Orthographe des patronymes et des toponymes

au fil du temps et des capacités orthographiques des rédacteurs d’antant

Je reçois d’innombrables courriels. Beaucoup concernent l’orthographe des noms de lieux et de personnes, et me signalent que mon site est bourré d’erreurs, enfin, selon eux… Ils sont tous du type : Sachez Madame que mon nom s’écrit … et non … comme vous l’écrivez dans le relevé untel.

Les 2 derniers courriels de ce type concernait un toponyme dont je donne l’acte en 1555 et l’individu pas content me dit Sachez que mes parents ont eu cette ferme et que cela s’écrit…., suit un nom de famille pendant la Révolution, puis l’orthographe récente de son patronyme, et gommant d’un trait et pas content du tout, les nombreuses variantes, surtout pendant la guerre civile de la Vendée, où, dans les Mauges, les mouvements de prêtres ou officiers civils peu formés, ont entraîné un surcroît de variantes phonétiques car l’accent était éminement variable d’une paroisse à l’autre.

J’ai passé 50 années de ma vie le nez dans les registres paroissiaux, les actes notariés et les chartriers, et je ne parviens pas à comprendre de telles réactions… Selon moi, il y deux choses dans un nom de personne ou de lieu :

  • la richesse des variantes orthographiques au fil des siècles et surtout des rédacteurs plus ou moins cultivés (je reviens bientôt sur la formation des prêtres, question qui m’a été posée) qui marquent souvent leur étymologie.
  • notre identité actuelle, telle qu’elle fut enregistrée le jour de notre naissance en mairie, et que nous devons sans cesse décliner, depuis 20 ans, épeller car l’ordinateur est plutôt limité en compréhension…
  • 1° Les orthographes anciennes

    Lorsque je fais un relevé d’actes, je fais une retranscription fidèle, et d’ailleurs exhaustive : c’est la seule méthode fiable, car au nom de qui ou de quoi faudrait-il moderniser et standardiser patronymes et noms de lieux, et d’ailleurs sur laquelle de leurs variantes…
    L’ouvrage le plus beau que je connaisse est le Dictionnaire étymologique des noms de famille, de Marie-Thérèse Morlet. Quand on l’ouvre, on a le vertige devant toutes les variantes d’un nom de famille, parfois d’ailleurs si surprenantes qu’elles font rêver, rêver d’étymologie. Je l’ouvre pour vous au hasard ce matin, et je lis : Glorian, -iand, -iant, participe passé du verbe gloriar, se glorifier, a désigné comme Glorieux (Centre, Nord), un individu vantard, vain. Autres dérivés : Gloriod (Franche-Compté), Gloriot (Est), Glorion, Gloirel, Glory (Midy), Gloriez (Nord), Glorget, variante de Gloriet (par confusion ancienne de i et j)
    Avouez que c’est un dictionnaire merveilleux, qui donne une grande idée de la richesse des variantes orthographiques… et je ne m’en lasse jamais.

    Il en va de même des noms de lieux. J’ai étudié il y a 12 ans les noms de lieux du Pouancéen à travers les anciens chartriers, et découvert à quel point Cassini avait fait beaucoup d’erreurs allègrement recopiées de nos jours. Ainsi la Barbe d’Orgère (en latin Barbus Ogerus) devenue Bordagère, etc… Et, pour votre édification personnelle, ce travail sur les noms de lieux du Pouancéen au 16e siècle, que j’ai mis sur mon site depuis 10 ans, a été entièrement volé et édité par quelqu’un qui n’a même pas eu le courage de me citer... mais qui est par contre devenu une gloire locale pour son travail (mon travail).
    A côté des vriantes étymologiques, citons les exentricités des rédacteurs, où les limites de leur culture, voire leurs erreurs d’attention. Ainsi au 19e siècle encore, à l’intérieur d’un acte, le nom varie, et que dire de la copie. Les copistes devaient passablement s’ennuyer…

    2° L’orthographe actuelle.

    J’ai bien connu une famille actuelle, dont le nom comporte LL. Ils ont eu 3 fils. Lors de l’enregistrement de la naissance de l’un des trois, la secrétaire de mairie a oublié un L (cela peut arriver, elles ne sont pas infaillibles, les pauvres), et jamais cette famille, pourtant du genre pointilleux sur tous les points, n’est parvenue par la suite à faire modifier l’acte de naissance, de sorte que ce papa LL a 2 fils LL et un fils L. Et, comme par la suite l’erreur se reporte sur les générations futures, désormais une branche n’a qu’un L.

    Vous pensez sans doute que je m’appelle HALBERT, il n’en est rien.
    Ce patronyme est strictement réservé aux réponses écrites, car lorsque j’écris je mets bien mon H devant.
    Mais il en va tout autrement à toutes les demandes orales de mon nom. Du temps des dossiers papier, il suffisait de crier H sinon on ne trouvait pas mon nom dans le tiroir des fiches A
    Depuis l’informatique il en va tout autrement. La grande majorité des Français doit épeller son nom, à commencer par moi. Pendant longtemps j’ai crié HALBERT-AVEC-UN-H et cela marchait, jusqu’au jour où la personne à laquelle j’avais répondu HALBERT-AVEC-UN-H, ne me m’a pas trouvée. Comme j’étais sure d’être dans ses dossiers (il s’agissait d’une administration) j’ai répété, en vain, puis, je lui ai demandé si elle avait bien mis le H, elle me répond que oui.
    Toujours en échec, je lui demande de me faire voir le patronyme. Et elle me tend ALBERTH. Je n’ai pas ri du tout tant j’étais triste au contraire.
    Depuis je m’appelle HALBERT-AVEC-UN-H-DEVANT puis j’épelle le tout lentement en pesant lourdement sur le H. Si on commence en épelant d’abord, la personne prête rarement attention au H.
    Donc, de nos jours, nous sommes soumis à l’orthographe exacte de notre carte d’identité, mais de grâce, cela ne vaut pas la standardisation de tout le passé, si joli avec ses innombrables variantes…. et je plains beaucoup les généalogistes bloqués dans leur esprit à une orthographe étroite, et qui ne savent goûter au plaisir de toutes les variantes passées.

    Ainsi, mon patronyme ne s’est pas contenté de perdre ou non son H, il a bien plus curieux. Il alterne parfois avec HERBERT et quand je dis alterne, j’entends bien les diverses formes de HALBERT dans un unique individu… ou famille… C’est une constatation, un point c’est tout… Les deux patronymes ont la même origine, et se sont parfois confondus…

    Alors, à tous les aimables correspondants qui ne sont pas contents que j’écrive les noms d’époque, je réponds :

    Monsieur, Madame
    Merci de votre email. Je l’ai sans doute mal lu, car il aurait dû être formulé ainsi : Madame, je vous remercie de m’avoir fait découvrir telle variante orthographique de mon nom, telle variante orthographique de la ferme de mes parents, etc…

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    Le nom de famille : qui connaît celui d’Astérix ?

    Personne, car chez les Gaulois, pas de nom de famille, encore moins héréditaire. Face à eux, les Romains débarquent avec 3 désignations chez les riches : prénom, nom de famille, surnom ; 2 pour les gens du peuple : prénom, surnom.

    Puis arrivent les Germains, qui portent un nom unique, qui sera souvent adopté.

    Après les Carolingiens, au 10e siècle, le surnom vient s’ajouter au nom individuel : Charles le Martel, Pépin le Bref, Charles le Chauve, Louis le Gros, ont amusé nos jeunes années d’historiens en herbe !

      Deux siècles plus tard, le surnom devient héréditaire, donc nom de famille.

    En 1539, François 1er promulgue l’Ordonnance de Villers-Cotterets : obligation de tenir des registres d’état civil, comprenez de baptême, car ce sont les prêtres qui en sont chargés. Le Concile de Trente, en 1563, dans son chapitre De reformatione matrimonii, oblige les négligents à tenir ces registres, d’autant qu’il convient de traquer la consanguinité. En 1576, à Blois, Henri III par Ordonnance, ajoute la tenue des mariages et sépultures dans les registres.

    Le nom de baptême est celui d’un saint, dont la liste est fixée par l’Eglise dans le Rituel. Voyez la liste du Rituel de Nantes en 1781. Il va devenir plus tard prénom lorsque le terme nom de baptême sera devenu gênant pour la laïcité et pour la liberté du choix.

    Le surnom, ancêtre de notre nom de famille, est 1° d’origine (lieux, province…), 2° ancien nom de baptême, 3° métier, 4° sobriquet ; et les noms étrangers qui viennent en France.

    Lorsqu’il enregistre un baptême, le prêtre est tenu d’inscrire : lieu, date, son nom, le nom de baptême de l’enfant, né (née) du légitime mariage de NN. et de NN. son épouse en marquant les noms, surnoms, qualité et condition, et profession du père et de la mère, de cette paroisse ou de de la paroisse de …, le parrain a été NN. et la marraine NN. mettant leurs noms, surnoms, qualité, paroisse, le père absent ou présent, qui ont déclaré ne savoir signer. (Rituel de Nantes, 1781).
    On voit alors que le surnom est notre nom de famille actuel. On peut alors comprendre que pour les gens du voyage qui ne possédait pas de surnom, des prêtres aient écrit Egyptien, en tant que surnom. D’où la trouvaille d’Henri.

    Le prénom, ex nom de baptême, est un terme moderne.
    C’est le nom qui, chez les anciens Romains, précédait le nom de famille et qui distinguait chaque individu. César portait le prénom de Caïus. Le prénom de Cicéron était Marcus. Il se dit aujourd’hui du Nom ou des noms particuliers qu’on donne à un enfant à sa naissance, qui, dans les actes de l’état civil, précèdent le nom de famille et qui servent à distinguer les individus. On l’a prié de décliner ses nom et prénoms. Il y a erreur sur la personne : le nom est le même, mais pas le prénom. (Dictionnaire de L’Académie française, 8th Edition, 1932-5)

    De nos jours, le nom est le mot ou l’ensemble de mots par lequel on désigne une personne, pour la distinguer de toutes les autres. Nom de personne. Nom de baptême, prénom donné lors du baptême (on dit aussi, familièrement, Petit nom). (Dictionnaire de l’Académie Française, actuel)
    Et pour l’administration, c’est le nom de famille ex surnom et le prénom ex nom de baptême.

    Je n’ai pu vous illustrer ce billet avec Astérix, car je n’en possède pas les droits, mais courrez le voir, c’est le moment… Regardez-le pour moi, je ne peux y aller : je suis hyperacousique et, comme beaucoup, exclue de cinéma.

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    Origine du patronyme Talourd

    Le patronyme Talourd est un nom de lieu d’origine.

    Le patronyme Talourd est un nom de lieu d’origine.
    Il ne figure pas dans le dictionnaire étymologique des noms de famille, de M.T. Morlet, 1991
    Voici les noms de lieu rencontrés : Talourre, Groissiat (Ain, 01), Talours, Saint-Gerrnain-les-Paroisses (01), Rocher de Talourd, Saint-Rambert-en-Bugey (01), Talourd, Angrie (Maine-et-Loire, 49), Bas Talour, la Pouëze (49), Guemo Talour, Grand-Champ (Morbihan, 56), la Talourdière, Saint-Mesmin (Vendée, 85)
    Le patronyme est présent en Anjou, et c’est à Angrie et La Pouëze qu’il prend ses racines. J’ai dépouillé ces deux paroisses à l’origine de leurs registres paroissiaux, et je l’y rencontre.
    Il est donc certain que le patronyme a pour origine ces noms de lieux. Il en est sans doute de même dans les autres départements ci-dessus, que je ne connais pas.

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