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Dans les années 1945-1955, adolescente, je voyais rue St Jacques chez ma grand-mère, une demoiselle qui avait un œil un peu de travers. Enfants, inconscients de nos observations redoutables, nous l’appellions « voisygoutte ».
Revenue à Nantes dans les années 1975, je la redécouvris rue du Frère Louis, où elle terminait ses jours. Il m’arrivait de lui rendre visite et tenter de lui faire quelques courses. Mais comme toutes les personnes de son âge, elle avait l’habitude de faire chaque jour ses courses, et elle m’étonnait sur ce point, car elle ne prévoyait jamais pour 48 h, mais toujours pour 24 h. Je pense souvent à elle lorsque je fais mes courses en ligne chez SUPERU pour plusieurs semaines. J’ai atteint son âge d’alors, et je mesure combien nous avons changé de mode de vie, et d’organisation de notre quotidien de personne seule à domicile. Nous ne faisons plus de courses au jour le jour, nous vivons un autre monde.
Mademoisele SELLEN aimait parler du passé, et évoquait volontiers et amour son père, pâtissier place Pirmil. Ce père qu’elle avait perdu en 1929, et dont voici l’éloge funêbre, dans le journal de mai 1929 !
Louis Sellen
Lundi ont eu lieu, en l’église Saint-Jacques, les obsèques de M. Louis Sellen, pâtissier-confiseur, qui, durant de nombreuses années, presque simultanément, fut le secrétaire dévoué du Syndicat des Patrons pâtissiers et de l’Amicale des anciens coloniaux, dont il avait été le fondateur.
Sellen fut, à l’origine, professeur aux Cours professionnels de la Pâtisserie, de 1911 à 1914, il avait repris sa place de professeur en 1928, et l’on peut vraiement dire de lui qu’il est mort à la tâche.
C’est le jeudi 30 mai qu’il a donné en effet, son dernier cours pratique aux apprentis de la profession qu’il honorait pas son savoir, sa probité et son dévouement ; c’est le 31 qu’il tombait malade et le 1er juin qu’il rendait le dernier soupir dans les bras de sa femme et de sa fille atterrées par le malheur qui, brusquement, les frappait.
Sellen n’avait que 63 ans.
Derrière son cercueil venaient les principaux dirigeants du Syndicat et de l’Union des Pâtissiers de l’Ouest : MM. Jouin, 1er adjoint au maire de Bouguenais ; Dubot, conseiller municipal ; Leduc, président du Syndicat ; Voineau, Poulmarch, etc., et de l’Amicale des Coloniaux, MM. Lucot, président ; Verdier, Haisnault, Logier, Contrée, Tessier, etc.
Nous prions Mme et Mlle Sellen d’agréer, en la circonstance, l’expression émue de nos sincères sentiments de condéléances.
Ainsi, bien avant que les boulangers ne soient boulangers-patissiers, il a existé en 1846 à Nantes Sud Loire, 4 boutiques de boulangers, dont 2 rue St Jacques (François Boutin et Henri Halbert) et 2 rue Dos d’Âne (Etienne Olive, Jean Bertineau), et aucune pâtisserie. Ce qui signifie au passage que le village de la Gilarderie, de Sèvres, la côte St Sébastien, la route de Clisson, n’avaient aucune boulangerie. Sans doute, cette partie rurale, qui contrastait avec la rue St Jacques, citadine et ouvrière, avait-elle encore des fours à pain ?
En 1901, les 2 boulangeries de la rue Dos d’Âne sont toujours là (Edouard Olive, Louis Gresset), mais il y en a désormais 4 rue St Jacques (Clément Tixerand, Pierre Fonteneau, Clément Lebastard, Henri Halbert), et une chemin de Vertou (Félix Bruneau). Après la disparition de la rue Dos d’Âne, et du bas de la rue St Jacques, seule la boulangerie Halbert subsista, et subsiste encore, tandis qu’une autre boulangerie s’installa plus haut face à l’entrée de l’hôpital.
Mais en 1901, on trouve un chocolatier rue Dos d’Âne (Jean Chevalier) et un patissier Place Pirmil (Louis Sellen, 62 ans). Ce dernier est le père de ce Louis Sellen décédé en 1929.
La patisserie fut ensuite l’affaire des boulangers, et on oublia sans doute qu’une pâtisserie, haut de gamme, avait existé place Pirmil. Sans doute y venait-on de loin, en particulier de Vertais, de l’autre côté du Pont de Pirmil.
De nos jours, nous mangeons moins de pain, et plus de pâtisserie, mais pour trouver une pâtisserie exceptionnelle, qui ne soit pas boulangerie aussi, il faut aller au centre de la ville de Nantes, et je suppose qu’il en est ainsi dans toutes les grandes villes.
Mademoiselle SELLEN, je ne vous ai pas oubliée, et je vous rends ici hommage.