Langueyeur : cession d’office, Angers, 1625

le vendeur était vigneron et exerçait la charge de langueyeur depuis 14 ans

  • Ce billet fait suite à celui d’hier, également consacré au langueyeur, et vous expliquant en détails ce métier.
  • La cession d’office ci-dessous est manifestement faite sous la pression d’une saisie, et le vendeur tente de retrouver des liquidités.

    L’acte qui suit est extrait des Archives Départementales du Maine-et-Loire – Voici la retranscription intégrale de l’acte : Le 18 mars 1625, devant nous Pierre Bechu notaire royal Angers, furent présents et personnellement establis chacuns de
    Pierre Gendron vigneron Me langueyeur et visiteur de porcs tant gras que de nourriture qui se vendent en ville, faulxbourgs dudit Angers et marchés en déppendants, et Catherine Lecommandeulx sa femme de luy de luy quant à ce deuement authorisée demeurants en la paroisse de Saint Samson de ceste ville d’une part, (nous apprenons qu’il est d’abord vigneron de son état, et a aussi l’office de langueyeur, ici dénommé avec beaucoup de précision)
    et Urban Lhoustelier marchand demeurant sur les treilles paroisse de la Trinité de ceste ville d’aultre part, (dommage que nous n’ayons pas le métier de Lhoustelier, mais une chose est certaine ni l’un ni l’autre ne savent signer)
    lesquels deuement soubzmis et mesme ledit Gendron et sa femme chascun d’eulx seul et pour le tout sans division de personnes et de biens ont fait et font entre eulx le contract de vendition cession promesse et obligation qui ensuit
    scavoir est que ledit Gendron et sa femme ont vendu quitté ceddé et transporté, vendent cedent et transportent audit Lhoustelier qui a achepté et prins pour luy ses hoirs, l’office et droict dudit Gendron de visiter et langueyer les porcs tant gras que de nourriture qui se vendent en ceste ville faulxbourgs et marchés en déppendant,
    auquel office de visite et langueyeur ledit Gendron a esté receu par Monsieur le Lieutenant Général et juge de la prévosté de ceste ville par acte du 6 décembre 1611 et 20 décembre 1618, en consequence du retrait d’achapt dudit office fait par ledit Gendron, passé par Rogier aussi notaire royal en ceste ville le 28 octobre 1611 avecq maître Anthoine Carron Sr de la Villette demeurant en la ville du Salla ayant les droits ceddez d’Arnault le Gascon exempt des gardes du corps du Roy et Jehan Godefroy controlleur ordinaire des guerres et gens du guet donataire et pourveu de par sa nature dudit office de visite et langueyerie de porcs du pays d’Anjou et le Perche, villes et marchés en deppendant, comme appert par lettre d’expédition auxdits le Gascon et Godefroy du 19 novembre 1606 signé Ramboullet notaire extraordinaire de sa Majesté pour ung office de langueyeur et visite de porcs, des gages proffits et esmouluements en déppendant, (ceci est l’historique de l’office de langueyeur vendu, et on constate qu’il a d’abord été acquis par des gens totalement étrangers à l’Anjou, mais vivant sans doute à Paris, qui l’ont revendu)
    jouir user et exécuter à l’advenir par ledit Lhoustelier avecq Jehan Chauveau, Vallotz ? et Guillaume les Burchais Me langueyeurs et visiteurs de porcs audit Angers faulxbourgs et marchés en déppendant comme eust et pouvoit faire ledit Gendron en conséquence de sondit contrat et provisions esquels il a mins et subrogé et subroge par ces présentes ledit Loustelier sans que ledit Gendron soit tenu de luy garantir sinon en tant et pourtant qu’il en sera garanti de se faire par ledit Loustelier pourvoir et recepvoir audit office et droit par monsieur le lieutenant général et aultre juge qu’il appartiendra à ses despends sans que ledit Gendron y soit aulcunement tenu ne luy bailler et fournir aulcuns tiltres fors néanmoings que ledit Loustelier pourra faire faire à ses despends coppyes extraits vidimus et collations des contrats, provisions, et actes de réceptions ensemble de certaine ordonnance et grosse donnée par monsieur le lieutenant général le 24 décembre audit an 1618 par ledit Gendron représentée demeurée entre ses mains, portant déffence à toutte personne de troubler et empescher ledit Gendron et consorts en l’exécution de leurdit office d’abattre visiter ne langueyer aulcuns porcs tant grans que de norriture en ceste dite ville et faulxbourgs foires et marchés d’icelle suivant leur permission, lesquelles pièces néanmoings appartiennent auxdits vendeurs pour une partie qu’ils ont pareillement ceddées audit Lhoustelier pour s’en servir avec lesdits Chauveau et les Barots, (je n’ai pas compris pourquoi toutes les copies des pièces sont à la charge de l’acheteur et pourquoi les vendeurs ne les cèdent pas, ce qui généralement le cas lors d’une vente, on donne les titres)
    ladite vendition cession et subrogation faite pour et moyennant la somme de 70 livres tournois que ledit Loustelier a promis et promet par ces présentes baillet et employer pour partie du rachat extinction et admortissement de la somme de 6 livres 5 sols de rente hypothécaire annuelle perpétuelle vendue et constituée pour la somme de 100 livres par lesdits Gendron et Lecommendeux sa femme audit Loustelier et Mathurine Maurabin sa femme à Michelle Buscher par devant Goussault aussy notaire royal en ceste ville le 24 ,ovembre 1619 et desquels Gendron et sa femme ledit Loustelier et femme auroient contrelettre d’indemnité et obligation de ladite constitution le prix d’icelle auroit au tout tourné au profit desdits Gendron et femme, auxquels ledit Loustelier est demeuré tenu et obligé par ces présentes les acquiter liberer et indemniser ladite constitution de la somme de 4 livres 7 sols 6 deniers à laquelle revient ladite somme de 70 livres dudit office de langueyeur à commencer de ce jour lequel Loustelier faisant ledit payement demeurera et demeure subrogé au lieu et droits d’hypothèque de ladite somme de 70 livres de ladite Buscher contre ledit Gendron et femme acquis par ledit contrat de constitution, et ou ledit Loustelier seroit ennuyé et troublé en l’exécution dudit office le garantir pour ce qui est de leur fait seulement et non autrement, … pour assurance de l’achapt duquel office de langayeur en cas d’éviction d’iceluy procédant du faict desdits vendeurs ledit Lhoustelier en cas de la vente des biens desdits vendeurs soyt conventionnellement ou autrement pourra nonobstant ces présentes procéder par interruption contre les acquéreurs conventionnels ou s’opposer aux cryées en cas de vente judiciaire et demander par jugement que les créanciers postérieurs audit Lhoustelier baillent caution de rapporter audit cas d’éviction dudit office de langayeur la somme de 70 livres prix dudit office desduite sur ladite somme de 100 livres portée en la contrelettre du principal de ladite constitution de rente de 6 livres 5 sols … (il n’est pas surprenant que le paiement serve à éponger une dette, et ceci est souvent le cas lors d’une vente, mais ici, les dernières lignes attestent entre les lignes mais néanmoins clairement à mes yeux, que le vendeur est sous saisie judiciaire de ces biens, et que l’acheteur de l’office, qui était son caution vient lui acheter l’office pour épurer partie d’une dette, mais doit s’entourer d’un tas de précautions en cas de vente judiciaire qui entraînerait l’empêchement d’exercer l’office de langueyeur. En fait, on devine qu’il est en train d’acheter l’office avant les criées et mises à prix, qui sont le sort de toute vente judiciaire)
    fait et passé audit Angers en nostre tabler en présence de Me Jacques Baudin Pierre Lemaistre et Hardouin Chartier. Signé Baudin, Lemaistre, Bechu (on découvre ici que les 2 protagonistes ne savent pas signer)

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    Marchand poudrier, ou comment les marchands tanneurs obtenaient le tan autrefois.

    Le terme poudre a beaucoup de sens, et le métier de poudrier par conséquent lui aussi. Voici en bref, les sens alors les plus connus (selon Encyclopédie Diderot, qui en donnent des pages et des pages) :

    POUDRES OFFICINALES, (Pharm. thér.) on garde dans les boutiques des Apothicaires, sous forme de poudres, un grand nombre de médicamens tant simples que composés. Il est traité des poudres simples dans les articles particuliers destinés aux diverses matieres qu’on réduit en poudre pour l’usage de la Médecine. Ainsi il s’agit de la poudre d’iris, de la poudre d’hypecacuanha, ou plutôt de l’iris en poudre & de l’hypecacuanha en poudre, etc…
    POUDRE A CANON, composition qui se fait avec du salpêtre, du soufre, & du charbon mêlés ensemble, & mise en grains qui prennent aisément feu, & qui se raréfient ou s’étendent avec beaucoup de violence par le moyen de leur vertu élastique
    POUDRE A CHEVEUX, en terme de Gantier-Parfumeur ; c’est un amidon bien passé & bien pulvérisé pour sécher les cheveux naturels & les perruques. Ce sont les Gantiers-Parfumeurs qui la fabriquent, & en font le commerce.
    POUDRE DE SENTEUR, (Parfumeur) ce sont des poudres que les Gantiers tirent des fleurs ou des drogues aromatiques, comme la poudre de violette, la poudre de Chypres, & autres. Elles servent à donner de l’odeur aux poudres à cheveux.
    POUDRE, (Tannerie) c’est le tan pilé dont se servent les Tanneurs pour tanner leurs cuirs. Les cuirs forts reçoivent jusqu’à cinq poudres, c’est-à-dire, qu’on y remet cinq fois de nouveau tan.

    Autrefois, le Maine et le Haut-Anjou étaient pays de Forges, et qui dit forges, dit forêt. A côté de ces forêts vivaient aussi un nombre incalculable de marchands tanneurs, sur lesquels je reviendrai longuement souvent car je les connais bien… Voici un contrat fort intéressant car il montre le lien entre forges et tanneurs, par la forêt. Il illustre également comment la fabrication de tan aidait singulièrelement les maîtres de Forges, puisqu’ils prenaient la coupe de bois à leurs frais.

  • L’acte notarié qui suit est extrait des Archives Départementales de la Mayenne, série 3E
  • Voici la retranscription intégrale de l’acte : Le 9 février 1685 après midy, par devant nous Pierre Poulain, notaire royal résidant à Laval, furent présents et établis, Julien Delépine et Gervaise (forme utilisée autrefois pour Gervais) Touchard marchands poudriers demeurants au forsbourg de la Rivière à Ste Suzanne, étant de présent en cette ville d’une part, et Jean Briceau aussi marchand poudrier demeurant audit forsbourg de la Rivière à Ste Suzanne, étant aussi de présent en cette ville, d’autre part, entre lesquelles parties après soumission requise a été fait ce qui suit
    c’est à scavoir que lesdits Delepine et Touchard ont vendu et par ces présentes vendent audit Briceau l’écorce du nombre de 10 arpents et demi de bois taillis (l’arpent est une ancienne mesure agraire qui vaut 100 perches carrées, mais la perche a des dimensions essentiellement variables, ce qui met l’arpent de 12 ares à 50 ares, voire plus, le tout selon les régions, et j’ignore celui de Chemiré en Charnie) faisant partie de l’écorce du nombre de 40 arpents de bois taillis que lesdits Delepine et Touchard ont acheté du Sr du Grand Jardin Me des Forges à Chemiray (Chemiré-en-Charnie), suivant l’écrit que lesdits Delépine tant pour lui que pour ledit Touchard a fait avec ledit Du Grand Jardin sous leurs seings de toute la vente de ladite écorce, lequel nombre d’écorce de 10 arpents et demi de bois ledit Briceau prendra dans un lot de bois nommé le Chêne creux situé dans la forêt de Bouillé où lesdits 40 arpents sont à prendre, et sera tenu de déclarer ledit Briceau auxdits Delepine et Touchard dans huitaine par quel côté il voudra prendre l’écorce dudit nombre de 10 arpents et demi de bois, et de continuer jusques à ce que ledit nombre lui soit fourni, laquelle écorce dudit nombre de 10 arpents et demi de bois ledit Briceau fera ôter de dessus ledit bois qu’il sera tenu de faire abattre à ses frais et dépens, en sorte que ledit bois sera abattu et pelé dans le jour de fête de St Jean Baptiste prochain,
    au moyen de ce que ledit Briceau a promis et s’est obligé de payer auxdits Delepine et Touchard pour ladite vendition d’écorce cy-dessus la somme 400 livres, savoir 100 livres dans le 1er jour de mai prochain, pareille somme de 100 livres dans la fête de Notre Dame Angevine, autre pareille somme de 100 livres dans la fête de Toussaint prochaine, et les 100 livres restantes dans la fête de Noël prochaine, à peine etc, ce que les parties ont ainsi voulu etc accordé dont les avons jugé etc
    fait et passé audit Laval ès présence de Jean Bellanger marchand et Jean Belot clerc praticien demeurant audit Laval – Signé Delespine, Briceau, Bellanger, Belot, Poulain

    Les forges des Chemiré (1494) et leur fenderie de Rochereuil (vers 1643) selon carte de l’évêché du Mans… publiée par H. Julliot, 1706, AN, NN 34716 (reproduite in  »La Métallurgie du Maine, de l’âge du der au milieu du 20e siècle, » Cahiers du Patrimoine, Inventaire Genéral, 1996)