Henri de l’Esperonnière tente de récupérer sa fille entrée au couvent des Calvairiennes à Angers, 1677

Voici une bien curieuse sommation d’un père qui tente de récupérer sa fille partie au couvent.

J’ai trouvé l’acte qui suit aux Archives Départementales du Maine-et-Loire, série 5E5 – Voici ma retranscription : Le 20 novembre 1677, par devant nous Françoys Crosnier notaire royal à Angers et des tesmoins cy après nommés a comparu en notre tabler Henry de l’Esperonnière escuyer seigneur de la Sansonnière demeurant en sa maison seigneuriale de la Sansonnière paroisse de St Georges des Sept Voyes
lequel sur ce que damoiselle Anne de l’Esperronnière sa fille se seroit soustraite de son obéissance et de celle de la dame sa mère, et à leur insue et contre leur gré et volonté se seroit retirée en la maison de l’œuvre des dames religieuses du Calvaire de cette ville jeudy dernier sur les 3 heures après midy,
et au moyen du refus que la dame supérieure dudit couvent abusant de la facillité de sa dite fille luy auroit fait de la luy rendre, et aux personnes de quallité qu’il auroit envoyées pour la demander de sa part, et de la réponse que ladite dame supérieure leur auroit faite qu’elle avoir de bonnes portes et murailles et qu’après la déclaration qu’elle feroit faire à ladite damoiselle de l’Esperonnière en cas de sommation si toute la justice s’y transportait elle ne l’a rendrait pas,
et scachant bien ledit sieur de l’Esperonnière que sa dite fille n’a aucune vocation ny intention pour estre religieuse et craignant que les persuasions et inductions ordinaires des religieuses ne portent sur l’esprit facille de sadite fille, et que dans la suite cela ne produise quelque mauvais effect, joint que sadite fille est malade depuis un an d’une débilité d’estomach qui ne peut rien souffrir, pouquoi il l’auroit envoyée en cette ville pour la mettre dans les remèdes,
nous a requis nous transporter avec luy et les dits tesmoins pour prier et requérir d’habondant et sommer ladite dame supérieure de luy rendre ladite demoiselle sa fille, ce que nous luy aurions accordé, et estant tous audit couvent ledit sieur de l’Esperonnière se seroit adressé à l’une des tourières d’iceluy et l’auroit requise de nous recevoir ladite dame supérieure à son parloir afin de conférer avec elle
ce qu’estant fait et parlant à ladite dame supérieure audit parloir, ledit sieur de l’Esperonnière l’a d’habondant comme il déclare ainsi fait et fait faire priée sommée et requise de luy rendre présentement ladite demoiselle sa fille, désirant l’avoir auprès de luy pour sa consolation et de la dame sa femme et par leur gouvernement estant désormais âgés et valétudinaires et n’ayant de fille que celle la, et aussi pour la faire remeddier de sa maladie et infirmité continuelle, estant constant qu’elle ne luy a jamais manifesté avoir aucune intention ny vocation pour la religion, de plus a sommé et requis ladite dame supérieure de luy rendre aussi présentement demoiselle Anne Monoust sa niepce de laquelle il est curateur à personnes et biens pensionnaire audit couvent et dont la quarte payée par advance finira le dernier de ce mois, protestant que sa pension cessera de ce jour et de faire compensation du prix et valeur de ce qu’il en reste à expirer avec les mesmes mises si aucunes ladite dame supérieure a faites pour sadite niepce protestant à faute que fera ladite dame supérieure de luy rendre présentement sesdites fille et niepce lesquelles il est prest de recevoir et se pourvoir en justice pour les y faire contraindre par les voyes ordinaires de n’estre cependant tenu de leurs pensions, et de toutes pertes despens dommages et intérests
laquelle dame supérieure a faire response ne se souvenir point d’avoir voulu les forcer des portes et murailles du couvent ni d’avoir refusé l’ouverture desdites portes à ladite damoiselle de l’Esperonnière pour en sortir mais bien d’avoir dit qu’elle ne pouvoit pas la forcer et violenter pour ce faire, et que si ladite damoiselle ne le vouloit, elle ne pouvoit faire davantage pour la satisfaction dudit sieur de l’Esperonnière que de faire ouvrir les portes,
qu’elle a requis ladite demoiselle de l’Esperonnière sur tous les motifs de sa vocation et de son dessein, et qu’elle luy avoit fait response qu’elle désiroit estre religieuse du Calvaire et qu’elle n’en sortirait pas, que ladite demoiselle l’avoit fait prier de luy donner l’entretien en la maison auparavant mesme que ladite dame supérieure la cognoisse et eust parlé à elle,
à l’égard de ladite demoiselle Menoust qu’elle ne prétend pas non plus la tenir contre le gré dudit sieur de l’Esperonnière et fera son pouvoir pour la faire venir à la porte afin qu’il en dispose
et a ladite dame supérieure offert de faire venir au parloir lesdites demoiselles de l’Esperonnière et Menoust afin d’estre requises et ouyes sur le subjet de la présente sommation au surplus proteste de nullité d’icelle,
répliquant par ledit sieur de l’Esperonnière, il a dit qu’estoit à propos et du debvoir de ladite dame supérieure de mettre sesdites fille et niepce au dehors de la maison et qu’elle les retient contre son gré de les faire seulement venir au parloir et les luy refuser
c’est pourquoi il a persisté en la protestation cy dessus, dont et du tout il nous a requis le présent acte que luy avons octroyé pour luy servir et ce qu’il appartiendre que de raison
fait et passé audit parloir en présence de Me René Faure et Pierre Pezot demeurant audit Angers

Odile Halbert – Reproduction interdite sur autre endroit d’Internet Merci d’en discuter sur ce blog. Tout commentaire ou copie partielle de cet article sur autre blog ou forum ou site va à l’encontre du droit d’auteur.

3 réponses sur “Henri de l’Esperonnière tente de récupérer sa fille entrée au couvent des Calvairiennes à Angers, 1677

  1. Henry de l’Esperonnière, écuyer ,seigneur de la Sansonniere de Sallebeuf et de la Frelandiere fut baptisé à Crosmieres le 5 septembre 1624 , il a épousé Jeanne de Menou dont il eu Henry marié le19 decembre1690 à St Denis d’ Angers avec Marie Davy Marie Henriette ondoyée à St Saturnin sur Loire le 12 dec 1655 supp bapteme St Denis d’ Angers 26 avril1664 Marie Anne mariée avec François de Ligondes contrat du 25 juillet 1683 devant Normand notaire à Saumur dont une fille donc je présume qu’il s’agit de la fugueuse pré citée, avec sa cousine, dommage sa date de baptême n’est pas précisée .Révolte contre un mariage arrangé ? en plus en terme actuel on pourrait parler d’anorexie ( débilité d’estomac qui ne peut rien souffrir) Je pense à la Religieuse de Diderot façon inverse .sources « Maison de L’Esperonnière » de Théodore Courtaux

      Note d’Odile :
      Merci pour ces précisions.
      Je lisais hier « Comment vivaient nos ancêtres » de Jean-Louis Beaucarnot. Il raconte que les chances de faire un mariage d’inclination autrefois dimimuaient d’autant qu’on montait dans l’échelle sociale, et que « le mariage d’inclination était le privilège des pauvres ».
      Je trouve cette dernière formule particulière jolie.
      Je pensais naïvement que l’anorexie était une maladie de notre société moderne, merci de nous suggérer son ancienneté très probable en effet ici.
      Pauves demoiselles d’antan, condamnées à subir un époux non choisi !
      Vous venez de me donner envie de relire La Religieuse, d’autant que mon cerveau encombré par un virus banal mais bien encombrant, n’est plus capable de travailler à mon blog ce jour…
      Cordialement
  2. Un père qui essaie de regagner la confiance de sa fille » Crois -moi ,ma chère enfant,dit- il; je ne vois dans le monde de mauvais mariages que les mariages d’inclination; le hasard est encore moins aveugle que l’amour,puis ,se pressant ,pour mieux capter l’ingénue,il se fait aimable,il plaisante. » Penserais-tu,dit-il,mieux connaître ton futur après l’avoir vu dix ans; rien n’est si dissimulé que les hommes ,si ce n’est peut-être les femmes ! »
    Une telle soumission n’allait pas sans réserves,et se serait bien mal connaître les filles que supposer qu’elles fussent aussi aveuglément capables de docilité. La preuve en est que cette même Angélique,en causant avec sa petite soubrette,toujours dans l’Ecole des Mères,témoigne assez de son insubordination. » Vous épouserez M. Damis ?
    demande Lisette à Angélique. »A cette question Angélique s’insurge,,elle s’irrite,elle joue la révoltée.Elle a ce mot admirable: » Moi, l’épouser ! Je t’assure que non; c’est bien assez qu’il m’épouse ! »
    Et ce billet d’une comtesse de Maugiron à son époux,qui en dit long sur la froideur mutuelle que certains couples de ce siècle professaient à l’endroit les uns des autres:  » Je vous écris parce que je n’ai rien à faire; je finis parce que je n’ai rien à vous dire.Signé: Sassenage,très fâchée d’être Maugiron. »
    « La Vie de Famille au XVIIIe siècle, »(Edmond Pilon.)

  3. Quelle belle lettre que celle de cette assenage, épouse Maugiron ! Tout son amour et sa docilité sont transmis en quelques mots, parfaitement choisis.

Répondre à Jérôme Annuler la réponse

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *