entre Jean Lombard, natif de Nîmes, et Françoise de la Fuye (AD49, série 5E5)
Pour le billet d’avant-hier, qui concernait Brouage, je viens de trouver le site des fortifications de Vauban.
Aujourd’hui nous accueillons en Anjou un ministre protestant et nous le marions.
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Le milieu est assez aisé.
Le contrat prévoit le mariage devant la religion prétendue réformé
Le futur étant originaire de Nïmes, on lui ajoute la phrase relative aux acquets en Anjou, afin de lui interdire de convertir l’argent de son Angevine en propriétés en Languedoc !
La future reçoit 2 000 livres d’un Parisien, sans doute proche parent… pour faire un tel cadeau de nopces.
Et l’acte contient une clause nouvelle à mes yeux, et comme j’espère bien que vous allez tout lire, d’autant que je vous facilité la tâche en retranscrivant, ajoutant des alineas dans un manuscrit totalement exempt de ponctuation et aliénas, et je surgraisse les lectures essentielles. Alors j’espère que vous allez trouvez ce que ce contrat contient d’exceptionnel et inattendu.
Les femmes présentes au contrat sont nombreuses et signent toutes. Ceci est la marque d’un contrat protestant manifestement, car sinon les femmes présentes au contrat de mariage sont uniquement la future, parfois la mère, et rien de plus, et la pauvre future fait parfois face à quelques dizaines de messieurs lorque le milieu est aisé et ce point m’a toujours frappée. Regardez attentivement les signatures de ce contrat, il est exceptionnel et vous allez être étonnés sur ce point : une quantité de femmes sont présentes et signent. Les protestants avaient vraiement marqué là une grande différence avec les catholiques.
Attention, je passe à la retranscription littérale y compris l’orthographe : Le 3 septembre 1676, par devant nous Françoys Crosnier notaire royal à Angers, furent présents establiz et soubzmis Me Jean Lombard ministre de la religion prétendue réformée d’Angers, fils de deffunt noble homme Anthoine Lombard et damoiselle Claude Simon sa femme, natif de la ville de Nymes province de Languedoc, demeurant en cette ville paroisse de Saint Maurice d’une part, et demoiselle Marie Conseil veufve de deffunct Me Jean de la Fuye vivant ministre de la mesme religion, et demoiselle Françoise de la Fuye fille dudit feu Sr de la Fuye et de ladite damoiselle Conseil, demeurant audit Angers paroisse St Michel de la Pallud d’autre part,
lesquelz traitant et accordant le futur mariage d’entre ledit Sr Lombard et ladite Delle Françoise de la Fuye avant fiances et bénédiction nuptialle ont fait entre eux les conventions matrimoniales qui suivent,
s’est assavoir que le dit Lombart du consentement de Me David Gilly ministre de la religion prétendue réformée à Baugé, qui a dit avoir charge de ladite demoiselle Simon d’assister audit mariage et a promis qu’elle n’y contreviendra à peine, et ladite damoiselle de la Fuye du consentement de ladite demoiselle sa mère et autres leurs amis cy après nommez et soubzsignez se sont promis et promettent mariage et le solemniser aux formalitez ordinaires de ladite religion prétendue réformée, tout légitime empeschement cessant,
en faveur duquel mariage ladite demoiselle Conseil a donné par ces présentes à ladite future espouze sa fille la somme de 4 000 livres qu’elle a promis et s’est obligée payer auxdits futurs conjointz par advancement de droitz successifs partenelz eschuz et maternelz à eschoir à sadite fille premièrement sur les paternelz scavoir 2 000 livres dans le jour de bénédiction nuptialle et la quiter de touttes debtes de quelque nature qu’elles puissent estre,
feu (fut) aussy à ce présent estably et deuement soubzmis noble homme Me David Dutenps aussy ministre de la religion prétendue réformée d’Angers demeurant paroisse de St Michel de la Pallud au nom et comme procureur de Louis Giberne sieur de Salunsac par sa procuration passée par Enogier conseiller du roy notaire gardenottes de sa majesté au chastelet de Paris le 26 aoust dernier la minutte de laquelle signée Giberne Chupin Enogier et paraphée en marge par ledit procureur est demeurée attachée pour y avoir recours sy besoing est, lequel en vertu de ladite procuration en faveur dudit mariage et pour la bienveillance dudit sieur Giberne envers ladite demoiselle de la Fuye et par ce qu’il l’a ainsi voulu et luy plaist, a donné par ces dites présentes à ladite demoiselle de la Fuye future espouze et acceptante pour elle ses hoirts et ayant cause la somme de 2 000 livres qu’il promet et s’oblige audit nom de procureur payer auxdits futurs conjoints le jour de leur bénédiction nuptialle en deniers contans,
desquelles sommes de 4 000 d’une part, 2 000 livres d’autre revenant ensemble à la somme de 6 000 livres tournois, entrera en la communauté des futurs conjointz qui s’acquérera du jour de leurdite bénédiciton nuptialle, la somme de 400 livres tournois, et le surplus montant la somme de 5 600 livres demeurera et demeure à ladite future espouze et aux siens en ses estocq et lignées de nature de propre immeuble patrimoine, que ledit futur espouz l’ayant au préalable receu promet et s’oblige employer et convertir en acquest d’héritages en cette province d’Anjou, pour tenir à ladite future espouze et aux siens en ses estocqz et lignées de ladite nature de son propre, sans que ledit surplus immobilisé les acquets en provenant ny l’action ou actions pour les avoir et demander puissent tomber en ladite communauté, siens demeureront perpétuellement de ladite nature de propre à ladite future espouze et aux siens en ses estocs et lignées à tous effectz, et à faute dudit employ en a ledit futur espouz des à présent venu et constitué rente au denier vingt à ladite future espouze, qu’il est les siens feront contre argent racheter et admortir 2 ans après la dissolution dudit mariage ou de ladite communauté, et dudit jour de la dissolution payer et continuer ladite rente jusqu’au rachapt, (la somme entrant dans la communauté est généralement 10 % et je suppose que le chiffre de 400 livres est calculé sur les biens du futur, qui ne sont pas explicités, et montent donc probablement à 4 000 livres. Le total fait alors 10 000 livres et on est dans un milieu aisé que l’on peut comparer à celui d’un avocat à Angers ou notaire royal à Angers)
quant audit futur espoux il se marye avec tous et chacuns ses droitz noms raisons et actions tant mobilières qu’immobilières où qu’ils soient situez et à quoy qu’ils se puissent monter et revenir,
desquelz en entrera pareillement en la communauté des futurs conjoints la somme de 400 livres outre pareille somme qu’il donne à ladite future espouze à prendre sur iceux par forme de don de nopces pour elle ses hoirs et ayant cause, le surplus de tous lesdits droitz demeurera et demeure audit futur espoux et aux siens en ses estocs et lignées de ladite nature de propre immeuble qu’il pourra convertir en acquets d’héritages qui luy tiendra de la mesme nature de propre, et aux siens en ses estocs et lignées,
ladite future espouze et les siens pourront renoncer à ladite communauté toutefoys et quantes quoy faisant elle et ses enfants dudit mariage reprendront franchement et quittement de touttes debtes ses habits bagues joyaux ladite somme mobilière et générallement tout ce qu’elle y aura aporté mesme ladite somme de 2 000 livres à elle cy-dessus donnée, desquelles debtes ils seront acquitté par ledit futur espoux et les siens par hypothèque de ce jour, en cas d’alliénation des propres des futurs conjointz pendant ledit mariage, ilz en seront respectivement raplacez et récompensez sur les biens de ladite communauté, ladite future espouze par préférence et déffault sur les propres de sondit futur espoux qu’il y a affectez aussy par hypothèque dudit jour combien qu’elle eust parlé auxdites aliénations
ce qui leur eschera cy après de successions collatérales ou autrement demeurera de nature de propre à celuy de l’estoc et lignée dont il reviendra à la réserve des meubles meublants qui entreront en ladite communauté,
ledit futur payera et acquittera ses debtes avant la bénédiction nuptialle sans qu’elles puissent entrer en ladite communauté ny qu’a raison de celles du futur espoux les droits de ladite future espouze puissent estre diminuez
ladite damoiselle Conseil jouira sa vie durant de la part afférante à sadite fille en la succession de sondit père et demeurent ses pensions et entretenement compensez avec le revenu de son bien paternel sans que ladite Delle Conseil soit obligée de rendre aucun compte,
aura ladite future espouze douaire coustumier sur les propres de sondit futur espoux cas d’iceluy advenant, mesme sur les droitz mobiliers et immobiliers,
parce qu’ilz l’ont ainsy voulu consenty stipulé et accepté, à ce tenir s’obligent respectivement …
fait audit Angers en la maison et demeure de ladite Delle Conseil présent honorable homme Pierre ? Pasquereau marchand bourgeoys dudit Angers, Abraham Lepelletier sieur de la Thieurine Me chirurgien en cette ville, Paul Besnard sieur du Porcher marchand dudit lieu cousins de ladite demoiselle future espouse et autres leurs parents et amys soubsignez et encore présents Me Nicolas Perdrix et Jacques Pelletier praticiens demeurant audit Angers tesmoins à ce requis et appellés
Cette image est la propriété des Archives Départementales du Maine-et-Loire. Je la mets ici à titre d’outil d’identification des signatures, car autrefois on ne changeait pas de signature.
Le futur fait un don de noces et c’est la première fois que je vois une telle clause dans un contrat de mariage, d’autant qu’il est assez important puisqu’il égale la somme qu’il met dans la communauté. Il est bien écrit :
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outre pareille somme qu’il donne à ladite future espouze à prendre sur iceux par forme de don de nopces
Comme tout ce que je vous livre ici, ce contrat ne me concerne en rien, mais je suis passionnée par la découverte de tous ces détails, manifestement parlants. Ainsi, le don de noces est rare, car c’est le premier que je découvre.
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