Assassinat de Nicolas Beaudon par Jean Cohon Sévaudais : 1645

Voir mon étude sur la famille COHON

Voici un second assassinat dans lequel les Cohon Sévaudais sont mêlés.
Le premier cas est en ligne dans les lettres de pardon du roi, publiées par Michel Nassiet.
Mathurin Cohon et son fils Pierre Cohon nous sont connus par la lettre de rémission datée de mars 1583 , dont voici le résumé à ma manière (entre crochets ce qui est dans le texte) dont voici les références électroniques : Michel Nassiet, « Lettres de pardon du roi de France (1487-1789) », Criminocorpus [En ligne], Les sources de la recherche, Articles, mis en ligne le 06 septembre 2017, consulté le 13 septembre 2017.

En juillet 1578 Guy Martin « pauvre jeune homme », 18 ans, et son frère Jean, 15 ans, demeurant à La Rouaudière (53, mais autrefois Anjou) partent chercher du foin avec un cheval au pré de Chaussegoulx dépendant de la Bouleraie.
Ici, précisons que le terme « pauvre » s’imposait à tous les avocats pour défendre leur client, pour engendrer la pitié, mais quand on a un cheval à cette époque on n’est pas pauvre. Le cheval est alors un animal de marchand qui se déplace beaucoup et/ou de la classe sociale plus aisée que les closiers. Ceci me rappelle que dans ma tour, nombre de propriétaires se disent pauvres mais possèdent une résidence secondaire !
Non seulement, les 2 jeunes gens ont un cheval, mais ils ont aussi emmené une arquebuse !

Là encore, on se demande comment un pauvre possède une arquebuse, et pourquoi il va au pré avec. Bon, il prétend que c’est une « petite arquebuse pour tirer les turtres », autrement dit les tourterelles. La encore, qui peut croire qu’un pauvre a une arquebuse pour tirer les tourterelles. Pire, les volatiles sont réservés au pigeonnnier des nobles !
Arrivés au pré, ils y trouvent Mathurin Cohon et son fils Pierre, qui leur auraient pris une partie du pré ; Mathurin tient un broc, qui est la fourche à 2 dents avec laquelle on charge le foin, tandis que son fils tient un baton ferré.

On se demande bien pourquoi emmener un baton ferré au pré. Mais surtout, ils sont accompagnés d’autres personnes. En clair, personne n’est là pour le foin, mais tout le monde pour chercher la bagarre.
S’ensuit une bagarre, sous les hurlements de Mathurin Cohon : « Tuons ces mechants voleurs icy ! ». Les Cohon poursuyvent les Martin, les frappent à coup de baston ferré et de pierre.
Les Martin leur demandent d’aller régler cela devant la justice, mais les Cohon continuent les frappes, et bientôt Guy Martin est acculé contre une haie et tombe. Encore frappé du baton ferré, il parvient à abattre le chien d’un coup d’arquebuse. Mais les Cohon le frappent encore à terre, frappant même l’arquebuse, tant et si bien que celle-ci part toute seule droit sur Mathurin Cohon, qui décède.
Je pensais que les arquebuses étaient peu maniables aussi viser le chien quand ont est à terre et frappé me semble plutôt impossible. Quant au second coup il est peu vraisemblable.
Vraiement Mathurin Cohon n’a pas eu de chance avec ce coup là.
Mais Guy Martin obtiendra une lettre de rémission 5 ans plus tard, non sans s’être absenté du pays, pour éviter son arrestation.

Les notaires de leur côté nous donnent beaucoup de transactions, et je vous en ai déja mis plusieurs concernant des assassinats, après lesquels la transaction met un terme à la demande d’indemnité, et les sommes sont toujours ridiculement faibles, ce qui m’a toujours étonnée, mais en lisant l’ouvrage de Michel Nassiet « La violence, une histoire sociale – France XVI – XVIIIèmes siècles » chez Champ-Vallon 2011, j’ai la confirmation de la valeur relative des assassinats, moins condamnables que les injures et le vol, du moins c’est ce que j’ai compris.

Donc, ici, comme dans toutes les transactions que je vous ai déjà mises sur des assassinats, le montant de l’indemnité touchée par la veuve est si faible que j’ose à peine l’écrire ici. Pour vous l’imager, elle aura à peine de quoi vivre un ou 2 ans, rien de plus.

Acte des Archives de la Mayenne AD53-3E63-17 Voici ma retranscription (voir ci-contre propriété intellectuelle) :
« Du 16 juin 1645, nous Jean Lemetayer et Jean Magdeleine chirurgiens certifions à qui il appartiendra que le 16 juin 1645 estre transportés de nostre demeurance de la ville de La Guerche jusques au bourg de Brein distant de nostre dite demeurance d’une lieue ou environ, pour voir et visiter le corps mort de defunt Nicolas Beaudon et le visitant luy avons trouvé un coup d’arquebusade situé en une partie du muscle frontal et partie du couronnal et tout le jousnal ??, le tout du costé dextre, auxquels avons vu environ une douzaine de plaies en rotondite ? quelques unes grandes et les autres plus petites, deux desquelles et la plus grande ont enfoncé l’os et pénétré à la substance du cerveau, lesquels coups ont causé la mort audit cy devant nommé dans 5 ou 6 heures ainsi que l’on nous a déclaré, et est nostre raport que certifions estre véritable, lesdits jours et ans que dessus » – « Du mercredi 26 juillet 1645, par devant nous Charles d’Hellyand escuier sieur de la Maslonière conseiller du roy prévost provincial d’Anjou en la maréchaussée de Château-Gontier, assistant noble …
« Le 24 juillet 1645 à la requeste de Renée Hardy veuve de defunt Nicolas Beaudon continuant les exploits faits par Boyard sergent royal par vertu de la sentence de quart et … par Mr le lieutenant en la maréchaussée de Château-Gontier le 18 des présents mois et an, contre Me François Cointet prêtre et Jehan Cohon dit Sevaudaye déffendeurs accusés, pour raison de l’assassinat par eux commis en la personne dudit deffunt Beaudon, j’ai inthimé à ban et cry publicq quard et super habondent (superabondant : de surcroît) édit lesdits Cointet et Cohon à comparoir mercredy prochain venant et pour se représenter ès prinsons royaux dudit Château-Gontier, lesdits Cointet et Cohon par davant Mr le prevost provincial en la méréchaussée dudit Château-Gontier, pour recepvoir confrontation des tesmoins des charges et autres suirvant … déclatons que en cas d’abscence l’audition et recollation desdits tesmoings vaudra confrontation, pour voir aussi procéder à la vériffication davant nous sieur prévost lieutenant ou acesseurs en absance de raport des sirurgiens qui ont vicité le corps mort dudit defunt Beaudon, et taxer les despends adjugés par ladite sentence à ce que aulcun n’en ignore. Fait au hault des halles de la ville de Craon le soir du marché tenant ou estoient grand nombre de personnes qui se sont assemblées au son de la trompette, fait sonner à cest effet entre autres … ledit trompette nommé René Beudeau demeurant audit Craon a déclaré ne savoir signer. Par moy sergent royal soubzsigné demeurant audit Craon, et ay laissé par attaché copie de ladite sentence et du présent exploit au poste ordinaire desdites halles en présence de tout le public. »
« Du 24 octobre 1645 : entre Jean Cohon dit Sevaudaye, demandeur en requeste et commission du conseil du 8 août 1645 à fin de règlement de juges, pour la contention de juridiction d’entre le prévost des maréchaux de Château-Gontier et le juge de la baronnie de Craon en Anjou, et requérant que sans avoir esgard à la sentence du règlement en recolement et confrontation de tesmoings rendue par ledit prévost comme nulle le procès criminel concernant l’accusation contre lui interjetée par la déffenderesse pour raison de l’homicide commis en la personne de son mary soit renvoyé par devant tel instance criminelle ou autre juge auquel le conseil trouvera la cognoissance apartenir d’une part ; et Renée Hardy veufve de feu Nicolas Beaudoin sieur du Bois Segrier et contrôleur des Eaux et Forests de la baronnie de La Guerche es noms et qualités qu’elle procède déffenderesse d’autre ; Et entre ladite Hardy demanderesse en requeste par elle présentée au conseil le 16 septembre 1645 et en requeste verbale par elle présentement faire en l’audience du conseil à ce qu’à faulte par ledit Cohon de se présenter en l’audience du conseil pour avoir par ladite desiruparation ? la suite d’iceluy depuis la comparution personnelle qu’il a faite au greffe didot conseil contre la prohibition et déffences à luy faites portées par l’arrest dudit conseil extraordinaire rendu avec luy le 5 de ce mois, il soit débouté dudit prétendu règlement de juges, et ce faisant que les parties seront renvoyées par devant ledit prévost des maréchaux de Château-Gontier ou son lieutenant pour estre le procès criminel par luy encommancé à faire audit Cohon pour raison de l’assassinat par luy inhumainement commis avec armes à feu dans le cimetière de la paroisse de Brain à la porte de l’église dudit lieu en la personne dudit feu Beaudon, continuation faict et parfaict audit Cohon, et explet par ledit Prevost des maréchaux de Château-Gontier ou son lieutenant, et iceluy Cohon condemné en 75 livres d’amende envers le Roy moitié moins envers ladite Hardy et en tous ses despens dommages et intérests ; et ledit Cohon deffendeur d’autre. Après que ledit Bauldry advocat pour ladite veufve Beaudon, assisté de Chuberé son procureur, et de Me Robert Puisset contrôleur au grenier à sel de Candé, ayant charge de ladite veufve, a conclud esdites requestes. Chaulet procureur dudit Cohon a dit que il offre faire représenter ledit Cohon jeudy prochain en l’audience du conseil, auquel jour il supplie le conseil de remettre la cause. Et que Salomon pour le procureur général du Roy a esté ouy. »