Apprentissage de tanneur, Angers, 1591

Nous repartons dans l’apprentissage. Ici, le papa est bien vivant et tanneur à Château-Gontier. Il place son fils chez un confrère d’Angers, qui, en tant que confrère ne demande aucune somme en argent. Je trouve cet échange très sympathique car on apprend toujours encore mieux à mon avis entre confrères. La durée n’est que de 15 mois, mais manifestement le garçon a déjà vu et appris avec papa.
Ne me demandez pas quels vêtements le papa fournira car l’écriture de ce notaire est largement impénétrable, et je vous ai mis seulement 3 lignes, parmi les plus lisibles, afin que vous vous rendiez un peu compte …
Attention, bouchez-vous le nez avant de regarder l’iconographie, car les tanneurs sentent fort, et l’Erdre est stagnante, ce qui arrange bien les choses… J’ai toujours pensé que le cinéma, les vidéos, et autres consoles modernes, sont des coquilles vides car il manque les odeurs. Alors, ce blog aussi est ce jour une coquille vide sur ce plan, veuillez m’en excuser.

    Voir ma page sur les tanneurs
    Voir ma page (en construction) sur les contrats d’apprentissage


Vielles tanneries sur les bords de l’Erdre à Nantes, Dessin de M. Hawke, in Histoire de Nantes par M.A. Guépin, 1839

L’acte qui suit est extrait des Archives Départementales du Maine-et-Loire, série 5E36 – Voici ce que j’ai pu retranscrire de l’acte, à l’écriture imbuvable : Le 19 mars 1591 en la court du roy notre sire Angers endroit par davant nous (Lepelletier notaire royal Angers) personnellement establi sire Lois Bourdays le Jeune marchant Me tanneur demeurant en ceste ville d’Angers paroisse de la Trinité d’une part
et Nicollas Delaunay marchant demeurant à Château-Gontier et Jehan Delaunay son filz tanneur d’autre part
respectivement etc confessent avoir fait et font entre eulx ce qui s’ensuit c’est asscavoir que ledit Nicollas Delaunay a mis et alloué met et et alloue ledit Jehan Delaunay son fils audit Bourdays qui l’a prins et accueilli pour le temps d’un an et demy à commencer du premier jour d’apvril prochainement venant et firont à pareil jour
pendant lequel ledit Bourdays a promis et promet audit Jehan Delaunay luy monstrer instruire et enseigner sondit fait et mestier de tanneur et tout ce dont il se mesle en iceluy
et outre le nourrir coucher laver et entretenir honnestement …
aussy ledit Jehan Delaunay a promis et promet audit Bourdays le servir en sondit fait et mestier de tanneur, et en touttes choses licites et honnestes que ledit Bourdays lui commandera pour le proffit dudit Bourdays … dommage éviter et l’advertir du contraire si tost qu’il en aura connaissance
sans s’en aller pendant ledit temps ne ailleurs aller …
et pour ce que ledit Jehan Delaunay exerce ledit mestier de tanneur, ledit Bourdays a promis et promet ne demander aulcune chose audit Jehan Delaunay pendant ledit temps
autrement ledit Jehan Delaunay ne s’en fust … et allat avec iceluy Bourdays
et a promis ledit Nicollas Delaunay entretenir sondit filz de … a ce requis selon sa qualité fors que ledit Bourdays a promis l’entretenir de souliers seulement
et ..
auquel marché et tout ce que dit est s’obligent lesdites parties respectivement et spécialement ledit Jehan Delaunay son corps à tenir prinson comme pour les propres deniers du roy

    parties respectivement et spécialement ledit
    Jehan Delaunay son corps à tenir
    prinson comme pour les propres deniers

le CORPS a bien ses 4 lettres, mais le P est en forme de X au 16e siècle (souvent) et cherchez le bien, vous le trouvrez, ensuite le A TENIR est un trait de plume
suit la PRINSON etc… cherchez bien, vous avez mon mot à mot

fait et passé à notre tablier en présence de Jacques Quettier demeurant à Chastellays et … Rondeau demeurant … ledit Nicollas Delaunay a dit ne savoir signer
et a iceluy Nicolas Delaunay assuré sondit filz estre sain et légal et à ce l’a cautionné et cautionne pour ces présentes

Odile Halbert – Reproduction interdite sur autre endroit d’Internet Merci d’en discuter sur ce blog et non aller en discuter dans mon dos sur un forum ou autre blog. Tout commentaire ou copie partielle de cet article sur autre blog ou forum ou site va à l’encontre du projet européen d’éthique des blogueurs, disponible sur le site du Parlement européen.

Contrat d’apprentissage de couvreur d’ardoise, Saumur, 1735

L’Anjou est pays d’ardoise.
Voici un contrat d’apprentissage de couvreur d’ardoise.
Qui vient s’ajouter aux nombreux contrats d’apprentissage déjà sur ce site-blog.

J’ai été frappé par la durée : 5 ans. C’est considérable, et comme en contre-partie, l’apprenti ne paye rien au maître, je pense qu’en fait il lui sert d’ouvrier.
Aussi par une précision : sera nory à sa table des mesmes mets que luy
Mais le plus frappant concerne l’habillement, car nous avons là un détail précieux. Il est dit entre autres vêtement à fournir : 6 chemises. Or, la chemise était un vêtement que tout le monde ne portait pas, en quelque sorte, elle a suivi un parcours de démocratisation au fil des siècles, et j’apprends donc ici qu’en 1735 un couvreur d’ardoise porte chemise. Je songe à vous préparer un article sur cette pièce du vêtement, à travers mes inventaires après décès, pour que vous voyez à quel point elle est synonyme de rang social.

Extrait des Archives Départementales du Maine-et-Loire, série E2170 (fonds famille Crosnier) – Voici la retranscription intégrale : Le 14 juillet 1735 avant midy par devant nous les notaires de la chatellenie de l’abbaye royale de saint Florent les Saumur furent présents et soumis Pierre Rathouis maistre couvreur d’ardoise d’une part Jean Crosnier âgé de 20 ans fils de deffunt François Crosnier et de Florence Badin ses père et mère, et François Crosnier frère dudit Jean Crosnier, tous demeurant audit saint Florent
entre lesquels Pierre Rathouis et Crosnier a esté fait et convenu ce qui suit c’est à savoir que ledit Rathouis a déclaré prendre ledit Jean Crosnier sous la caution dudit François son frère, pour aprenty du mettier de couvreur d’ardoise, pour le temps de 5 années qui ont suivant la déclaration dudit Rathuis commencé dès le 25 juin 1733 de ce dont ledit Jean Crosnier a convenu et déclaré vouloir faire ledit apprentissage et promis de vouloir finir son temps desdites 5 années

pendant lequel temps ledit Rathouis s’est obligé de luy bien enseigner toutes les conditions qu’il convient audit métier et de l’entretenir de vestement de culottes bas souliers chapeau et linge selon son estat,
sera nory à sa table des mesmes mets que luy, s’oblige en outre ledit Rathouis donner audit Jean Crosnier une année devant les 5 années expirées un habit d’étoffe de pinelière (que je n’ai pu identifier), et 6 chemises pareilles à celles qu’iceluy Crosnier a à préents, s’oblige aussi ledit Jean Crosnier de bien travailler pendant ledit temps desdites 5 années pour le profit dudit Rathouis de luy estre fidèle et obéissant et iceluy Rathouis s’oblige d’entretenir ledit apprenti de travail sans lui laisser perdre aucun temps

et si au cas que ledit Jean Crosnier s’absentoit par libertinages dans le cours desdits 5 années ledit François Crosnier s’oblige comme caution faire raison audit Rathouis du temps que ledit apprenti auroit perdu soit de faire employer ledit temps perdu par ledit apprenti ou de payer audit Rathouis ce qui sera arbitré par d’autres maistres couvreurs d’ardoise

à quoy tout ce qui a esté voulu consenty stipulé et accepté les parties se sont respectivement obligées mesme ledit Rathouis avec tous ses biens meubles et immeubles présents et futurs pour l’entretien dudit aprenty comme à ses habillements linge et abits qu’il luy doit donner

dont fait et passé à Saint Florent en la maison de demeure de Jacques Charpentier l’un de nous notaires soussignés en présence de l’autre soussigné, ont lesdits Rathouis et Crosniers déclaré ne savoir signer enquis –
Signé : Charpentier, Bonnet

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Contrat d’apprentissage de chirurgien, Angers, 1651

Ce contrat d’apprentissage contient un terme curieux : locatif, qui n’existe dans les dictionnaires depuis la Renaissance que comme adjectif, sous la dénifition du bien loué. Mais je trouve tout de même qu’il a été substantif :

Locatif : adjectif et nom masculin, 13e siècle. Qui est passager, qui n’habite que provisoirement en un lieu. Et au figuré : Tous les hommes sont mis ainsi comme locatifs sur cette terre (Perrin) (Dict. du moyen Français, la Renaissance, Larousse, 1992)

Locatis : En Normandie, homme de peine dont on loue les services occasionnellement. (Dict. du Monde Rural, M. Lachiver, Fayard, 1997)

Ces définitions ne conviennent pas dans l’acte ci-dessous. Je pense qu’il y est pris en synonyme d’apprentif, mais ceci reste une hypothèse.

L’acte qui suit est extrait des Archives Départementales du Maine-et-Loire, série 5E8 bis – Voici la retranscription de Pierre Grelier : Le vendredy 25 août 1651 avant midy, par devant nous Jacques Bommyer notaire royal à Angers furent présents establys et duement soubmis honorable homme Pierre Ronsin maitre chirurgien audit Angers y demeurant paroisse saint Pierre d’une part
et René Beliard locatif de l’art de chirurgie, demeurant en la ville d’Ancenis, étant de présent en cette ville d’autre part

lesquels ont fait la convention qui s’ensuit, c’est à scavoir que ledit Ronsin a promis et s’est obligé entretenir en sa maison ledit Beliard pour le temps et espace de 6 mois entiers et consécutifs et commençant de ce jour et à finir le 25 février prochain

et pendant ledit temps luy monstrer et apprendre à son pouvoir ledit art de chirurgie sans rien luy en cacher ni celler, le nourrir et coucher et luy faire comme maîtres chirurgiens doivent et son tenus faire à locatif

    Ici, le terme locatif semble bien être utilisé pour apprentif

comme aussy promet ledit Beliard pendant ledit temps obéir et faire le poil et tout ce qu’il se rencontrera à faire concernant ledit art de chirurgie sans pour ce en rien prétendre ny espérer de gain ny profit, ni que ledit Ronsin soit tenu luy payer ny bailler aucun argent en contrepartie de ce que ledit Ronsin luy montrera et apprendra comme dit est ledit art à sa possibilité

furent à ce présents establis et soumis Charles et Jean les Beliard ses frères marchands et teinturiers demeurant scavoir ledit Charles à Candé et ledit Jean en ladite ville d’Ancenys

    Erreur, car nous savons par ailleurs de façon certaine que Charles habite Ancenis et Jean habite Candé

lesquels ont promis et assuré que ledit Beliard leur frère exécutera les termes de cette présente convention et demeurera chez ledit Ronsin ledit temps de 6 mois entières et consécutives aux charges et conditions susdites
et de ce ensemble de la fidélité de leurdit frère ils font leur propre fait et debte et obligent solidairement à peine contre eux en leurs privés nom de toutes pertes despends dommages et intérests desdits dommages et intérets, dès à présent par entre lesdites parties stipulés et convenus à la somme de 60 livres que lesdits Charles et Jean les Beliard solidairement avec les renonciations au bénéfice de division, discussion d’ordre etc s’obligent payer et bailler audit Ronsin sans forme ni figure de procès au cas que ledit René Beliard vint à sortir de chez ledit Ronsin auparavant lesdits 6 mois expirés, lesdits Charles et Jean les Beliard paieront 15 jour après que ledit René Beliard en serait sorty sans comprendre en ladite somme de 60 livres la fidélité dudit René Beliard

car ainsy les parties ont le tout voulu consenty stipullé et accepté et à ce tenir etc promettant etc dommage etc s’obligent icelles parties respectivement etc biens et choses à prendre vendre etc renonçant etc dont etc
fait et passé audit Angers maison de nous notaire présents Me Pierre Lemesle et Pierre Thibaudeau praticiens demeurant audit Angers témoins advertis du scellé suivant l’édit
Signé : J. Beliard, C. Beliard, Ronsin, R. Beliard, Thibaudeau, P. Lemesle, Bommyer

Pour vérifier le sens de locatif, j’ai également consulté en vain :

    Glossaire angevin, Charles Ménière, 1880
    Glossaire du patois angevin, Henri Boré, 1988
    Le parler populaire en Anjou, Augustin Jeanneau et Adolphe Durand, 1987
    Parlers et traditions du Bas-Maine et du Haut-Anjou, Cercle J. Ferry, Laval, 2001

Si vous avez mieux, merci de nous en informer ci-dessous.

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Contrat d’apprentissage de clerc de notaire, Angers (49), 1612

pour Maurice Chauvin chez Nicolas Charlet Me écrivain (Archives Départementales du Maine-et-Loire, série 5E)

Dernière minute : je découvre ce matin sur Internet que l’UNESCO vient de classer 12 sites de Vauban au patrimoine de l’humanité. Je n’en reviens pas de découvrir à quel point j’étais en phase hier avec les fortifications de Saintonge vues du ciel.

Je poursuis les contrats d’apprentissage, et aujourd’hui voici l’apprentissage d’un futur clerc de notaire, malheureusement sans indication ni de la durée de la formation, ni de l’âge du garçon.

L’acte qui suit est extrait des Archives Départementales du Maine-et-Loire, série 5E – Voici la retranscription de l’acte : Le 10 may 1612, par devant nous Pierre Richoust notaire royal Angers personnellement establis honneste personne Nicolas Charlet Me escripvain d’une part
et Elisabeth Jarry marchande publique

(ne pas confondre avec femme publique qui désigne le commerce de son corps, je supposais que la marchande publique est celle qui vend à la criée, il n’en ai rien, et elle serait un femme ayant le droit juridique de vendre, ce qui concernait surtout les veuves, mais pas exclusivement, la meilleure explication que j’ai trouvée, se rapporte au commerce du port de Nantes Les femmes et le commerce maritime à Nantes (1660-1740) : un rôle largement méconnu.
Il est probable que l’origine du qualitifatif « publique » tient au fait de l’effacement des femmes derrière leur mari dans le droit coutumier d’autrefois, et on aurait trouvé ce qualificatif pour celles qui se sont lancées sans leur mari dans le commerce, qu’elles soient veuves ou non, et dans ce dernier cas avec l’autorisation de leur mari mais juridiquement indépendante de lui. Pratiquement, il semble qu’on ait eu quelque difficulté à mettre le terme « marchand » au féminin, alors on avait inventé cette formule « marchande publique » qui signifierait « marchande » ayant le droit juridique de vendre à son compte, autorisée de son mari à faire un autre commerce que le sien, voyez mon commentaire vous donnant le Code Napoléon)

femme de René Chauvin marchand hostelier d’aultre part tous demeurant en ceste ville d’Angers paroisse de la Trinité soumettant etc confessent etc avoir faict et font entre eulx le marché accord et convention ce qui s’ensuit

c’est à savoir que ledit Charlet a promis et demeure tenu de montrer instruire et enseigner à Maurice Chauvin fils desdits Chaulvin et sadite femme faire toute escriptures faictes à la main et escripre toutes escriptures qui sont à présent en usaige et à gester (on jette bien entendu, et on ne geste pas) et calculer aux chestons (on calcule aux jetons ici écrits chestons) et commencer à congnoistre le chiffre et à orthographier le mieux et le plus profitablement qu’il luy sera possible de faczon et manière qu’il soit capable d’estre clerc de notaire pour minutes copies et faire des grosses en parchemin bien et duement, comme il appartient,
lequel Maurice Chauvin sera et demeurera tenu d’aller chacun jour en la maison dudit Charlet aux heures acoustumées sans intervalle ny discontunation
et est ce faict moyennant la somme de 15 livres tournois sur quoy ladite Isabeau Jarry a payé comptant audit Charlet la somme de 7 livres 10 sols et le reste payable par ladite Jarry dedans un an prochainement venant à ce tenir et obligent renonçant etc foy jugement, condamnation etc
fait et passé audit Angers en nostre table après midy en présence d’Estienne Cize et René de Mouteul demeurant audit Angers tesmoins etc ladite Jarry a dict ne savoir signer de ce enquise
Le 1er juillet 1613 fut présent ledit Charlet qui a confessé avoir reçu dudit Chauvin par la main de Elisabeth Jarry sa femme la somme de 7 livres 10 sols pour le reste et parfait payement de ladite somme de 15 livres mentionnée au marché cy-dessus et pour la cause y contenue.

Même si la durée n’est pas explicitée, le mode d’étalement des deux paiements laisse clairement entrevoir 24 mois, au moins, car le paiement est toujours parfait bien avant la fin du stage.

Le calcul aux jetons : Le jeton est un pièce ronde ou à pans et plate, de métal, d’ivoire ou de nacre, sur laquelle on met des portraits, des armes, des devises, etc. et dont on se sert pour jeter et calculer, pour marquer et payer au jeu.
Le calcul aux jetons se fait aisément, en représentant les unités par les jetons, les dixaines par d’autres jetons, les centaines par d’autres. Par exemple, si je veux exprimer 315 avec des jettons, je mets 3 jetons pour marquer les centaines, 1 pour les dixaines, 5 pour les unités.
L’usage des jetons pour calculer étoit si fort établi, que nos rois en faisoient fabriquer des bourses pour être distribuées aux officiers de leur maison qui étoient chargés des états des comptes, & aux personnes qui avoient le maniement des deniers publics (selon l’Encylopédie Diderot). Le jeton apparaît en France à l’époque de Saint-Louis comme instrument de calcul : en métail ordinaire, et frappé au marteau, c’est le jeton de compte. Il sera par la suite orné par des particuliers, corporations etc…

Nantes conserve des choses merveilleuses qu’on peut voir sur Internet, ainsi la collection de sceaux du Musée Dobrée. Les maires de Nantes avaient leur jeton, et si je n’ai pas trouvé en ligne les jetons, j’ai trouvé les maires de Nantes. Si j’ai voulu redécouvrir ces jetons, c’est que j’en ai toujours entendu parler, mais je crois maintenant que je n’avais pas tout à fait bien compris le rôle du jeton, avant ce billet, pour lequel je me suis penché sur la méthode de calcul autrefois. Les Russes et les Chinois avaient le boulier et je ne m’imaginai pas que nous avions une méthode différente

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Contrat d’apprentissage d’architecte à Laval (53), 1659

L’école d’architecture de Nantes déménagera en février prochain. Installée sur les friches industrielles de l’île de Nantes, faite de béton, verre et métal, elle domine la Loire.
Par ailleurs, 3 000 contrats d’apprentissage, tous métiers confondus, sont en cours d’étude à Nantes, et lorsque ce travail sera publié, on saura combien d’années un architecte était apprenti, en moyenne, car il semble que la durée soit variable.
Ainsi, à Angers on voit 24 mois, et voici le double à Laval, qui avait aussi la particulirité d’employer le terme d’allouement pour ce contrat. Cette durée de 48 mois, certes longue, s’entend sans doute parce qu’on est en famille, et que la maman, remariée, case son fils chez un proche parent qui va parfaire toute son éducation. Enfin, c’est comme cela que je le vois…
Voici donc un contrat d’apprentissage qui vient enrichir ma petite base de données :

Laval, le château
Laval, le château

Autres cartes postales de Laval, collections privées. Reproduction interdite.

  • L’acte notarié qui suit est extrait des Archives départementales de la Mayenne, série 3E
  • Retranscription de l’acte : Du 8 juillet 1659 avant midy devant nous Jean Marais notaire du comté de Laval et y demeurant ont esté présens et deuement estably Me Jullien Seigneur et Marie Frin sa femme, de luy suffisamment authorisée quant à ce, et François Langlois fils mineur yssu du premier mariage de ladite Frin avec deffunt François Langlois Sr de la Butte d’une part, et Michel Langlois Me architecte d’autre part, demeurantes lesdites partyes audit Laval, entre lesquelles partyes a esté fait l’allouement tel qui ensuit
    c’est à scavoir que ledit Michel Langlois a promis et s’est obligé apprendre et instruire ledit François Langlois audit mestier d’architecte à son possible pendant le temps de 4 années du jour et feste de Magdelaine prochaine et finiront à pareil jour lesdites 4 années finies et révollues
    pendant lequel temps ledit Michel Langlois a promis le nourrir coucher et lever et reblanchir et luy donner tout lantemens honneste et raisonnable qu’un maistre doibt à un apprenty
    lequel temps d’apprentissage ledit François Langlois soubz l’authorité desdits Seigneur et Frin a promis et s’est obligé à ce tenir par corps faire et parfaire sans se desfaire du service dudit Michel Langlois pour quelque occasion que ce soit,
    et en cas d’évasion abvenue mesme de maladie de plus de trois jours de remplir ledit temps d’apprentissage et fin d’icelluy,
    la présente convention faicte moyennant la somme de 100 livres que lesdits Seigneur et Frin sa femme ont promis et se sont obligez bailler et payer scavoir 50 livres d’huy en 6 mois et l’autre moitié un an après les 6 mois expirez,
    et oultre de luy bailler une monstre dont la boiste est d’argent qui estoit audit deffunt la Butte, ou la somme de 20 livres en cas que par l’évenement de procès pour raison d’icelle elle ne demeure auxdits Seigneur et femme, (j’ai compris que la montre était au défunt père de l’apprenti, lequel était manifestement proche parent, voire frère de Michel Langlois, le maître architecte, mais qu’il y avait entre les 2 frères une sombre histoire de montre et de procès à son sujet. Dans tous les cas, on a ainsi le prix d’une montre, soit 20 L, et elle était réservée à cette époque à une élite, ne serait-ce qu’à cause de son prix)
    à la charge par lesdits Seigneur et femme d’entretenir ledit François Langlois d’habits linges et chaussures
    pendant ledit temps de la fidélité duquel et représentation dudit Langlois apprenty en cas d’absence lesdits Seigneur et Frin demeureront responsables mesme des dommages et intérestz faulte de parfaire ledit temps d’apprentissage, ce qu’ils sont respectivement voulu accordé stipullé et consenty …

    fait et passé audit Laval en présence et de l’advis de René et François Langlois oncles dudit mineur, et de Jean Gaudin et Jean Jourdan praticiens demeurant audit Laval, tesmoins à ce requis et appellés.
    Signé de tous, y compris de Marie Frin

    On est dans un milieu cultivé et aisé, parce que la signature de la maman, Marie Frin, est belle, et parce que cette histoire de montre est curieuse. La montre est un objet rare et cher, et il semble bien qu’on puisse lire dans cet acte, certes entre les lignes, que la montre est un héritage qui fait l’objet d’une petite dispute familiale…

    Au sujet des signatures : j’observe le plus souvent que les femmes de notables qui signent, le font avec leur prénom et sans floriture, tandis que les messieurs le font avec l’initiale seulement de leur prénom, et le plus souvent une floriture, enfin les écuyers le font sobrement, avec leur prénom et sans floriture. C’est bien le cas ici de la femme et des messieurs (pas d’écuyer ici, ce sera une autre fois).

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    Apprentissage de drapier-drapant, Morannes (49), 1619

    Voici encore un contrat d’apprentissage qui vient enrichir ma base de données.

    (Archives Départementales du Maine-et-Loire, série E) : Le 21 mars 1619, en la cour royale de St Laurent des Mortiers, par devant nous Jacques Jucqueau notaire d’icelle demeurant à Morannes,
    Jacques Roguet marchand demeurant paroisse de Daumere étant de présent audit Morannes
    confesse avoir baillé et mis comme aprantif dudit jour en deux ans en suivant Jehan Roguet son fils à honneste homme Jehan Letourneux drappier drappant, demeurant audit Morannes, à ce présent, prenant, retenant ledit Roguet fils dudit estably à son apprantif (apprentif), auquel ledit Tourneux sera tenu et promet monstrer et ensaigner (enseigner) au mieux qu’il pourra son dit mestier de drappier en quelque façon qu’il doibve estre monstré par son dit mestre (maître) à cause dudit estat et durant ledit temps luy quérir et livrer son vivre de boyre manger feu lit logis lumière bien et convenablement comme il appartient ensemble le traictter (traiter) doucement (j’aime tout particulièrement cette phrase, et je suppose qu’elle est là parce qu’il a existé des maîtres plus durs que d’autres)

    et ledit Roguet père fournira à son fils de vestement et habits honnestes en quelque façon que ce soit selon estat, pour rayson duquel apprantissayge ledit Roguet estably sera tenu promet et gayge payer audit Le Torneux mestre dudit apprantif la somme de 23 livres en ceste manière que cy-après c’est à savoir la moytié à la Saint Jehan Baptiste prochainement venant et le surplus de ladite somme au jour et terme de Quasimodo en un an, (je n’ai pas vu la durée de l’apprentissage qui a été oubliée dans cet acte, mais le fait que le second terme soit dans un an laisse à penser que la durée est de 2 ans, car les termes étaient toujours payables d’avance)
    présent à ce ledit Jehan Roguet apprantif aagé de sese (seize) à dix sept ans (si on n’a pas la durée de l’apprentissage, on a par contre l’âge de l’apprenti, ce qui est rarement indiqué dans un contrat, ici 16 à 17 ans, et au passage on remarque le manque de précision alors que le père sait signer et devrait savoir compter l’âge de son fils) qui ce présent bail et tout ce que dit est a eu pour bon et agréable et promet servir ledit Tourneux sondit mestre bien et loyalement à son mestier et en toutes choses licites et honnestes, fayre son profit et fuir son dommaige et l’avertir du contrayre s’il vient à sa cognoissance, sans cesser de servir durant ledit temps et en cas de fuitte ledit Roguet père le promet quérir en quelque lieu et place qu’il fut et le ramener audit Tourneux son mestre pour et affin que ledit Roguet son fils parachève son dit contrat d’apprantissage, et oultre ledit Roguet estably à toute loyauté et prodhommie, mesme ledit apprantif son corps à tenir prison (encore ce point de droit, très contraignant à nos yeux, mais autrefois on ne badinait pas avec l’abscence de l’apprenti).
    Fait audit Morannes en la maison d’Estienne Poyson hoste dudit Morannes (le nom ne semble pas terrible au premier abord pour un hôtelier, mais rassurez vous, il ne s’agit que de l’orthographe fautive du patronyme Poisson, plus rassurant), ès présence de honneste homme René Cesnault sieur de Primault, Jehan Jouault cordonnier témoins, lequel Letourneux a dit ne savoir signer . Signé : J. Roguet, Jouault, Cesnault, Jucqueau

    Le drapier drappant fabrique et vend, et le marchand drapier vend seulement, et ce dernier est généralement installé dans une grande ville comme Angers, Nantes. Voici la définition exacte des deux métiers :

    DRAPIER, s. m. (Comm.) marchand qui fabrique le drap, ou qui le vend. On appelle le premier Drapier-drapant, & le second marchand Drapier – DRAPANS, s. m. (Commerce.) nom par lequel on distingue les ouvriers fabriquans les draps des marchands qui les vendent ; on appelle les premiers drapiers-drapans, & les seconds marchans-drapiers. (Encyclopédie Diderot)

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