IL Y AURA D’AUTRES SUJETS ICI CONCERNANT LA SECONDE GUERRE MONDIALE, merci de les attendre.
En attendant, merci de comprendre que j’éliminerai tout commentaire n’ayant pas la bicyclette pendant la seconde guerre mondiale pour thème.
En 1944, je suis réfugiée à Guérande intra-muros. Maman attend son 5ème enfant, né en février 44. Voici ce que j’écris dans mes souvenirs de la seconde guerre mondiale :
Le téléphone aidant, car il fonctionne, Papa vient nous voir en bicyclette avec tante Monique, soit 80 km aller, sans compter la traversée de Nantes et les barrages Allemands à franchir.
Les réquisitions et pénuries de toutes sortes sont telles que seule la bicyclette permet de se déplacer, et encore, quand les bicyclettes ne sont ni volées ni réquisitionnées elles aussi.
Elles ressemblent à ce que nous connaissons, à une différence près : elles ne possèdent pas encore de dérailleur, qui n’arrivera chez les coureurs cyclistes qu’après la guerre.
Les vélos sans dérailleur auront encore une longue vie devant eux, et je me souviens en avoir utilisé un quelques années après la guerre, qui était à Belmont, pour aller à la Turballe. Même 5 km sur un tel vélo laisse des souvenirs !
La vitesse moyenne de mon papa atteignait-elle 15 km/h, rien n’est moins sur ? En 2012, les coureurs du Tour de France, assistés comme ils le sont, font une moyenne de 36 km/h, et il convient donc de diviser au moins par 2 cette vitesse.
Si on ajoute les crevaisons, les barrages Allemands, et un pause casse-croûte, Papa a mis :
Comme il fallait circuler de jour, on voit qu’il est parti au lever du soleil pour arriver péniblement avant le coucher, puisqu’en février les journées ne font guère plus de 9 heures.
On crève souvent : les chambres à air sont ce qu’elle sont en temps de guerre, les routes aussi !
Pour réparer point de rustines, pénurie oblige. On utilise une lime ou du papier de verre, un vieux bout d’ancienne chambre à air et de la colle, qui elle aussi est ce qu’elle est.
Souvent ce bout de vieille chambre à air est découpé dans une chambre à air de camion ou d’automobile . Bref, on récupère tout ce qu’on peut.
Même les chambres à air font parfois défaut. Pour s’en passer, il faut remplir le pneumatique avec ce qu’on trouve, enfin avec quelque chose de pas trop dur de préférence !
En pays de vigne, on a encore quelques bouchons de bouteille en liège. C’est ainsi qu’à … l’oncle … remplit le pneu de bouchons enfilés à la queue leu-leu ! Ils lui permettent tout de même d’aller chercher du beurre dans une ferme située près de Chemillé à 20 km de chez lui, soit 40 km aller-retour !
Comme vous, avec mes parents et mes soeurs nous avons fait beaucoup de bicyclette pendant la guerre.
Dès l’apparition des cartes d’alimentation (1940), nous allions mes 2 soeurs et moi avec nos parents, environ 2 fois par mois, et par tous les temps, nous ravitailler dans des fermes aux alentour de Bouvron et Notre Dame des Landes, soit environ 80 km aller et retour, avec des bicyclettes d’enfants, alors que nous avions entre 6 et 9 ans. Maman, fille des villes, n’avait jamais appris à faire de la bicyclette, Papa avait donc trouvé un tandem et ainsi elle pouvait nous accompagner. Nous crevions souvent et toute la famille s’arrêtait pour réparer.
En 1942, comme Maman attendait mes 2 petites soeurs jumelles, à tour de rôle l’une de nous la remplaçait sur le tandem
Après les bombardements, alors que nous étions réfugiés à Bouvron, Papa venait nous retrouver le dimanche à bicyclette également.
Cette vie difficile dont je n’ai pas gardé un mauvais souvenir nous a forgé le caractère!
Note d’Odile :
Je pense que 40 km aller était fréquent pour les Nantais en quète d’approvisionnements, car plusieurs personnes de mon ensemble m’ont raconté aussi 40 km aller, mais dans notre cas vers la Vendée puisque nous sommes sudistes.
Vous souveniez vous combien de temps vous mettiez pour faire les 80 km aller-retour, et si vous avez vécu des crevaisons ?
Merci
Odile
Nous partions dès le matin (vers 8 heures). Nous faisions un petit arrêt au Temple de Bretagne dans un petit café ou la patronne nous donnait une tasse de lait chaud et une tartine de pain et de beurre, que nous mangions avec appétit pendant que Papa faisait le noeud de cravate du petit garçon de la maison, son père étant prisonnier.
Nous arrivions en principe dans la 1ère ferme vers 12h, ou la fermière nous avait préparé un repas (poulet, pommes de terre) et après le déjeuner, nous remplissions nos saccoches avec oeufs, lard salé etc, puis nous partions dans une 2ème ferme chercher beurre, poulet ou ce que la fermière voulait bien nous donner.
Après un bon gouter nous repartions pour Nantes vers 16h où nous arrivions aux environs de 20 heures.
Cet horaire pouvait changer au gré des crevaisons qui étaient fréquentes;
Nous avions 3 bicyclettes et 1 tandem et au moins 4 ou 5 crevaisons à chaque fois. Pour aller ce n’était pas trop difficile de réparer, mais au retour il fallait vider les saccoches et le porte bagage avant de commencer la réparation.
Le surplus de provision était distribué dès le lundi matin par Maman à des gens agés ou à d’autres qui n’avaient pas de bicyclette.
Note d’Odile :
Je me souviens aussi de l’auberge du Temple de Bretagne, car à la même époque, ma maman, débordée par les grossesses successives, me mettait place Viarme (selon mes souvenirs c’était alors place Viarme) au car pour Guérande, assise à l’arrière du chauffeur, une petite valise sur les genoux. On me confiait au chauffeur, et durant les 3 ou 4 heures du voyage je ne bougeais pas et je serrai ma valise sur mes genoux sans vouloir la lacher.
Dans ce voyage, que j’ai fait plusieurs fois, âgée de 2 ans eu début jusqu’à mes 4 ans, nous arrêtions très souvent et le chauffeur avait toujours des tas de colis à charger et décharger sous le milieu du car, et même il montait dessus.
Et je me souviens du Temple de Bretagne. Alors vous me faîtes un immense plaisir à me rappeler cet arrêt, qui m’a marqué, comme d’autres.
J’arrivais directement sur la place du Marché à Guérande, et comme ma tante demeurait rue saint Michel, nous n’avions pas loin, mais je me souviens que partis vers 16 ou 17 h de la place Viarme, nous arrivions longtemps après la nuit tombée.
Mon aptitude à ne pas lacher ce qu’on m’avait confié sera plus tard utilisé durant l’année 1944 par les grandes personnes pour porter la nourriture à un prisonnier caché, sans que jamais les Allemands ne se soient rendu compte du manège. J’avais aussi la bouche cousue.
Odile
Merci à vous d’avoir eu idée de mettre sur ce blog vos souvenirs de guerre.
Vous faites un devoir de mémoire.
Nous commémorons cette année les 70 ans de la bataille de Bir Hakeim et de la Rafle du Vel’d’Hiv. Combien de Français de moins de 35 ans savent de quoi il s’agit?
Note d’Odile :
Pour moi, plus jeune que vous, il s’agissait en fait de ma découverte de la vie, et je m’aperçois combien cette découverte fut biaisée et pourquoi certaines images sont si fortement ancrées en moi.
A bientôt sur ce sujet, sans doute tous les samedis.
Pour ma part, je le sais ! Malheureusement, l’histoire reste bien souvent cantonnée dans les manuels scolaires pour être bien vite oubliée…
-Pendant l’occupation,une plaque d’identité ,avec nom et adresse était fixée sur l’avant du cadre de la bicyclette.
-Une carte (timbrée ?),délivrée par la préfecture, était également obligatoire.(sorte de laisser passer)
Note d’Odile :
Je constate que les laissez passer étaient plus nombreux que les pneumatiques… Quelle époque !
Je vais vous tapper l’état de l’absence de pneumatiques des industries en 1947, mais j’ai tout plein de sujets encore….
C’est bien agréable de lire des posts comme ça. Vraiment super ! Génial