Jacques Hallenault, saisi, allègue une quittance qui semble bien un faux, Bouillé-Menard et Loiré 1618

car dans l’accord qui suit, il est question d’une prétendue quittance, qu’il aurait montrée si elle avait été vraie. Je le soupçonne donc d’avoir trouve un faux prétexte pour ne pas payer, mais ici il doit céder.

Notaires d’Angers et avocats d’Angers étaient des arbitres particulièrement clairvoyants dans ces affaires d’impayés, car ils tranchent avec beaucoup de compétence. J’ignore si de nos jours les négociations pour éviter procès sont signées devant notaire, même si je sais qu’elles peuvent être en présence d’avocats, mais j’ai cru comprendre que de nos jours il existait des avocat spécialisés dans la négociation, d’autres dans les poursuites jusqu’au bout.

Loiré - collection personnelle, reproduction interdite
Loiré - collection personnelle, reproduction interdite

J’ai trouvé tous les actes qui sont sur ce blog, grâce à mes longues recherches. Cet acte aux Archives Départementales du Maine-et-Loire, série 5E5– Cette trouvaille ainsi que sa retranscription constituent un apport intellectuel au titre de la loi, s’agissant de textes anciens. Par ailleurs ce blog constitue une publication. Seule la copie personnelle est autorisée. La copie ou discussion ailleurs sur Internet constituent un vol de propriété intellectuelle. Voici la retranscription de l’acte :

Le 20 septembre 1618 avant midy, devant nous Guillaume Guillot notaire du roy à Angers, furent présents en personne soubzmis et obligés honneste homme Claude Genet marchand demeurant à la Haulte Beurière paroisse de Bouillé Menard d’une part et Jacques Hallenault dict misterye marchand demeurant en la paroisse de Louere d’autre part, lesquels ont accordé du différend et procès qu’ils auroient ce que s’ensuit
sur ce que ledit Genet poursuivait ledit Hallenault en exécution de l’accord cy devant fait entre eulx par devant Chauveau notaire (blanc) 1615 par lequel ledit Genet auroit cédé et transporté audit Hallenault certaines debtes et actions que ledit Genet avoit en qualité qu’il procède contre et sur les biens de défunt Richard Houssin moyennant la somme de huit vingts livres tz qui se debvoit relaisser par rente constituée pour la somme de 10 livres tz de rente et à ceste effect estoit ledit Hallenault obligé faire intervenir et obliger avec luy Perrine Chaudet sa femme, iceluy Hallenault et sa femme luy passassent ledit contrat de constitution de rente et s’y obligeassent solidairement sans modification des hypothèques acquises audit Genet au désir dudit accord, et luy payassent les despens et frais faits à la poursuite qui ont esté taxés par exécutoire donnée siège présidial de cette ville le 31 août dernier montant 37 livres 6 sols 10 deniers et autres faits en despens dommages et intérests
et que ledit Hallenault disoit que pour procéder à l’exécutoire il auroit recouvert dudit Houssin une quittance portant paiement des sommes qui estoient dues audit Genet en privé nom et qu’il auroit cédé audit Hallenault par ledit accord
et partant vouloit se pourvoir contre ledit accord afin d’estre déchargé du contenu en iceluy et par conséquent des despens contenus audit exécutoire et autres faits en exécution
et de la part duquel Genet repliquant estoit dit que ladite prétendue quittance alléguée par ledit Hallenault et apparue audit point passée par Julien Restault notaire soubz la cour du Bourg d’Iré le 17 juillet 1614 estoit faulx et ne l’avoir jamais consentie et auroit offert en passer l’instruction en faulx et en fournir moyens en cas que ledit Hallenault ou autre s’en voulussent aider
et partant demandoit sans autre esgard à ladite pretendue quittance ledit accord passé par Chauveau feust exécuté et ce faisant que ledit Hallenault et sa femme luy passassent ledit contrat de rente ou luy payassent contant ladite somme de huit vingt livres de principal et les despens dommage et intérests

    Ce qui semble le plus curieux dans cette allégation de faux, c’est que si vraiement cette quittance avait été vraie, Hallenault serait venu à Angers avec la quittance et l’aurait montrée au notaire et aux témoins, dont un avocat au présidial, Maurice Dumesnil, qui a probablement joué ici le rôle d’arbitre.
    En effet, nous allons découvrir à la fin de ce long acte, qu’Hallenault est tenu rendre cette quittance, alors que si il l’avait apportée à Angers, l’avocat et le notaire auraient pu la voir et la laisser ensuite à Claude Genet. Et d’ailleurs, ils auraient pu donner leur avis sur la nature de vrai ou de faux de cette quittance.
    Comme par la suite, nous allons découvrir qu’Hallenault cèdde, je suppose qu’il savait que c’était un faux et que son allégation était fausse.

lequel Hallenault disoit que ladite quittance n’estoit de son fait et qu’il l’auroit comme dit est trouvée entre les papiers dudit défunt Houssin et que par ce que ledit Genet vouloit alléguer de faulx il offroit renoncer à s’en aider et à l’effet d’icelle
et pour le regard des huit vingts livres de principal qu’il doibt par l’exécutoire ne pourroit y faire intervenir sadite femme mais offroit en paiement d’icelle luy vendre par contrat pignoratif

pignoratif : Terme de Jurisprudence. Il se dit en parlant d’Un contrat par lequel on vend un héritage à faculté de rachat à perpétuité, & par lequel l’acquéreur loue ce même héritage à son vendeur pour les intérêts du prix de la vente. Ces contrats tolérés dans quelques Coutumes qui les admettent, ne sont qu’une voie détournée de tirer intérêt d’un principal non aliéné; ce qui les fait rejeter dans toutes les autres. (Dictionnaire de l’Académie française, 4th Edition, 1762)

audit Genet les héritages dudit défunt Houssin dont ledit Hallenault est seigneur par contrat judiciaire
à quoy ledit Genet se seroit accordé comme s’ensuit, c’est à savoir que pour paiement tant de ladite somme de huit vingt livres tz de principal dudit accord passé par Chauveau que de la somme de 40 livres tz à quoi les parties ont composé et accordé tant pour le contenu audit exécutoire des despens que autres faits depuis et en conséquence d’iceluy dommages et intérests procédant de ladite debte,
qui fait en tout la somme de 2 00 livres tz ledit Hallenault a vendu quité et transporté vend quite et transporte et promet garantir audit Genet qui a achapté et achapte pour luy ses hoirs etc toutes et chacunes les choses héritaulx qui appartenoist audit défunt Houssin et qui ont esté vendues et adjugées audit Hallenault par décret expédié en la sénéchaussée d’Anjou le (blanc) 1617 ainsi que lesdites choses se poursuivent et comportent et qu’icelles sont amplement spécifiées et contenues par ledit décret sans rien en réserver
des fiefs et seigneuries dont lesdites choses sont tenues et aux debvoirs ordinaires que les parties adverties de l’ordonnance royale ont dit ne pouvoir aultrement exprimer, quite du passé
pour par ledit Genet ses hoirs etc en jouir et disposer à l’advenir ainsi que bon luy semblera comme de son propre
o grâce et faculté donné concédée par ledit acquéreur audit vendeur et par luy retenue de pouvoir rescourcer et rémérer lesdites choses vendues d’huy en 5 ans prochains payant et refonfant par ledit acquéreur ses hoirs par ung seul et entier paiement ladite somme de 200 livres tz avec les loyaulx cousts et habondances que raison

    cette clause me semble curieuse, au vue de ce qui précédait concernant un contrat pignoratif, c’est à dire avec condition de grâce perpétuelle. Il semble qu’entre temps, cette perpétuité se soit raccourcie à 5 années !

et par ces mesmes présentes a ledit Genet affermé lesdites choses audit Hallenault pour le temps de ladite grâce à la charge d’en jouir comme ung bon père de famille, les entretenir en bon estat de réparation et payer les rentes et debvoirs
et d’en payer de ferme par chacun an audit Genet la somme de 12 livres 10 sols à pareil jour et date que ces présentes le premier paiement commençant d’huy en ung an prochain, et à continuer

    donc, le prix de la ferme est de 6,25 %, ce qui est le même prix que le taux des obligations à cette époque.

et au moyen des présentes sont et demeurent les parties hors de cour et de procès lesdits différends et procès terminés sans autre despens dommages ne intérests de part et d’autre
s’est ledit Hallenault désisté et départy se désiste et départ de ladite prétendue quittance, consenti et consent qu’elle demeure nulle et sans effet et comme telle promet la rendre audit Genet dedans quatre sepmaines prochaines

    Donc, on constate ici qu’Hallenault n’est pas venu avec cette fameuse quittance, ce qui est sincèrement surprenant, car si elle avait été si vraie, il l’aurait volontier montrée au notaire et à l’avocat Dumesnil, et n’aurait pas cédé.

et a ledit Genet consenty et consent deslivrance et main-levée des choses saisies à sa requeste sur ledit Hallenault par la décharge des commissaires que iceluy Hallenault demeure tenu payer et satisfaire de leurs salaires et frais seulement y escheuent en acquiter ledit Genet

    Donc, Hallenault était en mauvaise posture pour discuter dans cet accord. Il est évident que l’avocat Dumesnil lui a vivement conseillé de céder et payer.
    Enfin, un bon accord vaut mieux qu’un plus long procès.

le tout fait sans éviction ne préjudice pour ledit Genet aux droits et hypothéques à luy acquises pour son deub tant par ledit accord passé par Chauveau que par les obligations y mentionnées et aultrement
et aussi sans préjudice à ce que ledit Hallenault est par ledit accord obligé acquiter ledit Genet vers Mathurin Chaudet des ladite somme de 15 livres à quoy ledit Hallenault satisfera sy fait n’a
par ce que ainsi le tout a esté voulu stipulé convenu et accordé entre les parties lesquelles à l’effet et accomplissement se sont respectivement obligés et obligent etc renonçant etc dont etc
fait et passé audit Angers en notre tablier en présence de honorable homme Me Morice Dumesnil avocat au siège présidial Nicolas Bonvoisin et François Martin clers tesmoins

Cette vue est la propriété des Archives Départementales du Maine-et-Loire. Ciquez pour agrandir.

Odile Halbert – Reproduction interdite sur autre endroit d’Internet Merci d’en discuter sur ce blog. Tout commentaire ou copie >partielle de cet article sur autre blog ou forum ou site va à l’encontre du droit d’auteur.

Laisser un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *