Marguerite Defay, séparée de biens, vend un pré, Champigné 1546

Le même jour que l’acte paru ici hier, mais cette fois sans condition de grâce, donc en vente définitive, Marguerite Defay vend un pré à Champigné à Foussier et Blanchard, qui ont sans doute un lien très fort avec Champigné et les environs, voire même un lien de parenté plus ou moins éloigné avec Marguerite Defay.

Si vous relisez attentivement les deux actes, celui d’hier et celui-ci, vous observerez une curieuse manière de citer Marguerite Defay. En effet, dans un acte où l’homme vend un bien, ce qui est le cas le plus courant, il est repris au fil de l’acte soit sous la dénomination « le vendeur » soit « son nom de famille, sans le prénom », mais ici, le nom de famille n’est pas repris, mais seulement le prénom, et elle est donc dénomée « Marguerite » ce qui est l’inverse de ce qui se disait pour les hommes.
Je rapproche ceci des baptêmes de ce début du 16ème siècle, et même plus tard, où le prêtre mentionne le prénom et le nom du père suivi du seul prénom de la mère (ou rien d’ailleurs, car bien souvent elle est carrément omise).
Je comprends que les femmes étaient plus connues sous leur prénom suivi de femme d’UNTEL, que sous leur nom de jeune fille. Qu’en pensez-vous ,

J’ai trouvé tous les actes qui sont sur ce blog, grâce à mes longues recherches. Cet acte aux Archives Départementales du Maine-et-Loire, série 5E2– Cette trouvaille ainsi que sa retranscription constituent un apport intellectuel au titre de la loi, s’agissant de textes anciens. Par ailleurs ce blog constitue une publication. Seule la copie personnelle est autorisée. La copie ou discussion ailleurs sur Internet constituent un vol de propriété intellectuelle. Voici la retranscription de l’acte :

Le 22 avril 1545 (calendrier Julien, soit avant Pâques qui était le 25 avril 1546, donc 22 avril 1546 n.s.) en la cour du roy notre sire à Angers endroit par devant nous Marc Toublanc notaire royal personnellement establye Marguerite Defaye femme de Mathurin Saulaye demeurante en la paroisse de Champigné autorizée par justice et comme ayant séparation de biens jugée entre elle et ledit Mathurin Saulaye sondit mary ainsy qu’il nous est apparu par les lettres de ladite séparation dabtées du 14 mars dernier duement publiées vériffiées et proclamées en ceste ville d’Angers par Jehan Delaporte sergent royal
soubzmectant ladite Marguerite elle ses hoirs etc confesse etc avoir aujourd’huy vendu quité cédé délaissé et transporté et encores etc vend quite cèdde et transporte à honnestes personnes maistre Jehan Foussier licencié ès loix et Jehan Blanchard demeurant en ceste ville d’Angers au nom et comme tuteurs et curateurs ordonnés par justice à chacun de Jacques et Gabriel les Foussiers myneurs d’ans à ce présents et acceptants et lesquels ont achapté audit nom
scavoir est une hommée de pré ou environ sise et située ès piecze de la Guymbertière paroisse dudit Champigné joignant et aboutant les terres et piecze de la Hamonière et tout ainsi que ledit pré se poursuit et comporte et que Jehan Hamelin mestayer de la Coudasnière l’a tenu possédé et exploité par cy davant
tenu du fief et seigneurie de la Chouseaunière ? avecques tout ledit lieu de la Coudasnière à la somme de 5 sols payables par chacun an au seigneur de Princé au jour et feste et terme de l’Angevine
transportant etc et est faite ceste présente vendition cession et transport pour le prix et somme de 50 livres tournois laquelle somme aujourd’huy a esté payée baillée comptée et nombrée manuellement comptant en notre présence et à vue de nous par ledit Blanchard seulement à la dite Marguerite venderesse laquelle somme elle a eue prinse et receue tant en or que monnaye et dont elle s’est tenu à contante et bien payée et en a quité et quite par ces présentes lesdits Blanchard et Foussier achapteurs esdits noms leurs hoirs et ayant cause
à laquelle vendition cession et transport et tout ce que dessus est dit tenir etc et lesdites choses ainsi vendues et transportées comme dit est garantir etc dommages amandes oblige ladite Marguerite venderesse elle ses hoirs etc renonczant etc et par especial au bénéfice et au droit vélléyen et à l’authentique si qua mulier etc foy jugement condemnation etc
fait et passé en ceste ville d’Angers en la maison dudit Foussier en présence de honneste personne Pierre Defaye marchand ciergier et maistre René Girard du bourg de Joué tous demeurants en ceste ville tesmoins à ce requis

Cette vue est la propriété des Archives Départementales du Maine-et-Loire. Cliquez pour agrandir.

Odile Halbert – Reproduction interdite sur autre endroit d’Internet Merci d’en discuter sur ce blog. Tout commentaire ou copie >partielle de cet article sur autre blog ou forum ou site va à l’encontre du droit d’auteur.

2 réponses sur “Marguerite Defay, séparée de biens, vend un pré, Champigné 1546

  1. En effet, c’est très étonnant cette différence entre hommes et femmes, je ne l’avais jamais remarquée à ce point.
    Je trouve tout de même que les femmes apparaissent de plus en plus mentionnées (dans le haut Anjou s’entend) par leur nom de jeune fille au fur et à mesure que l’on avance dans le XVIIe et le XVIIIe siècle. Et ce n’est qu’au début du XXe, par exemple, qu’elles apparaissent sous leur nom de femme mariée dans les recensements de la Mayenne.

      Note d’Odile : Je prépare actuellement pour ce blog des retranscriptions des années 1520 chez Huot notaire. Or, ce notaire ne donne les femmes que par leur prénom dans une vente de biens immeubles, lorsqu’elles sont avec leur mari pour la vente. Je retrouve la manière dont les prêtres rédigeaient les baptêmes, avec seulement le prénom de la mère, voire pas de prénom du tout et seulement « UNTEL et sa femme »
  2. Il y a une bien jolie anecdote rapportée par M. Gérard-Gailly,dans son aimable et curieux opuscule intitulé « Les Sept couches de Madame de Grignan »,anecdote qui vient témoigner à quel point les garçons-que ce fût au XVIIe ou au XVIIIe siècle-étaient toujours plus désirés que les filles:
    « Le 15 novembre (1669) se promenant avec sa mère dans les jardins de l’Arsenal,la comtesse (de Grignan) fut prise de quelques douleurs.On crut à une simple »colique de fille »,on rentra sans trop de souci,et impromptu la comtesse accoucha.Le désarroi fut extrême.Il n’y avait rien de prêt.Sage-femme et médecin,mandés en hâte,arrivèrent dans les cris du dénouement.Hélène,la femme de chambre,annonça:-C’est un garçon !Délirante,Madame de Sévigné le répéta au coadjuteur de l’archevêque d’Arles,autre frère de M. de Grignan,qui se trouvait là pour la prochaine cérémonie du baptême.Puis l’on s’empressa autour de la sage-femme,et du petit docteur Péquet,et de la maman,et du petit garçon.Et quand on eut « regardé d’un peu près »,ce petit garçon tant souhaité,on trouva qu’il n’était qu’une fille ! »
    « Je vous assure,écrivit Madame de Sévigné à son gendre,que cela rabaisse le caquet ! »
    (La Vie de Famille au dix-huitième siècle.Edmond Pilon .)

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