Quand l’arquebuse était appelée fusil en Anjou et au Maine et sans doute ailleurs

Bonjour à tous
et comme je ne suis pas une adepte de l’écriture inclusive, les dames sont bien entendu dans mon bonjour ! elles avaient compris !

Je suis depuis 3 semaines dans un inventaire qui m’a réservé des surprises, et mieux, non seulement j’ai l’inventaire mais j’ai aussi la vente des meubles. C’est du pur bonheur, car les 2 actes contiennent tous deux le détail de la tannerie et le montant, et même si je me doutais bien que les tanneurs n’étaient pas spécialement pauvres, je dois dire que je découvre une aisance plus que certaine.Mieux, je découvre, ahurie, la multiplicité des peaux et des modes de traitement, et de destination des peaux, bref, toute la complexité du métier.
Bien sûr je vais revenir sur cette tannerie en détail car il sagit d’un JALLOT et comme vous l’avez sans doute remarqué sur ce site et ce blog, je descends plusieurs fois des JALLOT.
Ici, il s’agit d’un double collatéral car je descends aussi par les Jallot de Louise Crespin la soeur de Marie. Et les 2 filles CRESPIN étaient les filles de Louise Chesneau, dont je vous parlais ces jours-ci car l’inventaire de ses biens dépassait 10 000 livres, donc famille très aisée.

Ce couple va mourir jeune laissant des orphelins. Lui est décédé à 43 ans seulement.
Jean JALLOT °Noëllet 13.9.1671 †Ampoigné 22.8.1714 Fils de Guillaume 1er JALLOT & de sa 2e épouse Marguerite ALLANEAU. x Ampoigné(53) 20.7.1700 Marie CRESPIN †1714 soeur de Louise.

Peu d’inventaires mentionnent des armes, car autrefois les armes étaient rares, et j’ai déjà mis depuis longtemps celles que j’ai trouvées dans les inventaires sur mon site, et je vous analyse bientôt cette page sur les armes.

Donc, ces tanneurs disposaient de plusieurs milliers de livres de marchandises, et se déplaçaient souvent à cheval (il en a un, j’y reviendrai) pour acheter et pour ventre ses peaux. Pour sa sureté sur les chemins d’alors, il a donc des pistolets. Le sabre est surprenant et on peut supposer que c’est un héritage, et l’arme de ses ascendants ?
L’inventaire donne aussi un fusil, qui a la particularité de ne plus apparaître dans la vente, et pour ne pas être méchante langue, je me contenterais donc de dire qu’il a disparu, et d’ailleurs plusieurs choses ont disparu, j’y reviendrai.

  • inventaire

Une paire de pistolets, un fuzil, un sabre avec un sainturon (sic) de cuir, une paire de boujettes de cuir 10 livres

  • vente

Une paire de pistolet avec un sabre et sainture de cuir chamoizé audit Guillaume Jallot 9 livres 5 sols

Mais au juste, qu’est ce qu’un fusil fin 17ème début 18ème siècle ?

Stupéfaction, comme vous avez pu le constater sur ma page recensant les armes, il n’y a jamais le terme ARQUEBUSE mais souvent le terme FUSIL
Je regarde donc l’histoire du fusil, et les dictionnaires d’époque, et là, je découvre stupéfaite que le fusil tel que cité dans les inventaires de l’époque n’est autre que l’arquebuse, car partie de l’arquebuse s’appelait aussi fusil.

  • Le Dictionnaire de l’Académie française 1694, t. 1

FUSIL. subst. masc. Petite piece d’ acier, avec laquelle on bat un caillou, pour en tirer du feu. Pierre à fusil. battre le fusil. amorce de fusil. meche à fusil.

On appelle aussi, Fusil, La piece d’ acier qui couvre le bassinet de certaines armes à feu. Fusil d’ arquebuze, fusil de pistolet. arquebuze à fusil. pistolet à fusil.

Fusil, signifie aussi, L’ arquebuze entiere, quand elle est à fusil. Il le tua d’ un coup de fusil. un fusil de quatre pieds. un fusil juste, qui ne manque point.

  • Dictionaire critique de la langue française T.2 (E-N) [ 1787 ]

FUSIL, s. m. FUSILIER, s. m. FUSILLER, v. act. [Fuzi, zi-lié, zi-glié: mouillez les ll au 3e.] Fusil est, 1°. Une petite pièce d’acier, avec laquelle on bat un câillou pour en tirer du feu. « Pierre à fusil, battre le fusil. = 2°. La pièce d’ acier qui couvre le bassinet de certaines armes à feu. « Fusil de pistolet, d’ arquebûse. = 3°. L’ arquebûse elle-même, quand elle est à fusil. « Il le tua d’un coup de fusil.

Voyez auss l’histoire du fusil, bien faite, sur la page du site ARMAE J’espère que ce site n’est pas d’usage mauvais des armes, et que je ne vous induis pas en mauvaises pages d’Internet !!! car parler des armes de nos jours est dangereux.

 

Ainsi, le terme FUSIL est un faux ami pour nos recherches, car il n’a rien à voir avec ce que nous connaissons aujourd’hui, mais il s’agit bel et bien de l’arquebuse.

Pierre Blanchon, marchand demeurant à Saint Etienne en Forez, livre des pièces pour montage d’arquebuse et repart avec du drap, Angers 1596

il s’agit des pièces métalliques de l’arquebuse, surement, et le reste devait être fabriqué sur place à Angers, car les arquebuses étaient ensuite montées à Angers.

    Voir ma page sur l’arquebuse

J’ai trouvé cet acte aux Archives Départementales du Maine-et-Loire, série 5E6 – Voici sa retranscription (voir ci-contre propriété intellectuelle) :

Le 31 décembre 1586 en la cour du roy notre sire par devant nous (Nicollas Bertrand notaire Angers) personnellement estably et deument soubzmis soubz ladite cour honneste homme Pierre Blanchon marchand demeurant à St Estienne en Forestz estant de présent pour ses affaires en ceste ville d’Angers, lequel volontairement a céddé quicté et transporté cèdde quicte et transporte par ces présentes

    il y a 514 km de Saint Etienne à Angers, et je suppose que la marchandise nécessitait plusieurs chevaux, et un cheval ne fait que 40 km par jour, donc il devait mettre au moins 10 jours pour livrer une telle marchandise et encore autant pour le retour.

à honorable homme Florent Gruget marchand demeurant audit Angers présent stipulant et acceptant pour luy ses hoirs la somme de 74 escuz sol qu’il a dit et asseuré audit Gruget luy estre deubz par Erve ? Servant monteur d’arquebuze audit Angers de reste de 80 escuz que ledit estably a baillés audit Servant comme appert et pour les causes portées par le marché et convention fait entre eux par davant nous le 11 décembre 1585 pour s’en faire payer par iceluy Gruget tout ainsi qu’iceluy estably eust fait et peu faire auparavant ces présentes et pour l’effect que dessus et contenu audit marché iceluy estably a subrogé et subroge ledit Gruget en son lieu droits et actions et consent qu’il y soit et demeure subrogé sans garantage de la présente cession ne restitution fors du fait dudit cédant ains s’en fera ledit Gruget payer et en fera les poursuites à ses despens périls et fortunes comme bon luy semblera et comme ledit estably eust peu faire lequel à ceste fin luy a baillé en notre présence copie dudit marché qu’il a pris et receu et s’en est contanté et contante
et a est faite la présente cession pour pareille somme de 75 escuz sol en payement de laquelle lesdit estably a confessé ledit Gruget luy avoir baillé et livré auparavant ces présentes 35 aulnes de bon drap de la mesure tainture de Paris dont icelluy Blanchon s’est tenu et tient à contant et en quite ledit Gruget présent et acceptant comme dessus

    je ne suis pas sure de la mesure tainture de Paris, merci de voir avec moi cette ligne

à laquelle cession quictance et ce que dessus est dit tenir obblige ledit estably, renonçant etc dont etc fait et passé audit Angers à notre maison en présence de Jacques Daraise clerc demeurant audit Angers et de Me Jehan Garnault

Cette vue est la propriété des Archives Départementales du Maine-et-Loire. Cliquez pour agrandir.

PS (paiement du solde) : Le 3 novembre 1610 par devant nous Nicolas Bertrand est comparu ledit Gruget estably et soubzmis soubz ladite cour lequelle a recogneu et confessé avoir auparavant ces présentes receu ladite somme de 75 escuz mentionnée

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Histoire de l’arquebuse

L’arquebuse, contrairement à l’épée, n’est pas réservée aux gentilshommes. C’est l’arme des troupes.

in Dictionnaire encyclopédie universelle, B. Dupiney de Vorepierre, 1876

  • Les premières armes à feu portatives
  • Les bouches à feu étaient à peine inventées, que l’on imagine de donner aux troupes des armes établies suivant le même système, mais assez légères pour qu’un seul homme pût les manoeuvrer. Ces armes parurent vers 1380, et furent appelées Canons à main.. Elles consistaient en un tube de fer du poids de 12 à 15 kg, qu’on chargeait ordinairement avec des balles de plomb, et qu’on appuyait sur un chevalet pour les tirer. On y mettait le feu avec une mêche allumée, comme néguère encore on le pratiquait pour l’artillerie.
    Mais les nouveaux engins de guerre étaient extrêmement lourds et fort peu maniables. On rémédia à ces inconvénients en diminuant la longueur et le poids du tube, et en adaptant à son centre de gravité 2 tourillons servant d’axe de rotation, et reposant sur une fourchette, appelée croc. de plus, le canon fut terminé par une poignée que l’on tenait de la main gauche, tandis que la main droite portait le feu à la lumière. Ainsi perfectionnés, les canons à main reçurent d’abord le nom d’Haquebutes, puis celui d’Arquebuses à croc.
    Vers 1480, une nouvelle amélioration fut introduite dans la fabrication de ces armes. On en fit dont le canon était fixé à un fût de bois muni d’une cosse cintrée pour s’appuyer sur l’épaule. Ces nouvelles arquebuses avaient la lumière percée sur le côté, et portaient une sorte de bassinet destiné à recevoir l’amorce. On y mettait le feu avec un mèche que tenait la main droite, pendant que la main gauche appuyait le fût contre l’épaule. Néanmoins la plupart d’entre elles étant encore beaucoup trop lourdes pour qu’on pût les mettre en joue sanas point d’appui, on appuyait le bout du canon sur une béquille ou fourchette plantée en terre. Ces armes conservèrent le nom de haquebutes, tandis que celles qui étaient assez légères pour qu’on pût les tirer à main libre furent désignées sour celui d’arquebuses.
    Quoique les archebuses eussent été rendues assez légères pour être tirées sans autre appui que l’épaule, elles étaient cependant d’un service incommode, à cause de l’obligation où l’on se trouvait de viser en même temps qu’on mettait le feu. Ce fut pour rémédier à cet inconvénient qu’on imagina la platine à mèche ou à serpentin et la platine à rouet.
    La platine à serpentin prit naissance au commencement du XVIe siècle, mais on ignore dans quel pays. Elle consistait enune espèce de bascule, appelée serpentin, qu’un petit ressort tenait éloignée du bassinet qu’on forçait à s’en rapprocher à l’aide d’un levier qu’on pressait avec le doigt. Le sepentin tenait entre ses mâchoires un bout de mèche allumée qui communiquait le feu à l’amorce.
    La platine à rouet paraît avoir été inventée à Nuremberg en 1517. Une petite roue d’acier, cannelée à son pourtour, était fixée sous le bassinet, au fond duquel elle pénétrait à travers une fente. Son axe était muni d’une chaînette dont l’extrémité opposée s’attachait à un ressort disposé à peu près comme celui d’une montre. Une pièce de fer recourbée, appelée chien, se trouvait fixée en arrière du bassinet. Ce chien tournait autour d’une vis par l’un de ses bouts, tandis que l’autre était muni de deux espèces de dents ou mâchoires entre lesquelles on plaçait un fragment d’alliage d’antimoine et de fer. Quand on voulait faire usage de l’arme, on ouvrait le bassinet, qui se fermait avec une coulisse ; on abaissait le chien de manière que la composition métallique se trouvât en contact avec le rouet ; puis, à l’aide d’une petite clef, on bandait le ressort de ce dernier absolument comme on monte une montre. Une détente maintenait le ressort en place quand il était arrivé au bandé, mais aussitôt qu’on pressait sur cette détente, le rouet, obéissant à l’action du ressort, décrivait une demi-révolution sur son axe, et le frottement de ses cannelures sur l’alliage produisait des étincelles qui enflammaient l’amorce.
    L’invention de ces deux mécanismes donna naissance à deux espèces d’armes à feu. Les Arquebuses à rouet, qui étaient relativement légères, furent destinées à la cavalerie, tandis que les Arquebuses à mèche, qui étaient beaucoup plus lourdes, mais dont le mécanisme plus simple était moins sujet à se détraquer, furent données à l’infanterie. Ces dernières se tiraient à l’aide d’une fourchette ; elles lançaient une balle de 32 à la livre, et plus tard une balle de 24.
    C’est vers le milieu du XVIe siècle que paraît avoir été imaginé le Mousquet. Cette arme, qui fut d’abord en usage en Espagne, différait des arquebuses par la forme de sa crosse qiu était moins recourbée ou tout à fait droite, et par son calibre qui était plus considérable. Son nom lui vient de mochetta, petite mouche, qui lui aurait sans doute été donné, en manière de plaisanterie, à cause de la grosseur de ses projectiles. En effet, ses balles étaient d’abord de 8 à la livre ; plus tard, on descendit à 10 et même à 16. Il y avait des mousquets à mèche et à rouet. Suivant Brantôme, le mousque fut introduit en France, vers 1600, par Stozzi, et il devint bientôt d’un usage général. Au reste, à cette époque, il se produisit différentes variétés d’armes à feu portatives.
    Vers 1545, on imagina, pour la cavalerie, des arquebuses à rouet de petite dimension montées sur un fût sans crosse, et qui se tiraient à bras tendu ; on les appela pistoles, d’où est dérivé le mot pistolet, non pas par ce qu’elles avaient été inventées à Pistola, comme on le dit communément, mais parce que leur canon avait le diamètre de la pièce de monnais ainsi nommée. On en fit également d’autres qui étaient de moyenne grandeur, et tantôt à mèche, tantôt à rouet, auxquelles on appliqua la dénomination de Poitrnal ou Pétrinal, parce que, pour les tirer, on appuyait leur crosse sur le milieu de la poitrine. Enfin, il paraît qu’au XVIe siècle, on connaissant déjà les armes rayées, c’est-à-dire, munies intérieurement de cannelures en spirale : mais elles étaient peu employées à cause de la lenteur de leur chargement.
    Dans les premières années du XVIIème siècle, l’infanterie française se servait, sur les champs de bataille, de mousquets du calibre 200 à 22, et pour la défense des places de mousquets de 12 à 16. La cavalerie portait des arquebuses raccourcies, des pistolets et des carabines rayées, le tout à rouet ; mais ces dernières armes ne tardèrent pas à être remplacées par de petits mousquets à rouet, dit mousquetons, qui étaient plus faciles et plus prompts à charger, parce qu’ils ne réclamaient pas l’emploi du maillet.

    Voir ma page sur l’arquebusier