Gabriel Babou est venu de Bourges à Angers se mettre en apprentissage chez un libraire, Angers 1593

et c’est sa mère qui l’a accompagnée et le cautionne. Elle a surtout eu la lourde charge de venir avec la somme de 12,5 écus pour le paiement de la moitié du contrat d’apprentissage, et il faudra qu’elle refasse le même voyage 6 mois plus tard, avec la même somme. C’est une somme importante sur soi, car cela représente 37,5 livres soit la moitié de la valeur d’un bon cheval, ou bien une année de revenus d’un artisant de classe moyenne. Bref, une fortune pour les petits marchands et boutiquiers, car manifestement Babou père fait des chapeaux à Bourges !

Il y a 254 km de Bourges à Angers, et j’ai supposé que les libraires d’Angers rayonnent au point qu’à Bourges ont ait besoin de venir se former chez eux. Si vous êtes historien de Bourges, merci de nous dire si cette ville avait déjà des libraires avant 1593, car cette maman courage, faisant 254 km pour placer son fils en apprentissage, avec surtout la somme sur elle, aurait sans doute mis son fils apprenti à Bourges, à moins que les libraires de Bourges n’aient pas été libres pour prendre l’apprenti ?

Ils sont appris à écrire à leur fils, qui a une jolie signature.

L’acte qui suit est extrait des Archives Départementales du Maine-et-Loire, série 5E1 – Voici la retranscription de l’acte : Le 24 octobre 1593 après midy en la cour du roy notre sire Angers endroit par davant nout François Revers notaire royal de ladite cour, personnellement establis honnestes personnes Jacquine Foucquet femme de honneste homme Pierre Barbou autorisée à la poursuite de ses droits comme elle dit et Gabriel Babou leur fils demeurant en la ville de Bourges en Berry d’une part
et honneste homme Pierre Lemelle marchand libraire demeurant Angers paroisse sainte Croix d’autre part
soubzmettant lesdites parties respectivement elles leurs hoirs etc confessent avoir fait et font entre eux le marché d’apprentissage tel que s’ensuit savoir est ladite Foucquet avoir ce jourd’huy baillé sondit fils audit Lemelle lequel a promis et promet avecq le vouloir et constentement de sadite mère estre et demeurer avecq ledit Lemelle en sa maison Angers pendant le temps de 2 ans entiers et consécutifs commenczant au jour et feste de Toussaint prochainement venant
pendant lequel temps de deux ans ledit Gabriel Babou promet servir ledit Lemelle en sondit mestier et estat de libraire et ce qui en dépend dont il se mesle, et en toutes choses licites et honnestes qui luy seront commandées faire par ledit Lemelle bien et deument et fidèlement comme ung bon loyal serviteur et apprentif doibt et est tenu faire sans aulcun abus ne malversation
pendant aussi lequel temps de deux ans sera tenu et promet ledit Lemelle monstrer instruire et enseigner sondit estat de libraire audit Babou au mieulx qu’il peut aussi diligement que faire se pourra sans rien luy en receler
et oultre luy fournir pendant ledit temps de boire manger laver et coucher ainsi qu’appartient audit Babou
et est fait le présent marché pour et moyennant la somme de 25 escuz sol sur laquelle somme ladite Foucquet à ce jourd’huy payé et baillé manuellement contant audit Lemelle la somme de 12 escuz et demi qui ladite somme a eue prise et receue en notre présence et au vue de nous en quarts d’escu au poids et prix de l’ordonnance royale dont il s’est tenu content et en a quite et quicte ladite Fouquet et ses hoirs et ayant cause
et le reste de ladite somme de 25 escuz montant pareille somme de 12 escuz et demi payable par ladite Foucquet à ses despens périls et fortunes audit Lemelle en sa maison audit Angers dedans d’huy en 6 mois prochainement venant

    le paiement est toujours en quelque sorte franco, c’est à dire au domicile du créancier, or, ici, la maman de l’apprenti demeure à Bourges, et le notaire a donc souligné qu’elle doit apporter à Angers la somme à ses périls et fortunes.
    Même de nos jours, imaginez vous transportant en liquide sur des dizaines de km, une année de vos revenus ! Et pourtant nos routes sont surement plus sures que celles d’autrefois sur ce plan, même si le vol sur les routes sévit encore et toujours.

et a ladite Fouscquet promis pleger et cautionner plège et cautionne

Pleiger. v. act. Cautionner en Justice. Il vieillit. (Dictionnaire de l’Académie française, 1st Edition, 1694)

    autrement dit, autrefois, les parents étaient responsables de leurs enfants jusqu’à leur majorité, laquelle majorité était tardive, car seulement à 25 ans.
    Vous avez remarqué que cette caution des parents, ou l’un d’eux ce qui revient au même, figure dans tous les contrats d’apprentissage, nombreux, que je vous trouve et mets sur ce blog ! C’est bien une chose oubliée de nos jours !

ledit Babou son fils vers ledit Lemelle de toute fidélité et légalité
et a ladite Foucquet donné et baille audit Lemelle ung chapeau tel qu’il en porte et ung chapperon à sa femme le tout en faveur du présent marché qui aultrement n’eust esté fait entre les parties qui ont stipulé accepté tout le contenu en ces présentes respectivement

Chaperon, m. acut. C’est une facon d’habillement de teste, que les François de toutes qualitez portoient, qui estoit façonné communéement de drap, et celuy des Princes couvert d’orfaverie, ou autre diaprerie, estant façonné à une manche longue et estroitte, qui faisoit plusieurs tours au col, et un bourrelet qui estoit son assiete et arrest sur la teste de l’homme, et d’une piece de drap plissé, qui pendoit sur l’oreille, et servoit contre le Soleil, et le vent, ores pendant sur une oreille, ores sur l’autre. Nicole Gilles en la vie du Roy Jean, prisonnier en Angleterre, parlant du Duc de Normandie, fils aisné de France. Lors luy bailla ledit prevost des marchans de Paris son chaperon qui estoit mi-party de rouge et de pers, à la livrée de ceux de la ville, lequel le Duc meit en sa teste, et ledit prevost print le chaperon de mondit Seigneur le Duc, qui estoit de brunette noire, orfaverisé d’or, et le porta tout le long du jour en sa teste.
Maintenant les seuls qui sont de robbe longue, et aucuns magistrats politiques en usent, le portans sur l’espaule, là où anciennement tous François le portoient indifferemment, jusques aux messagers, et pelerins, qu’on appeloit lors aussi bourrelet, comme s’appele encores à present. D’un tel accoustrement de teste François entend parler Villon en ces vers: Chausses, pourpoincts, et bourrelets, Robes et toutes vos drapilles, Ains que cessez vous porteres Tout aux tavernes, et aux filles.
On appelle aussi chaperon l’atour et habillement de teste des femmes de France, que les damoiselles portent de velours à queuë pendant, touret levé et oreillettes attournées de dorures, et sans dorures, autrement appelé coquille, et les bourgeoises de drap, toute la cornette quarrée, horsmis les nourrices des enfans du Roy, lesquelles le portent de velours, à ladite façon bourgeoise. On dit aussi un chapperon de Fou, pour l’habillement de teste à cornes et oreilles qu’on fait porter aux fols: Et un chapperon en fauconnerie, est la coiffe de cuir, où on enclost la teste du faucon. (Jean Nicot: Le Thresor de la langue francoyse, 1606)

auquel marché et tout ce que dessus est dit tenir etc dommages etc obligent lesdites parties respectivement elles leurs biens à prendre etc et le corps dudit Babou à tenir prison comme pour les deniers et affaires du roi mesme par défaut de faire et accomplir le contenu de ces présentes dont il s’en iroit oultre le gré et vouloir dudit Lemelle, lequel en ce cas ne sera tenu le représenter et si bon luy semble le poursuivre à ce faire et accomplir le contenu audit marché, renonczant etc et par especial ladite Foucquet au droit vélléien à l’espitre divi adriani à l’authentique si qua mulier et a tous autres droits faits et introduits en faveur des femmes lesquels droits nous luy avons donnés à entendre estre tels que femmes ne sont tenues ès obligations et promesses qu’elles font fusse pour leur mary sinon qu’elles aient expressement renoncé auxdits droits autrement elles en pourroient estre relevées, foy jugement condemnation etc
fait à notre tabler Angers en présence de Me Loys Allain praticien et Michel Remere ? demeurant audit Angers tesmoins
ladite Foucquet a dit ne savoir signer

Cette vue est la propriété des Archives Départementales du Maine-et-Loire. Cliquez pour agrandir.

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3 réponses sur “Gabriel Babou est venu de Bourges à Angers se mettre en apprentissage chez un libraire, Angers 1593

  1. Les jolis contes de notre enfance.
    Il était une fois,une petite fille de village,la plus jolie qu’on eût su voir,sa mère en était folle,et sa mère- grand,plus folle encore.
    Cette bonne femme lui fit faire un petit chaperon rouge,qui lui seyait si bien,que partout on l’appelait le » Petit chaperon rouge »
    (Charles Perrault )

  2. Un famille Babou de Bourges s’est illustrée dans l’histoire :
    « Sous le règne de Louis XI, vers l’an 1470, vivait à Bourges un honnête notaire : il se nommait Babou ; son père avait été barbier … Babou gagna beaucou d’argent, il acheta à Philibert Babou son fils, la charge de Trésorier de France … »
    http://books.google.fr/books?id=NWYFAAAAQAAJ&pg=PA346&dq=Nobiliaire+du+Berry+Babou#v=onepage&q=Nobiliaire%20du%20Berry%20Babou&f=false

  3. Quand la fille du notaire royal,apprenait à faire des « chapperons ».

    -E.4212.(Carton.)-98 pièces,papier.
    -Traité pour l’entrée en apprentissage »pour faire chapperons de velloux »,de Françoise Lebloy,fille d’un notaire royal,chez Marie Monceau,femme de Jean Lefeuvre,praticien en court laye (1575).
    (Série E.-Notaires.AD du Maine et Loire.C.Port.)

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