Prêt direct, sans passer par l’obligation, 1624

Le prêt direct est beaucoup plus rare que le prêt par obligation c’est à dire par rente perpétuelle annuelle.
En voici un en 1624 :

    il est écrit devant notaire,
    un terme est fixé pour le remboursement, ici un an
    mais curieusement pas d’intérêt mentionné

Je descends des Pillegault, pour lesquels j’ai déjà fait un énorme travail ! Pour moi, cet acte, qui serait anondin pour beaucoup de chercheurs, est important car il atteste des liens entre tous les participants, car pour faire un tel prêt il faut se faire confiance, enfin c’est ce que me crie en octobre 2008 toutes les minutes la radio BFM, à savoir que la crise est un manque de confiance entre banques… Donc autrefois, face à un prêt on est certain de la relation très forte de confiance, et donc de l’existence de liens solides.

Ah là là, heureusement que la confiance a existé autrefois !

L’acte qui suit est extrait des Archives Départementales du Maine-et-Loire, série 5E6 classé chez Louis Coueffe, et je précise ce point, car le notaire devant lequel l’acte est passé est notaire royal à Gené en 1624, et bien entendu aucun fonds de ce notaire n’est disponible ou déposé aux Archives.

Voici la retranscription de l’acte : Le 5 juin 1624 avant midy, par devant nous Jean Ternière (classé étude Coueffe) notaire du roy notre sire en la sénéchaussée d’Anjou demeurant à Gené furent présents et personnellement establis
honorables personnes François Pillegault marchand sieur de la Garelière et Mathurine Ernix son espouse demeurant en la paroisse de Saint-Aubin-du-Pavoil, ladite Ernix authorisée dudit Pillegault son mari quand à l’effet des présentes,
lesquels deuement soubzmis soubz ladite court ont confessé debvoir et par ces présenes promettent rendre payer et bailler dedans d’huy en ung an prochainement venant à honneste fille Guillemine Briant, à ce présente et acceptante, demeurante au bourg de la Jaillette,
la somme de 1 000 livres tz, quelle somme ladite Briand a présentée manuellement contant en notre présence auxdits Pillegault et Ernix qui ont eu et receu ladite somme de 1 000 livres de ladite Briand en espèces de quart d’écu, testons, francs et demi francs et autre bonne monnoye du poids et prix de l’édit du roy, ayant cours, (il circulait autrefois beaucoup de types de pièces, et on voit ici quelques spécimens, qui font toujours mon admiration, car le notaire devait calculer avec pièces à la valeur non arrondie, et variable) :

teston : ancienne monnaie d’argent qui, sous François 1er valait 10 sous et quelques deniers, et dont l’usage a fini sous Louis XIII lorsque leur valeur était montée par degrés à 19 sous et demi. (Lachiver, Dict. du Monde Rural)

Revenons à l’acte : et dont ils se sont contentés et en ont quitté ladite Briand, laquelle Briand a déclaré ladite somme estre en partie provenant de la rescousse sur elle faite de la constitution de rentes à elle deues par défunt Ma Jean Fayau de Segré, par acte passé devant Me René Suhard de Segré, à laquelle somme de 1 000 livres payée dedans ledit terme et pour les causes cy-dessus obligent lesdits Pillegault et Ernix sa femme eulx et chacun d’eux seul et pour le tout sans division de personnes ne de biens leurs hoirs et ayant cause, renonçant et renoncent aux droits de bénéfice de division et ordre, de priorité et postériorité, foy, jugement et condemnation,
fait et passé en la ville de Segré dans la chambre desdits establis ès présence de honorable homme Me Louys Regnard marchand demeurant à Sainte Gemmes près Segré, discrete personne Me Nicolas Cornée prêtre curé de Nyoiseau et y demeurant, et honnorable homme Abraham Ernix marchand demeurant en la paroisse de St Aubin du Pavoil

Odile Halbert – Reproduction interdite sur autre endroit d’Internet Merci d’en discuter sur ce blog et non aller en discuter dans mon dos sur un forum ou autre blog.

7 réponses sur “Prêt direct, sans passer par l’obligation, 1624

  1. Pourquoi ne trouve-t-on pas les archives d’un notaire royal aux AD ? Sont-elles conservées aux archives nationales ?

    Note d’Odile : On trouve des notaires royaux aux Archives Départementales, la preuve, je vous en mets tout plein.
    Mais on ne le trouves pas tous. Il faut que les fonds aient été conservés, puis déposés.
    Cela suppose déjà que tous les notaires ayant eu le fonds au cours des siècles dans le grenier de leurs études, aient pu le sauvegarder ! à l’abri de l’humidité, des souris, ou du feu.
    Cela suppose que lorsqu’un notaire, au fil de ces mêmes siècles, vendait son étude, ou bien déménageait, les archives suivaient bien…
    On comprend donc qu’i y a eu des pertes irréparrables
    Mais je pense que nous avons donc bien de la chance que certains fonds nous soient parvenus, ayant traversé les siècles avec autant de bonne volonté.
    Je précise ceci parce que nous, nous fabriquons actuellement l’éphémère : que laisserons nous 5 siècles après nous ? Et sur ce point nous ne nous posons pas trop de questions ! Moi qui fut chimiste dans une précédente vie, je suis consternée. Vous n’avez probablement idée de mon émotion devant les actes notariés pré-révolutionnaires, car le papier était alors de chiffon et se conservait. Ensuite, on a inventé le papier acide, qui a la gentille manie de se décomposer rapidement en poussière. Moins cher, il a permi de diffuser à tous les livres et le savoir, au détriment de la conservation. Et nos impôts pour une numérisation totale phénoménale, y avez vous songé ?

    Par contre les fonds sont au département concerné, mis à part quelques rares exceptions, souvent pour des petites paroisses limitrophes. Parfois, lorsqu’il y a ces petites exceptions, les Directeurs d’Archives Départementales échangent avec leur voisin pour leur restituer leur département.

    Enfin, tout n’est pas encore déposé par les notaires, car ce n’était pas une obligation, et je suis personnellement dans un cas précis. Le notaire contacté conserve ses caisses dans son grenier, et son grenier fermé. J’ai donc écrit un immense CD à l’intention des mes petits-neveux ou arrière-petits-neveux, (pour le cas où dans 50 ans ou 100 ans l’un d’eux se passionne) en racontant avec précision ce que j’ai fait, et ce qu’ils pourront compléter si ils ont un jour accès à ce notaire lorsqu’il aura déposé, lui ou ses successeurs. A la grâce de Dieu !
    Les Archives ne peuvent pas tout ingurgiter d’un coup, il leur faut aussi des km linéaires et du personnel pour le tri, laborieux.

  2. Je poursuis la réponse à Périgord ci-dessus.
    Le notaire royal qui demeurait à Gené en 1624, en vertu de l’acte que je vous ai retrouvé ci-dessus dans une étude d’Angers, déposée, avait la particularité de résider en campagne.
    Gené est un petit bourg, à l’écart des voies de communication. Les clients de Ternière, notaire royal résidant à Gené en 1624, devaient se situer dans les paroisses circonvoisines.

    Dans le cas des notaires royaux de campagne, bien souvent l’étude n’a pas eu de successeur qui rachète l’étude et ses archives. Dieu sait ce que les héritiers ont fait des archives !

    Même lorsqu’un fonds est déposé, parfois les archives des notaires de campagne (excusez le terme gens de Gené et d’ailleurs, et surtout prenez le affectueusement de ma part) ont disparu avant 1700 voire 1720. C’est le cas à Pouancé, Segré etc… On faisait le ménage dans les greniers…

    En Loire-Atlantique, c’est une catastrophe, et le Maine-et-Loire est bien plus riche…

    Pour certains départements, au fil de l’histoire de leurs archives départementales, certaines décisions de détruire ou de conserver ont été prises, car on ne pouvait tout garder. Sait-on ainsi pourquoi le Maine et Loire, si riche par ailleurs en notaires, n’a pas de recensements anciens ! Ils n’ont pas été jugé digne de conservation autrefois ! et pourtant quelle merveille !

    Enfin, les citoyens s’y sont mis eux aussi pour mettre le feu ! la Guerre Civile de la Vendée n’a pas allumer ces feux qu’en Vendée !

    Et pour terminer, tout historien vous dira que n’importe quel fonds d’Archives est partiel, et que le travail d’un historien consiste à comprendre l’histoire à travers des lacunes…

    Lorsque j’ai commencé, il y bien longtemps, je me souviens être arrivée à Armaillé, reçue par une charmante secrétaire de mairie qui me répondait au sujet des archives du presbytère :

    On a fait le ménage, il y en avait du travail pour tout nettoyer (comprenez tout détruire)
    Vive les déchetteries… Enfin pour les iconoclastes.
    Je connais un iconoclaste qui a participé il n’y a pas si longtemps que cela à une telle oeuvre en pensant faire oeuvre hygiénique ! Exactement comme au presbytère d’Armaillé.
    Pour ma part, j’ai imprimé Le registre Clandestin de Saint Julien de Concelles pour le sauver, et j’avais obtenu qu’il soit microfilmé, c’est ainsi qu’il nous parvient. Car, chaque fois qu’un presbytère a fermé, n’importe qui a fait n’importe quoi. J’en connais même qui se sont personnellement servis… Croyez-vous que je puisse parler ?

  3. Merci Odile pour ces éclaircissements !
    Il est exact que la conservation des documents se posent mais en France, nous avons de la chance : j’ai tenté de travailler en Italie d’où je tire mes racines … Aucun regroupement comme dans nos AD ; les curés dans les paroisses laissent moisir leurs archives et en refusent l’accès. Les notaires ne nous reçoivent pas …
    Quelle chance ont vos petits-neveux !

    Note d’Odile : je ne suis pas certaine que mes petits-neveux aient de la chance, parce que je ne suis pas sure que mon travail leur parvienne, et c’est ma hantise. Je ne souhaite léguer ni aux Archives ni à une association certaines choses, tout à fait personnelles… Or, l’expérience des uns et des autres montrent qu’il y a le plus souvent alternance d’iconoclastes et de passionnés.

  4. Heureusement qu’il y a des personnes dévouées comme vous ,Madame pour préserver ces documents pour les générations futures .
    Telle une Vestale veillant au feu sacré.MERCI. Greniers sans doute meilleurs dépots que les caves qui étaient parfois inondées. Péril du nettoyage par le vide…!
    Dommage que certains musées ne soient pas créer pour « héberger  » ces fonds. Mêmes les registres d’Etat Civil n’étaient pas traités avec respect , dans les années 50 , en Haute Provence ( d’après mon père ) juste laissés en vrac à même le sol , nourriture à souris…

  5. Quart d’écu : division (1/4) en argent de l »écu d’or créée par Henri III et frappée jsuqu’au règne de Louis XIII.
    Teston : grosse monnaie d’argent frappée pour la première fois en France sous Louis XII et sans discontinuité jusqu’au règne d’Henri III.
    Franc et demi-franc : monnaies d’argent (l’unité et sa division) frappées en France à partir d’Henri III jusqu’au règne de Louis XIII.

    Il s’agit donc là des principales monnaies royales d’argent en circulation sous le règne de Louis XIII, avant que ce dernier ne réforme en profondeur le système monétaire français en 1640-1641.

  6. Tous ces documents anciens détruits, égarés ou accaparés, cela nous attriste ou nous révolte car la conséquence en est une perte d’information irréparable, des branches de notre arbre non finies, etc. Mais que dire de notre époque actuelle ? Quelle généalogie pourra être faite dans 100 ans, à l’ère du tout numérique, des noms composés qui rendront les ascendances plus difficiles à établir. Et surtout des documents sans âme, en traitement de texte, et sans détails superflus, qui font le bonheur du chercheur. Odile a malheureusement raison de craindre que ses neveux ne soient pas intéressés. Regardons autour de nous, nous sommes souvent seuls à avoir cette passion au sein de la famille.

  7. C’est pareil dans mon cas : la seule de ma famille des deux côtés de la Manche à s’intésser à nos ancêtres !
    C’est merveilleux lorsque les prêtres donnaient les causes de décés.En GB, la cause de décés est écrite dans l’acte mais ce qu’il y a d’ennuyeux : l’autopsie est très souvent pratiquée.

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