
et en faveur duquel mariage qui autrement n’eust esté accordé entre lesdits futurs espoux ledit Bourdais père présent duement estably en ladite court a promis et promet donner audit futur espous en advancement de droits de ladite Bourdais sa fille la somme de 500 livres payable savoir la somme de 300 livres dedans le jour et feste de Toussaint prochaine et le surplus montant la somme de 200 livres dedans le jour et feste de Toussaint prochainement venant en ung an

    curieuses dates, qui ne sont pas le jour des épousailles. Je rencontre rarement le paiement différé et échelonné en Anjou, bien que je vous l’ai déjà montré. Sans doute le papa a-t-il eu plusieurs enfants à marier ?

de laquelle somme y en aura la somme de 200 livres qui entreront en leur future communauté entre lesdits futurs espoux etle surplus montant 300 livres ledit futur espoux sera tenu de l’employer en acquest d’héritage en ce pays d’Anjou qui sera censé et réputé le propre patrimoine et matrimoine de ladite future épouse sans que ladite somme ni les acquetz qui en seront faits puissent entrer en ladite future communaulté et à faulte que ledit futur espoux fera d’employer ladite somme en acquets d’héritages après la dissolution dudit futur mariage ladite Bourdais ou ses hoirs prendront ladite somme de 300 livres sur le plus clers deniers de leur future communauté et en cas qu’il ne demeure en ladite future communaulté suffisant pour payer ladite somme iceluy cas prendra ladite future espouse sur le propre patrimoine et matrimoine dudit futur espoux, et ledit futur espoux promet rente à ladite future espouse au denier vingt à commencer du jour de la dissolution de leurdit futur mariage
et outre ledit Bourdais promet bailler auxdits futurs espoux dedant le jour de leurs espousailles la jouissance d’une maison grange avecques les aireaulx issues appartenances et descendances d’icelle en laquelle est à présent demeurant touchant une maison … située au bourg de Neufville laquelle jouissance pour le temps de 5 ans
et dudit jour des espousailles sera tenu ledit futur espoux d’en payer les cens et debvoirs chacune desdites 5 années …
et outre ledit Bourdais promet de bailler trousseau honneste à sadite fille et de l’habiller d’habits nuptiaux beaulx et honnestes selon sa qualité

    soit au total 500 livres en argent, plus 5 années de loyer, plus trousseau, plus habits nuptiaux, ce qui fait environ le tout 1 000 livres

et lequel futur espoux a dit luy estre deu en deniers et autres marchandises jusques à la somme de 700 livres de laquelle somme il en emploiera la somme de 300 livres en acquets d’héritages qui seront censés et réputés son propre patrimoine et matrimoyne sans que ladite somme ni les acquets qui en seront faits puissent entrer en leur future communaulté,
et a ledit futur espoux assigné douaire coustumier à ladite future espouze sur tous et chacuns ses biens immeubles cas de douaire advenant
ce qui a été stipulé et accepté par lesdites parties auquel contrat de mariage et tout ce que dessus est dit tenir obligent respectivement renonczant etc foy jugement condamnation
fait et passé audit Angers en notre tablier en présence de Mathurin Metairie et Yves Peton praticiens demeurant Angers tesmoins

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Les Aides, impôt sur la vente du vin, 1629

Nous repartons dans les impôts sur le vin.
Cette fois, dans de nombreuses paroisses d’Anjou, au nord de la Loire, de Rochefot à Monguillon.
On découvre ici qu’il était en effet prélevé sur toutes les paroisses où existait de la vigne, et que pour collecter l’impôt, il existait de nombreux baux à sous-ferme.
Le collecteur final des 28 lieux nommés demeure à Rochefort. Nous découvrons que l’impôt des Aides était basé sur des noms de lieux qui ne sont plus paroisses, ou ne sont pas encore des paroisses, ainsi la Jaillette, la Touche aux ânes, les Essarts, le Petit-Paris, Roche-d’Iré, St Jean des Marais. Ce découpage, assez surprenant de cet impôt mérite le détour !
Bien sûr, je vous ai mis entre parenthèses une identificaiton de tous ces lieux.

Ceci dit, ces collecteurs devaient se déplacer à cheval sur ces distances, avec les sommes sur eux, et nul doute qu’ils aient posséder des pistolets d’arçon, tels que j’en ai relevés dans certains inventaires après décès, car ces déplacements étaient surement risqués, puisque François Babin, de Rochefort, apporte au final 1 821 livres à Angers, ce qui représente la valeur d’achat d’une métairie, ni plus ni moins, donc à titre de comparaison, c’est comme si vous aviez dans votre voiture, en liquide, environ 200 k€ (abréviation officielle de 200 000 €).

L’acte qui suit est extrait des Archives Départementales du Maine-et-Loire, série 5E36/188 – Voici la retranscription intégrale de l’acte : Le 18 mai 1629 avant midy, devant nous Noel Beruyer notaire royal à Angers fut présent Me René Durocher advocat en ceste ville, commis à la recepte des Aides de ceste ville, depar Me Charles de Monserat cy devant fermier des Aides de ceste élection, demeurant en ceste ville paroisse de Saint Pierre
lequel audit nom a reçu comptant en notre présence de Me François Babin demeurant à Rochefort, et de ses deniers comme il a dit, la somme de 1 831 livres 18 sols en pièces de 16 sols et aultres monnaies ayant cours suivant l’édit, faisant le reste et parfait paiement des fermes desdites aydes des paroisses de Saint-Martin-du-Boys, Louvaines, La Jaillette, Chambellay, Chenillé-Changé, Nyoiseau, St-Aubin-du-Pavoil, Bescon, les Essarts, la Tousche aulx Asnes,

la Touche-aux-Ânes, hameau en la commune de Saint-Léger-des-Bois –  » où ne sont que que deux petites maisons  » dit Louvet en 1565. Le roi Charles IX s’y arrêta pour dîner le 4 novembre. – La terre appartenait à Charles de Brie-Serrant. (C. Port, Dict. du Maine-et-Loire)

la Meignanne, St Jehan des Marestz (Saint-Jean-des-Marais, en St Clément de la Place aujourd’hui), St Clément de la Place, St Lambert de la Potherie, Loyré, Roche d’Iré, Vern, Chazé-sur-Argos, Le Plessis Macé, Beaucouzé, Brain-sur-Longuenée, St Augustin-des-Boys, Le Petit Paris (en Saint-Martin-du-Fouilloux aujourd’hui), St Martin du Fouilloux, St Léger des Boys, St Jean de Linières, Genay (Gené), St James près Segré (Sainte-Gemmes-d’Andigné) et Monguillon
fors et non compris un acquit de Me Hélie Michon montant 116 livres, qu’il aurait reçu dudit Babin le 6 septembre 1626 et qui est de l’entier paiement

desquelles paroisses de St Martin du Boys, Louvaines, La Jaillette, Chambellay, Chenillé et Changé, Me Loys Letessier estoit fermier pour 4 années 3 mois qui ont commencé au 1er juillet 1624 et finies au dernier jour de septembre dernier, à raison de 430 livres et le sol pour livre annuellement et d’autres les droitz de messieurs les officiers de ladite élection, par bail passé par Me Simon Goddes notaire royal de St Laurent des Mortiers résidant à Chambellay le 16e septembre 1624

et desdites paroisse de Nyoiseau, St Aubin du Pavoil, Jehan Faligan estoit fermier pour 3 années 9 mois qui ont commencé au premier janvier 1625 et qui ont fini ledit dernier septembre dernier à raison de 200 livres tz le sol pour livre d’entrée et continuation des droits desdits officiers officiers de l’élection, par chacun an, par bail passé par nous notaire le 9 janvier audit an 1625

et desdites paroissies de Bescon, les Essarts, la Touche aux Asnes, la Meignanne, St Jehan des Marestz, St Clément de la Place, St Lambert de la Potherine, Loyré, Roche d’Iré, Vern, Chazé-sur-Argotz, Le Plessis Macé et Beaucouzé, iceluy Faligan aussy fermier pour 3 années 3 mois qui ont commencé au 1er juillet audit an 1625 et qui ont fini audit dernier septembre dernier, à raison de 1 850 livres le sol pour livre de continuation par an, comme il est porté par bail passé par Me Louis Coueffé notaire de ceste cour le 5 juin audit an 1625

et desdites paroisses de Brain-sur-Longuenée, St Augustin-des-Bois, Jacques Bordier estait fermier à raison de 233 livres tz par an le sol pour livre d’entrée et de continuaiton des droits desdits sieurs officiers de l’élection par bail passé par Sébastien Leroyer et Maurice Boyvin notaires de la chatellenie du Lyon d’Angers le 19 décembre audit an 1624

et desdites paroisses du Petit Paris, St Martin du Fouilloux, St Leger des Bois et St Jehan de Linières, ledit Falligan estait aussi fermier pour le temps de 3 ans 9 mois qui ont commencé au 1er janvier audit an 1625 et fini audit dernier septembre dernier, à raison de 350 livres et le sol pour livre annuel

et desdites paroisses de Genay, Ste James près Segré et Monguillon à raison de 260 livres et 2 perdrix des droits desdits officiers par chacun an font René Guyon estait fermier pour le temps de 4 ans qui ont commencé au 1er octobre 1624 et fini ce dernier septembre dernier par bail passé par nous notaire le 4 novembre audit an 1624 desquelles 4 années ledit Babin en compte et paye 3 ans 3 mois qui ont commencé le 1er juillet 1625 et fini au dernier septembre dernier

et oultre a ledit Babin compté et payé en l’acuit dudit Guyon la somme de 49 livres 17 sols 6 deniers pour le huitiesme des paroisses de La Chapelle-sur-Oudon et Andigné de quartier de juillet audit an 1625

de laquelle dite somme de 1 831 livres 18 sols 10 deniers, ledit Durocher audit nom s’est tenu à comptant et bien payé et en acquitte et quitte lesdits Babin, Letessier, Faligan, Bordier et Guyon, reconnaissant en oultre avoir esté paié dudit Babin du prix desdites fermes et moyennant ce ledit Babin a présentement rendu audit Durocher audit nom les acquitz particuliers qu’il loy auroit baillé desdits payements par luy faits avant ce jour, non comprins en ladite somme de 1 831 livres 18 sols iceulx avquits et recepissez à la somme de 1 875 livres tz desquelz Durocher se tient contant et en quite ledit Babin

demeurent aussi comprins au présent compte les payements qui ont esté faicts audit Durocher en l’acquit dudit Babin scavoir par Allard 23 livres 5 sols par une part et par René Garnier la somme de 10 livres tz dont ledit Durocher leur en aurait bailler acquitz qui luy ont été rendus par ledit Babin sans préjudice audit Durocher de ladite somme de 113 livres pour raison de quoy il proteste faire contraindre ledit Babin par toutes voies dues et raisonnables,
lequel Babin a prostesté de s’en défendre et dit qu’il a payé audit Michon qui était pour lors faisant ladite recepte en cette ville pendant la contagion attendu l’absence dudit Durocher et sa femme qui s’estaient retirés à cause de ladite contagion, ce qui a esté protesté d’abondant au contraire par ledit Durocher et dit que pendant ladite contagion ils se seraient seulement retiré aux Ponts de Cé auquel lieu ledit Babin se debvait transporté ayant bonne connaissance que on y faisait la recepte et n’avoir jamais nommé comme recepveur ledit Michel pour son commis à faire ladite recepte, ainsi seulement clerc commissaire pour la marque des vins deffences et armes, sans préjudice aussy des deniers que ledit Babin pourraient aussi avoir reçu des vendants vin des paroisses de cette élection, ont il ne luy a tenu compte et sans préjudice des frais si aucuns sont
promettant obligeant etc dont les avons jugés etc
fait et passé audit Angers maison dudit Durocher en présence dudit Guyon demeurant à La Chapelle-sur-Oudon, Me François Jallier sieur de la Prevosté, et Mathieu Bardoul praticiens demeurant audit Angers tesmoins.
Signé : Durocher, F. Jallet, Babin, Guyon, Bardoul

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Marie Cady, veuve Bouet, acquiert la moitié d’une métairie à Vern-d’Anjou, 1650

Marie Cady avait épousé avant 1608 Jacques Bouet, qui lui fait 11 enfants, et décède en 1650. Devenue veuve, Marie Cady va poursuivre l’activité très intense que son mari avait menée pendant leur communauté de biens en acquêts multiples. Ils tenaient l’hotellerie à La Pouèze, mais se livraient aussi a des tas d’activités commerciales. J’ai une grande tendresse pour les veuves actives, d’autant qu’une fois n’est pas coutume sur ce blog, je vous parle ici d’une de mes ancêtres. D’habitude, je livre des actes qui ne me concernent en rien, si ce n’est mon immense passion pour le Haut-Anjou.

    Voir ma page sur La Pouèze
    Voir ma famille Bouet

Marie Cady a alors certainement la soixantaine, et durant les 3 années qu’elle va lui survivre, elle est souvent à Angers chez un notaire, achetant, plaçant… et le plus fort est qu’elle ne savait pas signer.
Ici, elle acquiert la moitié d’une métairie pour se faire payer de plusieurs dettes dues par les héritiers, fort nombreux, de Jean Mellet. L’acte sera un bonheur pour les éventuels descendants de ce Jean Mellet car il les liste tous en 1650.

J’attire leur attention sur l’une des dettes, à savoir la pension de Jean Mellet chez Marie Cady pendant 3 ans infirme et malade. Il est probablement frère ou oncle de tous les héritiers cités, car si cela avait leur père je pense que vue leur nombre, il y aurait bien eu au moins un d’eux pour le soigner sur ses vieux jours.

L’acte qui suit est extrait des Archives Départementales du Maine-et-Loire, série 5E5– Voici la retranscription intégrale de l’acte : Le 29 octobre 1650 après midy, par devant nous Nicolas Leconte notaire royal Angers furent ont esté présents Guillaume Meslet, tant en son privé nom que pour Michelle Ravary sa femme, René Bommyer aussi tant en son privé nom que de Guillemine Chemynard sa femme, demeurant savoir ledit Meslet au lieu et mestairie de Bounnarteil en paroisse de St Lambert de la Potherie et Bomyer à la Basse Bonaudière en la paroisse de la Meignanne, aussi tant en leurs privés nom que se faisant fors de Antoine, Louise et Renée les Mellets sœurs dudit Guillaume Mellet, et Christofle Chempiré et Jeanne Chemynard sa femme, de François Chemynard leur frère, de Pierre et Estiennette les Meslet enfants de deffunt Pierre Meslet, de Pierre Lebesson et Perrine Chemynard sa femme, de Mathurin Poirier et Jeanne Chemynard sa femme, de Pierre Moreau et Jacquine Cheminard sa femme, lesdites Guillemyne, Jeanne, Jacquine et Perrine les Chemynardz filles de Jean Chemynard et de deffunte Jeanne Meslet, de Michel Chempiré et Jeanne Sallé sa femme et de Jacques Sallé leur frère, tous héritiers de deffunt Jean Meslet vivant demeurant au bourg et paroisse de La Poueze, y décédé deux ans auparavant ou environ et qui estoit seigneur du lieu et métairie de Blanche ? en la paroisse de Vern, auxquelles dessusdits ils promettent faire ratiffier ces présentes et obliger avec eux solidairement à l’effet et entretemenet d’icelles et en fournir à l’acqueresse cy après nommée au pied du présent acte vallable et solidaire dans quinze jours prochains à peine, ces présents néanmoins, lesquels esdits noms et chacun d’eux seul et pour le tout sans division renonçant au bénéfice de division discussion et ordre confessent avoir vendu quité ceddé delaissé et transporté et par ces présentes vendent quitent ceddent délaissent et transportent promettent garantir perpétuellement de tous troubles hypothèques et empeschements quelconques et en faire cesser les instances

à honneste femme Marye Cady veuve de deffunt Jacques Bouet demeurant au bourg de La Poueze ce acceptant qui a achepté pour elle ses hoirs

la moitié par indivis du lieu et mestairye de Blanche, ainsi qu’il se poursuit et comporte composé de maisons jardins rues issues prez pastures terres labourables et non labourables bois taillis et communs le tout siué en la paroisse de Vern avec les appartenances et dépendances de ladite moitié de mestairie, sans rien en réserver ni aurement confronter, ni préjudicier aux droits desdits vendeurs esdits noms à l’autre moitié de ladite mestairye qu’ils prétendent leur appartenir et à ceste fin de son pouvoir comme ils veront bon estre
tenue ladite métairie du fief et seigneurie de Precort aux cens rentes et debvoirs seigneurieux et féodaux qui en sont deubz tant en avoine volaille argent corvée ou bian et autre si aucun sont deubz que ladite acqueresse …et pour le regard des 6 années dernières ladite acqueresse en acquitera paeillement lesdits vendeurs au moyen de ce qu’ils l’ont subrogée et subrogent en leurs droits et actions … et au parsus s’il en est deub lesdits vendeurs en demeurent tenus
transportant la présente vendition faite pour et moyennant la somme de 1 000 livres sur laquelle demeure déduit la somme de 400 livres à laquelle lesdites parties ont composé deubz à ladite achepteresse pour (suivent plusieurs petites dettes payées par elle par moitié, dont la pension dudit Jean Meslet pour 3 années qu’il a esté en la maison de ladite Cady sans pouvoir travailler à cause qu’il estait infirme et malade en laquelle maison il a esté nory et entretenu par ladite Cady, laquelle fera cesses les poursuites de Robert Bouet son fils et de Nicolas Lebouvyer son gendre pour raison des frais taxés contre lesdits Boumier) et du surplus desdits 1 000 livres montant 300 livres ladite Cady a payé présentement auxdits vendeurs la somme de 180 livres qu’ils ont reçue en bonne monnaye courente suivant l’ordonnance, s’en contenent et en quitte icelle Cady
laquelle s’oblige par hypothèque spécial et priviligié desdites choses vendues payer le solde un mois après … auxdits héritiers dudit deffunt Mellet et jusqu’à payement la rente aux interests à raison du denier vingt
et moyennant ces présentes le bail à ferme fait entre lesdites parties desdites choses demeure nul et résolu sans aucun dommage
demeurent en outre ladite acqueresse tenue d’acquiter les vendeurs esdits noms de leurs part et portion de quelque contribution demandée par le sieur Demollière pour raison de quoi il avait appelé lesdits Boumiers par devant Mr le juge prevost de ceste ville
ainsi voulu stipulé et accepté à quoy tenir et faire et accomplir sans y contrevenir aux dommages et interests stipulés à deffaut, obligent lesdites paries esdits nom et qualités que dessus
fait audit Angers en notre estude présents René Touchaleaume et René Raffray praticiens audit Angers
lesdites parties ont dit ne scavoir signer

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Inventaire du chartrier de la seigneurie de Vern, 1600

Selon C. Port, Dict. du Maine-et-Loire, 1876 :

Vern : … Le domaine seigneurial forme dès le 11e siècle un fief important, possédé par une famille de chevalerie et qui pour le moins en partie, relevait au 12e siècle de Pouancé. Il constitue plus tard une châtellenie qui rendait aveu à Candé. Baudouin de Vern avait pris la croix en 1126.
Dès la fin du 13e siècle et durant le 14e siècle, la terre est aux mains, ainsi que Montjean, de la famille de Montalais. Le centre seigneurial est installé à la Cour-de-Vern, aujourd’hui encore la plus grosse ferme du pays, et où s’est conservée l’énorme motte féodale.
L’aveu de 1467 détaille « la court du lieu de Vern avecq les maisons, hébergements, chapelle en l’honneur de Dieu et de monseigneur St Jehan, le portail, murailles et douves anciennes, avec les jardins, vergers … les grands bois assis à l’entour, la motte ancienne dudit lieu douvée tout à l’entour dans ledit bois, près ladite court » avec droit de banvin pendant 40 jours depuis la St Gervais jusqu’à la veille de la St Etienne d’août, et de deux foires, dont une tenue dans le bourg même, l’autre sur le champ de foire.
La terre, un instant passée par acquêt vers 1770 à Louis de Beaumont, fit retour par retrait lignager en 1491 à Mathurin de Montalais, mari de Jeanne de la Jaille, – en 1563 à Françoie du Puy-du-Fou, veuve de Robert de Montalais, remariée avec François Thierry. – Marguerite de Thierry, veuve de Jean d’Angennes, 1604 – Guy du Bellay de la Courbe, 1622, 1634 – Pierre de Montalais, 1644, 1657, Françoise de Montalais, veuve de Jean de Bueil, 1667, qui vend la châtellenie par contrait du 8 mars 1710 à Madeleine Neveu, veuve de Pierre Crespin – Marie Jeanne Crespin, femme de Georges-Gaspard de Contades, maréchal des camps et armées du roi, 1715
Le mesure locale du froment comptait un boisseau pour deux des Ponts-de-Cé, et pour l’avoine, le boisseau comble pour deux boisseaux 1/2 et 2/3 d’écuellée.

Le banvin, dont est question ci-dessus, est le droit pour le seigneur de se réserver, à certaines périodes, le monopole de la vente du vin au détail. (M. Lachiver, Dict. du Monde rural, 1997)

Le même seigneur, ici Marguerite de Thierry, possédait aussi la seigneurie de Sceaux, dont je vous mets l’inventaire pendant à celui ci-dessous, le même jour sur un autre article.
Or, lorqu’un même seigneur possédait plusieurs seigneuries, il est bien évident que les sujets tout comme les officiers de ces seigneuries avaient des mutations de l’une à l’autre, car lorqu’on voulait trouver un poste d’officier pour un office vacant ou un bail pour un métayer ou closier, il est bien évident que c’est l’échelon seigneurial qui était souvent le relais opportun.
Il s’ensuit des échanges humains entre ces deux seigneuries, donc ici, notez bien l’histoire de Vern et Sceaux au 17e siècle, et soyez certains qu’il y a eu des passages humains de l’un à l’autre lieu.
D’aileurs, au passage, je vous ferais gentiement remarquer qu’actuellement aussi, lorsqu’une entreprise, ou l’état, a plusieurs unités, elle peut muter de l’une à l’autre, volontairement ou non, cela est un autre sujet.

L’acte qui suit est extrait des Archives Départementales du Maine-et-Loire, série 5E36 – Voici la retranscription intégrale de Pierre Grelier : Le 30 novembre 1600 inventaire des titres et enseignements concernant la chastellenie, terre et seigneurie de Vern que haulte et puissante dame Marguerite de Tyerry dame douairière de Pongny propriétaire de Boisorcant, le Pont Rouault, Romillé et Ponguy baille et met entre les mains de Me Sébastien Eveillard sieur du Boispilé, fermier avec Louis Quetyer, de ladite terre et seigneurie de Vern,
Et premier un gros papier relyé couvert d’une peau de veau avec le poil, qui sont les procès de remembrance des pleds et assises de la chastelennie et seigneurie de Vern au 2e feuillet duquel y a registre de deux tenues desdites assises, l’une des 16e et 16e jours de may 1598, signées du Puy du Fou, de Cheverue, Cormier, Preost, Pillaut, et Faultier, et l’autre tenue desdites assises des 15e et 16 août 1599 signée de Cheverue, Cormier, Pregost et Pillault ledit livre coté A

Item une autre remembrance couverte de parchemin aussi reliée où sont les procès de ladite seigneurie de Vern et qui contient neuf vingt huit feuillets, tant écrits que non écrits, au 1er feuillet est fait registre de la tenue desdites assises la 1ère tenue desquelles fut le 16 may 1565 et la 2e tenue d’icelles au mesme feuillet, fut le 12e jour de juin 1571, signée Denivart, Porcheron et Me Belin présent greffier, ledit livre coté B
Item un autre papier fort ancien couvert de parchemin my relié où il y a quelques déclarations et autres tiltres concernant ladite seigneurie, contenant 240 feuillets écrits sans comprendre ceux qui ne sont point écrits, le premier feuillet duquel est écrit s’ensuit la déclaration des choses héritaux que Jehan Jouon Robin Thibault Jouon Jamet Jouon Geoffroy Jouon etc auquel feuillet s’est iceluy trouvé soubsigné, J. Gaultier, Gareau, l’aultre est daté du 25 janvier 1462 au dernier feuillet duquel livre et icelle trouvé soubsigné en marge M. de Montalais et plus bas Lemaczon, Brochard, Moreau et Quetier, coté C

Item un autre papier en parchemein non relié contenant huit vingts feuillets tant écrits que non écrits, commençant au premier feuillet par Déclarations baillées à la seigneurie de Vern venues et levées de mot à mot en octobre 1586 et au dernier feuillet dudit papier iceluy tourné sont signés Brochart, R. Lemaczon, Quetyer, Moreau, et en marge M. de Montalays, coté D

Item un aultre papier relié couvert de parchemin contenant sept vingt treize feuillets tant écrits que non écrits commençant au premier feuillet Déclarations rendues à la seigneurie de Vern venues de mot à mot en octobre 1586, au sept vingt onzième feuillet duquel est enregistré la déclaration rendue par Sébastien Lequeu mari de Jacquine Herault aux assises de ladite seigneurie de Vern le 26may 1597 signée de Cheverue, Cormier et Joubert coté E

Item un autre papier couvert de parchemin et relié contenant six vingt seize feuillets, tant écrits que non écrits, au cinquième duquel est enregistre ce qui s’ensuit Jehan Joubert menuisier a aujourd’huu en jugement baillé par déclaration à noble et puissante damoiselle Françoise Du Puy du Fou dame de Vern et Seaulx au regard de sa terre seigneurie et chatellenie de Vern etc. Au soixante et dixième feuillet et iceluy tourné sont signé Cooacault, Joubert à la requeste de Morissault et de Cheverue coté F

Item un vieux papier couvert de parchemin non relié commençant au premier feuillet Remembrances des assises de Vern commençant le 25 février 1534 au dernier feuillet duquel papier est écrit ceste remembrance contenant septe vingt quatorze feuillets tant écrits que à écrire, signé M. de Montalays coté G

Item un autre papier couvert de parchemin non relié contenant quatre vingt quatre feuillets tant écrits que non écrits commençant au premier feuillet René de Montortier licencié ès loix sénéchal de la terre et seigneurie de Vern le 9 août 1557 (illisible) et finissant au soixante et quatrième feuillet iceluy tourné sont signés Porcheron, Joret et Thenot et coté H

Item un vieux papier couvert de parchemin non relié contenant trente et quatre feuillets tant écrits auquel sont registré les foy et hommages rendus à ladite seigneurie de Vern contenant au premier feuillet Roberet Jernigon seigneur du fief de la Meteraye a aujourd’huy fait foy et hommage simple à noble et puissante dame Jehanne de la Jaille dame de Chambellé etc. au dernier feuillet est registré la déclaration de la métairie de la Gesnerye coté J

Item un autre papier non relyé contenant les écrits des assises de Vern tenues le 2e et 3e jour de septembre 1596 commençant au premier feuillet Adjournements et autres exploits de justice et au dernier feuillet dudit livre qui est écrit ferme signés de Cheverue et Cormier coté K

Item un autre papier relyé couvert de porc contenant cent quinze feuillets tant écrits que non écrits, le premier feuillet écrit commençant ainsy C’est le papier censif des cens rentes et debvoirs annuels de la terre chatellenie et seigneurie de Vern coté L

Item, un aveu en parchemin du lieu de la Grinelière rendu par Jean Felet à noble et puissant seigneur Robert de Montalays, en date du 25 juin 1554 signé Felet et Henry à la requeste dudit Felet et iceluy côté M
Item une déclaration en parchemin de Hélye Brasdane veuve de feu M. Jehan du Brueil pour le lieu de la Saullaye en date du 8 novembre 1546 signée M. Thenot et P. Trochon à la requeste de ladite Brasdane présenté en jugement les jour et an que dessus par devant René de Montortier sénéchal de la seigneurie de Vern comme appert par ledit registre au bas de ladite déclaration signée B. Thiau coté M

Item un aveu en parchemin du lieu de la Baudonnière rendu par noble homme Pierre Liboreau Sr de la Pasqueraie à dame Françoise du Pui du Fou en l’assise de Vern le dernier jour d’août 1563 signé P. Liboreau, Porcheron, P. Chevrue. Ledit aveu présenté ledit jour et an aux assises de Vern devant Jehan Fousché sénéchal de ladite seigneurie de Vern ledit acte de présentation signé Théart coté O

Item une sentence en parchemein donnée par devant Jacques de Montortier sénéchal de ladite seigneurie de Vern le 9 avril mil cinq cent treize signé Theart, ladite sentence portant condamnation de payer la somme de 33 sous 6 deniers 21 boisseaux d’avoine 2 oies et 2 gélines pour le lieu de la Drouerlaie côté P

Par devant nous Mathurin Lepeletier notaire royal à Angers (le 30 novembre 1600) a esté présent duement soumis à notre cour ledit Me Sébastien Eveillard sieur du Boispilé lieutenant des eaux et forêts d’Anjou demeurant en cette ville paroisse de la Trinité tant en son nom privé que au nom et se faisant fort de Louis Quetier fermiers de la chastellenie terre et seigneurie de Vern lequel … a reçu de ladite dame de Pongny dame Marguerite de Tierry les papiers déclarations et titres et autres articles mentionnés en l’inventaire et mémoire cy-dessus escripts contenant iceluy inventaire des feuillets écrits et autres feuillets papiers déclarations titres enseignements que ledit Eveillard esdits noms a eu reçu et retenu pour s’en aider avec ledit Quetier aux fins de leurs fermes de ladite terre de Vern suivant …

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Mémoire d’Avent, l’oeuvre clandestine d’un Angevin à Saint-Julien-de-Concelles 1794-1802 : René Lemesle – chapitre 1er

(C) Editions Odile HALBERT
ISBN 2-9504443-1-8
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Chapître I

DE L’ANJOU A SAINT-JULIEN-DE-CONCELLES

  • Neuville et Grez
  • La commune de Grez-Neuville, près du Lion-d’Angers, dans le Segréen, au nord de l’actuel département de Maine-et-Loire, a été constituée en 1789 du bourg de Neuville et de sa succursale paroissiale, Grez, située sur l’autre rive de la Mayenne. En 1766 les prêtres desservent la succursale, mais il n’y a pas de pont pour s’y rendre et la rivière est large…

    En ce 23 février 1766, le grand froid dure depuis si longtemps que J. Davy ne se sou-vient plus quand il a commencé : il a vu la Mayenne prendre en masse, et on la traverse à pied sec. Il a même entendu dire que la Loire est traversée elle aussi à pied, entre Saint-Florent-le-Vieil et Varades. Les anciens ont beau essayer de se remémorer, aucun hiver ne leur a laissé un souvenir aussi glacial depuis 1709.

    Engourdi par le froid, monsieur le vicaire de Neuville et Grez, vient de faire deux grosses ratures. Il s’est trompé de sexe dès le début de l’acte de baptême et cela n’est pas pardon-nable. Peut-on confondre Marguerite avec René ? Enfin, il a écorché le prénom de Françoise-Scholastique Gardais. Certes, elle porte un prénom peu fréquent, mais il figure pourtant dans le rituel et il l’a oublié.

    Maître Jean Lemesle, forgeron à Neuville, est heureux d’avoir un fils pour lui succéder un jour. Il aime sa forge et il en est fier, depuis qu’il a appris son métier à Nyoiseau chez le père Gardais. Car Jean est le troisième fils de Jean Lemesle et d’Anne Houdmond, issus d’une longue lignée de marchands de fil et de filassiers du Craonnais et du Segréen. Le fil ne suffisait plus à nourrir tous les Lemesle qui y travaillaient et Jean avait choisi la forge.
    Marié à Nyoiseau, le 12.02.1760, à Françoise-Scholastique Gardais, il a eu avant 1766 deux fils, prénommés Jean-Charles, décédés peu après leur naissance.
    Paul Gaudin, parrain de ce nouveau fils Lemesle, n’a pas donné son prénom au baptisé ! Il est pourtant cultivé : il signe très habilement. Les Lemesle ne peuvent donc pas faire comme tout le monde, et appeler leur fils Paul comme le parrain, ou Jean comme le père… Pensez donc, ils l’ont appelé René, comme de nombreux Angevins depuis ce Plantagenet. On aime tant se souvenir du bon roi René dans ce petit coin du diocèse d’Angers, tellement qu’à Neuville et Grez il y a autant de René que de Pierre (1). Tous les Angevins ont la même adoration pour leur roi favori et nulle part en France on a autant de René dans les familles du XVIIIème siècle.

    Mais l’abbé J. Davy est jeune et avec le temps, il s’habituera à écrire correctement « Scholastique ». Avec M. le Recteur, qui est très âgé, il a la charge de 1 300 âmes et administre chaque année en moyenne 35 baptêmes, 14 mariages et 33 sépultures (1).

    La besogne n’est pas facile depuis que le pont s’est écroulé. Pour traverser la Mayenne, qui sépare Neuville de sa succursale Grez, l’abbé J. Davy prend souvent le bac. Le prieur de la Chapelle de Grez, Louis-Sébastien Bestrie y dit chaque jour la messe sous le retable de cuir doré, sans avoir le droit d’administrer les sacrements de mariage et de baptême ; M. le Vicaire doit s’y rendre.

    Le petit René ne grandit pas longtemps à Grez-Neuville, car bientôt son père quitte la forge pour celle de Vern-d’Anjou, plus apte à nourrir la petite famille composée déjà de Marie-Anne, René et Charlotte-Françoise.

    L’église de Neuville, reconstruite en 1704, conserve encore, en 1990, un arceau ogival du XIIIème siècle et un autel richement décoré de marbre.

  • Vern-d’Anjou
  • La petite famille s’installe à Vern vers les années 1770. Le bourg est un noeud de communications : de Candé et du Louroux-Béconnais au Lion-d’Angers, et de Segré à Saint-Georges. Il est aussi un centre artisanal préindustriel, avec un four à chaux et une briquetterie à la Drouère, qui fournit « une excellente chaux, préférable à celle de Montjean et d’Angers » pour approvisionner le Craonnais, ainsi que des ardoisières à la Bichetière et à la Pinardière (2). En 1806, Vern compte 14 moulins dont 4 à eau et 4 huiliers, 9 filassiers, 4 cardeurs, 3 tanneurs, 1 charbonnier et 34 fileuses (2).
    Le jeune René grandit au milieu de ses quatre soeurs et de son frère, la famille s’est agrandie à Vern de Gervais, Anne et Perrine. Il aime le contact de ses camarades fils d’ouvriers et artisans, admire les fours à chaux, les ardoisières, où il se fait des amis. Il découvre les aspects variés des activités humaines et il saura bientôt s’y fondre comme un caméléon. Mais n’anticipons pas, car pour le moment son père le cherche encore.

    le prieuré de Vern en 1910

    Tout en martelant, Jean Lemesle fulmine. Françoise-Scholastique ne lui a donné qu’un « bon à rien » : René a encore disparu dans l’un de ces endroits dont il a le secret.
    Son fils se plaît mieux dans la fraîcheur de l’ancien prieuré, parmi les livres, que dans l’atelier de la forge.
    C’est pourtant à la forge qu’est sa place, car il faudra bien qu’il la prenne un jour en main, car Gervais n’en sera jamais capable : il est maladif.
    Il y a du travail à la forge et ce fainéant n’est pas pressé d’apprendre le métier de forgeron.

    Voilà qu’il s’est mis dans la tête d’étudier avec M.le Recteur. Qu’a-t-il besoin d’étudier ? On sait écrire depuis longtemps chez les Lemesle et cela est bien suffisant. Jean craint l’influence du prêtre qui pourrait bien lui ravir son fils.
    Puis un jour, René annonce à son père sa décision :

  • Tu es maréchal en oeuvres blanches ; ta forge attire du monde, et je sais que tu veux que je te succède, mais je souhaite entrer au séminaire car Dieu m’appelle à une autre forge, celle des âmes.
  • Françoise-Scholastique tente en vain de s’interposer entre les deux hommes qui s’affrontent maintenant. Elle est si fière de ce fils et elle souhaite tant qu’il devienne prêtre. Seulement, son père s’y oppose : il ne pense qu’à la forge…
    Elle se souvient alors de sa jeunesse et une idée jaillit dans sa tête :

  • Ne te tracasse donc pas comme cela pour la forge, Jean. Regarde plutôt chez les Phelippeau, à la Pouèze, ou chez les Robert, au Louroux-Béconnais : ils ont chacun un fils qui ferait bien l’affaire, et puis tes filles… Te souviens-tu comment tu m’as connue ?
  • Oui, Jean se rappelle. C’était à Nyoiseau, il y a tout juste 20 ans. Le père Gardais l’avait pris comme apprenti. Il avait une fille lui aussi… une Françoise-Scholastique. Les deux jeunes gens s’étaient unis au pied de la magnifique abbaye.
    Jean a déjà remarqué le jeune Mathurin Phelippeau de la Pouèze, et le jeune François Robert du Louroux-Béconnais : eux au moins, ils aiment le travail. Il pourrait en parler au père Phelippeau, et prendre son fils comme apprenti.
    Françoise-Scholastique a peut-être raison, et il s’avoue vaincu. Il a perdu son fils, car qu’est ce qu’un fils au séminaire pour un forgeron ? Alors, il admire l’ardeur de Mathurin, et l’une de ses filles fera bien l’affaire… Tout de même, jamais il ne pourra se faire à l’idée que lui, Jean Lemesle, a un fils prêtre.
    A la forge on voit passer du monde, ceux de Loiré, de Craon, de la Pouèze, du Louroux-Béconnais, de beaucoup plus loin ; on colporte les nouvelles, on discute.
    Vern se prépare à la Révolution, elle va devenir républicaine et Jean Lemesle sera bientôt l’un de ses partisans.

  • Chemazé
  • Située à 7 km au sud-ouest de Château-Gontier, la paroisse de Chemazé possède en 1789 deux succursales : Molière et Bourg-Philippe. Rattachée au diocèse d’Angers, elle va en être séparée le 26.02.1790 pour rejoindre le département de la Mayenne nouvellement créé.
    En ce mois de décembre 1790, René s’apprête à rendre visite à sa famille dont il n’est séparé que par 27úkm qui sont vite franchis à pied. Il vient d’être nommé à Chemazé, sur la route de Segré à Chateau-Gontier. A 24 ans, il manque d’expérience, mais doit prendre une terrible décision : il a l’intention d’en faire part à sa mère. Il redoute la discussion avec son père, car pour Jean Lemesle cela ne fait aucun doute : son fils doit prêter serment.
    Et Françoise-Scholastique est inquiète de ce serment car son intuition féminine lui annonce des jours difficiles pour son fils. Cette Constitution ne lui dit rien de bon. Qu’adviendra t-il s’il prête serment comme lui suggèrent son père et son curé, Jean Gentilhomme ? Elle a bien senti qu’il était influencé par les deux hommes, plus âgés que lui. Ils ont des tas de bonnes raisons : liberté, égalité, fraternité…, mais son René ne peut tout de même pas renier son Dieu !
    Doucement, elle le confie à la Vierge du retable qu’elle a vue dans l’église de Chemazé, le jour où toute la famille était venue assister à l’installation.

    Noël s’est passé dans la tension à la cure de Chemazé. Aujourd’hui Jean Gentilhomme et son vicaire René Lemesle allongent le pas pour rencontrer Louis Labouré, vicaire desservant la succursale de Molière.
    Les 4,2 km sont vite franchis, car les deux prêtres sont habitués aux distances à pied. De trente ans son aîné, M. le Curé exprime fermement sa position : « nous prêterons serment tous les deux ». Et chemin faisant, il affirme sa confiance en cette république naissante.
    La jeunesse de René le rend dépendant de cet homme si ferme sur ses positions. D’ailleurs, il se sent aussi ébranlé par la position de Pierre Letourneur, vicaire de la succursale de Bourg-Philipe, qui, lui aussi, préconise de prêter serment. Pierre Letourneur se rétractera après avoir prêté serment, et reprendra son ministère en 1801 (3).
    Louis Labouré, natif de Gennes, les reçoit cordialement, mais la discussion est vive cependant. Louis n’est pas de l’avis de son curé, mais il ne réside pas sous le même toit et peut se montrer plus indépendant. Il s’apprête à refuser le serment ; plus tard il rejoindra l’armée vendéenne, puis se cachera dans le pays de Laval, Meslay et Changé, avant de devenir au Concordat curé de Loigné (4).

    Jean Gentilhomme, né à Angers en 1737, curé de Chemazé, sera élu officier municipal après son serment, mais sera destitué le 09.01.1793. Il apostasiera le 07.02.1794 et jouira à Château-Gontier d’une pension de l’état en 1796 (4).

    Nous retrouvons René Lemesle grâce à l’article « Chemazé » du dictionnaire bibliographique de l’Abbé Angot pour la Mayenne, et l’article « Vergonnes » de celui de Célestin Port pour l’Anjou (5,ancienne édition)

    René Lemesle prête d’abord un serment restrictif, mais finit pas suivre l’exemple de son curé. Il est nommé curé de Vergonnes le 02.08.1791. Il ne reste curé intrus de Vergonnes que cinq semaines et est remplacé le 13.09.1791 par Violay (3).

    Lemesle, vicaire de Chemazé, est élu le 02.04.1791, mais c’est Gagneux qui signe en 1793 « curé et officier public » (5).

  • Vergonnes
  • Bordée au nord par la forêt d’Ombrée, surplombant Noëllet et Combrée, entre Pouancé et Le Lion-d’Angers, la bourgade de Vergonnes ne compte que 248 âmes. Le maire, Jacques Jallot, est un bon patriote. Le curé Trochon a prêté serment en février 1791, puis s’est rétracté aussit“t. Il sera arrêté le 4 germinal V (=24.03.1797).
    Voici donc René, à peine âgé de 25 ans, nommé curé assermenté d’une paroisse de 248 âmes majoritairement patriotes, en pleine région de bourgs patriotes.
    Le registre de catholicité de Vergonnes est muet sur Lemesle. S’il y est resté un mois, il n’a laissé aucun acte dans le registre. C’est Paillard, vicaire, qui le signe jusqu’au 28.08.1791 et ses actes se suivent à un rythme normal. Puis, dès le 06.09.1791, on voit la signature de Gagneux qui y reste longtemps ; il signe en 1793 « curé et officier public ».
    Les sources écrites utilisées par Célestin Port (5), qui indiquent que René Lemesle n’aurait été que le seul mois d’août 1791 curé intrus de Vergonnes, sont probablement des traces de sa nomination ; il n’y a aucune trace de son installation dans le registre de catholicité et par ailleurs le registre communal des délibérations de cette époque n’existe plus.
    René Lemesle ne s’est donc probablement jamais présenté à Vergonnes et il disparaît dès août 1791. Qu’est-il devenu de 1791 à 1793 ?

  • La longue marche
  • Pendant les deux années qui suivent le mois d’août 1791, on perd la trace de René Lemesle. Il n’est pas pensable qu’il soit allé se cacher à Vern chez un père patriote, qui l’aurait mal supporté, au milieu d’un bourg très patriote.
    René va immédiatemment apprendre à se cacher tout seul, en se transformant en ouvrier agricole, etc,… favorisé en cela par son jeune âge et sa force physique.
    Il sait utiliser toutes les formes de déguisement pour se rendre « invisible », et n’a qu’une obsession : ne pas impliquer sa mère et ses soeurs.
    Il parviendra si bien à ne pas compromettre sa famille et à se faire oublier, que, lorsque Françoise-Scholastique sera arrêtée avec deux de ses filles, Marie et Charlotte, elles seront envoyées à la Commission Militaire d’Angers par Chollet, agent municipal du district de Segré le 27 germinal II (=16.04.1794), mais elles ne seront pas exécutées (Liste des prisonniers de Vern envoyés à la Commission militaire d’Angers par Chollet, agent national du district de Segré) : femme Lemesle (sa mère), fille Lemesle (sa soeur), femme Phelippeau (sa soeur) (6).
    Sa soeur Marie épouse constitutionnellement à Vern, le 21.11.1791, Mathurin Phelippeau. Sa seconde soeur, Charlotte, épousera François Robert le 20.11.1798 au Louroux-Béconnais.
    A quelques kilomètres de Vern, Noël Pinot, curé insermenté du Louroux-Béconnais, prêche la résistance à la Constitution Civile du Clergé ; il doit se cacher avant de mourir sur l’échafaud le 27.02.1794, place du Ralliememt à Angers.
    La bonne parole de celui qui deviendra le bienheureux Noël Pinot parvient-elle à René ? On peut le supposer. René, qui ne fait pas connaître sa qualité de prêtre, et encore moins sa qualité de prêtre assermenté, commence clandestinement une longue marche de réhabilitation, car il regrette son serment. Pendant cette période de sa vie, il fait l’apprentissage de la clandestinité dans laquelle il excellera.
    Il se cache au nord-ouest de l’Anjou, région qui vit quelques soulèvements dès mars 1793. La répression est sévère à Combrée qui compte 22 hommes guillotinés le 01.04.1793 (7). Peu après, avec un groupe d’angevins du nord de la Loire, René Lemesle rejoint près de Nantes la division de Lyrot, qu’il suivra désormais. Il a définitivement tourné le dos à Vern la patriote. Voici ce qu’en dit l’Abbé Angot :

    René Lemesle, vicaire, finit par se joindre aux Vendéens ; il affirme en l’an X qu’il assistait Bonchamps quand il sauva la vie aux prisonniers républicains, à Saint-Florent. Il habitait alors à Saint-Julien-de-Concelles, agé de 36 ans. Il passa dans le diocèse de Nantes, décédé à Nantes le 07.04.1824 (4).

    Ce passage à Saint-Florent-le-Vieil peut être rapproché de l’anecdote ci-après, racontée dans ses Mémoires par la marquise de la Rochejacquelein :

    On promena un peu M. de Lescure sur la plage, pour éloigner la foule, et, dans le moment où elle était moins nombreuse, une quarantaine d’officiers mirent le sabre en main et formèrent un cercle ; par ce moyen, on l’embarqua facilement. M. du Rivault, ma fille, mon père et moi, avec nos domestiques, nous sautâmes dans le bateau. Melle de Mesnard aussi ; mais le bateau étant trop petit, nous lui dîmes que nous ne pouvions y prendre sa mère, couchée sur un brancard, et elle redescendit à terre.
    Nous voilà donc partis; un matelot en chemise, tout en sueur, nous conduisait ; mon père lui dit de nous faire contourner l’île et de nous mener jusqu’à Varades, pour éviter à M. de Lescure le danger et la fatigue d’un double débarquement. Jamais on ne put l’y faire consentir par promesse, ni par menace ; enfin mon père tira son sabre, alors cet homme lui dit : Monsieur, je vous avoue que je ne suis pas marin, je suis un prêtre ; la charité me fait passer ces pauvres gens depuis huit heures sans relâche, faute de matelot, mais je n’ose traverser que ce petit bras peu profond, et je risquerais de vous noyer si je vous faisais faire le tour de l’île. Nous fûmes contraints d’y débarquer… (8)

    La marquise avait une mémoire considérable des noms. Si le prêtre avait dit son nom, elle l’aurait sans nul doute retranscrit. Il existait donc au sein de l’armée catholique et royale des prêtres qui se faisaient discrets sur leurs origines. René Lemesle en était ; il avait de bonnes raisons, sa famille, son serment. Le 23 novembre 1793, Jean Lemesle et Mathurin Phelippeau, père et beau-frère de René, déclarent le décès de Gervais, le fils cadet de Jean. A-t-il reconnu quelques semaines plus tôt son frère René dans les rangs de l’armée vendéenne ? A-t-il tenté de le suivre ? Nous savons seulement que l’armée vendéenne est bien passée à Vern fin octobre 1793.
    Gervais est-il mort naturellement ? Nul ne sait, mais à Vern les règlements de compte et les morts violentes furent nombreuses pendant la guerre civile (voir Annexe I).

  • Le ministère clandestin
  • Saint-Julien-de-Concelles s’étale sur 6 km, sur la rive gauche de la Loire, à l’est de Nantes. Bordée par La Chapelle-Basse-Mer, Le Loroux-Bottereau, Haute-Goulaine et Basse-Goulaine, cette paroisse de 3ú200 ha compte 3ú165 habitants en 1790 (9). Leur activité est tournée vers le trafic fluvial, la pêche, la culture de la vigne, du chanvre…
    L’abbé Frémont, vicaire insermenté de Saint-Julien, y exerce clandestinement fin 1791, puis il est à Haute-Goulaine début 1792. Il sera arrêté le 05.06.1792 et déporté en Espagne. Un prêtre irlandais, du séminaire de Nantes, vient pendant quelques mois dire la messe dominicale en l’église de Saint-Julien à 7 h, alors que Le Couteux, curé assermenté, la dit à 10 h. Cette situation est probablement due à l’organisation de fidèles (voir p.63). Les conflits sont nombreux :

    A messieurs les administrateurs du district de Clisson : nous vous donnons avis que le sieur Formon (sic) prêtre cy devant vicaire de Saint-Julien-de-Concelles, après avoir passé trois mois dans notre municipalité, et exercé toute l’emprise de l’aristocratie, s’est retiré depuis quelque temps à Haute-Goulaine et qui entraîne une grande partie des habitants de notre paroisse, qui les confesse et leur fait faire leurs pâques depuis le commencement du Carême, et attire aussi la majeure partie des enfants, qu’il leur fait faire leur première communion quoiqu’ils ne soyent point instruits de leur religion ; tous les jours le nombre en diminue dans notre église puisque nos prêtres nous en ont porté plainte, c’est pourquoi que nous vous le dénonçons et requerons qu’il soit conduit au département lieu de sa destinée suivant l’arrêté du département et sommes messieurs avec un fraternel attachement à Vertou le vingt et un mars 1792, vos très humbles serviteurs Saupin maire, Michel David, Gendron officier municipal, Besnard, Rozier, Affilé, Sauvestre (10)

    A messieurs les membres du directoire du département de la Loire-Inférieure résidant à Nantes : le citoyen Riverin Md épicier à Nantes ayant esté passer les festes de Pasque au bourg et paroisse de Saint Julien canton du Loroux, y a vu avec surprise un prêtre irlandais non conformiste y dire la messe et ce à l’invitation de nombreux aristocrates qui se cotisent entre eux pour le salaire du dit prêtre a qui ils donnent six livres par chaque messe à l’insu du curé constitutionnel, ce qui attire un monde considérable de l’endroit et des paroisses voisines, qui ne veulent pas reconnaître de prêtre assermenté, si bien qu’à la grand’messe de la paroisse, il ne se trouve pas soixante habitants patriotes. D’après cet exposé il en a résulté une rixe populaire, dont j’esté le témoing. Un nommé Guillaume Pineaux, domestique dans la paroisse du Loroux, ayant refusé à payer sa contribution pour la messe du prêtre irlandais le jour de pasque a été battu et maltraité dans la cimetière et à la porte de l’église de Saint Julien, après la dite messe basse qui se dit à sept heures du matin, heure ordinaire, qui se dit tous les faites et dimanche depuis environ cinq mois, le dit Guillaume Pineau étant bien blessé a esté trouvé le chirurgien juré du Loroux qui la pansé comme il apput. Par son procès verbal, attaché en joint, que je requis pour preuve des faix que je citte cy dessus et dont plusieurs citoyens patriotes du dit lieu mon priez de dénoncer devant vous, ne voulant pas paraître estre le dénonciateur des troubles que cette messe occasionne, crainte destre assommé par ces fanatiques qui les menassent tous les jours, c’est pourquoi ils désiraient que cette messe nussent plus lieu et que votre arresté soit suivie de point en point, qu’il vous plut de déffendre au prêtre irlandais d’aller davantage faire aucun office ecclésiastique dans l’église de Saint Julien. Le curé Mr le Couteux est bien du mesme avis, mais nossent vous requerir par la mesme cause de ces bons citoyens, je me suis chargé de la présente requeste pour vous prier d’y avoir égard. signé Riverin, Nantes le 11 avril 1792 (10)

    Rapporté par moi René Denis Ragneau Maitre es arts et en chirurgie, chirurgien juré commis au rapport demeurant ville et paroisse du Loroux Bottreau, département de la Loire Inférieure, district de Clisson, Canton dudit Loroux, que ce jourd’hui avril 1792 l’an 4 de la liberté, le nommé Guillaume Pineau agé de 49 ans domestique chez Pierre Lembert laboureur à ses terres demeurant au village de la Guissaudière en cette paroisse du Loroux, est venu me trouver à mon domicile se plaignant davoir été battu et maltraité ce même jour, auquel j’ai remarqué deux contusions l’une légère sur la partie moyenne postérieure de l’avant bras gauche et au dessous du coude une autre plus considérable large de 8 pouces environs du même c“té, encore du même c“té une excoriation sur le coude, ce qui relativement aux fêtes ne peut l’empêcher de vaquer Mercredi à son travail qi’il n’arrive pas d’accident. Les contusions et excoriations paroissent faite par un instrument contondant comme baton, pierre, chute ou autre. Je certifie le présent sincère et véritable en foi de quoi… signé D. Ragneau (10)

    René Lemesle arrive à Saint-Julien-de-Concelles le 07.10.1794. Il vient de Saint-Sébastien, car les deux premières minutes copiées dans le registre sont des baptêmes de Sébastiennais âgés de deux et trois mois respectivement.
    Son action a été relatée 100 ans après par l’abbé Petard (11) :

    « René Lemesle né le 23.02.1766 à Grez-Neuville, vicaire à Chemozé (sic) (partie de l’ancien diocèse du Mans, dont a été formé celui de Laval). Au passage de l’armée vendéenne, il s’était attaché à nos paysans et était venu chercher asile sur le territoire de Saint-Julien. Cet abbé Lemesle devint l’ap“tre de notre pays pendant les plus mauvais jours de la Révolution. Il ne comptait encore que 28 ans quand il se rencontra pour la première fois avec l’abbé Bertaudeau. Déguisé et changeant d’asile tous les jours, il échappa constamment aux poursuites acharnées dont il fut l’objet. Il célébrait la messe et administrait les sacrements partout o— il le pouvait, dans les granges, dans les celliers, quelquefois en plein champ (la messe fut assez souvent célébrée aux Planches, à la Vrillière et dans les greniers de la Richardière, au bourg). Semblable aux prêtres de la primitive église, il avait avec lui son diacre qui ne le quittait point et l’aidait dans la célébration des saints mystères. L’abbé Lemesle eut près de lui l’abbé Bertaudeau jusqu’au mois de mai 1795. Le vénérable confesseur de la foi portait partout sur lui un petit registre, sur lequel étaient inscrits fidèlement les baptêmes, mariages et sépultures. Ce registre, précieuse relique d’un apôtre dont le nom sera à jamais béni parmi nous, existe encore pour l’année 1799 et les années qui suivent jusqu’en 1803. Les actes antérieurs à l’année 1799 ont été perdus ; mais une copie bien fidèle en est conservée dans les archives du presbytère. » (11)

    En 1802, l’abbé Charbonnier vient aider quelques mois Lemesle.
    Gautron, fabriqueur en charge, verse une somme de 137 livres à Charbonnier. Les Concellois estiment qu’elle appartient à René Lemesle :

    « Il n’est pas juste, disent-ils, que M. Lemesle, ancien desservant, soit frustré de son traitement au profit d’un nouveau qui n’est arrivé que 5 mois après l’amas de la somme » (11).

    Pendant 7 ans, avant cet incident, l’abbé Lemesle a vécu de l’hospitalité et de la charité de ses ouailles. En février 1803, il est nommé vicaire à Saint-Nicolas de Nantes et c’est Mathurin Livinic qui prend la cure de Saint-Julien. Cependant son départ de la paroisse laissera des regrets universels parmi les Concellois. Ceux-ci ne surent probablement jamais qu’il avait autrefois prêté serment. Il s’était certes immédiatement racheté, et ceux qui avaient connaissance de l’existence de ce serment étaient en Anjou.
    En règle générale, pendant la guerre civile, la population gardait un certain mépris pour les jureurs qui s’étaient repris par la suite. Ainsi à Chanzeaux, on raconta au comte de Quatrebarbes, 30 ans après les faits, l’anecdote suivante. Les assiégés sont réfugiés dans le clocher, sous la conduite de Maurice Ragueneau. Les républicains ont amené de la paille et mis le feu :

    L’abbé Blanvillain, environné de mourants qui lui demandaient sa bénédiction venait d’être blessé à la tête. Inondé de sang, épuisé de souffrances en face de cette mort présente de toutes parts, un dernier regret de la vie s’empara de son âme, et sa bouche laissant échapper quelques paroles de merci, il exprima à voix basse le désir de se rendre. « Qu’ai-je entendu ? reprend Ragueneau ; ah, monsieur, est-ce à vous de mendier votre vie ? Rappelez-vous le serment sacrilège que vous avez prononcé ; Dieu vous donne pour l’expier le bonheur du martyre. Remerciez le, priez pour nous, et donnez l’exemple du courage … » (12)

  • René Lemesle oublié
  • Nommé vicaire à Saint-Nicolas de Nantes en février 1803, curé de Teillé en 1808, curé de Cordemais en 1810, aumônier du lycée de Nantes en 1818, René Lemesle meurt iacre d’office à la cathédrale le 07.04.1824.
    Sa soeur cadette, Anne, a épousé à Vern le 24.11.1801 un marchand de toile, René Poirier, qui s’installe à Nantes vers 1805. Leurs deux enfants, également marchands de toile à Nantes, furent sa seule famille proche.
    De nos jours, nul ne se souvient de lui à Grez-Neuville et à Vern-d’Anjou. Aucune trace de lui dans les archives et monographies communales. Seuls, Mercier-la-Vendée du Lion-d’Angers, et les serviteurs de M.de la Grandière, ont laissé à Grez-Neuville le souvenir de la guerre civile (1).
    René Lemesle aurait aimé cette discrétion, toute à son image. Mais deux siècles ont passé, et pour sauvegarder l’oeuvre des prêtres clandestins, il paraissait souhaitable de faire connaître un exemple.
    J’ai choisi le registre clandestin de Saint-Julien-de-Concelles par hasard, dans le seul but d’attirer l’attention sur ce type de documents en voie de perdition.
    Ces registres conservent la trace de l’héro‹sme de beaucoup de nos ancêtres et leur mémoire y est consignée. Les Concellois risquaient le martyr pour la foi (voir p.30).
    J’avais commencé la copie informatique du registre de Saint-Julien, afin d’en assurer la sauvegarde, lorsqu’une chose étrange m’arriva.
    Une nuit, je me suis réveillée avec une intuition : « Ce Lemesle dont j’allais faire connaître l’oeuvre ne m’était pas inconnu » ! J’avais autrefois fait une généalogie « Lemesle » dans le Segréen, et des générations de marchands de fil, dont je descends, s’y succédaient de 1600 à nos jours.
    Me levant immédiatement, je me dirigeais vers mon dossier généalogique « Lemesle », qui sommeillait depuis plus de 5 ans. A peine ouvert, le dossier confirmait l’intuition : René Lemesle était présent à Vern en 1800 comme « témoin » d’une déclaration de naissance à l’officier municipal. Il y était dit « vivant à Saint-Julien-de-Concelles ».
    Le prêtre clandestin, dont j’allais faire connaître l’oeuvre, était à Vern en 1800 et il m’était allié.
    Une grande émotion me saisit alors : je travaillais depuis plusieurs années sur la population lorousaine sans me douter que j’avais un lien quelconque de parenté avec le prêtre clandestin voisin de Saint-Julien !
    Remontant alors du doigt la volumineuse descendance, à la recherche du lien de parenté, je découvrais qu’il était le frère de mon ancêtre Marie, celle-là même qui épousa constitutionnellement Mathurin Phelippeau.
    Je me recouchais, avec la certitude qu’une main divine m’avait guidée à lui.

      à René LEMESLE mon « arrière (4 fois)…grand-oncle »
      fait à Nantes le 25.12.1990
      Odile HALBERT

    Odile Halbert –
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