Contrat d’apprentissage de royer : Miré (49) 1630

pour apprendre à faire des charettes (ou plutôt des chartes, comme on disait alors)

Aujourd’hui nous sommes à fonds dans le fabricant de roues :

Voici un nouveau contrat d’apprentissage, et je suis frappée de constater, comme pour mon ancêtre, que le royer était en fait un artisan modeste, qui ne sait pas souvent signer.
L’acte qui suit est extrait des Archives Départementales du Maine-et-Loire, E4292
Mais nous sommes à l’actuelle frontière départementale avec la Mayenne, qui n’existait pas à l’époque, et nous sommes bien en Anjou en 1630.
Voici la retranscsription intégrale de cet acte notarié, dont l’orthographe est assez médiocre ! : Le 23 avril 1630 avant midy devant nous Jacques Jucqueau notaire à Miré furent présents établis et deuments soubzmis

honneste homme Marin Boysard royer demeurant en la paroisse de Preancé pais du Maine d’une part,
et René Garnier à présent serviteur de la veufve Michel Nail mestayère du Bois Morin y demeurant paroisse de Saint Martin de Villenglouse d’autre part,
entre lesquelz a esté faict les acquordz (cela devait être un accord très solide avec un Q)et marchés que s’ensuit scavoir est que ledit Boysard a promis par ces présantes et c’est obligé bien et deument monstrer audit Garnier son estat de royer à fayre les chartes et aultres acommodements de son dit estat par l’espace de deux années antières et parfaittes qui commanceront au jour et feste de saint Jean Baptiste prochayne et finiront à pareil jour
et à promis en oultre apprendre sondit estat audit Garnier pourveu qu’il le puisse comprandre
comme à semblable ledit Garnier a promis travailler fidellement avec et pour ledit Boysard pendant et durant ledit temps de deux années sans y commettre abus
à la charge que ledit Boisard norrira couchera et trettera (nourrira, couchera et traitera) honnestement ledit Garnier sellon sa possibilité pendant ledit temps
et est fait le présant marché d’aprantissage et conventions que dessus à la charge de poyer et bailler par ledit Garnier audit Boisard ce accepant pour luy de la somme de 30 livres tournois à 2 termes esgaux scavoir 15 livres dedans ledit jour de Saint Jean prochaine et aultre pareille somme de 15 livres à la fin desdittes 2 années à peine etc
ce qui a esté voullu et consanty par chacquun desdits Boisar et Garnier qui sont demeurés soubsmis et obligés respectivement et mesme oblige ledit Garnier son corps à tenir prison comme pour deniers royaulx et en cas de deffault
renonçant etc foy jugement et condamnation etc
fait et passé audit Miré maison de René Geslin hoste présents René Nail fils de ladite veufve mestayer avec elle audit lieu du Bois Morin lequel s’est paraillement soubzmis et obligé aux conditions de paymant que dessus avec ledit Garnier audit Boisard et certiffié et cautionné ledit Garnier jugé et condamné comme dessus, (si j’ai bien compris ce René Nail est demi-frère de Garnier et le cautionne. C’est beau la solidarité familiale !)
présent honneste homme Jean Lenoir tonnelier demeurant audit Saint Martin et Marin Morin le Jeune cordonnier demeurant audit Miré tesmoings à ce requis, lesquelz Boysard, Garnier et Lenoir ont dit ne scavoir signer.

Commentaires

1. Le lundi 18 août 2008 à 10:34, par Josette

J’ignorais que le royer était synonyme de charron …

Odile Halbert – Lorsque vous mettez mes travaux sur un autre site ou base de données, vous enrichissez leurs propriétaires en leur donnant toujours plus de valeur marchande dans mon dos

Royer, charron : fabricant de charettes et voitures

Comme vous être très forts (es), vous avez deviné, mais oubliez la torture (celle subie par mon ancêtre en 1609 à Angers sur la roue), car cette roue là n’était pas si répandue, une par grande ville, et encore, elle ne devait pas beaucoup s’user, de sorte que sa fabrication, rare, n’était pas un gagne-pain digne de ce nom pour le fabricant de roues de torture. Nous allons parler d’outils plus usuels si vous le voulez-bien, quoique j’ai dans mes ascendants une facture trouvée à Orléans, pour fabrique de brodequins de torture peu avant la révolution… J’assume… D’ailleurs, devinez quel était son métier ?

Ce billet répond à une demande concernant un métier rencontré à Cossé-le-Vivien (53) qui s’orthographie parfois ROILLIER, parfois ROUETTIER.
Il se trouve que j’ai l’immense chance de compter un charron parmi mes ascendants. Il s’agit de mon François Prezelin, qui est dit ROYER sur son acte de sépulture en 1655 à Montreuil-sur-Maine. J’avais aussi trouvé l’inventaire après décès, qui illustre manifestement un fabricant de roues.

Planche extraite de l’encycolopédie Diderot, article Charron.

Le royer était le charron, fabricant de roues. Il fabrique des charettes, voitures à cheval, et tout ce qui comporte des roues.

Le métier n’existe pas dans chaque village, mais on doit normalement en rencontrer de temps à autre, car je reste persuadée qu’il y en existait un tous les 15 km au moins, ou environ.
L’achat d’une charte ou charette était un gros investissement, aussi elle faisaient longtemps, et le charron devait plus souvent réparer que faire du neuf.
Il devait donc être l’ancêtre de nos garagistes (riez, cela fait du bien de rire, c’est bon pour la santé), toutes choses étant égales par ailleurs. Ces chartes auraient un tel bonus vert aujourd’hui qu’on les aurait certainement gratuitement ! Et puis, en cas d’absence de pétrole, qui sait, elles reviendront peut-être à la mode.
sous l’effet des accents locaux, le royer se transformait parfois en rouier, rouyer, roier, roiller, rouettier

Planche extraite de l’encycolopédie Diderot, article Charron.

Le latin ROTA a donné ROTELLA, dont nous tirons tous ces termes :

Pour comprendre toutes ces variantes, je vous suggère de remonter au latin ROTA, qui a donné lui-même ROTELLA (tient, tient, on voit ici à la fois un T et les LL)

beaucoup de termes en sont issus, dont la roue, le rouet, la rouelle, la rouette etc…
et la plupart d’entre eux nous sont parvenus à travers la ROTELLA, d’où des termes comportant des T et d’autres des LL
au 12e siècle, le Dict. Littré cite : JOINV., 219: Une charrue sanz rouelles
au 16e s., le même Littré cite : O. DE SERRES, 713: Et facilement seront charriés les orangers par le moien de roueles mises dessous les caisses rendans la charge moins pesante
la roue s’est appelée aussi : roüette, Roüette, voyez Rouë. du lat. rotella, diminutif de rota, roue. (Nicot, Thresor de la langue française, 1606)
Je dois tout de même ajouter, pour la confusion des esprits, qu’il existe aussi le ROTIER s. m. Celui qui fabrique des ros ou peignes de tisserand. (Émile Littré, Dictionnaire de la langue française, 1872-1877). Bien sûr, dans cette région de production de lin et de fil, le métier peut exister, l’ennui est que notre rouettier est parfois écrit roillier, et qu’il est bien plus vraisemblable de le rattacher aux roues de charettes qu’aux peignes.

Commentaires

1. Le lundi 18 août 2008 à 10:08, par Marie

Son métier ? peut-être cordonnier,qui étaient je crois comprendre en même temps marchands et faisaients affaires avec le tanneur et le corroyeur ? j’ai quelques cordonniers dans mes ancêtres. Revenons aux roues, je suis allée petite fille (toujours avec mes grands cousins ) chercher la farine au moulin de Corzé, dans une » carriole »on disait, « atteler la carriole », et c’était la fête !

2. Le lundi 18 août 2008 à 11:40, par Marie-Laure

Grand merci pour ce billet si richement illustré m’offrant réponse pour ce Mr Ferré de Livré -la -Touche / Athée , ayant pour métier : roillier / rouettier.C’est vrai qu’ils étaient les prédécesseurs des garagistes , ainsi , je pense le forgeron et le maréchal – ferrant ? Je suis d’accord avec Marie pour les brodequins.Il y a -t-il un autre mot pour le cordonnier quand il fabrique les chaussures et pas seulement les répare ?J’ai aussi des cordonniers dans ma famille, qui fabriquaient des chaussures , et même en cuir vernis…

3. Le mardi 19 août 2008 à 07:57, par Odile

Si j’ai bien compris la torture, qui d’ailleurs défile en ce moment sur la 5 avec une série historique sur l’Inquisition, le principe du brodequin consistait à serrer. Or, pour serrer, il faut un système de vis. C’est donc le serrurier qui fabriquait cet instrument, qui n’avait rien à voir avec de gentils souliers.

4. Le mardi 19 août 2008 à 12:49, par Marie-Laure

Parfois porter certaines chaussures neuves est une sorte de torture …Les bottes des scaphandriers me font penser à des brodequins.C’est vraiment affreux l’ingéniosité de la race humaine envers certains de ses membres.Ils enfermaient aussi les doigts dans des vis …En GB , the Iron Maiden était une sorte de costume/armure, comme le masque de fer mais pour tout le corps !, dont l’intérieur était couvert de pointes et le supplicié était enfermé dedans .

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Rouettier à Angers en 1599 : fabricant de charettes, coches, voire carrosse

Demain, nous allons voir Georges Manceau rouettier à Angers en 1599, issu de Champteussé sur Baconne, et fils d’Etienne et Jeanne Brochard.
Mais aujourd’hui, je vous propose l’étude de son métier.
En effet, le métier ne figure pas aux :

    Dictionnaire du Monde rural de Michel Lachiver
    Dictionnaire de l’ancien français en ligne sur Internet
    Dictionnaires d’autrefois de la langue française en ligne sur Internet

Donc, j’ai tenté tout bonnement sur le moteur de recherche et le site des vieux métiers
Hélas !
3 fois hélas !
les explications sont aussi diverses, différentes, que douteuses, excepté une qui me paraît correspondre. Je voudrais même ici signaler le mérite de cette définition du métier de rouettier, tant elle est plausible.

En effet, mon Georges Manceau, issu de Champteussé sur Baconne, est non seulement issu de mes MANCEAU de cette paroisse, famille sachant fort bien signer et même avec de belles signatures.
Ainsi, voici mon Pierre Manceau en 1595, qui est l’oncle de Georges

et voici la signature de Georges en 1599

Vous conviendrez que cette signature est belle et la marque d’une classe sociale moyenne.
Or, la plupart des explications que j’ai trouvées sur Internet ressortent de travailleurs de classe moins aisée.

Dès lors, contrairement à ce que disent ces sites, je retiens le terme de ROUE pour le ROUETTIER et de là, il fait non seulement les roues mais ce qui va dessus à savoir les charettes, coches voire carrosse puisque j’ai déjà vu un carosse fabriqué à Angers dont j’ai un acte sur ce blog.
Le métier de celui qui fait ses véhicules d’époque est le charron, donc j’en conclue que le ROUETTIER n’est autre que le CHARRON et qu’à Angers il fabrique des véhicules dignes de la bourgeoisie et de la noblesse angevine. C’est donc un artisan haut de gamme, d’où le milieu social et la signature.

Je vous mets ici ce que dit du CHARRON le site des dictionnaires d’autrefois :

Jean Nicot: Le Thresor de la langue francoyse (1606) :
Charron, m. acut. Est l’artisan qui besongne en bois, de façon de chars, (duquel mot il a prins le nom de son mestier) charrettes, hacquets, traineaux, tumbereaux, chariots, coches, carroches, charruës à labourer, et tels ouvrages de charriage, sur rouës, Faber carrucarius.

et dans cette définition de 1606, époque toute voisine de ce Georges Manceau rouettier en 1599 à Angers, vous voyez les roues.
Donc fabricant de roues et véhicules sur roues, et l’équivalent du terme charron.
Je tiens ici à féliciter celui ou celle qui sur internet a eu le courage de donner cette explication, contre toutes les autres qui sont à éliminer à mon avis ou plutôt au vue de ce que je viens d’expliquer et analyser ci-dessus.

Et vous ?
Qu’en pensez-vous ?

Odile Halbert – Reproduction interdite sur autre endroit d’Internet Merci d’en discuter sur ce blog

J’avais écrit une page sur ce métier sur mon ancien blog en 2008, la voici retrouvée grâce à Françoise :

Royer, charron

Par Odile Halbert, lundi 18 août 2008 à 09:00

fabricant de charettes et voitures

Je commence donc trois jours dans la roue. Comme vous être très forts (es), vous avez deviné, mais oubliez la torture, car cette roue là n’était pas si répandue, une par grande ville, et encore, elle ne devait pas beaucoup s’user, de sorte que sa fabrication, rare, n’était pas un gagne-pain digne de ce nom pour le fabricant de roues de torture. Nous allons parler d’outils plus usuels si vous le voulez-bien, quoique j’ai dans mes ascendants une facture trouvée à Orléans, pour fabrique de brodequins de torture peu avant la révolution… J’assume… D’ailleurs, devinez quel était son métier ?

    Ce billet répond à une demande concernant un métier rencontré à Cossé-le-Vivien (53) qui s’orthographie parfois ROILLIER, parfois ROUETTIER.
    Il se trouve que j’ai l’immense chance de compter un charron parmi mes ascendants. Il s’agit de mon François Prezelin, qui est dit ROYER sur son acte de sépulture en 1655 à Montreuil-sur-Maine. J’avais aussi trouvé l’inventaire après décès, qui illustre manifestement un fabricant de roues.

Planche extraite de l’encycolopédie Diderot, article Charron.

Le royer était le charron, fabricant de roues. Il fabrique des charettes, voitures à cheval, et tout ce qui comporte des roues.

    Le métier n’existe pas dans chaque village, mais on doit normalement en rencontrer de temps à autre, car je reste persuadée qu’il y en existait un tous les 15 km au moins, ou environ.
    L’achat d’une charte ou charette était un gros investissement, aussi elle faisaient longtemps, et le charron devait plus souvent réparer que faire du neuf.
    Il devait donc être l’ancêtre de nos garagistes (riez, cela fait du bien de rire, c’est bon pour la santé), toutes choses étant égales par ailleurs. Ces chartes auraient un tel bonus vert aujourd’hui qu’on les aurait certainement gratuitement ! Et puis, en cas d’absence de pétrole, qui sait, elles reviendront peut-être à la mode.
    sous l’effet des accents locaux, le royer se transformait parfois en rouier, rouyer, roier, roiller, rouettier



Planche extraite de l’encycolopédie Diderot, article Charron.

Le latin ROTA a donné ROTELLA, dont nous tirons tous ces termes :

Pour comprendre toutes ces variantes, je vous suggère de remonter au latin ROTA, qui a donné lui-même ROTELLA (tient, tient, on voit ici à la fois un T et les LL)

beaucoup de termes en sont issus, dont la roue, le rouet, la rouelle, la rouette etc…
et la plupart d’entre eux nous sont parvenus à travers la ROTELLA, d’où des termes comportant des T et d’autres des LL
au 12e siècle, le Dict. Littré cite : JOINV., 219: Une charrue sanz rouelles
au 16e s., le même Littré cite : O. DE SERRES, 713: Et facilement seront charriés les orangers par le moien de roueles mises dessous les caisses rendans la charge moins pesante
la roue s’est appelée aussi : roüette, Roüette, voyez Rouë. du lat. rotella, diminutif de rota, roue. (Nicot, Thresor de la langue française, 1606)

Je dois tout de même ajouter, pour la confusion des esprits, qu’il existe aussi le ROTIER s. m. Celui qui fabrique des ros ou peignes de tisserand. (Émile Littré, Dictionnaire de la langue française, 1872-1877). Bien sûr, dans cette région de production de lin et de fil, le métier peut exister, l’ennui est que notre rouettier est parfois écrit roillier, et qu’il est bien plus vraisemblable de le rattacher aux roues de charettes qu’aux peignes.