Plusieurs femmes signaient à Vallet déjà dans les années 1740

Le boucher de Vallet (44), Jean Papin, a 14 enfants dont les baptêmes sont remarquables. Sur tous les registres paroissiaux, ceux des grandes villes mis à part, les seules signatures sur les baptêmes sont celles du parrain et de la marraine, quand ils savent signer. Or, à Vallet, dans les années 1740 plusieurs femmes signent, et même bien, et le prêtre les a autorisées à signer. Les 14 baptêmes attestent que ces bourgeoises étaient éduquées, assistaient à ces baptêmes et qu’elles demandaient manifestement au prêtre le droit de signer avec la marraine. Magnifique clan féminin à Vallet !  Ainsi les familles Dutemple, Morin, Papin, Petitgars, Fouquere, Guillon …

Déclaration de grossesse d’Anne Roullin : Le Bourg d’Iré 1790

En 1790 un notaire est encore notaire royal et pas encore notaire public, les femmes enceintes non mariées doivent encore déclarer leur grossesse, et mieux il lui recommande de faire attention à son fruit. Quel joli terme pour désigner la grossesse, terme bien oublié de nos jours, si ce n’est dans les prières des catholiques où nous disons « et que le fruit de vos entrailles soit béni »

FRUIT, subst. masc. http://zeus.atilf.fr/dmf/

 

Au propre

« Production d’une plante qui succède à la fleur« 

P. ext. « Tout ce que l’on récolte pour l’alimentation« 

P. anal.

« Enfant considéré comme produit de sa mère« 

En partic.

Au fig.

« Bénéfice, profit« 

« Résultat positif, réel ou attendu, effet de qqc. (en partic. d’une activité)« 

Cet acte est aux Archives Départementales du Maine-et-Loire, 5E32 – Voici sa retranscription (voir ci-contre propriété intellectuelle) :

     Le 5 mai 1790 avant midy, par devant nous Pierre Louis Champroux notaire royal en Anjou résidant à Segré, fut présente Anne Roullin veuve de Jean Levrot demeurant au village de Pommeray paroisse du Bourg d’Iré, laquelle pour satisfaire aux édits, arrêtés et déclarations de sa Majesté, a déclaré être enceinte d’environ 6 mois des œuvres de Julien Manceau cordonnier demeurant au bourg du Bourg d’Iré qui la recherche en mariage depuis environ 2 ans et avec lequel elle a eu commerce charnel tant par la faiblesse de son sexe que par les promessses réitérées qu’il lui a faites, à laquelle présente déclaration ladite veuve Levrot nous a requis le présent acte que lui avons décerné pour lui faire valoir ce que de raison, après toutefois lui avoir recommander de sa comporter de manière qu’il n’arrive aucun accident à son fruit dont etc fait et passé en notre étude en présence de Joseph Félix Furet perruquier et Jacques Parquier sergier demeurant audit Segré témoins. »

Autrefois le patronyme était parfois en écriture inclusive, et cela on ne le voit pas encore en 2022

Puisque je suis à me réjouir de la place des femmes autrefois, quand il y avait lieu car cela n’était pas tout le temps, voici le patronyme en écriture inclusive. Vous en avez certainement rencontré beaucoup car ils n’étaient pas rares ces féminisations du patronyme, et je me souviens très émue de la première fois que j’en ai renconté un. Voici donc un exemple de patronyme en écriture inclusive,  extrait du chartrier d’Armaillé, aux Archives Départementales du Maine-et-Loire, cote E1134 f°6, aveu de Michel Guisneau le 30 octobre 1538 – Avouez qu’elle est jolie cette Jehanne Guysnelle que vous écrivez sans doute Jeanne Guisneau dans vos bases de données, lesquelles bases j’évite totalement.

Cet acte est aux Archives Départementales du Maine-et-Loire, E1134 – Voici sa retranscription (voir ci-contre propriété intellectuelle) :


Blanche – Item une boisselée de pré sise ès prés
du Tertre joignant d’un costé à la terre de Jehanne Guysnelle
d’autre costé au pré Robert Bonneau une haye entre eux

Monsieur ne signe pas mais madame signe : cela a existé !!! en voici un exemple, Le Plessis Grammoire 1785

Dans ces temps un peu tristes, il convient de tenter de se détendre, c’est ce que je viens vous proposer.

En effet, autrefois il était rare que Madame signe, et les femmes étaient bien moins éduquées sur ce plan que les hommes.

Alors, voyez que parfois c’était tout à fait le contraire :

Le Plessis-Grammoire 10 juillet 1785 « baptisé Françoise fille de Mathurin Pertué absent métayer à la Perdrillière et de Françoise Deleon, parrain Robert Pertué (ns) oncle de cette paroisse, marraine Perrine Deleon (s) fille, de la paroisse de Saint Michel du Tertre, tante » Joli couple dans lequel les Pertué ne signent pas mais les Deleon ont appris à signer aux filles ! C’est encore d’autant plus rarissime qu’il s’agit de métayers, chez lesquels on signait plus que rarement avant la Révolution.

 

 

Autrefois les femmes avaient droit d’être caution d’un tiers, certes lorsqu’elles étaient veuves

De nos jours il est toujours affirmé qu’autrefois les femmes n’avaient aucun droit, mais tout de même, être caution d’un tiers est bien une charge tout à fait remarquable car aussi risquée.

Qant à René de Ballodes, l’emprunteur,  il vient de Noëllet, sans doute pour acheter des tissus, qu’on désignait alors « draps », pour une quelconque occasion, et contrairement à ce que nous faisons de nos jours, à cette époque, ici 16ème siècle, on achetait peu souvent du tissu pour renouveler l’habillement ou autre, mais par contre en quantité en quelque sorte on en avait pour un bon moment. Je suppose que la dette de René de Ballodes est bien un achat qu’il est venu faire à Angers, car la somme est relativement peu importante pour une autre destination.

Acte des Archives du Maine-et-Loire 4E6 – Voici ma retranscription (voir ci-contre propriété intellectuelle) :

Le 13 novembre 1582 à la matinée, en la cour du roy notre sire à Angers et de monseigneur duc d’Anjou endroit par devant nous René Garnier notaire d’icelle personnellement estably noble homme René de Ballodes sieur de la Rachère demeurant en la paroisse de Nouellet tant en son nom que comme soy faisant fort de damoiselle Louyse de La Forest son espouze et promettant luy faire ratiffier et avoir agréable ces présentes et la faire lier et obliger avec lui … confesse que ce jourd’hui et auparavant ces présentes à la prière et requeste et pour luy faire plaisir seulement honneste femme Jehanne Labé veuve de Me Pierre Morineau et René Labé marchand demeurant audit Angers se seroient obligés avec lui et chacun d’eulx seul et pour le tout de payer et bailler dedans d’huy en ung an prochainement venant à Me Jehan Mestreau sieur du Jambay et Renée Nepveu sa femme la somme de 19 escuz sol pour l’obligation passée ce jour audit Mestreau est sa femme par ledit estably …

L’absence des femmes dans les actes notariés anciens en Normandie : ouf, je trouve ce jour un acte uniquement des femmes !!!

Rarissime !!!

Car en Normandie les femmes n’héritent jamais, enfin presque jamais puisqu’elles héritent uniquement quand il n’ont pas de frère ou frères, car alors ils sont seuls héritiers. Bon, je dois vous avouer que les braves frères doivent par contre luy payer sa dot.

Donc dans l’acte qui suit 3 soeurs et leur mère, donc le défunt père n’avait pas laissé de fils, baillent une maison et terre à ferme à (et c’est là que cela se corse …) une femme. C’est rarissime en Normandie, et je me réjouis donc de saluer, avec vous mesdames je présume, cet acte normand rarissime. Et vous pouvez chanter « où sont les hommes ? » je vous le permets…

Le 22 juillet 1634[1] à Rânes devant Jean Héron et Denis Moignet tabellions royaulx fut présente Anne Delange (m) fille de defunt Jean Delange de la paroisse de Grès tant en son nom que se faisant fort pour Jacqueline Gerard sa mère, Marie et Françoise Delange ses sœurs, baille pour 6 années à ferme manable et loyer d’argent à Julienne Trepey fille de defunt Guillaume de la paroisse de Beauvain une carrée de maison servante de chauffepied[2] avec 3 pièces de terre labourables l’une le champs de bas, les 2 autres les champs Huet, avec une petite portion de terre en pré nommmée la Landette aux Delange, avec un clos à chenevière – Item une portion de jardin d’arbres fruitiers nommée la commune, le tout assis au village et environs de la Gourière paroisse de Beauvain, comme il appartient à ladite bailleresse, mère et sœurs … pour 9 livres tournois chacun an à 2 termes par moitié qui sont la Saint Michel et la Saint André commençant à la Saint Michel prochainement venant en un an, et la saint André ensuivant … et sera tenue ladite preneure de faire demie cornée de faulcille au vavasseur de la vassorerie[3] au Moine que ladite bailleresse a reconnu faire à cause desdits héritages – Présents Pierre Poullain Le Rouvre, et Marin Fischet fils de Toussaint de St Martin Lesguillon témoins

[1] AD61-4E119/32/59

[2] pièce avec cheminée

[3] en Normandie orientale, la vavassorerie est la qualité d’un fief tenu par un vavasseur – Un vavasseur est vassal d’arrière-fief, sorte de paysan soldat, charnière entre le monde paysan et celui des nobles. Le vavasseur doit divers services (M.T. Morlet, Dictionnaire du monde rural, 1997)

Comme vous pouvez le constater je suis au GRAIS près Briouze en Normandie, et je suis sur les DELANGE, et demain je vous envoie une inégalité sociale là où vous ne vous doutez pas !!!