Histoire de la quincaillerie en gros Guillouard, rue St Jacques, Nantes

De la graineterie à la quincaillerie en gros

Je vous ai déjà parlé de la graineterie Moriceau à l’angle de la rue St Jacques et la rue du Frère-Louis 1814-1860 La petite-fille des Moriceau, Victorine Grelet, est aussi issue de maçons et serruriers qui avaient la bonne idée de ne pas avoir trop d’enfants, mieux d’avoir des célibataires qui gagnaient bien leur vie, et laissaient tout à l’unique nièce, de sorte qu’elle était aisée. Elle épouse un bel homme du quartier, Francis Guillouard, et ensemble ils reconstruisent le bâtiment un peu vétuste de l’ancienne graineterie et y créent un magasin de quincaillerie en gros, qui répond sans doute à un tel besoin qu’il va bientôt livrer plusieurs départements, de la Vendée au Morbihan.
Francis et Victorine vont vivre dans l’appartement au dessus du magasin toute leur vie. Ils vont avoir 7 fils, aucune fille. Sur ces 7 fils, 2 meurent en bas âge, un meurt au front en 1914, 2 vont créer en 1911 l’usine ALG et 2 vont avoir en partages égaux la quincaillerie en indemnisant les autres. Ils vont élever leurs fils non dans les études supérieures mais dans une multitude de contacts avec les fournisseurs, leur visite, et la visite de l’exposition universelle de 1890 foires à Paris etc…, leur inculquant ainsi des connaissances de la fabrication des articles ménagers.

articles de ménage et de bâtisse

Le papier à lettre de la maison de commerce de François Guillouard en 1909 montre l’étendue des produits, alors surtout destinés à des artisans plus qu’aux particuliers : Pointes fines et ordinaires – Clouterie forgée et mécanique – Clous à cheval – Vis à bois, boulons – Fourches acier – Baldaquins – Outils de forge, de charpentier, charron, menuisier, plâtrier, couvreur, sabotier – Carton bitumé – Poterie de fonte – Grillages, fil fer, meules à aiguiser – Fourneaux, cuisinières – Chaines – Huile, essence, vernis – Peinture – Verres à vitre  

la livraison avec 19 chevaux

Pour livrer il faut beaucoup de chevaux, et ils sont en partie rue de Bonne Garde, en partie à Rezé, et pour mesurer les distances des lieux géographiques éloignés, et même très éloignés, Francis Guillouard a des cartes et même un ouvrage qui donne les distances, alors mesurées en lieues. Donc il sait combien de lieues pour atteindre le FInistère etc… Il faut aussi beaucoup de personnel, et les photos ci-dessous datent d’avant la première guerre mondiale, environ 1909. Il faudra attendre après la seconde guerre mondiale pour voir la disparition des chevaux de livraison.

le magasin rue St Jacques et rue du Frère Louis

Pour stocker les marchandises, Francis Guillouard loue des maisons à l’arrière, donnant rue du Frère Louis, et il les acquiert pour 8 500 F en 1899, d’un vendeur incroyable : la ville de Nantes, qui est le plus généralement acquéreur pour expulser et agrandir les voies.

Cet acte, rare, car le vendeur est la ville de Nantes, concerne :
Un immeuble sis rue du Frère-Louis, porté au plan cadastrail de la commune de Nantes sous les n°2022 de la section P, comprenant une maison composée d’un rez-de-chaussée, de trois pièces et un cabinet servant actuellement de magasin – une cour à l’est et au sud de cette maison – hangar, puits et water-closets dans la cour, le tout en un seul tenant, d’une contenance de 350 m2
environ, borné au Nord par Mr Guillouard acquéreur, à l’Est par la propriété Haudemont, au Sud et à l’Ouest par la rue du Frère-Louis avec entrée sur cette rue. Suivent 4 pages sur l’’origine de propriété et on apprend que « ladite parcelle avait été distraite d’une propriété qui était échue aux consorts Maillard et Grelet sus-nommés, dans diverses successions, ainsi qu’il est expliqué ». Ainsi, pendant des décennies, on peut se demander à quoi la ville de Nantes jouait en spoliant pour revendre enfin.

En 1909 vient l’heure de placer les 5 fils

Et ce n’est pas rien, mais tous ont appris la dynamique de la fabrication, des circuits commerciaux, des besoins évolutifs des clients, et la comptabilité, tous les 5 sont armés pour l’avenir, et les parents font les partages. Victor-et y installent un atelier de ferblanterie, car le fer-blanc, acier doux étamé, est à la base des boîtes de conserve qui se développent et des articles de ménage comme seaux, brocs, lessiveuses… Edouard et Charles prennent la quincaillerie, qui vend toujours à des artisans menuisiers, charpentiers, forgerons, charrons et le bâtiment.

 

1914 arrive la guerre

Edouard passe les 4 années au front, notant tout, tandis que le lieutenant Leglaive photographie. J’ai publié ces rares documents de la guerre de 14-18 Joseph meurt au front dès les premières hostilités. Charles garde la quincaillerie, et Adrien et Louis sont plus utiles à la France à fabriquer des seaux etc.. pour l’armée, et bientôt des armes. L’une des images du cahier de guerre d’Edouard Guillouard résume cette production utile, car pour ces millions de soldats il fallait tant de seaux, gobelets pour boire, etc… pour la nourriture etc… et Edouard quand il voyait une nouvelle munition allemande, s’empressait de l’envoyer à Adrien, le surdoué en inventions.

La guerre enfin terminée, le commerce qui a manqué de clients, la plupart au front, va cahin caha, tandis que l’atelier de production a prospéré.

La quincaillerie est bombardée en 1943

Le 23 septembe 1943, la seconde vague des bombardiers alliés touche St Jacques, détruit des immeubles, fait un immense trou devant l’église et touche la quincaillerie Guillouard. Comme de nombreux magasins bombardés, le commerce s’arrête, le personnel est sans travail, et le pillage, fléau de toutes les guerres, mais dont on parle généralement moins, s’ajoute à la douleur.

reconstruction de la quincaillerie

Fin de la quincaillerie

Dans les années 1950 le plastique remplace beaucoup le fer galvanisé ; il est bien meilleur marché et le chiffre d’affaires baisse en conséquence. Puis dans les années 1960 les grandes surfaces apparaissent et détruisent tous les commerces au détail de proximité, y compris les quincailleries donc la quincaillerie de gros. La fermeture entraîne les primes de licenciement des salariés, reste seul le bâtiment, qui est loué en 1982 à Meuble Inter jusqu’au 17 février 1989 ou un feu de poubelle sur la rue entraîne l’incendie du magasin. C’est la fin, et le bâtiment est vendu à un promoteur immobilier quelques mois plus tard.

Voici la cadastre moderne montrant bien la plan de l’immeuble de l’angle de la Rue du Frère-Louis, qui fut l’ancienne quincaillerie Guillouard.

 

Les hommes du 84° RIT posent sur le cheval de l’ordonnance, jouent sur les ânes, puis suivent le cours d’équitation.

ILS POSENT SUR LE CHEVAL DE L’ORDONNANCE, avril 1915

J’avais de mon grand-père, Edouard Guillouard, une photo à cheval pendant la guerre 14-18.

Mon grand-père connaissait bien les chevaux, puisqu’il en avait 18, logés à Rezé, pour livrer la quincaillerie jusque dans le Finistère.

Cette photo (ci-contre) était tellement belle que je croyais qu’il avait eu un cheval pendant la guerre 14-18.

C’est en 2021, alors que j’ai déjà 83 ans, que je découvre la vérité sur cette photo, grâce aux albums de son ami Fernand Leglaive, le photographe de la compagnie, et fidèle compagnon durant ces 4 années difficiles.

En effet, je découvre dans la collection de photos conservées par Leglaive, qu’il y avait 6 autres cavaliers, et en regardant les 7 photos de cavaliers de plus près, je vois toujours la même maison et le même cheval.

Puis, lisant le carnet de guerre de mon grand-père, je comprends qu’en fait, ils ont eu ce jour-là la visite de l’ordonnance.

Je comprends que l’ordonnance était alors la liaison entre le commandement en chef et la compagnie, soit pour recevoir des ordres, soit pour remonter les problèmes de la compagnie.

Et bien sûr, l’ordonnance n’a pas de voiture, car elles sont encore rarissimes, mais un cheval.

Ce jour de la visite de l’ordonnance, le front était manifestement calme, et les officiers accueillent avec détente l’ordonnance, et ils sont même tellement détendus qu’ils posent tous les 7 sur le cheval de l’ordonnance, l’un après l’autre.

Je me souviens que lorsque j’étais petite, cette mode des photos posées dans un décor ou sur les genoux du père Noël était à la mode.

Mais gageons que là, Leglaive fait figure de pionnier en matière d’utilisation de l’appareil photo. Non seulement son appareil va retenir la vie au front, mais il va aussi voir des moments de détente.

[photo ci-contre, c’est Leglaive lui-même]

D’ailleurs, je vous mets ci-dessous une toute autre détente, qui est même si détendue, que c’est de l’amusement, presque comme des enfants.

Ainsi, je découvre que mon grand-père n’avait jamais eu de cheval pendant la guerre, mais que cette photo était un moment de détente des officiers de la 84°RI, lors de la visite d’un cavalier à Bailleulval en 1915.

Voici donc toutes ces photos pour que vous examiniez de près le cheval.

 

[photo ci-contre, le lieutenant Crehalet, souvent cité dans le carnet de guerre d’Edouard Guillouard]

 

 

 

 

 

 

 

 

toutes ces photos de Leglaive, en avril 1915, Bailleulval, 84° R.I.

[photo ci-contre l’adjudant Bichon]

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

ILS S’AMUSENT SUR LES ÂNES, février 1917

En février 1917, ils sont au Bois Rappont.

Là ils rencontrent quelques ânes.

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

ILS SUIVENTS DES COURS D’ÉQUITATION, septembre 1917

[photo ci-contre « septembre 1917, l’Ache près de la côte de Montjoie »]

Ainsi mon grand-père est enfin sur un cheval, mais c’est en cours d’équitation.

 

 

 

 

Pourtant il connaissait bien les chevaux, puisque pour le magasin de quincaillerie en gros de ses parents il y avait 18 chevaux, et voici mon grand père, jeune homme, bien avant la guerre, qui est manifestement à l’écurie pour préparer des chevaux. Ici en 1904 à l’écurie Guillouard à droite, puis devant la quincaillerie avec une voiture à cheval, puis les employés.


 

 

 

 

Carnet de guerre d’Edouard Guillouard 84° RIT : juillet 1915-février 1916


Edouard Guillouard (carnet de guerre) Fernand Leglaive (appareil photo)

TRANCHÉES de GASTINEAU à BERLES

1er au 4 août 1915 Tranchées de Gastineau Cie T
5-8.8 Cantonnement Bailleulval
9-12.8 Soutien Gastineau
13-14.8 Cantonnement Bailleulval
15.8 dimanche Promenade à Avesnes (Avesnes-le-Comte à 14 km)
20-25.8 Tranchées Cie T2
26-31.8 Cantonnement Bailleulval
1-3.9 Tranchées Cie T2
4.9 samedi Départ de Mr Leglaive en permission
5.9 dimanche Créalet remplacé au commandement de la Cie
6.9 Tranchées Cie T2
7-12.9 Relève dans la matinée, cantonnement de Bailleulval, travaux le soir du 7 à la muraille de Chine, convoqué par Dussert-Vidolet, le 7 vu Henri Cassin partant pour sa 1ère permission [la muraille de Chine était le nom tout plein d’humour que le 84°RI avait donné à un petit muret derrière lequel ils pouvaient se cacher, et vous en avez la photo sur mon blog]
13.9 lundi Tranchée T2 où nous sommes remplacés le 14 par le 12e
15-16.9 Tranchée T1 où nous remplaçons le 4e
17.9 vendredi Cantonnement de Bailleulval, le 10 du 81e s’y trouve, ils partent pour Arras
18.9 samedi A 10 h alerte, nous montons remplacer la 12e Cie et nous restons en ligne jusqu’au 4 octobre
[photo ci-contre « été 1915, soutien de Gastineau » à gauche Edouard Guillouard]
24.9 vendredi Arrosage des tranchées, surtout la section de Dte
26.9 dimanche Mr Leglaive est blessé dans la matinée
27.9 lundi Créalet vient remplacer Mr Leglaive et manque de griller dans son abri
1er octobre 1915 jeudi Tranchées Cie T2, arrivée des casques [donc la photo ci-dessus est prise dans les premiers jours après l’arrivée des casques donc début novembre 1915]

5.10 mardi Soutien de Gastineau, le colonel remet des décorations, Ct Lemoine, Cavaliers
8-11.10 Tranchées Cie T4, remplaçons 11e Tirbiche, travaux de sape, inquiétude, obus 150, visite du colon (qui crie), attaque par le feu artillerie, heure H jour J
[photo ci-contre « été 1915 tranchée de Gastineau », l’homme assis semble graver une plaque, pour servir d’indication des diverses voies dans la tranchée]
12.10 mardi Bailleulmont, fête, reçu plusieurs colis, l’obus, bouquets
13.10 mercredi Départ pour Bavincourt (6 km O.), quoique mal installé c’est l’arrière, désinfection de l’ambulance
14.10 jeudi Visite d’Henri Cassin qui déjeune avec nous
15.10 vendredi Promenade à l’Arbret (4 km S.O.), brouillard
16.10 samedi Départ pour Basseux (touche Bailleulval, donc le front), installation à l’école, incident avec Créalet, la Carrière
17.10 dimanche grand-messe, dévotions
19.10 mardi emplacement d’alerte
20-23.10 Tranchées Cie T2
24-27.10 Cantonnement Bailleulval chez Dupéré
28.31.10 Soutien Gastineau. Le dimanche 31 messe pour la maison Gastineau par l’abbé Leboeuf
1-4.11.1915 Tranchée T2, remplacé par Mr Paumier dans nouvel abri
5-8.11 Bailleulval
[photo ci-contre « été 1915, soutien de Gastineau » Guillouard est assis au milieu]
9-12.11 Soutien de Gastineau
13-16.11 Tranchées T2, très mauvais temps, pluie, le jour de la relève difficultés pour sortir par les éboulements de tout côté
29-30.11 cote 147, les Rats, signaux avec lanterne pour artillerie, travaux du génie du 11e, Gravoil
1er décembre 1915 mercredi Fortin, Roussel
2-4 décembre 1915 Tranchées de Berles
5-7.12 Bailleulmont

que je n’identifie pas
que je n’identifie pas

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

que je n’identifie pas
que je n’identifie pas

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

« été 1915 Bailleulval » 6 officiers, et Edouard Guillouard est le 5ème à partir de la gauche

« été 1915 Bailleulval, 7 officiers du 84° RIT. Leglaive, le propriétaire de l’appareil photo est au milieu, et c’est probablement Guillouard qui a pris la photo, car je suppose que les officiers ne se faisaient pas photographier autrement qu’entre eux. Pour identifier les autres aidez-vous de la liste de tous les hommes qu’ils ont rencontré au front, selon la liste établie au jour le jour pendant la guerre par Edouard Guillouard.

8-13.12 Gastineau, relève par un mauvais temps, pluie, on trouve difficilement le chemin dans la boue arrivée aux tranchées, remplace Mr Pommier anéanti
14-16.12 Bailleulval, la bouteille d’Elixir à Mr Sacré
[photo ci-contre « été 1915 tranchée de Gastineau, poste d’écoute »]
17-19.12 Soutien à Bellocourt avec le capitaine de Chaneut à monocle
20-22.12 Tranchées de Berles, le colonel sous les obus
23.12 jeudi cantonnement à Bailleulmont
24.12 vendredi Préparatif de départ pour la permission, ce n’est qu’à 15 h que j’apprends mon départ pour le soir, visite à l’église de Bailleulmont, on prépare la messe de minuit, le docteur, le Ct Lochenau, partie de carte après diné, Sarrazin et Licot accompagnent jusqu’à L’Arbret, retard du train, départ à 4 h, à 8 h à Abbeville, visite de la ville, grand-messe en musique, les Indiens, départ à 15 h pour Paris, arrivée sous la pluie, diné à la gare d’Orsay
26.12.1915 Arrivée à Nantes à 4 h
1er janvier 1916 samedi Le premier janvier me trouve en famille à Nantes et dans les souhaits de nouvel an il n’y a pas d’arrière pensée, l’année qui commence sera l’année de la Paix, on entrevoit l’offensive ce printemps et même on fixe comme date extrême le 14 juillet. Aussi c’est avec confiance que le 2 janvier à midi je quitte ma famille pour retourner au front.
2 janvier 1916 dimanche Le départ toujours pénible, les parents, ma femme, mes enfants, mes frères viennent me conduire à la gare, c’est quand même avec tristesse que je quitte les êtres aimés pour repartir vers l’inconnu et le danger. A mon passage à Paris je retrouve l’ami Chaussé à m’attendre à la gare et qui m’emmène diner chez lui où je trouve le meilleur accueil près de sa femme, après un bon dîner, je quitte Paris en fête car c’est dimanche et dans un compartiment bondé je passe la nuit puis la matinée pour arriver à Doullens (au nord d’Amiens et à 167 km de Paris) à 9 h
3.1 lundi Pas de train pour L’Arbret, mais malgré les ennuis d’un long voyage en train de marchandise, je trouve une occasion avec le capitaine Denis du 83e T. et à 4h je suis avec les camarades, qui sont au comble de la joie occasionnée par le départ du colonel Dussert. Je vends à Créhalet l’imperméable horizon que j’avais acheté à Abbeville pour 20 F, il m’en avait coûté 55
4-7.1916 Le lendemain à 4 h départ pour les soutiens de la cote 147 par la pluie. Nous y passons les trois jours sans incidents notables et le 7 au matin nous prenons nos emplacements habituels à T2 de Berles
8-9.1 Séjour tranquille, on ne redoute plus la visite de Dusert-Vidalet, c’est un grand soulagement pour les officiers comme pour les hommes
10.1 lundi Nous descendons des tranchées, nous avons prémédité de recevoir les sous-officiers chez Blanpain où nous avons du matériel, nous faisons acheter chez Ripoche une dinde 22,50 F prix extraordinaire pour le moment.
11.1 mardi Nous les recevons le mardi soir, Joron en avait profité pour prendre une de ces bitures faisant époque, ses camarades ne nous l’avait pas amené. Dîner joyeux, le sergent major Cottereau nous chante la Sainte Bidgougat, Héron et Moreau se font également entendre
|es 3 photos ci-contre montrent le soutien de Gastineau été 1915, sorte d’abri]
13-15.1.1916 Nous prenons les soutiens de Gastineau qui sont en fort mauvais étét, nous y remplaçons Keler. Les trois jours se passent, ce sont des cavaliers qui sont en ligne, on a peine à reconnaître nos anciennes tranchées de 1ère ligne, tout est éboulé et mal entretenu, quelques veilleurs seulement, ce n’est plus notre occupation
16.1 dimanche Départ pour Berles, boyaux en mauvais état, construction d’un abri de chef de section, le colonel Monier Vinard vient nous rendre visite et nous surprend pendant une partie de bridge, bien aimable il ne reste que quelques instants. Pendant ces trois jours je fais finir mon abris
19.1 mercredi Nous retournons à Bailleulval où nous retrouvons la mère Leroy, Mme Loiret loge un général, les cavaliers sont les maîtres du village

photo Leglaive « été 1915 tranchée de Gastineau » Ces soldats gravent des pierres qui seront des paneaux d’indication dans les diverses tranchées

22.1 samedi Nous partons pour Bellocourt, le capitaine Hurel est chef de groupe des chasseurs, nous prenons nos repas en commun et faisons le bridge ensemble, il est très sympathique ainsi que les médecins. Nous profitons de notre séjour pour revoir Rivière Bretancourt, il y encore du commerce et des habitants, un enfant a été tué la veille mais d’autres courent les rues sans se soucier du danger, le côté de Bretancourt est inhabité, c’est dans ce coin où nous avons pris pour le première fois les tranchées, je loge toujours près des Boches, les abris sont en bien mauvais état
25.1 mardi Tranchées de Berles, on commence à parler de relève par les Anglais, nous avons plusieurs visites d’officiers, l’artillerie anglaise tire beaucoup. Nous avons des ripostes, mais les trois jours se passent bien
28.1 vendredi Nous descendons à Bailleulmont, je loge chez Havier, c’est la tranquilité au cantonnement, on parle beaucoup de la relève vers le 15
31.1 lundi Nous partons pour Berles, bien logé quoique peu à l’abri, nous faisons popote avec le commandant et nous jouons au bridge avec Goëceu-Porry le terrible et le bureau interprête de Nantes.
1.2.1916 mardi Nous allons faire des achats à la cantine anglaise, nous prenons plaisir à voir les anglais manœuvrer avec leur fusil mitrailleur, la musique s’exerce sous un hangar, nous visitons le pays et retrouvons la route suivie en septembre 1914 vers Ransart
2.2 mercredi J’assiste dans le patronage de Berles à une grand-messe, c’est le commandant qui joue de l’orgue et chante, les Anglais tirent beaucoup dans la soirée
3.2 jeudi Tranchée de Berles pour la dernière fois, mon abri est bien solide, le village de Berles que nous avons quitté le matin est bombardé à plusieurs reprises dans la soirée au moment ou la musique militaire anglaise donnait un concert, le bombardement recommence et tue 24 Anglais 6 Français et une cinquantaine de blessés français et anglais
4.2 vendredi L’adjudant Paul est blessé grièvement et les deux autres jours sont tranquilles, nous quittons avec espoir de ne plus revenir, mais nous n’osons pas y croire
[Edouard Guillouard a envoyé à son fils Robert, âge de 7 ans, cette magifique carte postale, en relief et jolies couleurs rappelant la présence anglaise amie, mais la carte est bien émise par l’armée Française]
6.2 dimanche Nous arrivons à Bailleulmont, j’assiste à la grand-messe et au salut, le curé de Berles fait un service comme les bruits de départ se confirment nous tenons à recevoir le deuxième groupe de sous-officiers à diner chez Blanpain, tout se passe bien. Fauceron nous chante la neige et on se quitte comptant bien que la guerre ne sera pas longue désormais, notre rôle est terminé
8.2 mardi On réduit le plus possible les bagages, j’expédie ma cantine (valise à chaune)
[avant de quitter les lieux ils prennent une dernière photo de la maison Gastineau, qui entre-temps n’a plus beaucoup de tuiles au toit]
9.2 mercredi Nous remontons aux soutiens de la cote 147 mais on s’attend à la relève, dès le matin visite d’officiers anglais, les permissions sont supprimées et on s’apprête au départ, la journée et la nuit passe
10.2 jeudi Nouvelle visite d’officiers, nous faisons des transports de tout le beau matériel de tranchée finies, periscope, beaucoup de gaspillage, les voitures manquent, enfin à 6 h du soir ils arrivent, mais la relève est longue, j’attends plus d’une heure à Berles, il est 9 h quand nous quittons Berles, en sortant du village nous trouvons couché sur la route le caporal Giraud ivre mort, nous faisons la route jusqu’à Bavincourt heureux de quitter ce coin que nous tenons depuis plus de quinze mois, pour nous nous partons vers l’inconnu vers le repos, on parle de divers cantonnements, puis Lisbourg. Arrivés à Bavincourt (6 km O. de Bailleulmont), la compagnie loge dans une grande barraque Adriant et les officiers sont logés dans le théatre sur la place, sur des paillasses, nous sommes une vingtaine Mr Leglaive, les officiers du 3e bataillon, Rousselot, Rivasseau, Cru, Poumier, Duneau, Léonardi, Créhalet a soif, je l’accompagne dans un bistro borgne dont je conserverais souvenir les bas fonds de Paris, dépravation, ivrognerie. Nous dormons peu, il fait froid dans l’abri et nous sommes matinal le lendemain

carte postale « LISBOURG passerelle sur la Lys » Cette rivière prend sa source dans le pays, c’est elle qui traverse la Belgique

11.2 vendredi Nous déjeunons chez Mme Gautmont très aimable de nous recevoir, car ce pays est peu sympathique. Nous partons en autos à 9 h par Avesnes-le-Comte, la grand’route de StPol, nous faisons une courte halte à StPol (StPol-sur-Ternoise) et à 3 h nous sommes à Lisbourg (55 km N.O. de Bailleulmont) . Nous nous installons dans le haut du village, le cantonnement est assez long à faire et ce n’est pas sans difficultés, le capitaine Tardieux s’étant entouré de Glorion pour la distribution des emplacements et ils ne sont pas les plus mal servis. Je loge dans une ferme chez de braves gens Bienaimé Victor, j’ai une grande chambre mais comme nous n’étions pas difficiles à ce moment, j’en suis très content
12.2 samedi Continuation de l’installation du cantonnement, les hommes ne sont pas très bien et on obtient difficilement de la paille. Le pays n’a pourtant pas été éprouvé par la guerre, c’est un petit village assez coquet, situé à la source de la Lys, Mr Leglaive demeure tout près de cette source
13.2 dimanche Nous goutons du repos à l’arrière, grand-messe aec les habitants du pays, la population est assez aimable, nous j’y sommes pas habitué, le 2e bataillon arrive dans l’après midi du dimanche avec le colonel le Drapeau et la 2e Cie qui était restée un jour de plus à Gastineau. Les cafés sont ouverts toute la journée et les poilus en profitent même les officiers, Créhalet s’illustre par de fameuses fredaines
14.2 lundi Mr Leglaive part en permission, le pourcentage est augmenté de 20 puis de 35 %, il ne reste que peu de monde à la Cie
15.2 mardi Le temps est mauvais, beaucoup de pluie
16.2 mercredi J’apprends la mort de tante Marie (Audineau, de Clisson), et envoi une lettre de condoléance à ma femme
17.2 jeudi Chaque jour on fait un peu d’exercice, mais c’est le repos complet, petite marche
20.2 dimanche Repos, à la grand-messe le capitaine Hervé parade près du colonel
21.2 lundi Matin feu chez le maire, Hucteau oublie de nous prévenir, mais ce n’est pas conséquent
22.2 mardi Le froid se fait de plus en plus fort, chaque on compte que le séjour sera d’un mois
23.2 mercredi Mr Leglaive rentre à 8 h 30 du soir, on l’attendait le matin avec Locart et Tardieux parti 24 heures après rentré avant
24.2 jeudi le froid et la neige continuent, on parle de Verdun mais on a pas l’impression de ce qui se passe
25.2 vendredi Le feu se déclare dans les dépendances de la ferme où j’habite, mais rien de grave. La pauvre femme est navrée, ils ne sont pas assurés, on croit que ce sont les brancardiers qui ont occasionné l’incendie
[photo ci-contre « été 1915 le lieutenant Sacré »]
27.2 dimanche Nous assistons à la grand-messe, l’après-midi nous faisons une promenade à Verchin (2,7 km de Lisbourg en remontant la Lys), on parle de plus en plus de Verdun et on commence à savoir notre infériorité dans cette bataille et notre recul, on craint pour la ville de Verdun. A notre retour nous apprenons le départ du régiment pour faire des travaux à N.D. de Lorette et Ablain. Mr Sacré nous apprend la mort de son père. Soirée triste, le départ est fixé au 1er mars
28-29.2 Préparatifs de départ, on regrette ce pays et on appréhende les travaux dans cette contrée de N.D. de Lorette (55 km S.E. de Lisbourg, près de Lens)
J 414 (1 an 1 mois 28 jours) : arrivée des casques
On craint pour Verdun,
le 25.2.1916 les Allemands s’emparent du fort de Douaumont

Télécharger l’original du carnet de guerre d’Edouard Guillouard

Je ne vous mets pas les vues directement car ce serait trop lourd pour visionner ma page, donc je mets seulement les liens, et cliquez pour télécharger : début août 1915  –  fin août 1915  –   septembre 1915   – octobre 1915  – fin octobre 1915  – novembre 1915  –   début décembre 1915  –   fin décembre 1915  – début janvier  1916  –  mi janvier  1916  –   20 janvier 1916  – fin janvier  1916  – début février  1916  – 10 février  1916  – 15 février  1916  –   20 février 1916  –   fin février  1916  –

Carnet de guerre d’Edouard Guillouard 84° RIT : octobre-décembre 1914


Vous êtes sur le carnet de guerre d’Edouard Guillouard et photos de Fernand Leglaive au 84° RIT et il y a beaucoup de pages dont table des matières Edouard Guillouard (carnet de guerre) Fernand Leglaive (appareil photo)

DAINVILLE – TRANCHÉES de la SOMME

1er octobre 1914 jeudi – Travaux sur les mêmes positions, cantonné à Beaucourt, Hamel, ravitaillement difficile
2.10 vendredi – le doit grand garde dans le ravin au nord de Beaucourt, mangé du poulet aux pois, tombés près de la route

3.10 samedi – même occupation de jour, le soir cantonné à Beaumont, reçu lettres
4.10 dimanche – Tranchées au nord de Beaucourt, mouvement de repli vers 15 h sur la gauche, retraite générale sur Beaumont-Hamel, Mailly-Maillet, retour sur Auchonvillers. Bivouac d’alerte, bombardement

5.10 lundi – Occupé coté 142 au sud d’Auchonvillers, ordre de tenir jusqu’à midi, pas d’attaque, départ le soir, cantonné à Bertrancourt, fortement occupé par diverses troupes et beaucoup de blessés

« décembre 1914, tranchées du chemin de fer de Dainville »

6.10 mardi – Occupé 2es positions près Colincamps, cantonné à Louvencourt, appris que Joseph (son frère) est blessé

7.10 mercredi – 2es positions près Beaussart, cantonné à Bus-lès-Artois. Lettre du père

8.10 jeudi – Retour en 2e position, grand halte, départ pour l’arrière après félicitations, mais nous marchons par Coigneux, Souastre, StAmand, Humbercamps, La Cauchie, La Herlière

9.10 vendredi – Départ de La Herlière (route d’Arras), bois de Beaumetz-lès-Loges. L’après-midi reconnaissance des emplacements, rivière, Brétencourt. A 20 h occupation des tranchées du 270e RIR, alerte, fusées éclairantes

10.10 samedi – Ravitaillement difficile, poulets

11.10 dimanche – de la Brouerie, à 22 h relève par le 82e RIT
12.10 lundi – Arrivée à Monchiet. Mauvais cantonnement. Vu Durouzier

« décembre 1914, tranchées du chemin de fer de Dainville »

13.10 mardi – Monchiet, soutien d’artillerie
14.10 mercredi – Départ pour le moulin de Berles aux bois, cantonné à Bailleulval à la mairie
15.10 jeudi – Bailleulval jusqu’au 21 au soir

16.10 vendredi – Travaux, grand garde dans les tranchées

17.10 samedi – Revue du général Damade

18.10 dimanche – Messe dans la petite église de Bailleulval
19.10 lundi – Arrivée de Perrin, le Ct de Heninie remplace Giguet
21.10 mercredi – le 81e vient nous remplacer, vu Cassin, Poudat, le soir cantonné à Monchiet
22.10 jeudi – Exercice autour de Monchiet, ravitaillement difficile, popote avec le Ct
23.10 vendredi – Départ à 13 h pour Arras, cantonnement d’alerte à Dainville
24.10 samedi – Dainville chez le boulanger, sur des paillasses
25.10 dimanche – Dévotions, travaux faute route d’Arras, ordre de départ pour les tranchées par Achicourt, Agny, Le moulin, le chemin creux. Nuit pénible, pluie

« décembre 1914 les cuisiniers de la 2ème compagnie »

26.10 lundi – Le Ct Rambois du 2e terrible pour le cuisinier

27.10 mardi – Popote dans l’écurie, pas de vin, du thé

28.10 mercredi – Attaque par le feu, tous les soirs

30.10 vendredi – Retour chaque jour des sections en ligne
31.10 samedi – Thomas Lamotte [cho..] les chevaux

1er novembre 1914 dimanche – Messe au château, tombes
2.11 lundi – Achat à bon marché à Agny (Douillard)
3.11 mardi – Les rives du Crinchon, les déjeuners sont meilleurs, bonne camaraderie. Perrin, Hervé, Berthelot
5.11 jeudi – Touché indemnité et solde, envoyé 1er mandat, inquiétude pour Joseph
7.11 samedi – Ravitaillement d’Arras, l’ordinaire, les usines [Edouard est issu d’une longue lignée de quincaillers venus de Normandie (La Sauvagère). Ses frères ont une usine à Nantes et lui même aime les visiter, car ce sont ses fournisseurs]

« décembre 1914, les cuisiniers de la 2ème compagnie »

8.11 dimanche – Attaqué par le feu, mené à Agny, arrivée trop tard

9.11 lundi – La barrique percée par une balle

[photo de 2 cuisiniers apportant la nourriture à pied par la voie ferrée, Dainville décembre 1914 – VOIR LES NOMBREUSES PHOTOS DE CUISINES et les commenter sur mon blog]

10.11 mardi – Occupations du grand ouvrage

11.11 mercredi – Le Chat maigre, arbres en boule

12.11 jeudi – Arrivée de Bichon, les hutes du Crinchon

13.11 vendredi – Le Ct de Guemenie vient s’installer au moulin
14.11 samedi – Les cuisinières du village d’Agny
15.11 dimanche – Pasquier légèrement blessé

Joseph Guillouard, mort pour la France

16.11 lundi – Un soldat de la 4e tué. Apprend la mort de Joseph [jeune frère d’Edouard, photo ci-contre. 
17.11 mardi – Le 270 remplace le 2e  Dainville
18.11 mercredi – Vu Croisy [voisin demeurant aussi rue St Jacques à Nantes ] dans le chemin creux
19.11 jeudi – Reçu postaux, la Varenne, ravitaillement
20.11 vendredi – à Arras, vermouth, liqueurs, champagne, gateaux
21.11 samedi – Relève dans la soirée par le 82e R.I.T.
22.11 dimanche – Départ par le froid du Crinchon, arrivée à 8 h à Simencourt, départ à 11 h du soir pour la cote 105. Reçu sac de couchage
24.11 mardi – Cote 105, repas au choix près Wailly avec la 4e Cie cap. Hervé, Berthelot
25.11 mercredi – J’apprends la naissance de Thérèse (son 3e enfant, qui ne connaîtra son père que 4 ans plus tard – Elle est ma maman)
26.11 jeudi – Constructions d’abri
27.11 vendredi – Cote 105 dans la petite tranchée couverte comme abri
28.11 samedi – Visite d’officiers d’E.M.
29.11 dimanche – Messe à Dainville avec Pasquier, travaux au ch. F.
30.11 lundi – Départ pour les tranchées du Crinchon

Joseph Guillouard, le jeune frère d’Edouard, était tout juste marié et la photo ci-dessus semble prise dans la famille de sa femme, à droite sur le banc les parents de Joseph. Cette photo semble montrer un mariage urgent avant le départ au front. Ma maman racontait peu de choses, mais tous les 1er novembre, lorsque nous faisions le tour des cimetières, devant la plaque mémoire du décès de Joseph Guillouard, elle nous disait que sa femme Jeanne Beautamy était décédée peu après de chagrain. Je n’ai jamais pu trouver ce mariage, mais cette vue montre l’écriture d’Edouard Guillouard donnant la légende de la photo ci-dessus.

1er décembre 1914 mardi – Tranchées du grand ouvrage et du Crinchon, chemin creux, une section en réserve, popote au moulin, pluie
4.12 vendredi – Tranchées éboulées, relève dans la soirée, installation à Dainville
5.12 samedi – Compagnie de garde, installation dans la grande ferme au nord de Dainville, séparation de popote avec la 4e

photo Leglaive – Pour agrandir cliquez et recliquez

ligne en haut (de gauche à droite) : MORIZOT – FAUCHERON – PIERRE – BRIDONNEAU – GORON -PAVAGEAU – RAMPILLON – MOREAU – LOUPY – PASQUIER
ligne du milieu : inconnu – BICHON – GUILLOUARD – LEGLAIVE – FAUCHERON – inconnu
ligne en bas : MARCHAIS – CHOYAUX – PINEAU

7.12 lundi – Exercice le dimanche et le lundi sur la route de Warlus
8.12 mardi – Ordre de départ pour travaux à l’arrière, départ à 8 h par Wagnonlieu, Duisans en vue des Boches, bombardement à la Hate près Louez, pas de course vers Etrun, arrivé à Acq, envoyé à Ecoivres
9.12 mercredi – Départ de Ecoivre pour Maroeuil, déjeuné à Maroeuil, travaux à partir de 11 h jusqu’à 22 h, cantonné à Maroeuil
10.12 jeudi – Reprise des travaux, départ de Maroeuil à 6 h, toute la journée dans les boyaux près la [Torgette]
11.12 vendredi – Départ de Maroueil à 5 h, travail jusqu’à 19 h, les travaux ne pouvant pas continuer la nuit
12.12 samedi – Reprise du travail à 3 h jusqu’à 8 h, repos à Maroeuil mais bombardement dans le village du Mont-St Eloy
13.12 dimanche – Travail de 4 h à 17 h, une heure seulement pour le repas
14.12 lundi – Repos le jour, départ le soir à 17 h pour Berthouval, travail RI058.jpgtoute la nuit dans un boyau avec 0,50 d’eau, rentré à 8 h
15.12 mardi – A Maroeuil, le soir à 17 h travail à la cote 84 devant la Maison Blanche
16.12 mercredi – Rentré à 6 h, départ pour Dainville à 11 h, les hommes fatigués, arrivé au cantonnement à 17 h, logé chez Ferron la Dlle pomme d’api trois dans la même chambre, popote chez Malvoisin
18.12 vendredi – Dainville, on entend le canon de Maroeuil et on croit à l’offensive (conf. samedi)
20.12 dimanche – Départ à 2 h pour tranchées, Crinchon, chemin creux, grand ouvrage avec les cavaliers du 3e Dragon, le grand ouvrage occupé par un peloton, le chemin creux par le 270
23.12 mercredi – Dans la soirée relève par nuit noire par 3e Bon
24.12 jeudi – Au chemin de fer, veille de Noël, réveillon à la maison du garde-barrière, messe sur la voie à minuit, chants de Noël, le Ct LeFer de la Motte

27.12.1914 dimanche – Dans la soirée, relève et départ pour Dainville
28.12 lundi – Dainville, même cantonnement Ferron et popote Malvoisin
29.12 mardi – Photos chez le Ct de Herminy
30.12 mercredi – Déjeuné avec le Ct du Gardier chef de popote
31.12 jeudi – Le départ pour les tranchées est remis au 1er au soir, aussi à 8 h grand repas chez le Ct qui fait popote chez le maire, chants, discours, les Nudreins, Stéphan, Goheau, on attend la nouvelle année qui doit nous donner la victoire et la paix, le retour au foyer fiers d’avoir bien fait son devoir, mais tous avec la conviction qu’en avril ou mai tout serait terminé
(voir les noms des officiers (pas mois de 17 pages du carnet de guerre d’Edouard Guillouard sont consacrées à la liste des noms)

ci-dessous sur mon blog et en discuter)

Télécharger l’original du carnet de guerre d’Edouard Guillouard

Je ne vous mets pas les vues directement car ce serait trop lourd pour visionner ma page, donc je mets seulement les liens, et cliquez pour télécharger : début octobre  1914mi octobre 1914 –  fin octobre 1914novembre 1914début décembre 1914  – mi décembre 1914fin décembre 1914

Noël 1914 : lettre d’Edouard Guillouard à son frère Louis

[Noël 1914 : Edouard Guillouard écrit à Adrien, l’un de ses 3 frères, qui possède avec Louis, autre frère, une usine à Nantes, et fabrique pour l’armée. La lettre témoigne d’une telle grandeur d’âme ! et pas une plainte ! L’usine est connue sous le nom ALG qui désigne Adrien et Louis Guillouard, et a été fondée par les 2 frères quelques années plus tôt]
Mon cher Adrien ma chère Gabrielle
Merci de votre postal que je reçois juste à temps pour joindre à ceux de mes camarades. Nous sommes gâtés, je n’avais jamais contenté autant de friandises.
Hier soir nous avons fait un vrai réveillon, et je n’ose pas vous en envoyer le menu. Si à la guerre il y a de fort mauvais moments, il faut bien se distraire un peu, malgré que nous ayons bien souvent lieu de nous faire du chagrin.
Hier il ne manquait rien pour se distraire car après le réveillon, nous avons assisté à une messe de minuit peu banale. Dans un ravin de chemin de fer à 12 m des boches, un abris de paille recouvre un autel, quelques branches de houx et 6 bougies dans de simples chandeliers. Un lieutenant d’artillerie, prêtre, dit la messe servie par deux soldats d’artillerie. Cette cérémonie est magnifique dans sa simplicité et son pittoresque. A un moment une forte voix chante un minuit chrétien dans cette obscurité, c’est émouvant et je conserverai longtemps le souvenir de cette nuit de Noël.
Que devenez-vous ? Louis m’écrit que vous êtes très peiné.
J’espère que Adrien obtiendra un nouveau sursis, et ne viendra pas voir les tranchées qui n’ont rien d’intéressant tant que les boches seront en France, mais qui m’ont encore appris la guerre. Je crois qu’Adrien, inventerait quelque chose de nouveau s’il y venait, mais, je me contente de faire des abris et installer des poëles, que nous n’allumons que la nuit pour ne pas être repérés.
J’en ai assez de cette vie de guerrier et nous ne voyons pas la fin venir, nous n’avons pas grande occupation, mais nous ne pouvons nous absenter de notre poste et malgré que nous n’ayons pas eu d’attaques heureusement, mais nous devons toujours être prêts à prendre les armes, et le plus dangereux et le moins agréable, c’est que jour et nuit nous avons toujours l’artillerie allemande qui, répondant à la notre, envoit des srapmells au petit bonheur. Gare à ceux qui les reçoivent et malgré qu’il y ai plus de trois mois qui nous en voyons éclater près de nous, on ne s’y habitue pas. C’est comme les balles, c’est toujours désagréable de les entendre siffler aux oreilles, surtout quant je suis aux tranchées de première ligne, dans ma compagnie. Nous n’avons pas eu trop de mal surtout depuis le 4 octobre, pas de mort pas de blessés sur les 250 hommes, espérons que la compagne se termine ainsi.
Je vous ai écrit voilà un mois une longue lettre, et je n’ai pas eu de réponse. Veuillez m’écrire longuement, vous me ferez plaisir. Et, si votre générosité vous le permet, vous pouvez m’adresser un autre postal. Je vais même vous en fixer le contenu (pour vous guider simplement). : un gâteau Lefèvre-Utile, quelques friandises, cigares et jambon ou un beau pâté de foie gras (pas autre chose).
Car je crois nos mauvais jours passés, et les camarades avec qui je me trouve aiment bien les bonnes choses. La plupart sont des messieurs de situation au dessus de la mienne, mais ce qui n’empêche pas que nous sommes tous très liés et de véritables amis, avec qui j’ai tout de même eu des jours de misère, que nous compensons quand nous le pouvons.
En attendant le jour heureux où il me sera possible de retourner vers Nantes, ce jour ne sera pas aussi agréable que nous l’aurions souhaité au départ, car notre pauvre Joseph manquera parmi nous. Sa disparition me fait beaucoup de peine. C’était un bien bon garçon, et un excellent frère, il n’a pas eu de veine, espérons qu’il ne m’en arrive pas autant, car il ne faut qu’un coup et comme je vous l’écris nous sommes souvent arrosés par la mitraille.
Je termine ma lettre en vous offrant mes bons vœux de bonne année, je vous encourage sérieusement à faire votre devoir de bons français en travaillant au repeuplement et je souhaite de bonnes affaires à Adrien, mais avec des sursis.
A vous lire, votre frère et beau-frère qui vous embrasse affectueusement, Edouard

J 144 (4 mois 22 jours) : 1er Noël dans les tranchées

La lettre ci-dessus est un témoignage de la grandeur d’âme, surtout quand on songe qu’Edouard écrit à ses frères non mobilisés,

 

Le quartier Saint Jacques (Nantes) au front pendant la Grande Guerre 14-18

Je vous ai déjà mis beaucoup de documents sur la Grande Guerre 14-18 à travers le carnet de guerre de mon grand-père Edouard Guillouard.

Il demeurait quartier Saint Jacques à Nantes, avant de partir au front. Et manifestement il a pu échanger quelques lettres avec ses amis du quartier Saint Jacques, puisque l’un de ses descendants possédait la lettre qui suit, datée du 9 mai 1915 et signée « Gaston ».

Ce Gaston tutoie mon grand-père, donc il connaît assez bien mon grand-père et je suppose qu’il s’agit de Gaston Roy, mais les Roy possédaient tous plusieurs prénoms et il est difficile d’identifier lequel a écrit la lettre, sans doute celui qui est inhumé au cimetière Misericorde (Nantes) le 25 novembre 1937 âgé de 59 ans, donc contemporain de mon grand-père et probablement tous deux ont été élèves dans leur jeunesse de l’école chrétienne de la rue St Jacques pour garçon seulement (à l’époque, plus maintenant).

Gaston (que je suppose Gaston Roy) donne des nouvelles de plusieurs autres camarades du quartier Saint Jacques, entre autres Emile Marry le coiffeur, né à Vallet le 4 février 1879, et aussi contemporain de Gaston.  Tous les autres noms qu’il cite me sont plus ou moins connus, mais je n’ai pas plus de précisions, et j’offre volontiers ce document au Quartier Saint Jacques, dans l’espoir qu’ils pourront identifier tous ces militaires, et me faire signe.
Quand il parle de « la pipe », il s’agit d’Edouard Halbert, mon grand-père paternel. Mais il en cite plein d’autres…

Je vous mets d’abord ma frappe, suivie des 3 vues !

Moridon, le 9 mai 1915
Cher Edouard
J’ai ta bonne lettre du 14 avril, excuses moi si je n’ai pu te répondre plus vite. Beaucoup de lettres à écrire, lettres commerciales ainsi que celles à ma famille, beaux-frères etc… puis ai fait un entrainement très dur et fatiguant avec ces chaleurs estivales.
On parle fortement de nous expédier dans les environs de Terns ? afin d’y faire nos tris de guerre finis point de direction le front. Mon régiment est en ce moment du côté d’Ypres et donne beaucoup aussi le dépôt se vide de plus en plus.
Je viens d’écrire à l’ami Gobin qui est à Locmaria près Auray. Il se plaint que le pays est monotone mais je suis certain que tu voudrais à sa place. Il est sergent major. La pipe est à Savenay et il gueule comme un putois, il n’a plus le goût militaire, il est comme mort mais il faut se résigner et penser à nos héros cachés et inconnus qui souffrent sans plainte. Emile Marry a été exaucé, il est mieux et va retourner au dépôt. Henri Halbert est dans les environs du camp de Chalons. Paul Halbert est toujours à Lorient et il obtient surplus de permission. Etienne Chauvet est au camp de Coëtquidan et il est téléphoniste et va partir sous peu pour le front ainsi que Blanchard Lemoine son camarade de combat. Mes beaux frères : Marcel est toujours dans les tranchées avec le 65ème du côté de Mailly Mallet ; Henri est du côté de Verdun ainsi que l’ami Louis Martin ex-caissier chez Lefèvre-Utile. Pierre Chauvet est dans les tranchées ainsi qu’André qui n’a pas encore eu le baptême du feu mais l’attend. Ma petite famille est bien et je l’ai vue encore la semaine dernière. Mon frère a dû te dire que nous avons perdu notre cousin de la champignonnière qui nous avait vendu notre représentation et qui la dirigeait depuis mon départ. Il est mort subitement d’une hémorragie centrale âgé de 53 ans c’est terrible. J’ai dû aller réorganiser l’affaire avec ma belle-sœur, mon frère et 3 employés. J’espère que la clientèle sera conservée. C’est tout ce que nous demandons pour cette terrible année.
De temps en temps nous aussi faisons des petits gueuletons, c’est la seule distraction à Issoudun et quand on a bon appétit c’est une bonne distraction.
Il passe des trains en quantité ici, c’est une ligne directe de Paris et il y passe des troupes beaucoup ;
Si tu vois mon frère tu lui serreras la main pour moi ainsi qu’aux amis Poudat Auguste etc…
Je te remercie de ta carte photo et je t’envoie ma binette ainsi que celle de quelques poilus. Mon ami Haudreau de Nantes, pâtissier rue de l’échelle, est surmonté d’une croix sur la photo, les autres ne t’intéressent pas. Tu vois qu’il faut être belle femme pour être mignon dans cette tenue.
A bientôt et cordiale poignée de mains
Gaston

L’engrais naturel avait autrefois tellement de valeur qu’on le faisait évaluer : bail

J’ai connu, dans Nantes Sud Loire, juste après la seconde guerre mondiale, la fin des chevaux, et je voyais le ramassage du crotin, et ce, avec beaucoup d’intérêts et précautions. J’étais alors loin de m’imaginer sa valeur. Et s’il faut en croire notre époque qui évolue un peu, on y revient ! C’est naturel !

J’ai déjà retranscrit plusieurs centaires de baux à ferme, mais toujours on y trouvait la clause des engrais laissés sur place, donc on ne les estimait pas, car ils faisaient partie de ce que l’exploitant trouvait en prenant le bail et devait laisser à la fin de son bail. Or, ici, il n’y a pas d’engrais, aussi cette close finale prévoit bien que si il y a des engrais laissés sur place à la fin du bail, ils seront évalués par 2 laboureurs s’y connaissant, et seront payés.

Voici l’acte passé à La Sauvagère (61) en Normandie :

« Le 5 avril 1723[1] a comparu Barbe Guillouard veuve de Nicolas Serais fils Guillaume, de la paroisse de La Sauvagère, laquelle a ce jourd’huy baillé à ferme prix et loyer d’argent pour le temps et terme de 5 années entières et parfaites et accomplis commençant le 1er avril dernier et finiront à pareil jour et terme à Jacques Guibert son gendre fils de feu Charles de la même paroisse, présent et acceptant, c’est à savoir tout ce qui à ladie bailleresse lui peut compéter et appartenir au lieu et village du la Serrière susdite paroisse de La Sauvagère pour par ledit preneur en jouir et disposer pendant ledit temps tout ainsi comme auroit fait ou pu faire ladite bailleresse, pour en payer par chacun an à ladite bailleresse 22 livres 10 sols tournois, payable par termes, savoir la st Michel et Pasques de chaque année, le 1er terme commençant à la St Michel prochaine … et a reconnu ledit Guibé que ladite bailleresse lui a baillé pour son service une vieille couche, un mauvais marchepied de peu de valeur, qu’il les lui rendra à la fin du présent bail, et comme n’ayant ledit Guibé trouvé auxun engrais sur ledit lieu, en y entrant il ne sera aucunement obligé d’en laisser en sortant et s’il en reste ils lui seront évalués par 2 laboureurs que les parties prendront pour cet effet pour en faire leur rapport, et est accordé entre les parties que au regard des fruits qui croisteront aux arbres fruitiers dudit lieu, ladite bailleresse en aura la moitié pour l’année présente et est entendu en ouvre ce que dessus que ledit preneur pourra enlever à la fin du présent bail tous et chacuns ses meubles tant morts que vifs qu’il auroit en la maison … »

[1] AD61-4E176/31/214

Et vous pouvez aussi aller voir les GUILLOUARD si cela vous intéresse, car ils sont issus de La Sauvagère (61)