Transaction à la suite de violences : paiement des soins à la victime, 1675, Champigné

Voici encore le notaire dans son rôle de médiateur.

Ici, la femme de François Cupif a reçu des coups de baton, ce qui a entraîné des frais médicaux. Il fait intervenir un tiers, Belnoe, probablement parce que celui-ci a un moyen de pression sur l’auteur des coups, Maugendre. A moins que ce ne soit Belnoe qui soit venu en intermédiaire proposer cette transaction à Cupif, pour éteindre toute plainte éventuelle. D’ailleurs, si on fouillait bien, on verrait sans doute Belnoe avoir un lien avec Maugendre, l’auteur des coups, donc réellement venu se poser en intermédiaire.

Une chose transparaît cependant, à savoir les coups ne sont pas impunis, et l’auteur devra payer, sinon il y aurait poursuites judiciaires. Naturellement, autrefois, on payait souvent en nature, d’où un compte compliqué, mi en argent liquide, mi en nature…

La victime, Renée Garnier ne survivra que 3 mois aux coups de baton, sans que l’on puisse dire si ils ont pu entraîner son décès. L’énigme restera sans doute inexpliquable…

L’acte qui suit est extrait des Archives départementales du Maine et Loire, série 5E – Voici la retranscription de l’acte : Le 2 septembre 1675 après midy, par devant nous André Chevalier notaire royal et juré demeurant à Champigné furent présents establys et soubzmis François Cupif laboureur tant en son nom qu’au nom et se faisant fort de Renée Garnier sa femme, demeurant au lieu du Petit Princé paroisse de Champigné d’une part
et honneste homme Jullien Belnoe marchand demeurant dite paroisse d’autre part
lesquels sont demeurés d’accord de la cession de droits qui s’ensuit, c’est à savoir que ledit Cupif auditnom a ceddé quitté et transporté par ces présentes cèdde quitte et transporte audit Belnoe ce acceptant tous et chacuns les droits et actions qu’il avait ou estoit prest de poursuivre criminellement contre Jean Mosgendre aussi marchand demeurant audit lieu pour raison des actes de violence (le notaire avait écrit puis barré « coups de baston ») qu’il aurait commis le jour d’hier à ladite Garnier
pour raison de quoy elle en est demeurée au lit malade et se seroit iceluy Cupif adressé à la personne de Robert Foussier Me chirurgien qui l’aurait cedit jour soignée au bras droit,

ladite cession faite pour et moyennant la somme de 60 sols tz laquelle somme ledit Belnoe a promis payer audit Cupif dans quinzaine prochaine et luy bailler toutefois et quantes le nombre de 5 boisseaux de bled seigle net et grelé mesure des Ponts de Cé, pour se faire rembourser de ladite somme de 70 sols et 8 boisseaux de bled par ledit Belnoe audit Mosgendre tout ainsi qu’il eust fait et put faire avant ces présentes pour cet effet l’a mis et subrogé en ses droits sans néanmoings aucun garantage, et outre a la charge dudit Belnoe de faire traitter perser et médicamenter ladite Garnier jusqu’à parfaite guérisson par iceluy Foussier qui a esté aussi à ce présent, et a promis en sorte que ledit Belnoe n’en soit inquiété ne rechercher à peine etc pour la somme de 4 livres laquelle somme iceluy Belnoe a promis luy payer lors de la guerison de ladite Garnier
à laquelle cession et tout ce que dessus est dit tenir etc obligent etc renonçant etc dont etc
fait et passé à nostre estude présent Jean Durand masson et Jean Delanoe tissier en toile demeurant audit lieu tesmoings, ledit Cupif a dit ne savoir signer

André Chevalier, le notaire royal à Champigné, est mon ancêtre ; il avait épousé en 1659 Suzanne Triffoueil. Grâce à cet acte, je sais qu’il demeurait au Petit Princé.

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  • 5 réponses sur “Transaction à la suite de violences : paiement des soins à la victime, 1675, Champigné

    1. Surprenant,l’estimation du dommage corporel se fait de gré à gré?et cela suffit …si cet acte a pu vous servir aussi, tant mieux ;mais on ne sait pas la cause de cette violence sur cette pauvre paysanne,si elle avait volé quelque chose il y aurai eu procès…?
      Note d’Odile : c’est rare d’avoir un tel fais divers dans une ascendance et selon moi c’est une perle précieuse. Selon mes longues recherches, un laboureur n’était pas un pauvre paysan, et le fait qu’il ne sache pas écrire ne suffit pas à le qualifier de pauvre, même si ce n’était pas la classe aisée, il avait généralement de quoi vivre, chichement il est vrai. Il y avait bien d’autres motifs de dispute que le vol, et même si cela avait été le cas, la transaction vallait bien mieux qu’un procès, car un procès entraînait des frais hors de mesure avec les faits.

    2. J’ai aussi l’inventaire apres deces de Renée, j’essaie de le traduire:je « rame »mais ce ne me semble pas un gros heritage à verifier à la fin…Je suis effectivement contente d’avoir cet acte
      Note d’Odile : alors vous allez pouvoir juger de son niveau d’aisance, et cela ne transparaît pas que dans la somme totale, mais aussi dans les types d’objets et meubles et leur qualité. Un pauvre n’avait qu’un vieux chaudron rapiécé, et encore, lorsqu’il en avait un !

    3. ( Je crois que Renée Garnier avait été blessée au bras droit car elle avait dû le lever pour essayer de protéger sa tête en parant à ces coups de baton.
      Ses plaies ont peut être été infectées et ont causé son décés…
      Ce Maugendre devait avoir un caractère violent , sans « self-control » pour battre ainsi une femme même si elle avait commis quelque délit ?!!! )

    4. Trouvé! Belnoe est le beau frere de Mosgendre (mariage jean mosgendre- perrine belnoe,1669, à champigné temoin Jullien Belnoe frère signature identique) famille de notaires donc notables, qu’en penser par rapport à l’époque? actuellement on dirait :pas de scandale dans la famille…et pénalement l’auteur reste impuni..Odile, je vous envoie l’acte les noms ne vous sont sûrement pas inconnus

    5. Les frais de justice, élevés, étaient autrefois entièrement à la charge du perdant, alors qu’aujourd’hui, ce sont nos impôts qui financent les tribunaux, les gendarmes etc… Si vous oubliez donc le contexte actuel, pour vous plongez dans celui de l’époque, vous comprendrez aussitôt le poids de ces frais sur la crainte d’un procès. Si Mosgendre ne se sentait pas clair dans l’affaire, pour s’être un peu « échauffé » comme on le disait autrefois, il avait tout intérêt à la transaction immédiate pour réparer ses torts, et c’est ainsi qu’on a beaucoup de transactions devant notaires autrefois, par crainte d’avoir encore plus de frais devant la justice.
      Donc, maintenant que vous confirmé le lien de famille entre Mosgendre et Belnoe, qui sont bien beaux-frères, il est allé trouvé son beau-frère pour lui demander d’intercéder dans une transaction, et tous les deux savaient fort bien qu’une poursuite de Cupif aurait coûté non seulement les dépends, mais aussi les frais de justice…

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