Les 5 perruquiers (coiffeurs) de Nantes Sud Loire en 1846

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Jusqu’à la fin du 19ème siècle, du moins à Nantes Sud Loire, on utilisait encore le terme de PERRUQUIER pour désigner le coiffeur. Cette curiosité de notre langue française figure bien au très sérieux dictionnaire de l’académie Française :

LE DICTIONNAIRE DE L’ACADEMIE FRANÇAISE. HUITIEME ÉDITION. T.2
PERRUQUIER. n. m. Celui qui fait des perruques. Il s’ est dit aussi autrefois de Celui qu’ on nomme aujourd’ hui Coiffeur.

Or, à Nantes Sud Loire, il y avait 5 perruquiers en 1846, dont un rue Dos d’Âne et 4 rue St Jacques, puis aucun perruquier en zone rurale, c’est à dire de la Grenerait à la Gilarderie et Sèvres, et toute la route de Clisson.

Mais pourquoi donc autant de coiffeurs ?

Ici, je tiens à témoigner qu’autrefois, 2 générations avant moi, c’est à dire la génération née fin 19ème siècle, on n’avait pas encore l’habitude du shampoing régulièrement, car lors de mes gardes dominicales autrefois chez l’une de mes grands tantes très âgée, je me souviens avoir abordé le sujet avec elle, pensant qu’elle avait ne pouvait plus se laver la tête toute seule. Elle me répondit alors qu’elle allait chez le coiffeur. M’inquiétant alors de la dernière date, j’appris alors que quelques fois par an, c’est à dire 4 à 6 fois, était le rythme.

Je suppose donc que le shampoing maison est une invention récente, probablement liée à l’eau courante à la maison, donc mes parents mariés en 1937 l’on connue, mais avant eux on pratiquait le coiffeur, rarement, mais c’était l’unique hygiène des cheveux.

Ceci dit, je dois ajouter que ma tante avait bonne allure et aucune négligence apparente de sa chevelure. Donc, j’ose ici conclure que plus on lave les cheveux plus on a besoin de les laver, et je ne suis pas persuadée que ce soit utile. Pour ma part, je pratique le rythme hebdomadaire.

 

Perruquier barbier baigneur estuvier à Laval, 1712

Mes souvenirs scolaires (Lycée Guist’hau de Nantes) sont remplis d’absence totale de bains, hygiène, même à la cour du roi Soleil. Voici pourtant un peu d’hygiène en 1712 :

  • L’acte qui suit est extrait des Archives Départementales de Mayenne, 3E30
  • Voici la retranscription de l’acte : Le 5 avril 1712 avant midy devant nous François Lebreton notaire du comté pairie de Laval, y résident, furent présents en leurs personnes establiz et submis Pierre Fleury marchand perruquier demeurant forsbourg du Pont de Maine paroisse St Vénérand de ceste ville d’une part,
    et René Lemesle perruquier et Jacquine Collibet sa femme de luy authorisée pour la valadité des présentes, demeurants paroisse de la Trinité dudit Laval d’autre part,
    lesquelles parties ont faict entr’elles ce qui suit, à savoir que ledit Sr Fleury a par ces présentes vendu ceddé et transporté auxdits Lemesle et Collibet sa femme acceptants et achetants pour eulx leurs hoirs et ayant cause, une des 4 places de barbiers, perruquiers, baigneurs, estuviers, faisant partye des 6 places créées pour ceste ville de Laval par l’édit du mois d’octobre 1701, desquelles 4 places Pierre Bourdin marchand Sr de Tiennebrune auroit obtenu ces provisions de la Grande Chancelerie le 16 mai 1706, et lesquelles 4 places il auroit vendues et ceddées audit Sr Fleury par acte au rapport de Me Jacques Lemoyne notaire de cette cour du 4 juin audit an 1706, pour par ledit Lemesle jouir faire et disposer de ladite place de perruquier à luy cy dessus vendue et se faire recevoir et installer en l’exercice d’icelle à ses frais et despens, quand et comme bon luy semblera, auquel effect ledit sieur Fleury leur a présentement deslivré et mis entre mains les provisions de laditte place de perruquier expédiées sous le nom dudit Bourdin Tiennebrune cy-dessus dattée scellée du frand sceau de cire jaulne, la quittance de finance du prix d’icelle en date du 30 mars audit an signée Bertin au dos de laquelle est l’enregistrement d’icelle signé Chamillard, la quittance des deux sols pour livre signée Ferrand en date dudit jour 31 mars et 2 moullez qui sont autant de l’édit de création desdites places et de l’arresté du Conseil des mois d’octobre 1701 et de juin 1702, le tout attaché ensemble sous le contrescel de ladite chancelerie, desquelles pièces lesdits Lemesle et femme se sont contantez et en ont deschargé ledit sieur Fleury,
    la présente vendition faicte pour et moyennant la somme de 200 livres que lesdits Lemesle et Collibet sa femme ont promis et se sont obligez sous l’hypotèque de tous leurs biens et solidairement l’un pour l’autre un seul pour le tout bailler et payer audit Sr Fleury savoir moitié montant 100 livres d’huy en un an, l’autre moitié montant pareille somme six mois après, le tout prochain venant, et jusques au payement réel de luy en payer les intéretz au sol la livre à commancer de courir de ce jour et ladite place de perruquier cy dessus vendue y demeurera hypotéquée par privilège spécial sans que ledit hypotèque général et spécial desrogent l’un à l’autre, et deslivreront lesdits Lemesle et femme à leurs fraiz coppie des présentes audit sieur Fleury, et à ce faire à esté présent aussy estably et submis Denis Collibet marchand lainier demeurant dite paroisse de la Trinité dudit Laval, lequel s’est volontairement submis et obligé dous hypotèque de tous ses biens et avecq lesdits Lemesle et Collibet sa femme et tous trois solidairement, les uns pour les autres un d’eulx seul pour le tout sous les renonciations requises au payement de la susdite somme de 200 livres dans les termes susdits et intéretz d’icelle vers ledit sieur Fleyrt à peine de tous dommages intéretz et despens ce que lesdites parties ont ainsy voulu stipullé et accordé et promis …
    fait et passé audit Laval en nostre estude es présences de Nicolas Jacquet commis au greffe ordinaire de ceste ville, et Pierre Gerbault (est-ce un ascendant d’Alain ?) marchand demeurant audit Laval, tesmoins requis qui ont signé avecq lesdits Pierre Fleury, Lemesle, Denis Collibet et nous notaire et a ladite Jacquine Collibet dit ne savoir signer de ce enquise.

    (Planche de l’Encyclopédie de Diderot et d’Alembert)
    Le métier de perruquier est donc défini ainsi : barbier, perruquier, baigneur, estuvier. Ce qui se traduit par différentes taches, et lorsqu’on utilise le terme perruquier, c’est à titre de raccourci, car on a toujours les 4 métiers réunis.
    Pour son rôle de barbier, il ne faut pas confondre barbier et chirurgien, même si tous deux font la barbe :

    BARBIER, s. m. artisan qui fait la barbe. Il y a à Paris deux communautés, qui, suivant leurs statuts, ont droit de tenir boutique ouverte pour faire la barbe, & d’y mettre des bassins pour enseigne. La premiere est celle des maîtres Chirurgiens, dont les bassins de l’enseigne doivent être jaunes : la seconde est celle des Perruquiers, dont les bassins sont blancs. Voyez CHIRURGIE. (Encyclopédie de Diderot et d’Alembert)
    Le perruquier a besoin d’une marmite ou chaudiere. Ce vaisseau doit être fait en poire, plus large par le bas que par le haut. Cette forme empêche les cheveux de remonter lorsqu’ils sont sur les moules. Sa grandeur ordinaire est d’un seau & demi, & il peut contenir 2 livres ou 2 livres & demie de cheveux frisés sur des moules qui ne soient ni trop gros ni trop petits.

    Il lui faut aussi une étuve. Il y en a de rondes & de quarrées. Ceux qui ont du terrein peuvent les faire en maçonnerie comme les fourneaux. Celles que l’on commande aux Menuisiers sont quarrées & de bois de chêne. C’est une espece de coffre de 3 piés & 1/2 à 4 piés de haut, sur 2 à 2 piés & 1/2. On place ordinairement en-dedans une croix de fer. Si l’étuve a 4 piés, il faut que la croix soit posée à la hauteur de 3 piés ou environ, & couverte d’une grille de gros fil de fer, dont les trous soient un peu écartés. Sous la grille, l’on met une poële proportionnée à la grandeur de l’étuve, pleine de charbons bien couverts, & disposés de maniere qu’en se consumant ils ne forment point de cavité. (Diderot)

    Mais le Perruquier-barbier-baigneur-estuvier, possédait aussi des bains pour l’hygiène corporelle. Ainsi, il y en avait 6 à Laval en 1712, pour 14 000 habitants.

    Dans les inventaires après décès que j’ai dépouillés à ce jour, la perruque est rare, mais j’ai surtout fait les classes rurales et il est probable qu’elle a été portée en ville.

    PERRUQUE, s. f. (Art. méch.) coëffure de tête, faite avec des cheveux étrangers, qui imitent & remplacent les cheveux naturels. L’usage & l’art de faire des perruques est très moderne ; ils n’ont pas plus de 120 ans (en 1766, ce qui la reporte à 1646). Avant ce tems, l’on se couvroit la tête avec de grandes calottes, comme les portent encore aujourd’hui les comédiens qui jouent les rôles à manteau, ou ceux qui font les paysans. On y cousoit des cheveux doubles, tout droits ; car on ne savoit pas tresser, & l’on frisoit ces cheveux au fer, comme on les frise aujourd’hui sur la tête. (Diderot)

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