Salaire des domestiques du tanneur : Noëllet (49) 1724

Il est rare de trouver le salaire des domestiques. En voici selon l’inventaire après décès en 1724 de Julien Jallot mari de Françoise Lemonnier, mes ancêtres. L’inventaire est extrêmement long car il fait 39 pages et a duré près d’un mois, et avec des journées de 8 h du matin à 19 h du soir, y compris le samedi.
Donc, à la fin de ce long inventaire (AD49-5E20) on a les dettes qui sont actives et passives, et dans les dettes passives on a aussi ce qui est dû aux salariés, au nombre de 4 :

  • Au sieur Pierre dit Langouin compagnon tanneur 85 L pour une année 7 mois de son temps – A Claude Gohier serviteur domestique 18 L 10 sols pour environ 6 mois de son service – A Julien Dupont aussi serviteur domestique 9 L 10 sols pour environ 6 mois de son service – A Jacquine Lemesle servante domestique 9 L pour environ 6 mois de son service

Ainsi, j’apprends qu’il n’y avait qu’un ouvrier tanneur, et qu’il ne gagnait pas 5 L par mois, mais 4,47 L, et les autres domestiques gagnaient encore moins puisque la servante est même payée seulement 1,5 L par mois, et ils n’étaient pas payés chaque mois, le plus souvent quand ils partaient. Tout cela est extrêment peu pour des heures plus que longues…

Les hardes du défunt serviront à l’usage des enfants, Beauchêne (61) 1744

Julien Chesnais voiturier à Beauchêne meurt à 35 ans laissant 3 enfants de 7, 6 et 1 an à Marie Maloisel sa veuve. Je tiens beaucoup à l’inventaire fait après son décès, car il est frère de mon ancêtre Gilles Chesnais, également décédé jeune et même métier, même village, donc je peux comprendre comment vivait Gilles Chesnais à travers cet inventaire de son frère. Je vais revenir très longuement sur cet inventaire car il retrace son mode de vie, mais ce jour je reviens sur la comptine de Gilles Vrigneault chantée par Catherine Sauvage au célèbre refrain « Quand mon grand papa mourera j’aurai sa vielle culotte … »

Car voici ce qui concerne les vêtements du défunt extait de l’inventaire du jeudi 22 octobre 1744 AD61-4E80/620 Devant notaire à Tinchebray

« Les hardes et habits dudit defunt consistant en un vieil justaucorps de finette de Saint Lo, une veste de pinchinal, une autre veste de tiretaine, 2 vieilles paires de culotte l’une de cuir, l’autre de tiretaire, une paire de bas de laine blanche, une paire de guestres de courtil, une paire de souliers, une paire de sabots, un chapeau, un bonnet, un vieil manteau de camelot, le tout estimé par lesdits parents à la somme de 12 livres à condition que lesdits habits seront employés à l’usage des enfants. »

Les estimations dans cet inventaire sont faites par des parents et non par personnes agréées désignées, mais c’est signe qu’ils s’entendent bien. Donc, ces parents laissent les hardes à la veuve mais elle n’a pas le droit de les vendre, et doit en faire usage pour ses enfants.
J’ai personnellement connu d’incroyables récupérations de vêtements, et même il n’y a pas si longtemps que cela. Ainsi l’une de mes tantes, célibataire, a vécu en retaillant les vêtements de sa défunte mère, et lorsque j’allais la visiter, je voyais la jupe taillée en fait dans le manteau de ma grand mère etc… Nous vivons une époque où j’entends à la télé que tout le monde change de tout presque tous les jours et on change de vêtement tout le temps… alors cette comptine me revient souvent Je suis cependant admirative que cette veuve ait pu récupérer des vêtements dits « vieux », et pourtant je sais que ces tissus d’autrefois étaient bien plus solides que ce que l’on porte de nos jours, et j’ose même ajouter « plus chauds » car le drap de laine d’autrefois était chaud. Pourtant j’ai parfois eu la chance d’acheter solide et  je porte encore parfois l’une des mes jupes qui a plus de 40 ans. Je dois cependant être un cas rare en France.

Nos ancêtres habitaient souvent une seule pièce touchant celle de bêtes pour se réchauffer un peu

A l’image de l’âne et le boeuf réchauffant l’enfant Jésus, nos ancêtres qui n’avaient pas nos moyens de chauffage moderne utilisaient la proximité des bêtes, voire du fumier. Puis, les agiculteurs, se modernisant, abandonnèrent ce mode de vie. Et voici que des essais sont en cours pour récupter la chaleur des stabulations avec des méthodes modernes comme les pompes à chaleur … et c’est à suivre. Pour ma part, j’ai connu le grenier à foin au dessus des maisons, et je me souviens de ces portes-fenêtres de greniers, avec un crochet au dessus, pour monter les charges car il y en avait chez ma grand mère. On savait isoler les maisons par le haut, et j’y songe souvent car j’ai connu au contraire une chambre à même l’ardoise, et je ne vous dis pas les températures l’hiver et pire l’été. Maintenant, en 2022, je subis comme d’autres Français, les lacunes béantes du droit de la copropriété, car pour isoler et/ou refaire le toît, le conseil syndical choisit d’abord ce qu’il va présenter en vote à l’assemblée générale, en d’autres termes il exclut tout ce qui est trop cher, donc les bonnes isolations etc… POUR PARVENIR A ISOLER LES LOGEMENTS IL FAUT IMPERATIVEMENT REVOIR LE DROIT DE LA COPROPRIETE POUR GARANTIR LE DROIT A CEUX QUI SONT SOUS LE TOÏT D’ÊTRE ISOLÉS.

 

Un étranger autrefois était celui qui n’appartenait pas à la paroisse, et même au clan familial

Voici l’exemple d’un garçon de Campbon venu faire les vendanges à Maisdon, soit du nord de la Loire-Atlantique au sud du même département, et il est dit « étranger ». Voici ce que donne le Dictionnaire du Moyen Français (1330-1500) :
Qui n’appartient pas à une communauté donnée
Qui est d’un autre pays
Qui n’est pas du cercle de la famille, des proches

En Normandie on les appelait « horsain »

L’acte qui suit est à Maisdon le 4 octobre 1688 :

04.10.1688 … Pierre « un étranger qui estoit venu pour faire les vendanges en ce pays cy, lequel est décédé chez Me Nicolas Rabut marchand en présence de Pierre Macé, Vincent Martin de la paroisse de Bein, et Julien Lorain de la paroisse de St Sulpice évêché de Rennes, qui ont dit qu’il se nommait Pierre et qu’il était de Cambon. Il est à remarquer qu’il a été confessé par missire Bizeul vicaire de Monnières »

Plusieurs femmes signaient à Vallet déjà dans les années 1740

Le boucher de Vallet (44), Jean Papin, a 14 enfants dont les baptêmes sont remarquables. Sur tous les registres paroissiaux, ceux des grandes villes mis à part, les seules signatures sur les baptêmes sont celles du parrain et de la marraine, quand ils savent signer. Or, à Vallet, dans les années 1740 plusieurs femmes signent, et même bien, et le prêtre les a autorisées à signer. Les 14 baptêmes attestent que ces bourgeoises étaient éduquées, assistaient à ces baptêmes et qu’elles demandaient manifestement au prêtre le droit de signer avec la marraine. Magnifique clan féminin à Vallet !  Ainsi les familles Dutemple, Morin, Papin, Petitgars, Fouquere, Guillon …

Histoire des fenêtres sans vitres, puis des vitres.

Il y a 14 ans, j’ouvrais de blog, avec cet article. Je le remets car j’ajoute ici les toiles aux fenêtres, selon A. Guépin, Histoire de Nantes, 1839 p 265
« En 1579, les fenêtres du collége Saint-Clément n’avaient que des carreaux de toile, comme le montre une plainte déposée au bureau de la mairie par le procureur du roi, qui poursuivait le principal et les régents, parce qu’ils exigeaient des élèves une indemnité pour la chandelle, les bancs et la toile des fenêtres. Le principal représenta que pareille chose avait lieu à Paris, et l’affaire n’eut pas de suite. »

  • Ouvrons les fenêtres

Un toît sur la tête, l’homme, pour y voir clair, pratique dans le mur une ouverture, appellée fenêtre du grec « éclairer ». Elle laisse passer l’air, indispensable pour cuire les aliments à l’intérieur. Les peaux de bête assurent la lutte contre la pluie, le vent… plus tard remplacées par des toiles cirées, papiers huilés, souvent protégés de grilles.

Puis, les fenêtres s’agrandissent et on y met une croisée ; à l’extérieur un contrevent de bois, découpé pour laisser un filet d’air et de lumière. Quelques Romains y mettent du mica ou de l’albatre, puis du verre coulé plat à la transparence relative !

Au début du 14e siècle, le verrier Philippe Cacqueray met au point la fabrication de feuilles planes. Les verreries, rares, très artisanales et consommatrices de forêts, produisent peu et le verre est difficile à transporter à plus de 40 km par charroi sur les chemins défoncés…

La fenêtre devient alors parfois le bois et vitrage qui composent la croisée. Les carreaux, fort rares, sont petits ; on leur adjoint à l’intérieur, un volet pour cacher la lumière à volonté.

Sous Louis XIV, le verrier Lucas de Nehou, met au pont le coulage du verre à vitre au château de Saint-Gobain, d’où la galerie des glaces.
Mais point de vitre aux fenêtres de l’immense majorité ! L’invention était pour la galerie des glaces, pas pour le peuple !

Au 19e siècle, le procédé est amélioré, les transports aussi. La vitre arrive enfin aux fenêtres. De son côté, le contrevent extérieur prend le nom de son collègue intérieur, le volet.

Au 20e siècle la vitre atteind de telles dimensions qu’elle concurrence le mur. Elle ne laisse pas passer l’air, alors on réinvente l’ouverture pour lui, et on ajoute un moteur : la VMC est née. Quant au volet de bois, ex contrevent, il peut encore être découpé, mais cette fois pour le décor…
Lucas de Nehou est oublié… Ah s’il voyait ces tours de verre !

Merci à Ghislaine le Dizès, poétesse, pour le joli titre de ce message…

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