Contrat de mariage d’un quincailler, Angers, 1663

Contrats de mariage retranscrits et analysés sur ce blog.

Le journal d’Etienne Toisonnier nous apprend à trier les bourgeois du reste de la population, enfin c’est lui qui trie… par moi.
Il s’avère qu’il met les quincaillers parmi les bourgeois.
Les quincaillers étaient en fait des marchands modestes, comme on le voit ici, et leurs biens et revenus sont comparables à ceux d’un artisan. Pour en revenir à Etienne Toisonnier et à son esprit bourgeois, le fait qu’ils exercent un commerce mais ne travaillent pas de leurs mains, doit faire la distinction, plus que l’argent.
Vous allez voir que dans ce milieu de marchands, on est cultivé puisque les signatures sont nombreuses. Cependant les dots montrent un milieu qui ne vit pas de ses rentes mais du travail. Elles sont bien insuffisantes pour vivre sans travailler.

Les métiers méritent le détour :

quincailler : marchand de quincaille, c’est à dire de toute sorte d’ustensiles, d’instruments de fer ou de cuivre.
gaînier : ouvrier fabricant des gaînes. (Ce qui atteste l’existence de corsets à Angers en 1663, sans doute pour la taille des dames)
leschallier : manifestement dans les échelles
cordier : autrefois un métier important à cause de la navigation fluviale et maritime

Cet acte fleure bon la Normandie ! en effet, généralement les quincaillers venaient de Normandie, dont on peut supposer une telle origine, d’autant que vous allez découvrir à la fin de l’acte un cousin Jean Mezange, qui est tout à fait susceptible d’origines normandes.

L’acte qui suit est extrait des Archives Départementales du Maine-et-Loire, série 5E5 – Voici la retranscription de l’acte : Le 3 février 1663 après midy, par devant nous François Crosnier notaire royal à Angers, furent présents establys et duement soubzmis honneste femme Suzanne Besnard veuve de deffunt honneste homme Jacques Babin marchand quincailler et honneste homme François Babin leur fils aussy marchand quincailler d’une part
et honnestes personnes René Madelin marchand Me gaisnier et Françoise Placé sa femme de luy authorisée quant à ce, et Françoise Madelin leur fille tous demeurant en la paroisse de St Maurice de cette ville d’autre part,

lesquels traitant et accordant du futur mariage d’entre lesdits François Babin et Françoise Madelin avant fiance et bénédiction nuptialle ont fait et convenu comme s’ensuit

c’est à savoir qu’ils se sont de l’advis authorité et consentement savoir ledit Babin de sadite mère, et ladite Madelin de sesdits père et mère, et autres leurs parents et amis cy-après nommés soubsignés ont promis et promettent mariage et le solemniser en l’église apostolique et romaine si tost que l’un en sera requis par l’autre tout légitime empeschement cessant,

en faveur duquel mariage lesdits Madelin et placé sa femme chacun d’eux solidairement renonçant au bénéfice de division ont donné et par ces présentes donnent à leurdite fille future espouze en advancement de ses droits successifs paternels et maternels le lieu et closerie de la petite Berrye situé en la paroisse de Saint Barthélemy ainsy qu’en jouit Julien Legendre à titre de ferme sans en rien réserver à la charge par les futurs conjoints d’entretenir le bail dudit Legendre …

plus lesdits Madelin et femme baillent et donnent à leurdite fille aussy en advancement de droits successifs la somme de 300 livres en argent un trousseau de la valleur de 300 livres payables savoir ledit trousseau et 200 livres en argent dans le jour de la bénédiction nuptialle et les autres 100 livres un an après,

desquels 600 livres d’argent et trousseau en entrera en la communauté des futurs conjoints que s’aquérera suivant la coustume la somme de 100 livres et le surplus montant 500 livres sera et demeurera à ladite future espouze et aux siens en ses estocs et lignées de nature de propre patrimoine et matrimoine que ledit futur espoux et sadite mère chacun d’eux solidairement renonçant au bénéfice de division s’obligent employer et convertir en acquets d’héritages en ceste province pour tenir à ladite future espouse et aux siens en ses estocs et lignées de ladite nature de son propre quant à tous effets sans que ladite somme et les acquets en provenant ni l’action pour l’avoir puisse tomber en ladite communauté, ains demeurera perpétuellement de nature de propre à ladite future espouse et aux siens en ses estocs et lignées quant à tous effets, et à faute dudit employ en ont dès à présent constitué rente au denier vingt à ladite future espouse et aux siens, qu’ils seront contraignables et admortissables deux ans après la dissolution dudit mariage ou de ladite communauté,

comme aussi en faveur dudit mariage ladite veuve Babin a ceddé et délaissé par ces présentes à sondit fils le bail à loyer de la maison par elle occupée présentement sur la rue Baudourle de cette ville à la charge par sondit fils de l’acquiter du prix dudit bail et autres charges d’iceluy et d’entretenir les baux de soubz loyer qu’elle en a fait dont il prendra le prix du jour de la bénédiction nuptialle

de plus luy a ceddé et délaissé le fons de sa boutique tant en outils que marchandises dont sera fait inventaire auparavant le jour de la bénédiction nuptiale, sur le prix de laquelle elle donne à sondit fils aussi en advancement de droits successifs sur la succession de sondit père et sur la sienne à venir la somme de 400 livres sauf à sondit fils à luy payer le surplus dans un an après ladite bénédiction nuptiale et à elle à fournir lesditses 400 livres dans le jour de ladite bénédiction ladite boutique n’estant suffisante

et outre habillera sondit fils d’habits nuptiaux convenables à sa condition desquels 400 livres en entrera en ladite communauté la somme de 100 livres et le surplus montant 300 livres demeurera audit futur et aux siens en ses estocs et lignées quant à tous ses effets de pareille nature de son propre patrimoine et matrimoine et pourra si bon luy semble le convertir en acquests d’héritaiges pour tenir de mesme nature,

plus s’oblige ladite veuve Babin d’acquitter sondit fils de toutes debtes de quelque nature qu’elles soient sans qu’elles puissent entrer en ladite communauté,

à laquelle ladite future espouze et les siens pourront renoncer toutefois et quante quoy faisant elle et ses enfants reprendront franchement et quittement de toutes debtes ses habits hardes à son usage ladite somme mobilière avec tout ce qu’elle y aura porté mesme ladite future espouze sa baque et joyaux desquelles debtes ils seront acquités par ledit futur espoux et les siens par hypothèque quoi qu’elle y fut obligée,
et cas d’aliénation de leurs propres pendant ledit mariage ils en seront respectivement raplacés et récompensés sur les biens de leur communauté ladite future espouze par préférence et à défaut sur les propres dudit futur espoux qui en a assuré aussi par hypothèque de ce jour quoi qu’elle eust part aux contrats d’aliénation sans stipuler
ce qui leur eschera cy-après de successions droites et collatérales ou autrement demeurera de nature de propre à celui de l’estoc et lignée dont il rendra aussi quant à tous effets les meubles meublants dans ladite communauté

aura ladite future espouse douaire sur les biens de sondit futur espoux cas d’iceluy advenant suivant la coustume

et ains en dons et advancements ainsi faits lesdits père et mères jouiront leur vie durant savoir ladite Besnard de la part afférante à sondit fils en la succession de sondit père et lesdits Madelin et sa femme de la part appartenant à leurdite fille en celle du prédécédé d’entre eux, et advenant ladite Besnard à rien prétendre contre sondit fils pour ses pensions et entretenement depuis le décès de sondit père d’autant qu’ils demeurent compensés avec ce qu’elle a peu toucher de son bien paternel,

par ce qu’ils l’ont ainsi voulu consenty stipulé et accepté et à tous dommages lesdits parties respectivement etc à prendre vendre etc

fait et passé audit Angers maison desdits Madelin et femme présents honnestes personne Jacques Minthier aussy marchand quincailler beau-frère dudit futur espoux, François Babin aussi marchand tonnelier, et Nicollas Besnard Me tailleur d’habits, ses oncles, François Babin le jeune René Bersette Me boulanger, Me Charles Galpin ses cousins, Me René Madelin leschallier frère de ladite future espouse, honneste homme René Placé marchand cordier son oncle, honnorable homme Jean Mezange Philippe Madelin Me chirurgien cousins tous demeurant audit Angers, et autres leurs parents et amis pour ce présents et assemblés, lesdits Besnard veuve Babin, Madelin père ont dit ne savoir signer

Cette image est la propriété des Archives Départementales du Maine-et-Loire. Je la mets ici à titre d’outil d’identification des signatures, car autrefois on ne changeait pas de signature.

Odile Halbert – Reproduction interdite sur autre endroit d’Internet Merci d’en discuter sur ce blog et non aller en discuter dans mon dos sur un forum ou autre blog.

Soldat de milice, Thorigné, 1689

La télé nous montrait récemment comment on achetait sous le manteau le numéro de permis d’un tiers pour se dédouaner de points en chute libre sur son propre permis. J’ai compris que c’était interdit mais que l’administration ne pouvait pas prouver qui était au volant.

Autrefois, on pouvait acheter un autre à sa place, en particulier pour partir à la milice : c’était tout à fait officiel, et nous avons déjà vu que cela était un marché passé devant notaire, donc par acte tout ce qu’il y a de plus authentique et officiel.
Naturellement, celui qui acceptait de partir à la place d’un autre avait pour seule motivation le besoin d’argent, et prenait le risque… Ici, il a femme et probablement enfants à nourrir… Lisez bien, il part pour que sa femme touche. Moi, j’en ai conclu qu’ils en avaient un besoin extrême, par contre j’ignore tous les détails de cette famille, en particulier le nombre de bouches à nourrir au moment des faits, c’est à dire le 15 mars 1689. Il s’agit de Pierre Planchet et Anne Houssin de Montreuil-sur-Maine.

L’acte qui suit est extrait des Archives Départementales du Maine-et-Loire, série 5E12 – Voici la retranscription de l’acte, à l’orthographe très médiocre : Le 15 mars 1689 avant midy, par devant nous Pierre Bodere notaire de la baronnie de Montreuil-sur-Maine y demeurant furent présents en leurs personnes establiz deument soubzmis et obligez soubz ladite cour prorogeant juridiction d’icelle, chascuns de noble et discret Me René Rigault prêtre curé de la paroisse de Thorigné sur Maine, honorable homme René Nigleau Sr de Haut Aviré,
h. h. Pierre Jallot marchand et Jacques Nail procureur de la fabrice dudit Thorigné y demeurants, iceux establiz tant en leurs noms privez que pour et au nom et sa faisant forts du général des autres habitants dudit Thorigné, promettant qu’ils ne conviendront à ces présentes ains les approuveront touttefois et quantes à peine etc ces présentes néanmoings etc d’une part,

et Pierre Planchet demeurant au bourg dudit Montreuil d’autre,

entre lesquelles parties a esté fait l’acte convention et obligations suivants, c’est à scavoir qu’iceluy Planchet s’est obligé et s’oblige par ces présentes d’aller au service du roy en callité (on a la qualité qu’on peut !) de soldat pour la milice pour la paroisse de Thorigné pendant le temps et espace de 2 années entières parfaites et consécutives qui commenceront lundy prochain 21 du présent mois et à continuer pendant ledit temps, et sans pouvoir pour quelque raison que ce soit s’apsanter (on s’absente comme on peut ! mais ouvez que phonétiquement on est parfait) dudit service sur les peines portées par les ordonnances de sa Majesté,

pour lequel cervice (service) ainsi faire iceux susdits establiz esdits noms et un chacun d’iceux seul et pour le tout sans divition de personne et de biens ont promis

et se sont obligez habiller ledit Planchet dudit abit (habit) complet avec chapeau bordé, une père de bas (paire), un père de souliers neufve, un fuzil, une épée avec un ceinturon, le tout conformément aux ordres de sa majesté, lequel abit fuzil et épée ils deslivreront audit Planchet dans cette présente semaine,

et oultre de payer audit Planchet la somme de 55 livres tournois en argent et 40 boisseaux de blé mesure du Lion d’Angers, savoir 25 livres dans ledit jour de son départ, et les 30 livres et ledit blé à Anne Houssin femme dudit Planchet, jusque à parfait poimant (paiement), sera de mois en mois à conter (compter) dudit jour de lundy prochain trente sols et 2 boisseaux de blé, et lors dudit poimant ladite Houssin en consentira acquits qui vaudront comme si fait estoit à la personne dudit Planchet,
à leffait (l’effet) de quoy il l’a des à présent authorisée avecq protestations faite par ledit sieur Rigault et establiz tant pour eux que pour le général des autres habitants de rendre responsable en privé nom ceux qui ont esté nommez pour servir à ladite milice, et de leur faire payer ladite somme et blé cy-dessus tant en principal que tous accessoirs pour cestre apsantez (s’être absentés) de ladite paroisse après ladite nomination, ce qui a obligé iceux establiz de conquester ledit Planchet et convenir avecq luy du prix cy-dessus attendu la nécessité pressante dudit soldat, pour ladite paroisse,

car les parties ont le tout respectivement ainsi voulu consenti et stipulé et accepté, à se tenir etc s’obligent solidairement comme dit est chacun en leur égard savoir lesdits establiz esdits nom au poiment desdites choses et ledit Planchet par corps comme pour les affaires de sa Majesté, à l’accomplissement de ce qui dit est le tout à peine etc renonçant etc dont etc
fait et passé audit Montreuil à notre tabler ès présence de vénérable et discret Me Jacques Jallot prêtre sacriste audit lieu, Jacques Bonjour tissier et François Lucas hoste demeurant audit Montreuil tesmoings, ledit Planchet a déclaré ne scavoir signer. Constat, por les 14 sols à quoy ils ont conveneu pour la semaine présente ledit Sr Curé les a présentement payées audit Planchet dont il se contente.

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