Contrat de mariage de François Guillouard et Marie Bernier, La Sauvagère 1750

Ce sont mes ascendants, et vous les avez en page 34 de mon étude Guillouard de l’Orne.
Ils ne sont pas aisés, et n’ont qu’un demi coffre. Les familles aisées avaient plus d’un grand coffre et demi coffre, et je vous avais parlé de cette remarquable appellation du petit coffre : le demi coffre, en fait un coffre plus petit que le coffre.

Le reste des meubles est aussi très réduit, en particulier, j’observe l’absence de meubles vifs, ce qui conffirme ce que j’avais découvert par ailleurs, le métier de journalier qui n’a pas de terre propre et s’embauche aussi comme colporteur au loin en saisons.
La vaiselle et le trousseau n’atteint aucune douzaine, et surtout on se passe de nappes et de serviettes ce qui est encore plus frappant, tout comme de pinte et chopine.
Je pense que comme on ne se passait pas de boire cependant, on utilisait des objets d’occasion, ce qui était le plus souvent le cas dans les familles modestes, même pour le poêlon.

L’absence de richesse n’empêche pas les précisions pour le propre de la future, dont le papa vit encore, et c’est heureux pour elle, car je vous ai aussi expliqué que lorsqu’il est décédé ce sont les frères qui ont hérité et qui décident de ce qui sera attribué à leurs soeurs le jour de leur éventuel contrat de mariage, mais qu’ils paieront ou plutôt tarderont à payer longtemps parfois.

    Voir ma page sur La Sauvagère

Enfin, j’attire votre attention sur une très grande particularité des archives notariales de l’Orne : elles ne sont pas en liasses mais reliées, en registres assez volumineux. Mais la double page des actes était ouverte avant reliure, de sorte qu’on a dans ces gros registres un ensemble de feuillets commençant par les rectos-versos de la première page des actes, et on doit chercher en fin du feuillet ce qui sera la fin de l’acte, qui est sur le reste de la double page reliée à droite. Il est le plus souvent très difficile de chercher cette suite, sur les registres eux-mêmes en salle de lecture, on pouvait regarder la tranche pour voir l’épaisseur du feuillet et où il se terminait, ce qui n’est plus possible maintenant qu’ils sont en ligne. Il faut bien se répérer aux termes qui vont se suivre, à l’écriture, et aux témoins, pour bien identifier que telle fin d’acte est bien la bonne. Et vous voyez donc dans la cote que je vous mets et que je reporte dans mes études sur mes familles normandes, 2 séries de numéros de vues, ici vues 85-86, 103-104

J’ai trouvé cet acte aux Archives Départementales de l’Orne, 4E176/50 notariat de La Sauvagère – vues 85-86, 103-104 – Voici sa retranscription (voir ci-contre propriété intellectuelle) :

Du 3 septembre 1750 en la paroisse de La Sauvagère, au village de la Prinze Fay noualle d’Andaine vicomté de Dompheront viron midy, pour parvenir au futur mariage qui au plaisir de Dieu sera fait parfait et acomplis en face de la Sainte église catholique apostolique et romaine entre François Guillouard journalier fils Guilleaume et defunte Marie Germain ses père et mère d’une part, et de Marie Bernier fille de Jacques et de Françoise Desnos aussi ses père et mère, tous de la paroisse de La Sauvagère d’autre part
lesquels futurs présents assistés et du consentement de leurs parents et amis soussignés ce sont donnés la foy de mariage et ont promis de s’epouser l’un et l’autre à la première réquisition que l’une des parties fera à l’autre les céréminies de la Sainte église préalablement faites et observées, et au présent et intervenu ledit Jacques Bernier père de ladite fille lequel en faveur du futur mariage pourveu qu’il soit fait et accompli, a promis et s’est obligé de payer et livret auxdits futurs pour toutes telle part et portion que ladite future pourroit prétendre demander et espérer tant à leurs successions parternelle que maternelle, scavoir la somme de 100 livres en argent, ensemble les meubles qui suivent un lit composé d’une couette, un traversin, une couverture de sarge sur fil, demi tour de lit de toelle, 6 draps de toelle commune, autant de serviettes, 6 écuelles autant d’assiettes d’étain commun, un demi coffre de bois de chesne fermant à clefs, une juppe de flanelle, lesquels meubles livrables à veille de leurs espouzailles estimés entre les parties à la somme de 25 livres une fois payés joint à celle de 100 livres compose en total celle de 125 livres du nombre de laquelle somme il en sera remplacé par consignation actuelle celle de 100 sur le plus clair et menue apparaissant de tous et chacuns les biens meubles dudit futur pour tenir lieu de dot à ladite future ou à leurs enfants provenus de leur futur mariage, se plus lesdits futurs se sont (sic, mais sans doute pour « font ») plein douaire coutumier à avoir à courir lors du jour de la dissolution de leur futur mariage sans enfants autres demandes en justice que leur présent, laquelle somme de 100 livres promise sera payée par différents termes, scavoir 12 livres la veille des épousailles venant en un an et ainsi d’an en an faire et continuer pareille somme de 100 livres jusque au parfait paiement de ladite somme de 100 livres, fait et arrêté du consentement dudit Guillaume Guillouard père dudit futur qui a eu le présent pour agréable, Guillaume Guillouard frère, Jacques Guillouard aussi frère, Pierre Leroy beau frère, Jean Guillouard cousin, Marie Bernier oncle de ladite future, Guillaume Desnoes aussi oncle, Louis Fauvel oncle Mathurin Fouyeul et plusieurs autres parents et amis tesmoins desdits futurs de paroisses du Grez et de la Sauvagère.

    et comme vous le voyez ci-dessus, on ne signe pas, mais en Normandie ceux qui ne savent signent posent leur marque.

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Le « coffre et demi » de certains contrats de mariage en Normandie

dans l’Orne, le contrat de mariage définit toujours le don « mobile », en présicant sa composition en meubles morts et meubles vifs.
Ajourd’huy j’aborde avec vous le coffre, car selon la fortune on a
un coffre
un coffre et demi
2 coffres etc…

Et rassurez vous le coffre et demi n’est pas un coffre plus un coffre scié en deux, mais bien un grand coffre et un petit coffre, qu’ils appelaient souvent le coffre et le demi coffre. D’ailleurs, certains notaires, plus précis écrivaient bien un coffre et un demi coffre et non un coffre et demi.

Ajourd’huy je vous offre une famille peu aisée, manifestement exploitant direct, et je vous laisse décrouvrir son coffre, car je suis persuadée que vous n’en avez pas souvent rencontré de pareil ! Il faut tout de même préciser que l’orthographe générale de l’acte laisse un peu à désirer et pour la compréhension j’ai rectifié certains mots tout en laissant les autres…
Bonne lecture Normande !

Ceci dit j’ai moî même une ascendance Regnault, mais les registres paroissiaux ne remontent pas si haut et je ne peux faire le lien avec ce qui suit, même si j’ai déjà noté et relevé beaucoup de Regnault.

J’ai trouvé cet acte aux Archives Départementales de l’Orne, 4E172 notariat de La Ferté-Macé – Voici sa retranscription (voir ci-contre propriété intellectuelle) :

« Le 11 décembre 1574, au traité de mariage faisant par paroles de futur et qui au plesir de dieu sera fait et acomply en face de ste église catholicque par entre Jullien Regnault fils de François Regnault et Suzanne Davy son espouse d’une part, et Francoysse de Fambynne fille de Bertran de Fambynne d’autre part, et en faveur d’iceluy mariage et pourveu qu’il soit fait et accomply comme dit est a esté présent ledit Bertran de Fambonne (sic) lequel a promys et accordé paier en don pécunyel la somme de 40 livres tournois avecques ce un cophre (sic) et trouseau fourny selon la maison dont elle part et celle où elle va, garnye de 2 robes de drapt de coulleur à son usaige qu’elle a de présent avecques ungne vache plaine ou son veau après elle, 6 brebis plaines ou leurs aigneaulx après elles, avecques 6 escuelles pltes et ungne pinte, le tout d’estain, à paier ladite somme de 40 livres tournoys dedans 4 ans prochainement venant après les espousailles par égal par chacun an jusques à fin de paiement dont il en sera employé la mouetye de ladite somme au nom et ligne de ladite future mariée et à ce moyen ledit Regnault et sadite femme ont consenti et accordé le cas ofrant qu’elle prenne son douere coustumier seur leurs biens meubles et héritaiges, et à ce a esté présent messire Michel de Fambinne lequel en faveur de ce que dessus a promys paier la somme de 100 soubz tournoys
fait le jour et an que dessus en présence de messire Michel Maheult et messire Jehan Guille prêtres et Guillaume Davy Me Julien Rosel Françoys de Fambine Guillaume Nugues Jean Thommeret fils de Julien et Ysaac Nugues tesmoings »

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Samson Legauffre retire des maisons sur Anne d’Espinay, Normande, 1586

J’ai trouvé cet acte aux Archives Départementales du Maine-et-Loire, série 5E121 – Voici sa retranscription (voir ci-contre propriété intellectuelle) :

Le 31 décembre 1586 avant midy en la cour royale d’Angers (Bertrand notaire) a esté présente establye et deument soubzmise dame Anne d’Espinay dame d’Ingrande et de Bouleau demeurant en ladite maison seigneuriale de Bouleau paroisse de Boulonse ? pays de Normandie

    Je n’ai pas identifié la paroisse car cela ne ressemble par totalement à Boulogne.

estant de présent en ceste ville d’Angers, laquelle a recogneu et confessé avoir eu et receu de honneste homme Samson Legauffre recepveur pour le roy des tailles en l’élection d’Angers sieur de la Montignère Jehan Girard d’Azé son procureur deument pourveu de procuration du 12 juin 1573 passée par Jehan de La Barre notaire soubz la baronnie d’Azé, la somme de 666 escuz deux tiers pour laquelle somme ledit Legauffre avait vendu à condition de grâce à ladite dame les maisons mentionnées par le contrat de ce fait le 28 mai 1578, outre dudit Legauffre la somme de 27 escuz 43 sols 8 deniers et 83 francs de 20 sols le tout bon et de poids selon l’ordonnance,
desquelles sommes ainsi payées par lesdits Legauffre et Girard ladite dame comme dit est s’est en tenu et tient à contante et bien payée et en quite ledit Legauffre ses hoirs etc et demeurent les maisons mentionnées et vendues par ledit contrat deuement recoussées rémérées et par ladite dame rendues au profit dudit Legauffre à ce présent et acceptant et luy a ladite dame rendu les pièces dudit contrat
à laquelle recousse et tout ce que dessus est dit tenir etc obligent etc renonczant etc foy jugement et condemnation etc
fait et passé audit Angers en la maison de Pierre Cupif sieur de la ? [lecture que je corrige en « sire Jean Cupif sieur de la Robinaye« ] en présence de Me Hector Billonnet et de sire Florens Gruget marchand demeurant audit Angers tesmoins

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« au cas qu’il eust un enfant male possédant son bien » : extrait du contrat de mariage de Nicolas Lagrue et Gillonne Duval, Beauvain (Orne) 1639

La dot s’élève à environ 400 livres dont 200 en argent, mais en Nromandie les meubles vifs et morts est important, et représente bien ici une somme identique, soit environ 400 livres.
Vous vous souvenez que je vous ai expliqué qu’en Normandie seuls les garçons étaient héritiers.
Sauf bien sûr quand il n’y a que des filles.

C’est le cas de François Duval, père de la fille : il n’a eu que des filles.
Et on trouve dans ce contrat de mariage une clause totalement incroyable pour les Angevins qui ont coutume de lire ce blog.

et « attendu qu’il n’y a aucun enfant que des filles , ledit Duval a promis et s’est obligé de payer en outre de ce que dessus auxdits mariés, au cas qu’il eust un enfant male possédant son bien leur donner et payer encore la somme de 200 livres »

Vous avez bien lu, et ceci dit clairement que seuls les garçons possèdent le bien ! et que le papa est malheureux de voir son bien échapper aux filles, et qu’il espère encore à travers un petit fils mâle !!!!
car la somme qu’il donnera est importante, avec 200 livres en argent qui est une somme identique à celle de la dot de sa fille.

Lecteurs Angevins habitués de mon blog angevin entre tous, je suis désolée de vous faire part de ma stupéfaction et horreur lorsque je frappe mes restranscriptions Normande ! Car cette clause fait frémir !!!
J’ai même dû arrêter ma frappe et partir faire un tour pour reprendre ma frappe, car j’étais totalement écoeurée !!!
Vive l’Anjou égalitaire !!! Pauvres Normandes !!!!

J’ai trouvé cet acte aux Archives Départementales de l’Orne, 4E172/34 – Voici sa retranscription (voir ci-contre propriété intellectuelle) :

« Aujourd’hui 6 novembre 1639, en la paroisse de Magny, au village de Lamberdière, après midi, devant les tabellions de la Ferté-Macé, en faisant et traitant le mariage qui au plaisir de Dieu sera fait et parfait en face de sainte église apostolique et romaine entre honnête homme Nicolas Lagrue (s), fils de défunt Nicolas Lagrue et de Marie Lefranc, ses père et mère, de la paroisse de Beauvain et Gillonne du Val (m), fille de honnête homme François Duval et de Marguerite Crotté ses père et mère, de la paroisse de Magny d’autre part, lesquelles parties se sont respectivement promis se prendre et épouser par foy et loy de mariage lorsque par leurs parents et amis sera advisé les solemnités ecclésiastiques sur ce préablablement faites, et à ce fut présent ledit François Duval (m), père de la dite fille lequel en faveur dudit mariage au moyen qu’il soit accomply comme dit est, a donné et promis payer aux dits futurs mariés en don mobile et pécuniel, attendant plus ample partage de sa succession et de la dite Crotté, sa femme, après leur décès, la somme de 200 livres tournois, avec deux vaches pleines ou leurs veaux après elles, une douzaine de brebis pleines ou leurs aigneaux après elles, un habit de robe et cotillon à l’usage de ladite fille, une douzaine et demy de draps, une douzaine et demie de serviettes, une douzaine et demie des nappes à la volonté de la mère de ladite fille, 6 escuelles avec 2 plats, 6 assiettes, un pot, une pinte, une chopine, une salière, un coffre et demy de bois de chesne fermant à clef, un lit fourni d’une couette, un traversier, 2 oreillers, une couverture de drap blanc, une courtine et des rideaux de toile à livrer lesdits meubles au jour des épousailles desdits futurs mariés, et pour l’argent des dites 200 livres payables par ledit Duval auxdits mariés, au jour de leurs épousailles 40 livres, et dudit jour en un an, aussi 40 livres, et ainsi dans un an jusqu’à fin de paiement
accordé entre ledit Duval et ledit Lagrue futur époux, attendu qu’il n’y a aucun enfant que des filles , ledit Duval a promis et s’est obligé de payer en outre de ce que dessus auxdits mariés, au cas qu’il eust un enfant male possédant son bien leur donner et payer encore la somme de 200 livres, à payer icelle somme à 4 termes qui seront 50 livres par an, à commencer un an après la naissance d’un héritier, en cas que Dieu lui en donnât,
du nombre du contenu de ce que dessus, ledit Nicolas Lagrue, futur marié a consenti et accorde qu’il en demeure en dot et assigné à la dite fille pour tenir le nom coté et ligne d’icelle la somme de 200 livres et outre son droit de douaire en dons parachevant ce que ledit Lagrue a assigné sur tous ses biens dès à présent et dès à présent comme dès lors, et à ce moyen lesdites parties sont demeurés à un et d’accord et en ont respectivement chacuns biens …
présents vénérable personne Me Thomas Broutin (s), prêtre et Guillaume Héron (s), sieur du Rocher, Philippe Foutelaye (s), sieur de la Pichardière, Robert Duval (m), grand-père de la dite fille, Jacques (s), Pierre (s) et Denis (s) Lagrue, Jacques Hutrel (m) (mot rayé) Folernerie, Jean Duval (m), Thomas (s), Jean (m) et Pierre (m) Lebreton, Etienne (m) et Michel (m) Hutrel, Pierre Ledonné (m), Thomas Lagrue (m), Pierre Hinoust (m), Michel Gautier (m) , tous parents et amis desdits futurs mariés »

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Devenu majeur, Jacques Dieuleveut amortit une rente due à son oncle, Falaise 1595

eh oui ! Nous sommes aujourd’hui en Normandie, car j’y retranscris des actes, et je souhaite vous montrer ici que les minutes des notaires ne se ressemblaient pas exactement d’une province à l’autre, parce que le vocabulaire et les tournures de phrase du vieux français différaient considérablement.

Le plus stupéfiant pour une Angevin est le gardian de soubz aliàs gardien de sous en version plus moderne des termes. Rassurez vous il ne s’agit pas de monnaie, mais d’une forme raccourcie de soubz l’âge, qui est le terme utiliser pour mineur, et comme vous l’avez compris, le gardien est le tuteur.

Pour le réméré, retrait, amortissement etc… on rencontre rendue.
Ici, il s’agit donc d’une rendue.
Mais vous allez voir que celui qui fait l’amortissement c’est le rendeur
et mieux, celui qui reçoit l’armotissement est le retireur.

J’ai trouvé cet acte aux Archives Départementales de l’Orne, 4E172/3 – Voici sa retranscription (voir ci-contre propriété intellectuelle) :

« Audit jour, audit lieu, [18 mai 1595, au lieu de la Ferté-Macé], devant les tabellions], fut présent honnête homme Jacques Dieuleveult, bourgeois de Falaise, lequel tant pour luy etc rendit et amortit affin dhéritage et rentes ès mains de honnête homme Marin Dieuleveut, son oncle dudit Falaise, à présent demeurant en la paroisse de Couterne, présent et acceptant, 2 escuz sol ung tiers vallant 7 livres tz de rente hypothèque que ledit Jacques Dieuleveut disoyt luy appartenir et avoir droit de prendre par chacun an sur ledit Dieulveult son oncle selon le contrat passé en devant les tabellions de Falaise Thury y recours, que ledit rendeur promest rendre audit retireur toutefois et quantes comme amortie et pour toute garantie sauf du fait et empeschement dudit rendeur seulement, et fut ladite rendue ainsi faite au moyen que ledit Jacques Dieuleveult coignoist et confesse avoir esté bien et deument remboursé par ledit retireur en or et monnaye ayant cours de toult le prix principal porté par ladite création et aultres cousts raisonnables en toutes choses, dont il s’en est tenu à content et bien remboursé par devant lesdits tabellions et a ledit Jacques Dieuleveult quité ledit retireur de tous les arrérages escheus de ladite rendue laquelle avait esté constituée par les gardiens dudit Jacques lors de sa minorité … présents de Marin Petit (m) et de Denis Roussel (m) »

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Comparaison droit Angevin / droit Normand : les nombreuses dots impayées des fonds des notaires de l’Orne

L’Orne, entre autres, est un département où il fait bon faire des recherches dans les fonds des notaires, d’une part parce que les notaires de toutes les petites villes ont conservé des fonds anciens, souvent avant 1600, ce qui n’est pas le cas en Anjou, ou les fonds anciens n’existent que pour Angers et quelques rares fonds.
Mais, le droit Normand a ses particularités, dont la plus importante à mes yeux est l’inégalité homme femme du droit de succession, et par là même des dots.
En Anjou, la succession est des plus égalitaires, sauf bien entenu celle des nobles. L’égalité est totale homme femme et même d’un enfant à l’autre puisqu’on remet dans la succession tous les dons ou dots recçus du vivant ds parents, lesquels dons peuvent parfois est inégaux.
En Normandie, les filles ne sont pas héritières de leurs parents.
Si elles ont eu la chance de se marier avant le décès de leurs parents, ils ont promis une dot (nous y reviendrons). Si elles se marient après le décès de leurs parents, les frères sont tenus de donner la dot à leur soeur.
Enfin, si elles ne se marient pas, mieux vaux le couvent sinon domestique chez un frère.

Mais même ayant eu une dot, celle-ci ne ressemble en rien à la dot angevine, et ce sur 2 grands points :
1-En Normandie la dot contient toujours les 3 apports : pécunier, meubles vifs (vaches pleines, brebis, boeufs), et meubles morts énumérés, et trousseau. Alors qu’en Anjou, les meubles vifs n’apparaissent pas (ou alors rarement et pas dans la région du Haut-Anjou)
2-En Normandie la dot n’est pas entièrement versée le jour des épousailles, mais selon un échéancier s’étalant le plus souvent sur 5 ans sinon plus, et jusqu’à 10 ans. Cet échéancier, surprenant pour un chercheur habitué à l’Anjou, est non seulement surprenant, mais source d’ennuis ultérieurs très nombreux.

C’est ainsi qu’on trouve dans les archives notariales de l’Orne de nombreuses dots impayées, dont le solde est souvent réclamé par les enfants (ci-dessous 46 ans plus tard pour Louise épouse Laisné), voire les petits-enfants (ci-dessous 64 ans après pour Jeanne épouse Guibé).
J’ai déjà trouvé 3 cas dans la famille Lepeltier, dont 2 relèvent de François Lepeltier lui-même, et la 3e de André Regnault, beau-père de son fils Jacques.

Avec ces 64 ans, je pensais avoir trouvé un record.

Or, je viens de retranscrire un autre cas aussi stupéfiant, toujours dans le cadre de mes ascendants personnels. Et j’en conclue que ces méthodes hallucinantes vis à vis des filles, n’étaient pas si rares, et les frères bien souvent oublieux de leurs soeurs.

Voici le dernier cas trouvé in AD61-4E119/16 notariat de Rânes – vue 102-103/242 (vue trouvée par un ami sur la site de Jean Pierre Bréard sur Geneanet, car je n’ai pas accès à Geneanet):

« Le 29 août 1622 , à Carrouges, furent présents honorables hommes Jean (s), Louis (s) et Guillaume (s) Aumoette frères, fils & héritiers de feu Me Guy Aumoette, vivant sieur du Fai de la paroisse de Saint-Martin l’Aiguillon et de feue Madeleine Pinson fille de feue Guillaume Pinson et de feue Marie Delaforge, ses parents, de la paroisse de la Ferté-Macé d’une part
et Jean Pinson (s), écuyer, sieur de la Brière à cause de la demoiselle son épouse, fille de feu Léonard Pinson, sieur de la Mellière qui était fils et héritier en une tierce partie de feu Jean Pinson vivant fils et héritier dudit feu Guillaume Pinson et de la dite Delaforge demeurant en la paroisse de la Ferté-Macé d’autre part,
lesquels en raison du différend qui était pendant au siège présidial du Mans, sur la demande desdits Aumoette contre les détenteurs des fonds à eux échus à cause de leurdite mère et auxdits Pinson auxdits droits échus de leurs prédécesseurs au pays du Maine pour en entrer en possession et en avoir partage sur ce qu’ils y étaient demeurés reservés par le traité de mariage dudit feu Me Guy et de la dite Madeleine reconnu aux ples de notre Dame à Falaise le 7 mai 1559, lesquels détenteurs auroient appelé ledit sieur de la Brière et Jean et François Pinson, sieur de la Vrignière et de la Mercerie, autres fils et héritiers dudit Me Jean Pinson et de ladite Delaforge aux fins aux fins de leur valloir et garantir, sur quoi s’en seroit ensuivi plusieurs procédures et pour éviter à la rigueur d’icelles en auroient lesdits Jean & François Pinson cohéritiers dudit sieur de la Brière chacun pour son particulier fait accord avec lesdits Aumoette passés en ce tabellionage et depuis s’estoient encore faits quelques procédures contre ledit sieur de la Brière pour au douteux évenement du jugement définitif fuir et éviter, aujourd hui date des présentes se sont retrouvés par ensemble ledit sieur de la Brière et lesdits Aumoette, lesquels par transaction finale jurée et yrévocable en ont accordé ce qui en suit c’est à savoir que ledit sieur de la Brière pour estre et demeurer quitte de son chef, lui et ladite damoiselle son épouse, de ladite poursuite prétention et demande desdits Aumoette leur a donné promis payer par exécution la somme de 182 livres tz, à savoir qu’il en a esté présentement payé 38 livres et le reste paiable dans quinzaine prochainement venant et ainsi par ces moyens les parties hors de procès et sans despens de part et d’autre ni autres rescompenses soit taxées et à taxer et entendre ledit sieur de la Brière avec lesdites Jean et Me François Pinson a acquiter lesdits Aumoette vers lesdits détenteurs des frais et despens qui pour ce leur pourroient estre deubs et demeurent lesdits Aumouette libres à se faire payer sur lesdits detenteurs des despens qu’ils pourroient debvoir pour les delays superflus
dont du tout etc et quant à ce etc obligent chacuns leurs biens etc présents Martin Héron (s) sieur de la Rousselière, de la paroisse de Beauvain et Jacques Lolivrel (s) sieur de la Frichetière
et du depuis ledit sieur de la Brière a pour lesdits acquéreurs et sans préjudice de sa rescompense contre eux payer auxdits Aumouette 73 sols pour sa tierce partie desdits delays superflus que lesdits Aumouette eussent peu demander auxdits acquéreurs ou détenteurs »

Ces familles sont toutes notables, signant fort bien, ce qui ne les empêchaient pas d’attendre 63 ans avant de régler enfin la dot aux petits enfants, et ce après poursuites.

Compte-tenu de la durée de vie de cette époque, le décalage est encore plus surprenant, car de nos jours on connait assez souvent ses grands parents, mais de là a payer leurs dettes ou inversment !!!

Mais, au delà de ces dots si longtemps impayées, je dois vous avouer que ces actes sont une mine de renseignements pour les chercheurs du 21ème siècle, qui ont ainsi sur un plateau plusieurs générations.

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