Les collecteurs des tailles de la paroisse de Challain, 1630

Voici encore un Pouriatz, prénommé Maurice. Il est collecteur des tailles de la paroisse de Challain en 1630, avec 7 autres. Ici, il n’est pas question de l’impôt, mais d’une dette des paroissiens de Challain, pour laquelle il fallait lever la somme sur tous les paroissiens, et c’est là que les collecteurs ont dû oeuvrer, en plus de leur collecte d’impôt.
Il ne sait pas signer : j’avais autrefois expliqué sur mon site qu’un collecteur d’impôt pouvait être illetré. Il lui suffisait de savoir compter, ce qui est différent, et il y avait beaucoup plus de gens sachant compter que sachant lire. Mais surtout il devait avoir suffisamment d’ascendant moral pour que ces concitoyens lui fasse confiance, non seulement pour la récolte des fonds, mais surtout pour l’esgail ou département de la somme sur chacun.

    L’esgail est le terme ancien de département, qui figure encore souvent au 16e et début 17e siècle, pour égailler c’est à dire répartir les sommes à prélever sur chacun, c’est ce que nous appelons la répartition.

En effet, la taille était prélevée par paroisse, et chaque année la somme variait, venant d’en haut, jusqu’à la paroisse. Là, les collecteurs, élus chaque année, avaient d’abord pour mission de faire ce fameux esgail ou département. Tâche oh combien délicate !!! Je ne sais pas si vous imaginiez définissant en 2008 par chaque membre de votre commune, la répartition du montant de l’IRPP !!!

    En 2008, selon l’Agence Nationale de Lutte contre l’Illetrisme ANLCI, l’illetrisme en France concerne plus de 3 millions de Français ! J’ai vu des émissions terrifiantes sur ce problème : même pas voir le nom d’une rue ! Et je reste persuadée qu’autrefois les illetrés n’avaient pas à vivre de telles galères !

Revenons à nos collecteurs. Donc, ils devaient d’abord se réunir chez un notaire du coin ou greffier ou notaire greffier, qui rédigeait le document. On partait sans doute du document de l’année précédente, puis on passait en revue tous les villages, feu par feu : untel est décédé, reste sa veuve, untel est un peu plus aisé, etc… et on aboutissait généralement à une première mouture, en forme de brouillon, et souvent, dans les actes notariés où j’ai pu trouver de telles listes, elles ressemblaient fort à un brouillon avec ratures, car bien sûr, lorsque le greffier avait fait le premier total, il y avait le plus souvent besoin de rajustements.
Bref, je trouve que cela n’était pas rien moralement ! En tous cas cela coûtait peu à la collectivité !!!

    En 2008, Eric Woerth, a dépensé des sommes astronomiques pour Copernic, le nouveau système d’information fiscal, qui est un ensemble de logiciels spécifiques visant à traiter les recettes de l’Etat et possédant quelques fonctions connexes nécessaires au fonctionnement administratif.

L’acte qui suit est extrait des Archives Départementales du Maine-et-Loire, série 5E6 – Voici la retranscription de l’acte : Le 27 novembre 1630 avant midy, par devant nous Louys Coueffe notaire royal Angers furent présents personnellement establis et duement soubzmis Me Jacques Demariant Sr de Bellanger advocat au siège présidial de ceste ville y demeurant paroisse St Michel du Tertre créancier de René Desmas, et Me Jehan Cocu Sr de la Chaussée aussy advocat audit siège demeurant en ceste ville paroisse St Maurille ayant les droictz de Me René Pinczon son beau-frère quiles avoit dudit Desmas,

lesquels ont receu contant en notre présence de Maurice Pouriatz, André Manceau, Mathurin Guerin, René Menard, Jullien Cottier, René Blouin, François Ballu et Macé Guillier collecteurs des tailles de la paroisse de Challain en l’année présente scavoir audit Demariant 64 livres qui luy estoit deue par ledit Desmas par obligation passée par Chauveau notaire de ceste cour le 20 mars 1625, et dont iceluy Demariant debvoit estre payé par préférence aux Pinczons ainsi qu’il est porté par la commission à luy faire par Hubé notaire de Challain le 25 août 1627, et rétrocession audit Coco sept vingt dix neuf (159) livres lesdites 2 sommes faisant ensemble 223 livres qui estoient dues audit Desmas par les paroissiens dudit Challain et qui a esté sur eux esgaillé par lesdits collecteurs en ladite année présente pour la payer et deslivrer ès mains dudit Cocu en conséquence du jugement par luy obtenu de Messieurs les président, lieutenant et esleu en l’élection de ceste ville pour les causes contenues,

    Cet acte vous paraît alambiqué. En fait voici ce qu’il en est : les paroissiens de Challain ont eu auparavant à faire faire des travaux, tels que réfection d’un clocher etc… Bref, ils ont alors dû emprunter de l’argent. Entre-temps leur prêteur est décédé, et le remboursement s’est un peu compliqué, mais cette fois, les collecteurs ont réparti la somme à payer et due, et viennent payer.

desquelles sommes lesdits Demariant et Cocu se contentent et en quitent lesdits paroissiens et lesdits collecteurs qui ont fait ledit paiement et pour leur regard fors que ledit Pouriatz a payé et advancé pour ledit Guillier sauf à s’en faire rembourser
et au regard des intérestz adjugés audit Cocu et conséquence dudit jugement qu’il a obtenu contre lesdits conseillers, il les donne et remet volontairement auxdits paroissiens sans préjudice des sallaires et vacations de Drouault sergent royal sy aucuns sont deubz, etc…
fait à notre tablier présent Me Loys Collet et Jehan Myette,
je constate que les collecteurs ne signe pas

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Les officiers du grenier à sel d’Ingrandes nomment un procureur pour récuser les poursuites criminelles contre eux, Angers, 1614

Le grenier à sel d’Ingrandes, situé sur la Loire, lieu de passage du sel, fait l’objet du chapitre III de l’ouvrage de Françoise de Person, Bateliers contrebandiers du sel, 1999, Ed. Ouest-France (à lire absoluement). L’auteur raconte toutes les partiques des faux sauniers y passant, et agrémente son propos de multiples faits divers, croqués sur le vif.

La lecture de ces multiples faits divers, bien salés, laisse entrevoir que côté officiers, le travail était assez délicat et vaste. Ici, nous les découvrons poursuivis par leur bailleur à ferme au niveau national, et contraints d’envoyer un procureur plaider leur cause pour réfuter une poursuite criminelle arguant relever du civil. La demande sera fait au roi lui-même et à son privé conseil. L’acte ne précise pas la nature des poursuites, mais le reste de cette affaire est surement aux Archives Nationales… du moins je n’en doute pas une seconde.

Ingrandes, collection personnelle, reproduction interdite
Ingrandes, collection personnelle, reproduction interdite

L’acte qui suit est extrait des Archives Départementales du Maine-et-Loire, série 5E36 – Voici la retranscription de l’acte : Le 5 avril 1614 avant midy, par devant nous Jehan Chevrollier notaire royal à Angers furent présents maistres Pierre Poyrier procureur du roy au mesurage à sel d’Ingrandes et Louys Oger recepveur audit mesurage demeurants audit Ingrandes, lesquels duement establiz et soubzmis soubz ladite court ont fait nommé créé et constitué et par ces présentent font nomment et constituent (blanc) advocat au conseil privé du roy, leur procureur général et spécial à puissance de substituer et estre domicilié suivant l’ordonnance royale et par espécial ont lesdits constituants donné et donnent pouvoir à leurdit procureur de présenter requeste au roy et à messeigneurs de son conseil avec maistres Pierre Gayardon et Jacques Lefebvre gardes et contrôleurs audit mesurage et passage dudit Ingrandes et aultres des officiers des gabelles de France qui se voudront à eux joindre contre damoiselle Marie Lemerat veufve de défunt Nicolas Largentier vivant adjudicataire général des greniers à sel de France et le sieur baron de Chapellaine son fils tendant affin de faire debouter lesdits Demeral et Largentier de l’instance criminelle par eulx intentée à l’encontre desdits constituants par nosseigneurs de la cour des aydes et monsieur Loirtheleur contrôleur et commissaire député par ladite cour pour l’instruction de ladite instance, lesdits Lemerat et Largentier n’éstaient pas recepvables à poursuivre criminellement les officiers desdites gabelles après son bail expiré et en evenement où ils seroient recepvables que ils ne pouront agir que civilement et non criminellement et demander la cause desdites parties estre évoquée en son privé conseil et deffences estre faite à sadite court des aydes audit sieur Berthelleau d’en cognoistre et en tout événement lesdites parties estre renvoyées pour procéder en telle chambre des enquestes qu’il plaira au roy ordonner
fait et passé audit Angers en notre tabler ès présence de vénérable et discret Me François Boyvin prêtre chanoine en l’église missire Jehan Baptiste de ceste ville et Michel Boulleau clerc demeurant à Angers tesmoins

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