Voici un exemple d’un impôt détesté entre tous, détesté parce qu’il impliquait de s’entendre collectivement pour le payer. Il en résultait des litiges entre voisins, et nous allons en décourir un aujourd’hui.
la frèche : en Anjou, en Touraine et en Poitou, rentes féodales solidaires, c’est-à-dire les plus gênantes et les plus détestées de toutes, à cause des difficultés qu’elles entraînaient constemment entre confrècheur qui vivaient en indivis. On écrit aussi fresche. On les appelle aussi tenues. (M. Lachiver, Dict. du Monde Rural, 1997)
L’acte qui suit est extrait des Archives Départementales du Maine-et-Loire, série 5E90 -Voici la retranscription de l’acte : Le 29 mars 1656 après midy, devant nous Nicolas Bellanger notaire royal à Angers résidant aux Ponts de Cé furent présents establis et duments soumis chacuns d’honorable homme René Guillot vigneron demeurant au Bas Versillé paroisse de Saint Jean des Mauvrets d’une part
et honorable homme Charles Marchais marchand tanneur demeurant en ce lieu des Ponts de Cé paroisse St Maurille et Me Pierre Martin le Jeune, notaire de la cour de la chastellenie de St Alman, demeurant paroisse St Jean des Mauvrets promettant faire ratifier et avoir ces présentes pour agréable à honneste femme Jacquine Fouscher veuve en secondes nopces de defunt Me Jacques Girault vivant sergent royal, demeurant en ladite paroisse St Jean et la faire solidairement obliger avec eux à l’effet des présentes et en fournir letre de ratificaiton en nos mains d’huy en huit jours prochains à peine etc ces présentes etc, lesquels Marchais et Martin esdits noms et en chacun d’iceux l’un pour l’autre seul et pour le tout sans division d’autre part,
entre lesquelles parties a esté fait l’accord qui s’ensuit sur les contraintes et saisies que ledit Guillot avait fait faire sur les frescheurs de la fresche de Versillé en conséquence d’exécutoire de despens émané de messieurs tenant le siège présidial d’Angers le 21 janvier dernier, par luy obtenu contre damoiselle Renée Germain veuve de defunt Me Eslie vivant chevalier seigneur de la Servaye dame de ladite fresche de Versillé, et du contenu auquel exécutoire et frais faits en conséquence ladite Foucher ensemble André Bouton mary de Jacquine Girault et curateur à la personne et biens de Louis et Jacques les Girault sont tenus pour avoir par ladite damoiselle Germain cédé audit defunt Girault avant l’optention dudit exécutoire de despens et de la sentence en dernier ressort du 23 novembre aussi dernier sur laquelle ledit exécutoire avait été décerné les rentes de ladite fresche pour l’année eschue à la feste d’Angevine 1651
c’est à scavoir que ledit Guillot a consenty et par ces présentes consent délivrance et main levée des bleds de rente qu’il a fait faire sur lesdits frescheurs au moyen desquels lesdits Marchais et Martin ont promis et s’obligent solidairement comme dit est payer et bailler d’huy en quinze jours aussi prochainement venant la somme de 23 livres tz pour la part et portion de ce que peut debvoir ladite Foucher du contenu audit exécutoire et frais faits en conséquence, à quoy lesdites parties ont composé et accordé ensemblement, hypothèque duquel exécutoire de ladite sentence ledit Guillot s’est réservé et réserve contre ladite damoiselle Germain lesquelles sentence exécutoire et toutes les autres pièces et frais divers ledit Guillot a présentement mis en mains dudit Bouton, à ce présent, desquelles il se contente et l’en quitte et tous autres, lequel a promis à aider audit Guillot mesme à ladite Fouscher toutesfois et quante ce qui a esté voulu stipulé et accordé par lesdites parties auquel accord et tout ce que dit est tenir etc dommage etc s’obligent lesdits establis solidairement comme dit est esdits nom et en chacun d’iceux, un seul et pour le tout sans division eux leurs hoirs etc biens et choses à prendre vendre etc renonçant même par espécial au bénéfice de division etc dont etc adverty du scellé suivant l’édit
fait à notre tablier en présence d’honorable homme Vincent Gaultier marchand maitre apothicaire, d’honneste homme François Bouton marchand vinaigrier audit lieu, tesmoins, ledit Guillot a déclaré ne scavoir signer.
Signé : Marchays, Boutton, Martin, Bouton, Bellanger, Gaultier
Et le troisiesme jour d’avril audit an 1656 après midy devant nous notaire royal susdit soubsigné fut présente establie et dument soumise ladite Foucher veuve dudit defunt Girault demeurant au bourg de Saint Jean des Mauvrets, laquelle après luy avoir fait lecture de mot à autre de l’accord de l’autre part, elle l’aloué ratifié confirmé et approuvé et consent qu’il sorte à effet de tout en tout selon sa forme et teneur et s’est obligée solidairement avec lesdits Marchais et Martin aussi y desnommés comme si elle avait été présente lors de la passation d’iceluy, reconnaissant outre que si lesdits Marchais et Martin se sont obligés audit acte ce n’a esté qu’à sa prière et requeste et pour luy faire plaisir
laquelle Foucher, en exécution d’iceluy acte, a soldé et payé comptant en notre présente audit Guillot la somme de 23 livres tz y mentionnée en bonne monnaye ayant cours suivant l’édit de laquelle il se contente et l’en quitte et tous autres avec protestation par elle faite de (blanc) partie d’icelle somme contre ledit Bouton dénommé audit acte, tellement que ladite ratification et tout ce que dit est tenir etc dont etc averty du scellé suivant l’édit
fait à notre tablier en présence d’honorable homme Vincent Gaultier marchand audit lieu temoins etc lesdits Foucher et Guillot ont dit ne scavoir signer
Signé : Proustière, Gaultier, Bellanger
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On peut ajouter, à la définition de M. Lachiver, que la frèche semble aussi attestée au sud du Maine, probablement à cause de la proximité de l’Anjou
Note d’Odile :
La féodalité n’avait pas les mêmes frontières, car je rencontre Notre Dame Angevine hors de l’Anjou. Il est vrai que certains grands seigneurs ont tôt possédé sur plusieurs provinces… par le jeu des alliances…
Par contre, quelqu’un sait-il comment la frèche est créée exactement ? Par la concession d’un bien par un seigneur à une personne ou un groupe de personnes ?
Note d’Odile : Je suppose qu’à l’origine de propriété il y eut la concession d’un bien par un seigneur à une personne. Je rapproche ceci aussi des noms de lieux issus des noms de personne, ainsi actuellement je fais la retranscription intégrale du registre paroissial du 16e siècle du Louroux-Béconnais, et je rencontre la Guymeraye à la famille Guymier, la Françoiserie et la famille Lefrançois, etc…
Cette origine semble confimée par le même Dictionnaire du Monde Rural, de M. Lachiver, qui donne aussi :
fraracher, verbe, Féod. Partager de façon que les puînés et les soeurs tiennent leur part en foi et hommage de l’aîné. Fraracher un fief. On trouve aussi frarêcher.
frarachaux, s.m.pl. Anc. Législ. Cohéritiers possédans par indivis. On dit aussi frarescheurs, parsonniers.
frarage, s.m. Partage fait comme on le fait entre frères.
frérèche, s.f. Communauté familiale composée de nombreuses personnes, unies par les liens du sang et par des intérêts matériels et moraux, qui vivent ensemble à pot et à feu.
frérage, s.m. Anc. cout. 1- Partie du fief enlevée à la part de l’aîné et partagée entre les cadets. – Droit de mouvance des fiefs échus aux puînés. On trouve farache, farage en Normandie. 2 – Association de membres d’une même famille qui possèdent et exploitent en commun des biens qui échappent ainsi aux taxes de succession et à la mainmorte.
A Corné, on trouve les villages ou hameaux de « Quiquère »( 64 mais, 186 hab) » d’Etriché » ( 14 mais, 47 hab ) nid , de ces familles Quiquère et d’ Etriché, qui m’ont beaucoup intéressée.
( DH. Célestin Port )
Consultable sur le net »Collection de décisions nouvelles et relatives à la Jurisprudence » par Jean Baptiste Denisart p88- Fresche- coutume du Maine Anjou et Touraine
Merci Elisabeth, je m’en vais regarder cela de plus près
C’est exactement le type de document que je voulais savoir : un fresche semble bien, en effet, se constituer après le partage entre les héritiers d’un bien grevé d’une rente. Ce qui est d’un grand intérêt en matière de généalogie puisqu’il permet de supposer (mais attention aux ventes peut-être) un lien de parenté entre les cofrarescheurs