Contrat de mariage de Jean Poiron et Gilette Ythier, Provins 1502

Introduction

C’est le premier contrat de mariage assez complet que je rencontre à Provins au 16ème siècle. Il stipule tout ce que chacun apporte, donc je trouve le lit et tout ce qui va avec dont les draps de chanvre et vous remarquerez qu’il s’agit manifestement d’une famille aisée car la mère de la fiancée donne aussi des mouchoirs de lin, et je vous promets que les mouchoirs n’existaient que chez les gens aisés… les autres se mouchaient sur leur bras… Et bien sûr, oubliez le coton et le synthétique qui viendront bien plus tard…

les draps de chanvre

Je suis sans doute l’une des rares françaises, mais je sais que d’autres aussi dorment encore ainsi, à dormir sur un drap de chanvre. Je précise ici que seul le drap de dessous est en chanvre et dessus j’ai un drap de lin, le tout blanc bien entendu. Le chanvre est un drap épais qui ne bouge pas d’un cm même non bordé. Alors quand j’ai perdu mes épaules (soudées après des années de douleurs des os ) et qu’il m’était devenu difficile de faire mon lit, j’ai suivi les conseils d’une de mes soeurs et j’ai coupé en deux un des anciens draps de chanvre que j’avais et je le mets donc dans l’autre sens non bordé, il tombe de quelques cm seulement de chaque côté et en haut et en bas, et il ne bouge absolument pas… J’ajoute que lorsque j’ai perdu mes épaules, j’ai eu la chance extraordinaire de tomber sur un admirable médecin de médecine physique que je n’ai vu que quelques minutes mais qui a m’a marquée profondément ; en effet, je lui avais demandé si je devais prendre un lit mécanique, et là, me regardant doucement droit dans les yeux, j’entends encore chaque nuit sa voie : « Madame, battez-vous le plus longtemps possible ! » Je n’ai pas de mots pour lui exprimer mes remerciements, tant je lui dois, car je remue encore un peu grâce à cette gymnastique nocturne… Et rassurez vous, j’ai tout de même toujours la précaution d’avoir le téléphone près de moi…

Jean Poiron et Gilette Ythier, Provins 1502

 

AD77-1056E586 Dechoisy notaire à Provins – vue prise par le CGHSM de Melun, avec son aimable autorisation

1502.11.19 vue 3121 – Furent présents en leurs personnes Gilette veufve de feu Jacques Ythier en son vivant procureur demourant à Provins d’une part, et Jehan Poiron fils de Gilet Poiron demourans audit lieu et Gilette sa fiencée fille dudit feu Jacques Ythier et de ladite veufve auctorisés suffisamment par sondit fiensé en tant que mestier est quant ad ce faire passée et aussi icelle fiensee sur ce bien advisée et conseillée comme elle dit par d’autres, lesquels recognurent et confessèrent de leur bon gré chacun en son regard que en faveur et contemplation du mariage qui au plaisir de Dieu sera le jour de demain fait et solempnisé en saincte église entre lesdits Jehan Poiron et Gilette sa fiensée, et aussi pour la part et portion de la succession mobilière et immobilière à ladite Gilette fiensée appartenant à cause dudit feu Jacques Ythier son père, et pour éviter procès et débat qui mouvoir se pourroit, et nourrir paix et amour entre elx, lesdites parties ont fait et accordé les choses qui s’ensiuvent, c’est à savoir que ladite Gilette veufve a donné transorté et délaissé en mariage à sadite fille la somme de 50 livres contens sur lesquels sont prinses 2 robes de mariage pour ladite Gilette fiensée et luy a baillé aussi 3 aulnes de drap vermeil pour un corps à ladite Gilette et la façon dudit corps, et ung chapperon noir – Item ung bon lict de plume de deux lez et ung quart entayé de 2 tayes, une couverture vermeille de drap, ung ciel (écrit siel) frangé, trois custodes de deux chanvres, 8 draps de lict de deux chanvres de deux les ulnes, ung drap de trois toilles grangé et une douzaine de mouchoirs de lin, 6 nappes l’une ouvrée, 6 serviettes ouvrées, une dizaine de serviettes plannes, deux coffres fermans à clef, 2 orilliers de plume à tayettes roilers ? qui est le trousseau fourny de ladite Gilette – Item sera tenue icelle Gilette mère de faire à ses despens la moictié des frais des nopces – Item ladite Gilette a ceddé et délaissé à tousjours à ladite Gilette sa fille ung quartier de vigne prins en ung arpent assis aux Bordes lez Provins que ledit feu Jacques Ythier acquéra de son vivant et font partage sera fait cy après entre eulx aux cens et charges foncières qui y sont deues. Et moiennant ce, lesdits Jehan Poiron et Gilette sa femme future se sont tenus bien contens et payés des biens et choses dessus déclarées et ont quicte et en quicte ladite veufve Ythier et tous autres de ce qui (f°2) appartient de telle part et portion que ladite Gilette eust peu et pourroit demander à cause de la succession dudit deffunt son père tant en meubles qu’héritages et viendra icelle Gilettte fiensée à sa part et portion des biens et héritages de ladite veufve sa mère après le trespas d’elle, tout ainsi comme bien des autres enfants d’elle sans autre chose y demander ne quereller … dont etc .. obligent etc … renonçant etc … présents ad ce Clément Roussignol et Loys Bandynot »

Les rentes annuelles étaient autrefois souvent payées en nature, le plus souvent du blé, mais aussi des poules, Provins 1502

Introduction

En 1502, l’argent liquide était rare chez les laboureurs et vignerons et autres manouvriers, et le plus souvent ils payaient en nature. Le blé était le plus souvent utilisé pour les paiements et il est rare de rencontrer les poules, et en voici cependant un exemple… Par ailleurs, les ventes sont le plus souvent des baux à rente perpétuelle mais aussi parfois à 99 ans et ici 90 ans… Je rencontre peu de ventes payées comptant en argent liquide.

deux poules à Noël au prieur de Voulton

AD77-1056E586 Dechoisy notaire à Provins – vue prise par le CGHSM de Melun, avec son aimable autorisation

1502.11.19 vue 3117 – Anthoine Brossart et Jehan Rufier laboureurs demourant à Bouart paroisse de Saint Martin des Champs recognut avoir prins et retenu l’un pour l’autre de religieuse et honneste personne messire Jehan Gaultier prêtre religieux prieur de Notre Dame de Voulon lez Provins membre dépendant de l’abbaye Dessonnes et seigneur temporel dudit Voulton bailleur, une pièce de terre partie en labour et partie en bois contenant 4 arpents assis au finage dudit Voulton et Bouart tenant à ladite forest d’autre à Marical Rufier à cause des Devilles aboutissant d’un bout audit prieuré et d’autre encore audit Maricel à cause que dessus, pour en user dès maintenant jusques à 90 ans entiers et accomplis moiennant 3 deniers tz de cens pour lots ventes sens au jour St Rémy et 2 bechets de froment de rente annuelle le tout pour chacun arpent desdites terres bone et loyal et marchant mesure de Voulton rendu audit Voulton es greniers, et pour lesdits 4 arpens deux poules de coustume à Noel premiers paiements commençant desdits cns à la saint Remy prochainement venant, de ladite rente à la saint Martin dernière et desdites poules à Noel ensuivant qu’on dira 1503 et ainsi en continuant etc durant lesdites années et seront tenuz lesdits preneurs de labourer cultiver et faire valoir duement lesdites terres tellement etc, ne pourront lesdits preneurs vendre ne transporter bailler ne eschanger lesdites terres ou partie d’icelles sans le congé dudit bailleur …

Catherine Barat et Jean Bapiste Prévost son époux reposent face à la sacristie dans l’église Saint Pierre de Provins depuis 1741

Introduction

Catherine Barat est la plus méconnue des ascendantes de Jules Verne, lui qui aimait tant sa grand mère Provinoise. Si elle est si méconnue c’est qu’un généalogiste incompétent l’a orthographié BAVAT et qu’un nombre incroyable de copieurs n’ont pas pris la précaution de vérifier ce qu’ils copiaient. Ce type de pseudo généalogistes est hélas très fréquent sur Internet !!! et j’en suis très triste.
Ces lignes pour rendre à Catherine BARAT sa dignité car tous nos ascendants le méritent, et ceux de Jules Verne en particulier. D’autant plus que son couple est assez touchant car ils sont vécus 70 ans tous les deux et qu’il l’a suivi 2 mois après son décès, preuve à mes yeux d’un grand amour.

écriture manuscrite de la lettre R 

En 1953 j’ai déjà appris que la lettre R était écrite différemment dans d’autres pays, ainsi je correspondais déjà avec Hildegarde suite à la demande d’Adenauer de promouvoir les échanges franco-allemands pour la reconciliation. Et ce jour 4 février 2025, cela fait 72 ans que je corresponds avec Hildegard !

Cette signature date de 1953, nos premiers échanges, et c’est là que j’ai appris à reconnaître la lettre R écrite d’une autre manière que ce que je savais écrire. Donc, lorsque j’ai appris la paléographie, je n’ai pas eu beaucoup de difficultés avec la lettre R puisque cette écriture manuscrite existe encore ailleurs qu’à Nantes ma ville natale !

Catherine Barat 

Je vous mets la naissance de son fils et sa sépulture, pour que vous puissiez voir la monstrueuse erreur qui sévit sur Internet actuellement, car on voit fort bien les lettres R dans ces vues et il y en a beaucoup, à commencer par Prévost, procureur, parrain, notaire etc…

Jean Baptiste PREVOT procureur °Provins St Pierre 18 octobre 1666 †Provins Ste Croix 16 août 1741 « le 17 inhumé dans le bas côté de l’église vis-à-vis la sacristie Me Jean Baptist Prevost procureur aux sièges présidiaux de cette ville, ancien maire et ancien marguillier de cette paroisse » x Catherine BARAT °ca 1671 †Provins Ste Croix 16 mai 1741 « le 17 inhumé dans le bas côté de l’église vis-à-vis la sacristie dame Catherine Barat épouse de Me Jean Baptiste Prevost ancien maire de cette ville et procureur au baillage de cette même ville, 70 ans, présents Jean François Prevost notaire royal »
1-Jean François PREVOST °Provins St Ayoul 5 septembre 1698 « baptisé Jean François fils de Me Jean Baptiste Prevost procureur et honneste femme Catherine Barat parrain Me Jean Grisard notaire marraine demoiselle Marie Magdeleine Bretin femme de Me Charles Charon notaire »
2-Jeanne Catherine PREVOST

J’ajoute qu’à cette époque, la ville de Provins avait un maire annuel, et je ne sais quelle année ou quelles années Jean Baptiste Prevost fut maire de Provins, car l’ouvrage sur Provins ne donne que ceux qui ont suivi 1789

Pierre Verot, épinglier à Provins en Brye, venait de Falaise en Normandie, 1502

Introduction

Les épingles étaient très utilisées autrefois ce que nous avons oublié avec tout ce qui adhère partout. Pour ma part, j’ai encore connu l’épingle anglaise car j’étais l’aîné de 6 enfants au temps de la couche à laver et non jetable, et même des langes. L’acte qui suit cependant prouve que Pierre Verot est de Falaise, mais ne prouve pas qu’il fabriquait lui-même les épingles, et on peut supposer que si son frère est venu à Provins acheter les biens de son frère à Falaise, c’est contraire à ce qui se passait toujours, à savoir c’était celui qui était parti qui venait effectuer la vente de ses biens sur son lieu de naissance, ou donnait procuration de ce faire, On peut supposer que ce frère est l’épinglier et qu’il a apporté des épingles à vendre à Provins… Ce qui signifierait que les épingles étaient fabriquées à Falaise.

Voici un site sur ce métier d’autrefois.

Pierre Verot vend ses biens à son frère, 1502

 

AD77-1056E586 Dechoisy notaire à Provins – vue prise par le CGHSM de Melun, avec son aimable autorisation

1502.09.12 vue 3058 – Pierre Verot marchand mercier et esplingliers demourant à Provins en son nom et comme soy faisant fort en cette partie des enfants de luy et de Colette sa femme … vendu … à Pierre Duvalet bourgeois de Falaise en la Basse Normandie près la Gibray et seigneur des Hales de ladite Gibray ad ce présent en personne acheteur pour luy ses hoirs tel droit part portion nom raison propriété fons seigneurerie appartenance et possession en toutes maisons manoirs terres prés vignes et autres héritages rentes et revenus quelconques et à luy advenuz et escheuz par les décès de feuz Jehan Verot et Jehanne jadis sa femme ses père et mère et aussi de son acquest et autrement pour quelque cause que ce soit lesdits héritages situés et assis à Tassilly et à Bons à une lieue ou environ près dudit Falaise et ailleurs illec environ dudit pays de Normandie sans rien excepter ne retenir … moyennant la somme de 100 livres tournois que pour ce ledit vendeur en a confessé avoir eu et receu dudit acheteur et l’en a quicté …

Germain Lecourt acquiert une maison rue Hugues le Grand, Provins 1502

Introduction

Je descends de Sydrac FAUCHON °Provins St Pierre 6 novembre 1557 x /1583 Elisabeth/Isabelle LECOURT que je ne remonte pas à ce jour, mais voici, à tout hasard un Germain Lecourt marchand rue Hugues Le Grand en 1502, rue qui relevait de la paroisse Saint Ayoul, la plus peuplée de Provins, mais aussi rue possédant encore ces magnifiques maisons anciennes… et sans doute celle de Germain Lecourt. (photo Google Street view 2025)

la vente à rente perpétuelle

Ce type de vente serait apparu début du 16ème siècle suite à l’interdiction par le pape de certaines formes de prêts à intérêts peu admis par l’église… La quasi majorité des ventes foncières que j’ai relevées sur Provins 1558-1562 étaient à rente perpétuelle. Ici, je suis en 1502 et on trouve déjà la rente perpétuelle, mais sur l’acte d’acquêt fait par Germain Lecourt, cette rente perpétuelle prend une forme très particulière. En effet elle est de 50 sols par an par trimestre, mais une partie et seulement une partie est rachetable dans les 3 ans, le reste sera perpétuel. Donc Germain Lecourt aura 3 ans pour racheter 20 fols de rente pour 20 livres mais devra payer perpétuellement 30 sols par an. Et bien sûr, toutes ces rentes faisaient partie des héritages et étaient bien connues de tous les héritiers…

Germain Lecourt rue de Hue le Grand, 1502

 

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1502.09.16 vue 3061 – Jehan Denet taillandier demourant à Provins recognait avoir baillé et promis garantir etc à Germain Lecourt marchand demourant audit lieu preneur pour luy ses hoirs la moitié d’une maison et lieu comme il se comporte dont l’autre moitié est et appartient audit bailleur tout à ung feste assis audit Provins en la rue Hue le Grant, ladite moitié tenant à l’autre moitié d’icelle audit bailleur appartenant d’une part d’autre costé … fossote à cause de Sainct Ayoul dudit Provins d’un bout par devant au pavé de ladite rue et par derrière au jardin cy après déclaré – Item ung jardin assis et tenant de ladite maison par derrière contenant en longueur 6 toises et de largeur depuis icelle maison 17 pieds ou environ tout jusques à la rue de la Charbonne ? faisant le bout dudit jardin, tenant d’une part audit bailleur et d’autre à une ruelle, pour en jouir user etc par ledit preneur ses hoirs etc dès maintenant à toujours perpétuellement moyennant la somme de 50 sols tz de rente annuelle et perpétuelle que pour ce ledit preneur et ses hoirs seront tenus payer chacun an audit bailleur ses hoirs aux 4 termes de l’an acoutumés à payer loyers de maison audit Provins Noel Pasques Saint Jehan Baptiste et Saint Remy par égal portion à commencer le premier paiement audit jour de Noel prochainement venant et de là en continuant etc et desquels 50 sols tz de rente ledit preneur ou ceulx qui auront cause de luy dudit hérigage en pourront rachecter 20 sols dedans 3 ans prochainement venant paiant 20 livres pour le principal à ung paiement francs et quites audit bailleur avec les arrérages etc en ce faisant ladite rente n’aura plus de cours et pour 30 sols tz à tousjours et sera tenu ledit preneur payer chacun an 8 deniers de cens aux religieux de Saint Ayoul au jour St Remy …

Don d’un quartier de vigne par Jacques Miracle à son neveu, Provins 1502

Introduction

Les actes des notaires de Provins montrent une vie sociale totalement différente de ce que j’ai observé en Anjou. En effet, en Anjou, j’ai observé que les exploitants agricoles alors appelés closiers ou métayers, travaillaient une terre qui ne leur appartenait pas mais prise à bail à moitié de récolte pour un nombre d’années fixées. Or, à Provins, ils sont laboureurs ou vignerons de terres qui leur appartiennent à rente annuelle et perpétuelle. Et j’observe parfois qu’ils sont amenés à donner leur terre à un proche ou un tiers lorsque sans doute ils n’ont pas d’héritiers … Bref, ici je vous montre un acte de don de terre à un proche, chose que je n’avais jamais rencontré en Anjou puisque les exploitants agricoles n’étaient pas propriétaires de leur exploitation.

Don de Jacques Miracle, Provins 1502

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1502.09.09 vue 3055 – Jacques Miracle vigneron demeurant à Provins recognait avoir donné ceddé etc par don irrévocable à tousjours et promis garantir de son fait et obligation seulement à Pierre Miracle fils de Jehan Miracle nepveu dudit Jacques demourant audit lieu ad ce présent et acceptant pour luy ses hoirs la moitié par indivis d’une pièce de vigne contenant environ ung quartier dont l’autre moitié appartient audit acceptant sis au lieu dit Paumenelle au finage de Provins tenant d’un costé à Mathurin Lecourt d’autre audit recognaissant d’un bout aux héritiers Me Symon de Saint Benoist, audit recognaissant appartenant par retrait qu’il en avoit naguères fait de Georges Rousseau pour les causes contenues es lettres dudit retrait qu’il a baillées pour toutes garanties …