Deux Angevins solidaires d’un Breton emprisonné pour dettes, Juigné-des-Moutiers 1659

La prison pour dettes était jusqu’à paiement de la dette, donc pour être libéré il fallait payer son débiteur. Or, ici le Breton Pierre Crosson, marchand à Juigné-des-Moutiers, a le bonheur de voir Mathurin Goullier de Noëllet et René Guiet d’Angers, le sortir de prison sous leur caution pour emprunter la somme due, et gageons, que tous deux vont aussi être caution devant le notaire qui fera l’acte de prêt ou obligation.
Sans doute ont-ils un lien quelconque entre eux, pour se faire autant de confiance ?

J’ai trouvé cet acte aux Archives Départementales du Maine-et-Loire, 5E6– Voici la retranscription de l’acte : Le samedi 18 janvier 1659 avant midy par devant nous Pierre Coueffé notaire Angers fut présent estably et duement soubzmis Mathurin Goullier sergent royal demeurant en la paroisse de Noislet et Me René Guiet praticien demeurant en cette ville paroisse St Maurille lesquels chacun d’eux seul et pour le tout sans division de personnes ne de biens renonçant au bénéfice de division discussion d’ordre etc ont recognu et confessé qu’à leur prière et requeste et pour leur faire plaisir seulement Me René Guibeles concierge et garde des prisons royaux de cette ville à ce présent luy a ce jourd’huy et présentement deslivré Pierre Crosson marchand que ledit Goullier auroit cedit jour emprisonné ès prisons à la requeste de René Gauld sieur de la Héardière qui se seroit obligé le représenter ès prisons à faulte de payer à Mathurin Gauld sieur de la Renaudaye les causes de l’emprisonnement fait de la personne dudit Crosson par Lechanteux sergent royal, et ce pour le mener vers des amis en ceste ville pour faire emprun d’argent pour satisfaire ledit sieur de la Renauldaye et faire descharger ledit sieur de la Héardière où il se pourra pour avoir la liberté de sa personne et à ce faire lesdits Goullier et Guiet solidairement comme dit est promettent et s’obligent réintégrer et remettre ledit Crosson prisonnier ès prisons dans ce jour et à faulte de payer en privé nom les causes dudit emprisonnement audit sieur de la Renauldaye sinon faire décharger sur le paspier desdites prisons et acquiter ledit Guibeles des recommandations sy aucunes estoient faites sur la personne dudit Crosson et du tout iceux Goullier et Guiet font leur propre fait et debte et consenti estre contraignables en vertu des présenes volontairement et par ce que bien leur a pleu et plaist autrement et sans laquelle promesse et obligation ledit Guibeles n’auroit donné liberté audit Crosson lequel a ce présent et aussy soubzmis soubz ladite cour, demeurant en la paroisse de Juigné des Moutiers pays de Bretagne, promet et s’oblige acquiter libérer et indemniser lesdits Goullier et Guiet de leur promesse et obligation cy dessus et les tirer et mettre hors de se représenter dans ledit jour le tout à peine de toutes pertes dommages et intérests recongoissant qu’ils ont le tout fait à sa prière et requeste et pour luy faire plaisir seulement,
ce qui a esté stipulé et accepté par lesdites parties etc obligent savoir lesdits Goullier et Guiet solidairement vers ledit Guibeles et ledit Crosson vers lesdits Goullier et Guiet leurs hoirs biens et choses à prendre etc renonçant etc dont etc
fait et passé audit Angers à notre tablier en présence de Me Jehan Lemaçon et Pierre Cau praticiens demeurant audit Angers tesmoins

Joyeuses fêtes de Noël à tous, et préparez bien votre bûche de Noël : Trefouel, Trefoueil, Trifoueil, comme nos ancêtres avaient coutume de le faire, enfin, si vous avez une cheminée, car il en faut une. Allez voir mon billet sur cette coutume, paru il y a 2 ans sur ce blog.


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3 réponses sur “Deux Angevins solidaires d’un Breton emprisonné pour dettes, Juigné-des-Moutiers 1659

  1. Cette coutume ancestrale ,persistait encore, dans nos campagnes, dans les années 1970,et bien après,un gentil voisin,nous apportait chaque année,une énorme bûche de chêne,pour la veillée de Noël.
    Très heureuses fêtes de fin d’année à vous.

  2. Dans « Moi, Barthelemy Dumont, geôlier de la Conciergerie » d’Arlette Lebigre ,mémoires apocryphes ,de nombreux renseignements sur la justice royale de cette époque 1608-1625 . Les prisonniers étaient en général nourris par leur famille ce qui incitait celle-ci à les faire sortir rapidement lorsqu’ils étaient emprisonnés au civil à la demande d’un tiers. Surtout qu’ils ne pouvaient s’occuper de leurs affaires durant tout ce temps. Les plus pauvres,ne pouvant payer les frais de geôlage , »les pailleux » dorment sur la paille et ne mangent que le pain du Roi. La catégorie des dettiers a un régime particulier à la Conciergerie (prison d’Etat) c’est à leurs créanciers de pourvoir à leur hébergement et nourriture ce qui incite à trouver des arrangements.. Apparemment ,en appel au Parlement ,ces messieurs baissaient quasi systématiquement les peines prononcées par les juges inferieurs. Pour crime ,on pouvait obtenir quelques années de bannissement plutôt que le gibet…

  3. Je précise qu’il s’agissait là, d’un geste de bon voisinage,l’attention délicate, de quelqu’un qui voulait faire plaisir !

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