Victimes des soldats logés à la Bohalle en 1652

à la demande de Marie, voici ce que je peux lire : une liste de victimes des soldats enterrés où ils ont pu être enterrés et en l’absence du prêtre manifestement, donc enterrés par leurs proches seulement. Je connais mal les noms de la Bohalle et merci de les corriger.

Au mois de febvrier et mars audit an 1652
est décédé pendant le
siège de la … d’Angers lorsque les
gendarmes et soldactz estoient logés en la
paroisse de la Bohalle chascuns de Jean
Boullay qui a esté tué par lesdits gendarmes
et enterré … au moins
Mathurin Bouguereau enterré au pied de la
Croix du carrefour de la Sablonnière
Gasnelle Leblanc et Pierre Bitaullays
enterrés au jardin de Michel Abraham
à cause due l’on ne pouvait approcher de l’église
et cimetière dudit lieu à cause desdits gentarmes
Sainte Guillot et Urbain Delespine Jean
Delespine son fils Pacquerre Normant femme
de feu Jacques, Mathurin Abraham Guy
Estau ? Mathurine Delespine fille de Jean
Jean Dubourg fils de Michel, Anne
Beauvillain femme de Jean Marsereau
et Julien Besnard Pierre fils de Pierre
Gedouin enterrés au cimetière dudit lieu
de la Bouhalle

Confiseries de Noël en emballage de verre, fabriqué par Louis de Mesenge

En 1633, Louis de Mésenge, natif de la Ferrière-aux-Étangs, gentihomme verrier à la Plesse à Précigné (Sarthe, à 50 km N.N.E. d’Angers) livre pour Noël des boîtes à confiture.

Dans les innombrables actes notariés que j’ai dépouillés, j’ai eu une faiblesse pour les inventaires après décès, pour l’immense témoignage qu’ils livrent sur les intérieurs et les modes de vie du passé.
Alliant ma passion pour le verre et les verriers, à celle des inventaires, j’ai constaté, parfois avec quelque étonnement, la très faible pénétration des objets usuels en verre au 17e siècle en Anjou. Ils étaient un objet de luxe, réservés à une élite, car en fait, point d’usine, mais uniquement quelques ateliers de verriers fort rares et éloignés. Voir mon billet « ouvrons les fenêtres »
Aussi, la découverte d’une vente de tels objets rares, parmi les actes notariés, fut pour moi un joie sans pareil !

Le 8 novembre 1633, Dvt Claude Garnier Nre Angers, Louys de Mezange, écuyer, Sr du Pont Dt en la paroisse de Présigné au lieu seigneurie de la Plesse, vend à Françoise Tribouillard marchande de verrerie, veuve de Mathurin Lapert Dt à Angers la Trinité, le nombre de quatre cents fais de verre bons et marchands assortis partie de verre à boire, de mascaron, verre commun, boîtes à confitures et verres de deux cents bouteilles d’un quart qui auront le col court et grande embouchure, le tout provenant de la verrerie dudit lieu de la Plesse, que ledit Sr du Pont promet livrer en cette ville d’Angers à la boutique de ladite Tribouillard chacune charge assortie tous les 15 jours, jusqu’à la parfaite livraison pour le prix de 200 L qu’elle promet payer en l’acquit dudit vendeur à h. h. René Guyet Sr de Fromentière marchand à Angers à Noël Prochain. »

Françoise Tribouillard, dont le nom vient du verbe tribouler : troubler, agiter, est effectivement une grande agitatrice, et pour tout dire, une révolutionnaire. A mon avis, elle vient de lancer la trêve des confiseurs, et, à ce titre, elle mérite une place dans l’Histoire avec un H.
En effet, l’acte stipule que la marchandise doit être livrée avant Noël, donc il s’agit pour cette commerçante hors norme, de vendre pour Noël !
En 1633, le sucre lui-même est une nouveauté, et tout fruit avec du sucre est appelé « confiture », alors que nous distinguons aujourd’hui confiserie, fruit confit, confiture.
Noël 1633 est une date dans l’histoire du sucre. En effet, c’est le 27 novembre 1632 qu’un arrêt de la Cour accorde aux épiciers le privilège de la vente exclusive du sucre, confiture, sirops, dragées…
Auparavant, le sucre était le privilège exclusif des apothicaires. Il fut d’abord paré de vertus médicamenteuses, mais d’aucun avait remarqué son petit côté gourmand ! Le monopole de la vente du sucre, fort lucratif, fut alors à l’origine d’une longue querelle entre apothicaires et épiciers, chacun voulant le monopole pour sa chapelle.
Ainsi, c’est dans ce joli quartier de la Trinité à Angers, qu’on nomme aujourd’hui la Doutre, où tant de maisons à pans de bois arborent avec fierté leurs 4 siècles, voire plus, que ce fit en ce Noël 1633 une immense révolution des modes de vie à Noël.
Mais, cette révolution ne fut pas la seule. Françoise Tribouillard lance aussi l’emballage : le récipient en verre pour confiture ! Vraiement, cette Françoise Tribouillard était une visionnaire : deux innovations en 1633, la confiserie à Noël et l’emballage en verre !
PS : Merci à Monsieur le maire de Précigné, et à tout autre lecteur de ce billet, de ne pas l’imprimer ou le rééditer, mais de signaler seulement son existence à ses administrés, en leur conseillant la visite de ce blog. Car, bien trop de maires du Haut-Anjou, ont abondament imprimé et diffusé, tuant mon site, or, ce site doit vivre, et pour vivre il doit tourner dans la guerre des clics qu’est Internet. Merci de le comprendre.

Joyeux Noël, Merry Christmas, Frohe Weihnachten !

Odile Halbert – Reproduction interdite sur autre endroit d’Internet seule une citation ou un lien sont autorisés.

Françoise Maulevault veuve Hiret fait les comptes avec son métayer Marin Boumier : La Pouèze 1644

Les femmes géraient les affaires lorsqu’elles étaient devenues veuves, je vous l’ai souvent mis ici.
Mais Françoise Mallevault aliàs Maulevault sait aussi compter l’effoil des bestiaux, etc… enfin tous les points de dépenses ou de profits d’une métairie. C’est en effet le propre d’un bail à moitié de devoir tout décompter et il faut donc s’y connaître, c’est donc plus compliqué qu’un bail à ferme pour lequel seul une somme est à connaître et toucher.
De son côté le métayer devait aussi compter et se souvenir de tous les profits ou mises, et je me suis toujours demandée comment ils faisaient pour tenir cette mini comptabilité, ne sachant pas écrire.
Françoise Mallevault a de son côté une magnifique signature, c’est une femme éduquée, et je pense pour avoir beaucoup d’actes la concernant que ce bien est de son propre.
La métairie de l’Ouvrardière est située au Nord du bourg de la Pouèze, et Marin Boumier est mon ancêtre, pour lequel j’ai trouvé beaucoup de baux, et la métairie qu’il tient à bail à moitié porte 2 noms différents, soit la Haye soit l’Ouvrardière. J’avais publié cet acte en novembre 2018 mais je le remets ce jours pour insister sur le fait que les baux à moitié concernent closiers et/ou métayers autant que le bailleur, donc on trouve dans les actes notariés beaucoup sur l’histoire de ceux-ci, considérés par certains généalogistes comme trop pauvres pour figurer dans un acte notarié. Et le plus fort dans cet acte est que je descends du métayer Marin Boumier mais que la propriétaire est ma tante par alliance à Olivier Hiret sieur du Drul. Je vous mets ci-dessous la liste, impressionnante, de tous les actes que j’avais trouvé autrefois concernant Marin Boumier mon ancêtre :

La Hée dite « Couraudière »[1] est une closerie à La Pouèze, qui appartient à Françoise Mallevault. Le 30.6.1623[2] Olivier la baille « à moitié » à Marin Boumier laboureur et Jullienne Lemesle sa femme pour 5 ans. Ollivier recevra en sa maison à Angers chaque année à Noël 30 livres de beurre en pot bon loyal et marchand, un coin de beurre frais honnête, à la Pentecôte 6 poulets et à la Toussaint 4 chappons. Ce bail sera renouvelé les  26.11.1627, 27.7.1633 et 27.7.1641 et le 8.6.1644[3] Françoise devenue veuve traite avec son métayer Marin Bommier pour l’argent du bail, des bestiaux, de fûts neufs, et réparation de couverture. Olivier fait les comptes avec Marin Boumier 8.11.1624[4] pour les bestiaux qui sont à présent à la Hée, et ont été estimés par Jehan Landais marchand arbitre à 155 # dont Olivier a fourni 106 #, et le reste est dû par Bommier. Le 21.9.1625 Olivier fait les comptes avec Jehan Landais. Marin Boumier lui doit 83 # 10 s pour les bestiaux le  26.11.1627[5]. Marin Bommier paie le 5.5.1628[6] les 12 # restant de 32 # tz et 2 # dues par Julienne Blanchet. Le 2.12.1632[7] Marin Bommier laboureur à la Hée, et Jehan Esnou métayer à la Babinière mandatent Olivier pour poursuivre leurs instances d’appel en la cour des Aides à Paris.  Le 10.6.1635[8] Olivier prolonge le bail de Marin Lebommier laboureur à la closerie de Louvardière à La Pouëze

[1] Célestin Port ne donne aucune Haye ou Couraudière à la Pouëze, mais Françoise Mallevault reparle de la Couraudière dans son testament

[2] AD49-5E6 Louys Couëffe notaire royal Angers

[3] AD49-5E6 Louys Couëffe notaire royal Angers

[4] AD49-5E6 Louys Couëffe notaire royal Angers

[5] AD49-5E6 Louys Couëffe notaire royal Angers

[6] AD49-5E6 Louys Couëffe notaire royal Angers

[7] AD49-5E6 Louys Couëffe notaire royal Angers

[8] AD49-5E6 Louys Couëffe notaire royal Angers

 

 

Cet acte est aux Archives Départementales du Maine-et-Loire, série 5E6 – Voici sa retranscription (voir ci-contre propriété intellectuelle) :

Le vendredi 8 juin 1644 avant midy par devant Louys Couëffe notaire royal à Angers, furent personnellement establis et eument soubzmis honorable femme Françoise Mallevault veufve de Olivier Hiret vivant sieur du Druil advocat au siège présidial de ceste ville, y demeurant paroisse st Michel Du Tertre d’une part, et Marin Boumier métayer de la Hée autrement l’Ouvrardière appartenant à ladite Mallevault paroisse de la Pouëze, lesquels ont présentement compté les sommes de 83 livres 10 sols par une part, 35 livres 12 sols 6 deniers par autre que ledit Boumier debvoit à ladite Mallevault par contrat et obligation passé par devant nous les 26 novembre 1627, 10 juillet 1633 et 27 juillet 1641, qu’elle a entre mains, d’autant que ledit deffunt sieur du Druil et ladite Mallevault auroient reçu le tout de l’effoil des bestiaux dudit lieu depuis l’année 1633 icelle comprise jusque à ce jour, rentes payées par iceluy deffunt Hiret à cause dudit lieu pour ledit Boumier, deniers que ledit Bommier auroit pareillement reçu pour le tout de l’effoil des bestiaux, autres deniers qu’il auroit pour les cens dudit lieu et pour l’extinction d’icelle depuis ladite année 1633 date du cordelage fait entre les cofrarescheurs jusques à l’année dernier, icelle comprise, et depuis l’année 1624 jusques à l’année 1633 tant de ce que ledit Boumier auroit trop payé de ladite rente pour sa part, et en ce qu’il auroit déboursé pour la façon des futs neufs qu’il auroit fait faire sur ledit lieu comme despens, outre le nombre qu’il en doit par ledit bail dont il demeure quite jusques à ce jour, et pour la réfection et couverture à neuf d’ung appentit estant sur ledit lieu de la Hée, et ledit Boumier s’est ainsi trouvé devoir à ladite Mallevault 107 livres 2 s sur lesquels elle luy a volontairement déduit et remis 7 livres 2 s et des frais qu’elle auroit à sa charge l’acquitte, et il promet l’acquitter de ce qu’il peut devoir en la maison de ladite Mallevault à Angers dans le terme de Toussaint prochaine »

Avant le pétrole, les grains et fourrages de milliers de chevaux : la maison Halbert, Nantes

1851 Jacques Mounier fonde la maison de grains

Jacques Mounier, mon trisaïeul (arrière arrière grand père) paternel, né en 1823, fut le cadet d’une famille de laboureurs, nombreuse et pauvre, vivant aux confins du Morbihan et des Côtes d’Armor. Il dût la quitter faute de place pour lui, et sut établir à Nantes un commerce de grains basé sur l’ère du cheval. Il est à l’origine de tous les immeubles des « Halbert » route de Clisson, dont il n’est rien resté à ma fratrie au décès de Georges Halbert en janvier 1974. La voiture avait supplanté le cheval et la fortune des Halbert s’en était allée ! Ces lignes sont le fruit de mes recherches dans les Archives Publiques, car je n’ai hérité d’aucun papier non plus. Ah ! si, j’ai hérité de quelque chose, j’ai la goutte de père et grand père.

Personne ne sait signer dans la famille de Jacques Mounier et la configuration du village natal montre qu’ils n’ont probablement pas beaucoup de terres à cultiver, pas assez pour vivre correctement. Jacques a 4 frères avant lui or dans les familles à l’époque il n’y a de place que pour un fils pour succéder et les autres doivent chercher ailleurs. On met les enfants domestiques chez des notables dès l’âge de 9 ans et ce n’est qu’après la guerre de 1870, que la loi du 18 mai 1874, dite « loi Joubert », élève l’âge minimum à 12 ans, limitant la journée de travail à 6 heures, et à 12 heures de 13 à 16 ans, et le travail de nuit est interdit jusqu’à cet âge. Tous ces enfants n’étaient pas maltraités. Certains au contraire pouvaient atteindre des compétences voire même une forme d’éducation. Ainsi, dans mes ascendants Guillouard, j’ai un Faucillon fils de laboureur, qui sera quasiment intendant et gérant des biens de la veuve Goureau dont l’époux absent faisait le tour du monde. J’ai trouvé un acte notarié qui l’atteste.
Un domestique alors ne touchait aucune mensualité et/ou annuité, mais une somme globale lorsqu’il se mariait ou partait après 15 à 20 ans de loyaux services, de quoi monter son petit ménage.
Dans le cas de Jacques Mounier, il est très surprenant qu’aucun de ses 4 frères, tous restés au pays, ne sachent signer alors qu’il sait signer. Il sait aussi fort bien compter la valeur des choses et les affaires. Cette différence de culture ne peut s’expliquer que par un placement dans une famille notable, dans laquelle il a appris. En effet plusieurs familles notables de Ménéac ont un lien avec Nantes puisque les grains de Bretagne sont indispensables aux chevaux Nantais. Placé chez eux, il aura appris à leur contact et aura observé comment ils s’approvisionnaient aussi en foin puisque Frossay livrait du foin en Bretagne.
C’est ainsi que Jacques Mounier parvint à l’âge adulte à Nantes, ayant acquis beaucoup de compétences, notamment livreur de l’usine de produits alimentaires située à la Piaudière, sur les bords de la Sèvre créée par J. Carrère, reprise fin 19ème siècle par Bonnefon. La mémoire de la famille recueillie en 1939 par Paul Halbert, précise que c’est lors de ses tournées de livraison qu’il constate le besoin en grains de plusieurs habitants de Saint Jacques et que lui vient l’idée de les en fournir en livrant lui-même.

Jacques Mounier était surtout très travailleur, ne comptant jamais ses heures durant lesquelles il remuait lui-même les lourds sacs de grains etc… à la fois pour les approvisionnements et les livraisons. Et j’ajoute, sachant vivre modestement sans domestiques dans peu d’espace.
Son épouse, native de Saint Sébastien, porta toujours la coiffe, et on la voit à gauche sur la photo ci-dessous avec Jacques Mounier, leur fille Marie, son époux Edouard Halbert, et leur gendre Coignard. Cette photo est rarissime car à l’époque on ne prenait par beaucoup la pause au jardin. Ils sont tous endimanchés et ce jardin est celui du 7 route de Clisson en 1887.
Jacques Mounier eut un fils et 2 filles, mais l’une des filles n’eut pas d’enfants, l‘autre un fils unique, enfin, le fils prénommé Georges connut une fin tragique à l’âge de 16 ans et demi à Haïti.
Avant de vous conter son succès à Nantes, laissez moi vous transmettre une trace de mémoire familiale recueillie en 1939 par mon oncle Paul Halbert. On lui avait raconté que Jacques Mounier était venu à pied à Nantes ramassant de la laine sur les chemins. Or, en 2022 je vois un documentaire sur Arte, qui montre en Irlande une maman et ses enfants de 3 à 5 ans autour d’elle ramassant la laine de moutons restée sur les herbes. Cette maman nous montrait même ce qu’elle faisait de cette laine, qu’elle utilisait dans ses tableaux d’artiste. Comme le récit transmis à mon oncle Paul en 1939 me paraissait curieux car je voyais mal la laine sur les chemins, j’ai compris que Jacques et ses frères, dès qu’ils savaient marcher, étaient mis au ramassage de la laine des moutons dans les champs, et manifestement Jacques Mounier avait dit à ses filles qu’il ramassait de la laine. Cela montre qu’autrefois beaucoup d’enfants avaient très tôt l’habitude de travailler… Travailleur, vivant modestement et connaissant l’ère du cheval, Jacques Mounier a acquis plusieurs maisons, mais ses descendants vivront bourgeoisement alors que l’ère du cheval décline, et n’acquèrent aucun bien, jusqu’à plus rien.

Pour mémoire, en 1851, c’est aussi l’arrivée à Nantes du premier train venant de Paris, ainsi, la disparition des chevaux de poste était déjà programmée… Donc il était plus que temps que Jacques Mounier gagne si bien sa vie.

les grains en sac de 100 kg

Nantes, pionnière mondiale des transports en commun en 1826, avec Stanislas Baudry, utilise beaucoup de chevaux et si Paris en compte 80 000, Nantes certainement près de 15 000, sinon plus. Or, un cheval tractant voiture consomme chaque jour environ 8 kg d’avoine et/ou orge, en 1850 surtout l’avoine, et 6 kg de foin. Wikipedia : Cheval au XXe siècle

Les grains venaient surtout des Côtes d’Armor (que l’on appelait alors Côtes du Nord), d’où venait Jacques Mounier, et c’est certainement ce commerce qu’il a imité au Sud de Nantes en fondant son propre commerce.
L’avoine est transportée en sacs de jute. Le sac pèse 100 kg. J’ai connu, après la seconde guerre mondiale, chez mon père Georges Halbert, successeur de Jacques Mounier, la préparation des sacs, alors passés à 50 kg. Il achetait l’avoine en vrac, et préparait les sacs de 50 kg à travers des gros conduits, et ce dans une énorme poussière.
Voyez sur mon blog un usage amusant de ces sacs de jute : La course aux grenouilles, départ 14 h 30 à la Croix des Herses, Nantes lundi 12 mai 1913
Le sac de 100 kg de farine, devenu au 20ème siècle 50 kg est aujourd’hui de 25 kg. Pour ma part, j’ai travaillé dans les grands moulins à Cologne sur le Rhin, et j’ai aussi travaillé à la Biscuiterie Nantaise. Je connais la farine. Lorsque je suis entrée à la BN à Nantes le 1er mars 1969, je n’avais pas de voiture et durant des années, j’ai travaillé dans le bâtiment de la place François II, lieu fondateur de la Biscuiterie Nantaise, et le soir j’attendais l’autobus. Quelques ouvrières, alors encore en activité sur la ligne ancienne de production de biscuits, attendaient avec moi. Et nous échangions de longues minutes l’histoire de la BN. L’une me racontait ce qui pour elle avait été la plus grande transformation : le sac de farine. Elle avait connu le temps où il était de 100 kg et admirait de finir sa carrière parmi des sacs de 50 kg, ce qui lui paraissait un immense changement des conditions de travail de certains à la BN.
Je rends ici hommage à tous les portefaix et ouvriers d’antan, qui encore entre les 2 guerres mondiales, chargeaient ainsi sur leur dos ces 100 kg. Et, si la France a évolué, passant à 50 kg, puis 25 de nos jours pour la farine, je pense à tout ce que nous oublions de voir dans les pays pauvres, et toutes ces charges si lourdes, comme Jacques Mounier les a connues.  Car cela existe encore ailleurs.
J’ai connu de 1945 à 1956 mon père toujours en bleu de travail sauf le dimanche où il s’endimanchait. Il portait lui aussi les sacs sur le dos. Les bleus de travail n’étaient pas encore en Jean, mais un épais tissu, et j’ai eu souvent à y coudre à la main des carrés de réparation, car je cousais bien et à l’époque on réparait tout, même les draps étaient coupés en deux par le milieu bien avant d’être usés, et je faisais les surjets plats recousant les 2 côtés ensemble car moins usés ils perpétraient encore des années au drap.

Les sacs étaient mis sur des balances agréées, et par ailleurs, pour recevoir les camions entiers, il y avait un pont bascule (voir ci-dessous).

le foin de la Basse Loire


Ces photos datent environ de 1900, on y voit quantité de chalands et du foin en vrac, mais surtout un grand nombre de travailleurs pour décharger ces chalands sur des voitures à cheval. Voyez aussi sur mon blog une carte postale du Quai des Fumiers à la Cale au Foin : le quai Magellan, Nantes 1840
Personnellement j’ai connu le foin dans les années 1945-1956 en botte de 90 x 46 x 36 cm pesant 18 kg. Mais auparavant il était en vrac sur les chalands sur Loire comme le montrent mes photos ci-dessus.

Voici Frossay en 1815 selon la carte générale de la France. 130, [Paimboeuf – Redon].  établie sous la direction de Cassini mais la carte actuelle est plus parlante. Vous y voyez le canal de la Martinière que Jacques Mounier n’a pas connu, et le Migron qui fut le port de chargement des chalands de foin au temps du canal de la Martinière  1892-1914

1875 construction du hangar de bois 

En 1870 Jacques Mounier a perdu tragiquement son fils unique Georges décédé à l’âge de 16 ans et demi à Haïti. Il a marié en 1872 sa fille Lucie à Alexis Coignard qui l’a emmenée. En 1875 sa fille Marie épouse Edouard Halbert qui reprendra l’affaire de son beau-père. Il est l’un des 3 fils de feu Joséphine Bonnissant, fille de Mathurin Bonnissant premier investisseur de la route de Clisson, juste en face de la maison de Jacques Mounier. 
Mathurin Bonnissant a laissé 3 héritiers : une belle fille célibataire Marie Judith Lebraire, sans postérité – un fils prêtre – et Joséphine Bonnissant qui a eu 3 fils, Henry et Edouard Halbert, et Etienne Chauvet; Ces 3 fils héritent de tous les biens Bonnissant et Lebraire, puisque l’oncle et la tante n’ont pas d’enfants. Or, les biens Bonnissant et Lebraire avaient bien fructifié ! Assez pour passer au rang de bourgeois.

Sur cette photo, Judith Lebraire, fête ses 80 ans en 1889 en présence de ses proches : Edouard Halbert est à sa droite et son fils Edouard II Halbert est l’un des enfants assis devant
Edouard Halbert apporte donc à Marie Mounier ses biens  Bonnissant dont le grand terrain qui touche les moulins des Gobelets. Ils y construisent un immense hangar de bois au fonds d’une grande cour donnant sur le calvaire de la Croix des Herses. La cour était si grande que le pont bascule qui était à droite disparaissait presque à la vue (la photo de pont bascule est un exemple actuel pour illustrer le pesage d’un camion). Comme les ponts bascules actuels, il avait une guérite, dans laquelle était le dispositif de pesage qui m’impressionnait beaucoup, car on tirait un gros poids de droite à gauche jusqu’à balance exacte. La photo explicative est de Larousse. Avant la seconde guerre mondiale les camions étaient tractés à cheval chez les Halbert, puis après un Ford. Et bien entendu, d’autres utilisateurs étaient autorisés à venir peser sur ce pont bascule leur camion. Et, chose étrange, moi qui suis née en 1938 et ai connu ce lieu de 1945 à 1956 je me souviens beaucoup de ce pont bascule. J’ai eu le grand privilège, en temps qu’aînée, d’avoir le droit d’entrer dans cette cabine de pesage.

Cette photo aérienne de 1956 montre le pont bascule situé à droite en entrant dans la cour, entre le calvaire dans l’entrée, et les bureaux avant le hangar, mais attention les bureaux n’ont été construits qu’au partage en 1936, car auparavant ils étaient encore en face dans le 9 route de Clisson. Ces bureaux avaient été conservés par la carrosserie Landron acquéreur en 1974.

En 1885, Jacques Mounier, le fondateur, se retire dans l’une des maisons qu’il avait acquise, et dont il loue toutes les pièces, et il laisse à sa fille et son gendre toute l’immense maison du 7 route de Clisson. L’homme qui a vécu modestement malgré son succès commercial, laisse la place à des descendants embourgeoisés.
Pourtant il existe déjà un concurrent route de Clisson comme l’indique en 1887 l’annuaire de la Loire-Atlantique qui donne encore 15 marchands de chevaux à Nantes, dont 2 à Pont-Rousseau et 2 route de Clisson, donc 4 au sud de la Loire, mais donne aussi un concurrent marchand de fourrage route de Clisson au Lion-d’Or.

1904 maison 4 rue Lemevel

Aujourd’hui 4 rue Lemevel (ex  chemin de la Gilarderie) cette maison est construite par Edouard 1er Halbert et Marie Mounier sa femme pour s’y retirer, car leur fils unique Edouard II Halbert se marie et ils lui laissent la maison n°7 route de Clisson en entier, tout comme Jacques Mounier l’avait fait en 1875 à sa fille Marie. La maison donnait directement sur la cour et le mur de parpaing que vous voyez ci-dessus date de 1956 car suite à sa demande de divorce , mon père nous enclos tous les 6 avec maman, pour mieux nous expulser. Mais, moi, l’aînée, j’y ai vécu de 1945 à 1956. Outre la cour nous avions accès à 2 jardins, l’un immense, plantée de toutes sortes de légumes, avec un grand poulailler, là où dans les années 1990-2020 la carrosserie Landron stockait des dizaines de voitures. L’autre jardin d’agrément, plus petit derrière la maison, où nous pouvions jouer. En bas 4 grandes pièces, un minuscule cabinet de toilette pour les parents, et en haut Georges, mon père, construisit en 1942 un autre cabinet de toilette et c’est là que j’ai vécu avec ma soeur de 10 mois ma cadette. Nous étions directement sous les ardoises dissimulées par une couche de plâtre et nous avions 45° l’été et moins de 10 l’hiver. On s’en souvient encore et on en parle encore souvent ! L’une des 4 pièces en bas était la grande cuisine avec la véranda, ici photographiée en 2011 exactement dans l’état que je l’ai connue en 1956. Mais la maison avait une merveille, un immense sous-sol, contenant une salle de bain, une buanderie (à l’époque pas de machine à laver mais une lessiveuse), une cave à vin, et une chaudière à charbon. C’est là que nous nous réfugions pendant les alertes aux bombardements pendant la guerre, puis, la guerre passée, c’est là qu’on punissait un enfant fautif, dans le noir dans la cave ! Malheureusement, ce sous-sol a demi sous-terre fait qu’à l’intérieur de la maison à la porte d’entrée il y a 4 marches, et c’est le cas de nombreuses maisons à Nantes. Je n’ai jamais compris comment des vieux pouvaient se construire une maison pour leur retraite, pleine de marches partout, car à la véranda il y en avait environ 9 pour descendre au jardin. Et ce type de maison, dont beaucoup à Nantes, est difficilement transformable en mode de vie 2023 c’est à dire la cuisine et séjour tout en un etc…
La maison, construite en 1904 ne jouit pas alors du confort qui existe déjà un peu en 1940, et pire, le premier étage n’est que grenier, mis à part ce qui fut sans doute au départ « la chambre de bonne », ainsi qu’on logeait autrefois les domestiques, même si il n’y a plus de domestique logé dans cette maison depuis 1923.
En 1942, Georges, très bricoleur et travailleur, entreprend des travaux de modernisation tout en tentant d’aménager le 1er étage afin de faire la place à sa petite famille qui s’agrandit un peu trop d’année en année. Pour le confort sanitaire, il a à sa disposition la miroiterie Marly, qui fait aussi les sanitaires, et est installée route de Clisson, face à la maison de Charles Haury. Il entreprend même une grande avancée dans le confort sanitaire : une baignoire. Mais la maison de 1904 n’était pas prévue pour faire la place à une salle de bains avec baignoire. En effet, elle ne laisse place qu’à un cabinet de toilette, exigu, comme on les faisait sans doute en 1904. Impossible d’y loger la baignoire.
Il décide donc de créer au sous-sol une salle de bains. Le sous-sol est vaste et les soupiraux nombreux. Il va aussi y installer la chaudière à charbon pour le chauffage central, et laissera une pièce pour la laverie, et une pièce pour la cave à vins. Et au premier il ajoute une salle d’eau avec lavabo et même bidet. Sous le toit pentu de ce grenier la pièce laissera même la place au bureau des enfants pour étudier.
Et il y installe sa famille en juin 1942, à la naissance de son 4ème enfant.
Je vais vivre 14 ans la haut, dans cette mansarde, sous les ardoises, car tout le grenier est à même l’ardoise, et la chambre, certes plâtrée, n’est pas isolée : on n’avait pas encore découvert les bienfaits de l’isolation ! Le bain hebdomadaire était orchestré donc au sous-sol par Georges, tous les uns après les autres, dans la même eau, en commençant par les plus petits, car entre-temps nous étions 6 enfants. En entrant dans l’eau, moi, l’aînée, je profitais donc des « traces » laissées par les précédents. Je ne m’en plains pas, car après 1956, je vais connaître ailleurs aucun lavabo, et même aucune eau, pendant des années.
Outre un poulailler nous avions un coq, et l’été il réveillait tout le quartier, et je le supportais très mal. Les coqs sont depuis longtemps maintenant interdits en ville, mais c’était vraiment une autre époque dans les années 1945-1956. J’ignore s’il y avait d’autres coqs dans le quartier, mais je le suppose car il existait d’autres poulaillers…
En 1950, sur le plan de la ville de Nantes apparaît une zone pour la future ligne de ponts, l’actuel boulevard Gabory, et la maison est alors frappée d’alignement. (voir ce plan sur ma page concernant la maison 7 route de Clisson) Ma chambre, que je partageais avec ma cadette Nicole, est la mansarde sur la rue. Cette mansarde était si mansardée que je ne pouvais faire mon lit sans me pencher beaucoup. En outre, les ardoises n’étaient pas loin, et même à nu dans les pièces voisines qui servaient de grenier. Elle était donc très chaude l’été etc… En outre, il est parfois arrivé des fuites dans la toiture et notre plafond prenait des traces noires. Papa nous disait qu’il était impossible de faire des travaux car la maison était frappée d’alignement pour construire une nouvelle ligne des ponts.
La ligne des ponts fut construite plus tard mais n’emporta que l’autre côté de la route de Clisson : la maison du 4 rue Lemevel est encore là en 1969, à ma grande stupéfaction, quand je reviens à Nantes après 13 années passées au loin. Car le 16 janvier 1956 mon père vide la moitié de la maison en partant avec ce qu’il estime ses meubles, même la TSF, le tourne-disque et les disques, et le Mécano alors important. Maman, restant alors seule avec les 6 enfants arrête net mes études faute de pouvoir nous élever tous les 6 car la pension alimentaire et sera rarement versée ou alors après action de l’avocat.  4 ans plus tard elle est expulsée de la maison de mon père, qui vend la maison en 1961 pour 51 600 F pour rembourser maman de son indemnité de divorce et de sa dot, car en se mariant en 1937 elle avait reçu une dot importante de ses parents, dont elle va pouvoir survivre.

1932

Edouard 2° Halbert décède brutalement Edouard 2° HALBERT 1877-1932 : train de vie  Aucun de ses 4 enfants n’est encore marié, et ils travaillent avec leur mère dans l’affaire.

Leur défunt père, qui avait été le premier dans le quartier Saint-Jacques à acheter une voiture, avait transmis le goût des voitures à son fils Georges. La photo ci-dessous le montre en 1936, manifestement heureux de livrer avec une voiture et plus à cheval, mais la photo montre aussi un cheval qui passe, les maisons en face joignant le 9 route de Clisson, la cour, puis la maison Bureau marchand de chevaux, et on devine à droite de la voiture la petite maison basse qui faisait l’angle du chemin de la Gilarderie et la route de Clisson. Sur cette photo on voit Georges heureux de livrer en voiture alors que la voiture est la fin de son commerce… c’est saisissant ! Cette photo me bouleverse chaque fois que je la vois.

Dans les années 1947-1956 Georges eut un camion Ford (plus petit que celui de la photo) avec un toit sur la cabine, et il allait chercher les bottes de foin ainsi ayant supprimé son camion hypomobile et ses chevaux. Lors des vacances scolaires c’est avec ce camion qu’il emmenait ses 6 enfants jusqu’au Pouliguen ou ma grand-mère maternelle possédait une villa. Nous étions installés derrière sur un banc et je surveillais les plus jeunes… Nous n’avions pas conscience d’un risque quelconque et nous jouissions de toute la vue possible et du grand air, le tout bien entendu sans ceinture ni aucune autre fixation. Nous étions probablement les seuls enfants du quartier à jouir de vacances familiales à la mer et revenir tout bronzés. Et à ceux qui trouveraient incroyables ce transport en camion sans attaches, je tiens à ajouter que mes cousins germains des Coteaux du Layon, venaient ainsi chaque hiver fêter Noël chez la grand mère Halbert, et mes cousins me racontaient qu’ils en avaient des stalactites au nez…

1936- 1956

En 1936 les biens des Halbert sont partagés entre les 4 enfants. Georges a le commerce et la maison du 4 rue Lemevel, et les maisons que Jacques Mounier avaient acquises vont aux autres. Le commerce dont a hérité Georges décline devant l’invasion des voitures, camions, trains, entraînant la disparition du cheval. Il doit se diversifier et lance une fabrique de paillassons, dans le grenier de son immense hangar. Voici sa publicité en 1939 dans le journal des maraîchers Nantais, ses clients.

Pour faire connaître ses paillassons, mon papa tenait à la foire commerciale un stand. Le voici dans l’annuaire de 1947 :

Les paillassons étaient fabriqués dans le grenier de l’immense hangar, sans isolation contre le froid et/ou le chaud. Il devait y avoir 2 ou 3 malheureuses employées, qui devaient subir ces épouvantables conditions de travail… sans oublier la poussière et la fatigue debout. Je n’ai jamais vu ce grenier, interdit aux enfants.
J’ai connu dans ces années 1950 le mois de Marie en mai, une fois par semaine dans la cour si grande, tout près du calvaire de la Croix des Herses. C’était bien le calvaire qui motivait ce lieu de prières et non la maison Halbert bien sûr, mais on allait pas installer des bancs sur la rue alors ils étaient installés dans la cour le soir et le quartier venait prier la vierge Marie.
Chaque année, du temps du moins que j’y ai vécu, c’est-à-dire 1945-1956, il y avait dans les semaines précédents la mi-Carême de Nantes, la construction d’un char à l’abri sous le hangar, et je me souviens avoir entendu mon père parler d’un certain Peignon en lien avec la rue des Olivettes. En tant qu’enfant, je crois que je ne réalisais pas très bien l’importance de ces chars pour les fêtes de Nantes. Nous allions voir le défilé un jeudi sans place privilégiée quelconque, comme tout le monde, dans une rue du centre de Nantes. A l’époque il n’y avait pas classe le jeudi, alors que maintenant c’est le mercredi.

1956-1974

Si je n’ai pas connu cette époque à Nantes, je peux la reconstituer car le paillasson pour culture maraîchère disparait dans les années 1960 devant l’industrialisation des maraîchers passés au pétrole et à l’électricité dans les serres. Saint-Julien-de-Concelles en est encore en 2023 une horreur écologique. Le paillasson pour clôture existe encore en 2303 en brande de bruyère, en roseau de Camargue et même en tige de saule. Sur la photo ci-contre vous voyez la clôture installée par mon papa en 1944 pour que moi l’aînée, assise, je puisse surveiller les cadets sans risques.

Je n’ai jamais revu mon père après 1956, mais je constate que le cheval avait disparu, les paillassons aussi, et en 1974, nous apprenons indirectement plusieurs jours après son inhumation son décès et la faillite. Je cours au commissariat Waldeck pour m’informer des conditions de son décès, j’y suis reçue cordialement en tant que fille du décédé, et un agent m’installe devant un cahier en occultant les actes qui ne me concernent pas. Et je lis ce alors une phrase si terrible qu’elle m’obsède toujours : « et le corps a été remis à sa famille ». Ainsi, en France, on n’est plus sa famille, mais on est par contre bien héritier potentiel des dettes, aussi je cours au tribunal renoncer à l’héritage avec les justificatifs des 5 autres enfants. Puis, tout le commerce est vendu à la carrosserie Landron et Mr et Mme Landron m’invitent à cette vente chez le notaire pour connaître l’histoire du calvaire, et j’y assiste donc en « pot de fleur » car il ne reste rien, et la vente couvre tout juste les dettes. Ils me précisent qu’ils ne sont pas croyants, mais respecteront le calvaire, ce qu’ils firent, et j’espère qu’il en sera de même du futur plan PLUM Lemevel. Histoire de la Croix des Herses, Nantes

J’ignore si mon père avait juré à son père en 1932 sur son lit de mort, de conserver l’affaire car cette notion de ne pas toucher aux biens de famille a pesé autrefois dans beaucoup de familles, incapables de suivre l’évolution, devenue rapide, des changements de la société. Mais, ce que je sais par mes années 1945-1956 alors en sa famille, c’est qu’il condamnait tous ceux qui changeaient de métier, persuadé que c’était mal. J’écris ces lignes avec douleur à la mémoire de mon père qui aima trop les voitures et les femmes, et vécut toujours bien au dessus de ses moyens, comme beaucoup de Français encore en 2023, mais ceux-là attendent des autres de l’aide, mon papa a assumé ses dettes.

La maison 7 et 9 route de Clisson, démolie en 1973 lors de la nouvelle ligne des ponts de Nantes


Jouxtant l’hôtel Gaudin, cette maison fut démolie en 1973 quelques années après la finition de la nouvelle ligne des ponts en 1966. D’ailleurs on voit à droite les publicités sur le mur qui touchait un autre immeuble détruit en 1966. La ville avait expropriée le 7 et 9 route de Clisson, en particulier son immense jardin, tenue maraîchère, sur laquelle roule aujourd’hui le boulevard Gabory. On voit encore l’arrêt d’autobus, qui se nommait toujours « la Croix des Herses ».

Voici son histoire.

Avant la Révolution, aucune maison route de Clisson à partir de la Ripossière si ce n’est les Gobelets et la Gilarderie de l’autre côté. Je vous ai situé avec une croix rouge l’emplacement de la maison 7 et 9 route de Clisson, qui est parfaitement déjà construite en 1834. Ce cadastre de la ville de Nantes est daté 1834 mais n’était pas à jour, ou bien les archives le classe avec une erreur. En effet, la date de la construction de cette maison figure dans d’autres archives notamment les recensements, très bavards.
Si la route de Clisson est alors la partie rurale, elle tente des commerçants visant l’expansion de leurs entrepôts car Nantes manque de place, et vous avez vu sur mon blog : Le premier investisseur qui installe dans ce coin ses entrepôts fut en 1815 Mathurin BONNISSANT. Mathurin Bonnissant est juste en face de la maison 7 et 9 route de Clisson.

Sur le cadastre de 1955, après le chemin, on voit la miroiterie Marly, 3 maisons dont l’hôtellerie Gaudin, et la maison de ma grand-mère Halbert et entrepôts. Le carré au milieu est une cour, et entre la rue et la cour la profondeur est grande car il y a un salon, un très grand vestiaire qu’on appellerait aujourd’hui dressing, une salle à manger. C’est dire que les entrepôts sont très profonds… mais tout de même moins que la miroiterie Marly.

Sur ce plan de 1956, vous voyez le projet de 2ème ligne de ponts, qui se termine par un rond fort intéressant pour moi car il englobe la maison de mon enfance qui est située aujourd’hui 4 rue Georges Lemevel et dont je vous ferai l’histoire. En voyant ce plan de 1956 je comprends pourquoi mon papa s’effarouchait à chaque réparation couteuse dans la maison car elle était comme il disait alors « frappée d’alignement »

1825

Les bâtiments, à savoir maison et entrepôts, magasins, écuries, situés au 7 et 9 route de Clisson, furent construits en 1825 par Antoine Libert, né à Beauvais, et venu s’installer marchand de Blanc rue des Carmes à Nantes. Par manque de place dans son magasin de vente rue des Carmes, il fait construire au sud cette maison, entrepôts et écuries à 4 chevaux, pour se lancer dans le commerce de gros.
En 1825, la maison (recensement ci-contre) est dite « neuve ». Libert occupe une partie et loue une autre partie. Sur la photo ci-dessus, vous voyez à gauche la maison, et à droite les entrepôts avec ces 4 fenêtres aux étages qui sont en fait des portes pour passer les marchandises directement sur les véhicules comme on le faisait autrefois dans les maisons de campagne. En construisant route de Clisson, Antoine Libert avait ainsi prévu ses entrepôts de linge sur la ligne d’arrivée à Nantes des tisserands de Cholet et environs.
Le « Blanc » désigne alors le linge dans les annuaires et la presse, même si vous trouvez quelques illuminés sur Internet qui disent le contraire.
A cette époque, au mariage on apporte un trousseau qui comporte beaucoup de draps de quoi faire toute la vie et on ne vit pas comme de nos jours avec un drap unique qu’on passe à la machine à laver, au sèche linge et on remet le soir au lit. On faisait la lessive peu souvent dans l’année mais en grand et on l’étendait dehors pour sécher.
Lors de la construction, la maison n°7, celle qui est à gauche sur la photo ci-dessus, avait un magasin sur la rue et non une pièce habitable, comme je vais vous l’expliquer.
Mais, à peine installé dans sa maison et entrepôts tout neuf, Antoine Libert décède le 16 juillet 1831 à 32 ans, non marié et sans hoirs. Ses concurrents ne reprendront pas ses locaux, et les nouveaux propriétaires s’efforcent de trouver des locataires intéressés par ces locaux : maison habitable, écurie à 4 chevaux, entrepôts. Aucun locataire n’ayant la capacité suffisante pour louer le tout, l’immeuble est alors divisé en plusieurs locataires mais le Blanc n’est plus la marchandise entreposée et vendue.

1856 

Le propriétaire est André Louis Moreau, marchand de vins, qui demeure quai de l’Hôpital à Nantes. Il entrepose route de Clisson son vin en gros, et loue à 3 locataires la maison d’habitation. Parmi eux, un nommé Jacques Mounier qui s’est lancé en 1851 dans les grains en gros. Il est l’un des 3 locataires de la maison avec un nommé Cassin qui a une épicerie en gros, et un 3ème locataire. Ils vivent chaque foyer dans peu de pièces, comme on vivait alors au début de 19ème siècle.
J’attire votre attention sur le fait que le recensement ne concerne par les magasins, mais uniquement les logements d’habitations et les habitants, donc on n’apprend rien du n°9 qui concerne les écuries et entrepôts. On monte les marchandises par les fenêtres donnant sur la rue, comme on le faisait autrefois dans les campagnes. Cet entrepôt est donc une transition avant l’apparition des entrepôts plus modernes.

Ci-dessous le recensement de 1856, série des Archives municipales. Les recensements antérieurs, que ce soit aux Archives municipales ou Départementales, ne permettent pas de dire qui est propriétaire. Une chose est certaine, Moreau n’a pas hérité mais acquis la maison de la route de Clisson.

propriétaire habitants profession âge origine
MOREAU 3 pièces RDC, CASSIN Mathurin épicier 44 Nantes
3 au 1er BRELET Reine sa femme 42 Nantes
maison CASSIN Reine enfant 11 Nantes
à 1 étage CASSIN Hortense enfant 8 Nantes
CASSIN Henry enfant 4 Nantes
BERTIN Louise domestique 26 St Colombin
MOREAU magasin RDC, MONNIER Jacques Md de grains 33 Meneac (22)
3 pièces 1er FORTIN Victoire sa femme 25 St Sébastien
MONNIER Lucie enfant 4 Nantes
MONNIER Georges enfant 3 Nantes
MONNIER Marie enfant 1 Nantes
GENDRON Françoise domestique 20 Rezé
MOREAU 1 pièce au 1er, jardin LEPINE Julien jardinier 46 Bouvron
JAUSSEL Henriette sa femme 50 Nantes
LEPINE Jules leur fils 11 St Sébastien

Pour vivre 3 familles dans cette maison, souvenez-vous qu’à l’époque on n’a ni cuisine ni salle de bains, mais une cheminée suffit pour tout faire, donc chaque famille avait au moins une cheminée. Mounier, qui avait l’étage, avait donc une cheminée pour cuisiner. On monte l’eau dans un broc, prise à la pompe, et on redescend le lendemain le seau hygiénique, et on envoie sur la rue les ordures. Le confort viendra plus tard. J’ai connu ce mode d’abscence de confort en 1957 quand je me suis retrouvée en haut d’une maison Renaissance, sans aucune canalisation, et je montais mon broc d’eau et redescendant mon seau hygiénique chaque jour.
J’ai déja publié plusieurs maisons de la rue Saint Jacques à cette époque où l’on voit l’entassement dans les maisons, voyez la table de mes publications : Nantes Saint-Jacques Pirmil : table chrono de mes travaux

1858

Les commerces de Mounier et Cassin fonctionnent si bien qu’en 1858 ils acquièrent la maison, certes à crédit, mais on ne fait crédit qu’à ceux qui prospèrent. La maison est alors dite située au Clos Toreau route de Clisson, car le Clos Toreau commençait à la Croix de Herses
« Suivant contrat passé devant maitre Maudouin notaire à Nantes le 29 juillet 1858, monsieur et madame Mounier donateurs et monsieur Mathurin Cassin épicier et madame Reine Marie Brelet son épouse demeurant ensemble au Clos Taureau route de Clisson commune de Nantes ont acquis de madame Victorine Fayolle négociant en vins demeurant à Nantes quai de l’Hopital n°2 veuve de monsieur André Moreau une propriété dite le Clos Taureau situé sur la route de Clisson commune de Nantes consistant en un rez-de-chaussée divisé en 3 parties séparées par de gros murs, premier étage divisé aussi en 3 parties et grenier au dessus, cour avec pompe, lieux d’aisance et écurie et jardin à côté. Il a été convenu que dans cette propriété monsieur Mounier serait propriétaire 1-de la partie au rez-de-chaussée située à l’est, 2-de la partie au premier étage au dessus de la portion du rez-de-chaussée lui appartenant, 3-de l’autre la joignant, 4-du grenier au dessus, de la moitié de la cour, de la totalité du jardin et d’une écurie, et que monsieur Cassin serait propriétaire des 2 autres parties du rez-de-chaussée[1], de la troisième partie du premier étage et des greniers au dessus, que la pompe et les lieux d’aisance placés dans la cour seraient communs entre lesdits acquéreurs, que la cour appartiendrait par moitié à monsieur Cassin et à monsieur Mounier et que le mur séparant la cour du jardin serait mutuel. Il a été encore convenu audit contrat que monsieur et madame Mounier seraient propriétaires de la moitié de la cour partie est et monsieur et madame Cassin de l’autre moitié partie ouest, qu’ils pourraient faire élever toutes constructions qu’ils jugeraient convenables dans la partie leur appartenant mais que ils devraient laisser libre un passage de 2 m de largeur pour aller aux lieux et à la pompe, restés en commun. Et que dans le cas où monsieur Mounier viendrait à charger les magasins du premier étage il devrait établir des poteaux en bois dans les magasins du milieu au rez-de-chaussée du sieur Cassin. La vente a été faite au profit de monsieur et madame Mounier pour un prix de 9 600 F sur lequel 1 600 F ont été payés comptant, le surplus a été payé depuis et au profit de monsieur et madame Cassin pour un prix de 6 400 F qu’ils ont payé comptant.
Audit contrat la venderesse a déclaré son état civil 1-qu’elle avait été tutrice légale de 1) monsieur André François Moreau 2) madame Caroline Louise Moreau épouse de monsieur Louis Roliers 3) et madame Mathilde Ophélie Moreau épouse de monsieur Charles Henri Bureau ses 3 enfants, mais qu’elle leur a rendu leur compte de tutelle ainsi qu’il résulte d’un acte passé devant ledit maitre Maulouin notaire à Nantes le 30 juillet 1857 et d’une décharge dudit compte passée devant le même notaire le 31 août suivant 2-qu’elle avait été aussi tutrice de madame Victoire Sophie Moreau épouse de monsieur Paul Houdemont sa fille mais qu’elle n’était débitrice d’aucune somme à cette dernière, et la déclarante serait obligée à fournir incessamment la décharge de tutelle et qu’elle n’aurait jamais eu d’autre tutelle. Une expédition dudit contrat de vente a été transcrite au bureau des hypothèques de Nantes le 10 août 1858 volume 477 n°54.
Aux termes d’un contrat passé devant maître Reinière notaire à Nantes le 6 septembre 1898 transcrit au bureau des hypothèques de Nantes le 17 du même mois volume 1909 n°1 monsieur Halbert mari de l’une des donataires aux présentes a acquis de monsieur Henri Joseph Mathurin Cassin grainetier et madame Julie Marie Louise Martineau son épouse demeurant ensemble à Pont Rousseau commune de Rezé, la portion de la propriété du Clos Taureau dont monsieur et madame Cassin Brelet père et mère de monsieur et madame Cassin Martineau sus nommés étaient demeurés propriétaires par le contrat du 29 juillet 1858. Dans le contrat du 9 septembre 1898 les vendeurs ont rapporté textuellement la convention intervenue entre eux et monsieur Mounier en date à Nantes du 21 mai 1890 enregistrée à Nantes 2ème bureau le 12 juin 1890 folio 94 case 418 et transcrite au bureau des hypothèques de Nantes le 17 juin même mois volume 1541 n°38[2], laquelle convention pour rectifier un jugement du tribunal civil de Nantes en date du 3 mars 1890 intervenu entre monsieur Mounier et monsieur Cassin stipule que monsieur Mounier devra à l’immeuble Cassin sur sa propriété un passage de 2 m pour accéder à la pompe, que monsieur Cassin devra à monsieur Mounier un passage de 2 m sur la cour pour aller aux lieux d’aisance. Mais que le passage de monsieur Mounier pour se rendre de sa maison à son jardin est fixée à 1,32 m de largeur.
Enfin, par contrat passé devant maître Rousseau Dumariet notaire soussigné les 25 et 26 janvier 1899 monsieur et madame Mounier donateurs ont vendu à monsieur et madame Halbert leur gendre et fille tous les droits de passage qu’ils possédaient sur la propriété du Clos Taureau faisaient l’objet de l’article premier de la désignation pour aller soit à la pompe soit aux lieux d’aisances soit au jardin ou sur toute autre partie de la propriété ayant renoncé à se prévaloir de tous les droits résultant à leur profit des actes ci-dessus relatés. La vente a eu lieu pour un prix de 300 F qui a été payé comptant. Il a été aussi convenu que monsieur Mounier serait déchargé de l’obligation d’établir des poteaux en bois dans les magasins du milieu au rez-de-chaussée provenant de monsieur Cassin, laquelle obligation lui avait été imposée dans l’acte sus énoncé du 29 juillet 1858. »
[1] donc Cassin possédait boutique sur la rue (qui deviendra la salle à manger « extraordinaire » Halbert sur la rue, et la pièce noire entre les 2 salles à manger que j’ai connues en 1950) et Mounier possédait ce qui était la salle à manger sur la cour.
[2] j’avais remonté par les hypothèques à cette convention, je l’ai et elle dit exactement la même chose que ce qui est ici retranscrit

1887

J’ai une magnifique photo de 1887 qui montre les magasins pas l’habitation, et qui montre surtout le manque d’égout et la rigole sur la rue qui recueillait les eaux usées et autres saletés, comme vous le voyez très nettement sur cette photo, juste au pied de ces dames.

 

et je vous invite à découvrir sur une carte postale, certes à Gérande, qui illustre comment les boeufs nettoyaient ces rigoles.

Les égouts empestent la route de Clisson

Cette photo de nettoyage des rues avec les boeufs est prise à Clisson et non à Nantes, mais route de Clisson à Nantes, il n’y avait manifestement pas de ramassage par boeufs, et uniquement un cantonnier seul, qui ne faisait que remonter les ordures sur le bord de la rigole… et aucun ramassage…

Je vous ai raconté que la route de Clisson était considérée comme « rurale » par la ville de Nantes : La ligne des nouveaux ponts : disparition des habitants de la Croix des Herses -Nantes 1930-1966

En 1901 il n’y avait aucun égout et le quartier était une telle puanteur que le journal Le Phare de la Loire en parle le 10 juillet 1901. Je suppose que le crotin des chevaux  était ramassé pour fertiliser les terres maraîchères. Mais leurs urines devaient bien partir sur la rue, tout comme les déjections humaines.
Selon le journal, les déjections puantes étaient parfois curées par les cantonniers, mais ils se contentaient de les mettre sur le bord, et non de les enlever. Les habitants de la Croix des Herses se plaignent de payer les mêmes impôts que la rue Crébillon, mais n’ont pas les mêmes avantages. Nul doute que Halbert fut signataire  de la pétition : « Monsieur le Directeur, les soussignés, habitants de la route de Clisson, vous font part de nouveau de la situation intolérable dont vous avez bien voulu, une fois déjà, vous faire écho. Il s’agit de l’égout à ciel ouvert situé sur la route nationale même, à la Croix-des-Herses. Aucun travail n’a été fait, aucune mesure n’a été prise pour faire disparaître les odeurs nauséabondes qui s’en dégagent, pendant les jours de chaleur principalement. Le cantonnier continue de temps à autre à curer la fosse et dépose simplement les ordures sur le bord, ou elles sèchent au soleil, empestant le voisinage. Comme vous l’avez dit, c’est une véritable fabrique de poudrette à l’air libre. Nous avons tout fait pour sortir de cette situation; nous avons pétitionné, nous avons écrit au député, au préfet. Ces messieurs ont sans doute d’autres préoccupations, et les ennuis de quelques électeurs ruraux les laissent indifférents ! Pourtant, Monsieur le Directeur, nous payons les mêmes contributions que les habitants du centre ville, nous devons être aussi bien traités qu’eux. Qu’adviendrait-il si un égout semblable était installé place Royale ou rue Crébillon ? Il n’y resterait pas 24 heures. Nous, voilà des années que nous supportons celui-là. Nous espérons, Monsieur le Directeur, que vous accueillerez notre protestation et que vous prendrez notre défense, puisque nos élus ne s’occupent pas de nous. Vous remerciant par avance, nous vous adressons, Monsieur le Directeur, nos sincères salutations. » 

En 1909 un nommé BILLOT fait sa publicité pour inciter certains à installer une fosse sceptique.

 

 

Et les animaux vagabondent

Même après la seconde guerre mondiale, les animaux vagabondent et les boeufs ne sont pas en reste. Et l’hôtel de la Maison Rouge leur sert de fourrière, sans doute car il y a une écurie pour les installer provisoirement.
Ainsi, non seulement on trouvait encore des boeufs sur la cote, mais il y en avait à Nantes en 1945 !
Voyez mes précédents articles sur les boeufs :
Les boeufs pour mettre à l’eau le bateau : Le Pouliguen 1910
Quand les boeufs tiraient le canon : Angers 1609

Vaches et chiens ne sont pas en reste.

 

 

 

 

 

1904

Mounier avait cédé depuis des années la maison à sa fille Marie Elisabeth Mounier épouse de monsieur Edouard Halbert négociant en fourrages avec lequel elle demeure à Nantes route de Clisson au Clos Taureau. Ces derniers ont un fils unique, Edouard, qui se marie, et ils lui cèdent toute la maison d’habitation en se retirant en face dans une maison qu’ils font construire en 1904, aujourd’hui 4 rue Georges Lemevel. Le n°7 route de Clisson devient la maison d’un seul ménage, et ils construisent une petite aile annexe à gauche de la cour, qu’on voit sur le cadastre de 1905, et dans cette petite annexe arrive le confort des toilettes, un lavabo avec glace, et une belle cuisine, dont je me souviens car les enfants y étaient admis, ne serait-ce que pour le goûter. Dans cette cuisine, à gauche de l’évier, j’admirais un énorme égoutoir de bois, fait maison, et bien pratique pour ceux qui ne rangent pas toute la vaisselle tout le temps.

1932

Edouard Halbert est emporté par une septicémie en 1932, sa femme et ses enfants gèrent le magasin. De gauche à droite le camioneur, l’employé, Georges, Marguerite, Paul Halbert, leur mère, Marie-Louise et Camille Halbert. Je n’ai jamais vu l’intérieur de ce bâtiment et je n’en connais que cette photo. A bientôt sur ce blog car je vais vous conter l’histoire de ce magasin de grains et fourrages.

Petite fille, de 1938 à 1956, j’ai  fréquenté cette maison de ma gand-mère Halbert, mais je n’en ai connu que le long couloir qui longeait le salon, l’immense dressing, la salle à manger et la cour. Les enfants que nous étions n’avaient aucun accès : au salon que j’ai uniquement aperçu un jour à travers la porte, à l’escalier et je n’ai jamais vu les étages. J’ai uniquement vu la cuisine, la cour, et le grand tilleul qui donnait sur un immense jardin où poussaient entre autres des groseilles dont nous faisions des confitures. Au delà, le jardin était loué à un maraîcher. Puis, le 16 janvier 1956, Georges Halbert, mon père, a quitté ses 6 enfants, et moi, l’aînée, je fus alors catapultée en usine, disant Adieu à des études de pharmacie que j’avais dans la tête…