Le baptême au temps où il était devenu aussi état-civil des Français, et la règle des trois jours après la naissance

    Contrairement à une opinion communément répandue, l’obligation de tenir des registres pour y consigner les principaux événements de la vie des individus (naissance, baptême, mariage, décès) n’a pas été imposée par l’ordonnance de Villers-Cotterêts de 1539.

Villers-Cotterêts est un acte de pouvoir royal venant officialiser un acte religieux pour l’état-civil des Français. C’est donc un acte qui dit que le baptême est considéré comme un état civil reconnu dans les affaires publiques du royaume.

  • Dès le 14e siècle
  • des curés tenaient des registres, qui, à l’époque n’étaient guère que de simples livres de comptes où ils notaient les dons qu’ils percevaient à l’occasion des mariages et des sépultures…

  • Au 15e siècle
  • les registres paroissiaux se multiplient. Ils sont alors tenus en vertu de prescriptions ecclésiastiques édictées par certains évêques pour pemettre de constater notamment les liens de parenté naturelle ou spirituelle qui pouvaient faire obstacle aux mariages. Ces registres sont apparus d’abord dans les principautés et les Etats situés à la périphérie du royaume de France, et plus spécialement dans l’Ouest. Le plus ancien texte règlementaire de ce genre est l’ordonnaice de Henri le Barbu, évêque de Nantes (3 juin 1406) qui prescrivait la tenue d’un registre où seraient inscrits les actes de baptême. Cette initiative fut imitée en Bretagne… (Lucien Bély, Dictionnaire de l’Ancien Régime, PUF, 1996)

  • 1532
  • la Bretagne, qui possède des registres, est rattachée à la France.
    août 1539, l’Ordonnance de Villers-Cotterêts ne fait que généraliser les registres des baptêmes et leur donner un caractère d’état civil. Si cet état civil utilise les curés, c’est qu’ils sont seuls capables d’écrire un acte dans chaque paroisse de France. Certes, il existe bien parfois un notaire ou un sergent royal, mais dans une minorité de paroisses. Article 51 :

    « Aussi sera faict registre en forme de preuve des baptêmes, qui contiendront le temps et l’heure de la nativité, et par l’extrait dudit Registre, se pourra trouver le temps de la majorité ou minorité et sera pleine foy à cette fin.»

    Cet article est si peu appliqué que 22 départements seulement possèdent des registres entre 1539 et 1579, dont la Bretagne, dans laquelle les évêques avaient devancé le roi… En effet, les curés dépendent de leur évêque, pas du roi…

  • 1563
  • le concile de Trente entend éviter la célébration des mariages entres personnes liées par des parentés spirituelles. Pour ce faire, il a besoin que soient notés les noms des parains et maraines, aussi il renforce la règlementation civile en faisant obligation aux curés de les inscrire dans un registre. Cette fois l’ordre vient de la hiérarchie catholique, et il est un peu mieux suivi, mais souvent sans double. Or, certains curés (j’en connais, ainsi à Châtelais, etc…) n’hésitent pas à prêter les registres hors de la cure… sans qu’il existe une quelconque copie du registre… Il faut attendre 1667 pour que le double soit obligatoire.

  • Par la Déclaration de 1698
  • le Roi enjoint à tous ses sujets de faire baptiser leurs enfants à l’église de leurs paroisses, dans les 24 heures après leur naissance, s’ils n’ont obtenu permission de l’évêque de différer les cérémonies du baptême.

  • Code Napoléon, 1807 Article 55
  • Les déclarations de naissance seront faites, dans les trois jours de l’accouchement, à l’officier de l’état civil du lieu : l’enfant lui sera présenté.

  • Code Civil actuel, Article 55
  • Les déclarations de naissance seront faires dans les trois jours de l’accouchement, à l’officier de l’état civil du lieu.

  • Comment est apparue la règle : dans les 3 jours ?
  • Le baptême est le premier sacrement de l’église. Au fil des siècles, l’église a réfléchi et évolué sur les questions de l’âge au baptême, parfois préférant que le baptisé soit en âge de comprendre ce qu’il fait. Voyez l’histoire du baptême
    La règle dans les 3 jours, était en vigueur au temps de nos bons vieux registres paroissiaux. Elle m’a toujours terrifiée à l’idée que quelques heures après sa naissance l’enfant était porté par le père, bien souvent à pied, par tous les temps, même grand froid ou autre, et même à 8 km de l’église, soit 16 km aller-retour (c’est le cas de certains villages que je connais…). On ne connaissait pas le parapluie, mais la toile cirée et les langes (j’ai le grand honneur d’appartenir à la dernière génération de Français élevés avec des langes).

    Il est vrai que dans le même temps les gens des villes ou les hobereaux, se séparaient de l’enfant pour le mettre en nourrice, et j’ai trouvé déjà à plus de 150 km de Paris en Normandie… Bref, on n’hésitait pas ! pas étonnant que quelques uns en aient souffert !

    Mais, parfois, comme dans toute règle, il y eut quelques exceptions. Ainsi à la Cour, puis une partie de la noblesse, voire de la bourgeoisie aisée… et ce, impunément…
    C’est là qu’intervient l’ondoiement, c’est à dire le baptême où l’on n’observe que l’essentiel du Sacrement ; les cérémonies se suppléent ensuite. Bien sûr, il était à l’origine strictement réservé au danger de mort de l’enfant. Une personne présente (nourrice, oncle, et même prêtre) ondoyait, puis le lendemain on allait à l’église pour les cérémonies. Mais, il fut toléré chez certains, qui pratiquaient chaudement au château l’ondoiement, puis lancaient les invitations à travers la France afin de réunir les lointains parents pour une grande réception le jour du baptême… bref, on prenait son temps… C’est ainsi que certains actes ressemblent à celui qui suit, pris à Juvigné (Mayenne) :

    Cliquez l’image pour l’agrandir. Cette image est la propriété des Archives Départementales de la Mayenne

      Le vingt et troiziesme de juillet mil six centz
      soixante et dix fut né et baptizé Jean Marie
      de Labroise filz de messire Jean de la Broise
      chevalier seigneur du Chalange et de damoyselle
      Renée Le Clerc sa companne et luy a esté administré
      les serémonnies de l’églize le vingt neufviesme
      octobre audit an que desus par moy prêtre soubsigné
      et ont esté parain et mareine Jean Baptiste
      Bouestin seigneur de la Brunelays gentilhomme servant
      chez le Roy et dame Marie du Pourpry dame douairière
      de Juvigné

    On trouve ce type d’actes dans de nombreuses paroisses, et parfois l’enfant a déjà plus de 12 mois, voire plus encore…

    Odile Halbert – Reproduction interdite sur autre endroit d’Internet Merci d’en discuter sur ce blog et non aller en discuter dans mon dos sur un forum ou autre blog.

    3 réponses sur “Le baptême au temps où il était devenu aussi état-civil des Français, et la règle des trois jours après la naissance

    1. Report des commentaires parus sur mon ancien blog !
      Marie, le 5 avril : Une cérémonie de baptême, pour le moins perturbée ! qui a dû rester dans la mémoire familiale. Commune du Plessis- Grammoire. Procès- verbal d’enquête,pour inscrire sur les registres, au 16 Février 1652, le nom omis de Pierre Carré. Les dépositions des témoins rapportent, que, < lors dudit baptême,le siège d'Angers avoit esté formé, et que, lors-qu'on estait à faire les cérémonies du baptesme, il arriva grande quantité de soldats, qui leur causèrent grande frayeur, et pour cela s'en fuirent tous, sans faire enregistrer le baptême>. (Supplément à la Série E. Arrondissement d’Angers. Canton Nord -Est.)

      Marie, le 26 mai : Ce Pierre Carré était le fils de Urbain Carré et de Françoise Laisné. (ancêtres à la 10ème gén)

    2. -Surprise par cet acte de baptême,parfaitement anonyme,ou même les noms des parrain et marraine sont omis !

      -Chaumont d’Anjou le…mars 1661.
      -Un fils de… et de…
      Par:…
      Mar:….
      Fait par moy susdit le jour et an que dessus .
      P.Leboucher.
      (Chaumont d’Anjou AM BMS 1609-1673-(vue 142)

        Réponse d’Odile :

      Ne soyez surtout pas surprise.
      En effet, quelques prêtres avaient inventé les imprimés à remplir que nous connaissons.
      Ils préparaient pour cela l’acte à remplir.
      Et parfois, ils ont omis de remplir.
      Il y a même eu des plaintes de certains paroissiens face à un prêtre par trop négligent à tenir les registres, et c’était devant des cas comme celui que vous citez. Et le prêtre avait été sévèrement remis face à ses devoirs par l’évêque.

      Doit-on imputer cet ouibli au vin ?
      Je pense pour ma part que les distractions peuvent aussi m’arriver, sans vin.
      Odile

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