Contrat de travail saisonnier de Ange Veillon comme serviteur chez Pierre Faucheux, Saint Lambert de la Potherie, 1589

Le contrat qui suit est établi pour une saison de récoltes de la st Jean qui est le 24 juin à la Toussaint.
Pour une métairie il y a toujours besoin de plusieurs bras d’hommes, contrairement à la closerie où un homme devait pouvoir s’en tirer seul.
Mais ici, j’observe une curiosité concernant le métayer. En effet, c’est la première fois que je vois un métayer qui signe, et qui signe même aussi bien qu’un marchand fermier. Sans doute fait-il aussi par ailleurs un peu marchand fermier.
Enfin, si le statut de travail 3 mois peut paraître un peu précaire, il faut relativiser car le salaire est conséquent, et je vous laisse le découvrir. Je dirais même à la lecture de ce que va toucher ce garçon pour ses 3 mois qu’il a de quoi vivre les autres jours de l’année, ou presque.

Et dans le salaire, il y a aussi des vêtements, et voici un nom que je n’avais pas encore rencontré.

HOUSSETTE, subst. fém.
A. – COST. « Vêtement long de dessus » (in Dictionnaire du Moyen Français (1330-1500) sur le site http://atilf.atilf.fr

J’ai trouvé cet acte aux Archives Départementales du Maine-et-Loire, série 5E2 – Voici sa retranscription (voir ci-contre propriété intellectuelle) :

Le 22 mai 1589 avant midy, en la cour du roy notre sire à Angers (Jean Poulain notaire) etc estably Anges Veillon demeurant en la paroisse de Saint Jehan des Mauvrets d’une part
et Pierre Faucheux mestaier demeurant en la paroisse de Saint Lambert de la Potherye d’autre part
subzmettant etc confessent etc scavoir est ledit Veillon avoir promis estre et demeurer avec ledit Faucheux du jour et feste de Saint Jehan Baptiste prochainement venant jusques au jour et feste de Toussaintz aussi prochainement venant
pendant lequel temps ledit Veillon a promis estre et demeurer avec ledit Faucheux et le servir bien et deument en toutes choses licites et honnestes comme ung bon serviteur doibt et est tenu faire
pendant lequel temps ledit Faucheux sera tenu le nourrir et fournir de boire et manger ainsi que à ung serviteur à luy appartient
et oultre sera tenu ledit Faucheux luy payer et bailler pour ses services pendant ledit temps la somme de 3 escuz solleil, une chemise, une paire de houssette le tout de toille neufve et une paire de soulliers neufs, le tout à l’usaige dudit Faucheux et poiable audit jour de Toussaintz prochainement venant
à ce tenir etc dommages etc obligent etc à prendre etc renonçant etc foy jugement condemnation etc
fait et passé audit Angers en présence de René Faucheux demeurant audit Angers et Mathurin Guerin paroissien de Beaucouzé tesmoings
lesdites parties et Guerin ont déclaré ne savoir signer

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Jean Guynoiseau serviteur d’une métairie faute du capital pour être métayer, Livré 1595

Cet acte est exceptionnel. Et je pèse mes mots.
En effet, les closeries et métairies, jamais détenues par les exploitants en Haut-Anjou fin 16ème siècle, sont baillées à l’exploitant à moitié la plupart du temps, ou à ferme directement mais plus rarement en Haut-Anjou, toujours à la même époque.
La métairie, qui est 2 à 3 fois plus importante que la closerie, a donc aussi beaucoup plus de bêtes. Or, contrairement à une idée reçue de nos jours, l’exploitant possède en propre une partie des bêtes et du matériel, et n’est pas pauvre. D’ailleurs, métayers sont toujours les plus imposés dans les rôles de taille, et vous pouvez vérifier ce point soit à l’aide des quelques rôles qui sont sur mon site, soit en trouvant l’ouvrage d’Annie Antoine : Fiefs et villages du Bas-Maine au XVIIIe siècle, Editions régionales de l’Ouest, Mayenne, 1993

Ici, le propriétaire prend un métayer sans capital personnel, et l’acte n’est donc pas un bail à moitié, mais un contrat de travail comme serviteur de la métairie, dans laquelle tous les bestiaux et le matériel appartiennent au propriétaire. C’est la première fois que je rencontre un tel contrat, et il illustre a contrario, l’existence d’un capital non négligeable ches les métayers lorsqu’ils prennent un bail à moitié.

L’acte qui suit est extrait des Archives Départementales du Maine-et-Loire, série 5E1 – Voici la retranscription de l’acte : Le 11 octobre 1595 avant midy, en la cour royale d’Angers endroit (Goussault notaire Angers) personnellement estably Jean Guinoiseau demeurant en la paroisse de Livré pays de Craonnais,
soubzmettant etc confesse avoir promis à honorable homme Me Julien de Saint Denis licencié ès droits advocat au siège présidial d’Angers présent et acceptant et demeure tenu demeurer comme serviteur et outre faire demeurer sa femme et prendre autres personnes avecq luy pour faire le lieu et mestairye de la Grimauldière pour et pendant le temps et espace de 3 ans pendant lequel temps iceluy Guinoiseau et sa femme et sa famille demeureront sur ledit lieu comme serviteurs dudit de Saint Denis sans qu’ils puissent prétendre aulcune chose des fruits dudit lieu d’aultant qu’iceluy Guinoiseau n’a le moyen de demeurer audit lieu comme mestayer pour ce que les bestiaulx applets et ustenciles dudit lieu sont et appartiennent audit de Saint Denis
appli : nom générique des objets servant à l’attelage des animaux de trait et de labourage et à les attacher soit ensemble, soit dans les étables et écuries (M. Lachiver, Dict. du monde rural, 1997)
et n’a aulcuns moyens d’estre aultrement sur ledit lieu
et est ce fait au moyen de ce que ledit de Saint Denys payera chacun an ledit Guinoiseau pour la somme de 80 esuz sol et outre luy a promis relaisser des laitages fruictages et autres petits émoluments audit lieu pour aider à vivre ledit Guinoiseau et sa famille faisant ledit lieu et mesmes luy donnera un septier de bled lorsqu’il fera la mestive sur ledit lieu
ce que lesdites parties ont stipulé accepté et à ce tenir etc dommages etc obligent respectivement etc renonçant etc foy jugement condemnation
fait et passé audit Angers en la maison dudit de Saint Denis en présence de Me Pierre Bardin et Nicolas Avril praticiens demeurant Angers

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