Bail à ferme du prieur saint Aubin d’Oudon, 1600

Ce sont les vacances, aussi je vous fais voyager un peu.
Nous partons à Oudon, sur les bords de la Loire, avec le bail à ferme du prieuré saint Aubin. En 1600, certains baux contiennent encore des clauses de non diminition du prix de la ferme et je suppose que cette clause a pour origine les troubles et les dommages subits ci et là.
Mais j’ai découvert aussi que le roi pouvait prélever des impôts (cela je le savais sur les particuliers) aussi sur les prieurés, mais aussi ordonner certaines ventes. Je vous laisse découvrir ces clauses curieuses.

Oudon, le rivage - collection particulière, reproduction interdite
Oudon, le rivage - collection particulière, reproduction interdite

L’acte qui suit est extrait des Archives Départementales du Maine-et-Loire, série 5E7 – Voici la retranscription : Le 12 eptembre 1600 avant midy en la court royale d’Angers endroit par davant nous Jehan Bauldry notaire héréditaire d’icelle personnellement establiz vénérable et discret Me Jacques Brunet prêtre chanoine en l’église de saint Lau de ceste ville demeurant en la cité dudit lieu au nom et comme procureur et soy faisant fort de vénérable et discret Me Bertrand Brunet prêtre prieur du prieuré de St Aulbin d’Oudon diocèse de Nantes prometant luy faire rariffier ces présentes à peine de tous dommages et intérestz d’une part,

    un chanoine est l’aristocratie du clergé, enfin, si on excepte l’évêque qui est bien au dessus. Un chanoine est donc issu de familles assez aisées…

• et Me Michel Baril demeurant audit Nantes tant en son privé nom que au nom et soy faisant fort de vénérable et discret Me André Baril son filz prêtre chanoine en l’église notre Dame dudit Nantes y demeurant prometant aussi luy faire cesdites présentes à mesme peine que dessus d’aultre part soubzmectant respectivement eulx leurs hoirs etc mesmes ledit Me Michel Baril esdits nom et en chacun d’iceulx seul et pour le tout sans division de personnes ne de biens ou pouvoir etc confessent avoyr faict et font entre eulx le marché qui s’ensuit
• c’est à savoir que ledit Me Jacques Brunet audit nom a baillé et baille audit Me Michel Baril esdits noms lequel a prins et accepté prend et accepte à tiltre de ferme et non autrement pour le temps de deux années et deux cueillettes entières et consécutives à commencer du jour et feste de Toussaintz prochainement venant et finir à pareil jour lesdites deux années et cueillettes finies et révolues, le temporel et tous et chacuns les fruitz profitz rentes revenuz et esmoluments dudit prieuré de St Aulbin d’Oudon ses appartenances et dépendances sans aucune chose en excepter retenir ne réserver dont ledit preneur a dict avoir bonne cognoissance
• à la charge dudit preneur esdits noms d’en jouyr durant ledit temps comme un bon père de famille en conservant les droits dudit prieuré sans y faire ne souffrir aucunes surprinses ne entreprinses et si aucunes y estoient faictes d’en advertir immédiatement ledit bailleur pour y pourvoir ainsi qu’il verra estre à faire,
• faire dire et célébrer le service divin du à raison dudit prieuré
• payer et acquiter toutes et chacunes les charges cens rentes et debvoirs deubz à cause d’iceluy et mesmes les décimes ordinaires et extraordinaires octroits et subventions en quoi ledit prieuré este ou pourra estre taxé et imposé durant ledit temps, sans diminution du prix de la ferme et du tout acquiter ledit prieur vers et contre tous et le garder de toutes pertes despens dommages et intérestz,
• faire faire les vignes dudit prieuré qui n’ont esté délaissées de faczons et ne sone en gast par chacune desdites années de leur faczons ordinaires en temps et saisons convenables, et pour le regard de celles qui sont en gast il ne sera tenu si ne luy semble,
• aussi sera tenu ledit preneur esdits noms de tenir et entretenir et rendre à la fin dudit bail la chapelle dudit prieuré en bonne et suffisante réparation de couverture seulement et pour le regard des autres maisons et appartenances il les entretiendra en tel estat qu’elles sont de présent ou qu’elles luy seront baillées par ledit prieur sans que toutefois ledit preneur puisse contraindre ledit prieur à faire faire lesdites réparations s’il ne luy plaist
• ne pourra demander aucune diminution du prix et charges de ladite ferme et pour ce qu’il convient audit prieur faire serment de fidélité pour raison de sondit prieuré en la chambre des comptes de Bretagne establye à Nantes est convenu et accordé que ledit preneur sera tenu payer les frais et mises qu’il conviendra faire pour faire ledit serment et rendre l’adveu et en retirer les actes nécessaires et a ceste fin luy envoyera ledit prieur dans la Toussaint prochaine procuration et au cas qu’il ne peust estre receu à faire ledit serment de fidélité par procuration y allant en personne, fera ledit preneur les mesmes frais et mises que dessus
si j’ai bien compris le prieur lui-même aurait dû aller à Nantes prêter serment, mais il tente de déléguer ? Je découvre le serment par procuration !!!
• et est fait ledit bail et prinse à ferme pour et à la charge en oultre tout ce que dessus dudit preneur esdits noms et en chacun d’iceulx seul et pour le tout d’en payer et bailler par chacune desdites deux années audit prieur ou audit Me Jacques Brunet pour luy la somme de 20 escuz sol évaluée à 60 livres tournois franche et quicte en ceste ville d’Angers au terme de Toussaintz premier paiement commenczant au terme de Toussaintz que l’on dira l’an 1601 et ensuivant sans que ledit preneur puisse avoir prétendre ne demander aucun rabais ne diminution du prix et charges de ladite ferme pour quelques cas fortuitz ou autres causes ou occasions que ce soit à quoy il a renoncé et renonce

    je suppose que c’est une allusion aux troubles de guerre tout comme aux mauvaises récoltes

• et ne pourra iceluy preneur coupper ne faire coupper ne abattre aucuns bois marmentaulx ne fructuaulx sur ledit prieuré par pied ne aultrement mais pourra seulement coupper les bois et estroisses qui ont acoustumé estre couppez et estroissez qu’il coupera en saison convenable lorsqu’ils seront en couppe sans les avancer ne retarder,
• et où il conviendroit aliéner quelque chose du temporel dudit prieuré par le commandement du roy ledit preneur ne sera tenu payer la taxe mais l’avancera ou elle n’exéderoit le prix de ladite ferme ce qui lui sera déduit sur les premiers termes à escheoir après le paiement fait,
• dont et de toutes lesquelles choses lesdites parties sont demeurées d’accord lesquelles ont stipulé et accepté et à icelles tenir etc garantir etc dommages etc obligent scavoir ledit bailleur audit nom soy ses hoirs etc et ledit preneur aussi esdits noms et en chacun d’iceulx seul et pour le tout sans division de personnes ne de biens soy ses hoirs etc avec tous et chacuns ses biens à prendre vendre etc renonczant etc et par especial ledit preneur esdits nom au bénéfice de division d’ordre et discussion de priorité et postériorité foy jugement condemnation etc
• fait et passé audit Angers à notre tablier présents honnestes persones Pierre Legendre demeurant à Cheffes marchand et Claude Porcher praticien demeurant en ceste ville

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Une réponse sur “Bail à ferme du prieur saint Aubin d’Oudon, 1600

  1. On peut constater que certains sont durs en affaires car la vie des Français est extrêmement difficile à cette époque : Au plus fort du XVIs, l’agriculture est placée sous la tyrannie du climat..80à 90%des Français appartiennent à la paysannerie et vivent en liaison directe avec les caprices du climat dans la crainte permanente d’une pénurie de denrées agricoles. Vivre à la campagne, près des sources de production pourrait passer pour un avantage mais c’est un handicap car le moyen de production ne suffit pas à nourrir tout le monde :une démographie galopante a doublé la population française entre 1450 et 1560 or pendant tout le temps des troubles de la Ligue l’offre de biens de consommation va régresser. D’abord du au climat :un petit âge glaciaire qui s‘instaure entre 1560et 1580; En Anjou ,de 1565 à la fin du siècle on constate une série de périodes climatiques mauvaises :pluies de printemps ou d’été ou au contraire grandes sécheresses d’été qui brûlent les récoltes Les territoires cultivés ne sont pas étendus et pas d’intensification de la production dus aux troubles endémiques qui détournent de l’innovation : 20 quintaux de blé à l’hectare relève de l’exploit (vu sur internet actuellement en Beauce peut aller jusqu’à 122)et il faut garder des semences pour l’année d’après quand c’est possible…….A cette époque le pain est rare donc cher, les prix flambent et les marchands de grains d’Angers spéculent cf Louvet en 1595…Les conséquences seront dramatiques pour les petits paysans ne vivant que de leurs bras et ne possédant pas de bien propre et pour les petits seigneurs ruraux à qui les propriétés ne rapportent plus rien soit en faire valoir direct soit en concession et pour qui cens et champart deviennent synonyme d’infortune en période de production nulle. Le nombre de Français régressera de 10 à 20% de 1560à 1630 ;D’après Ph Tourault « les Angevins au temps des guerres de Religion » Il y aura aussi toutes les épidémies qui sont en corrélation avec ces temps troublés…

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